Elle n'est pas bien sûre de comprendre ce qui est en train de se passer ni pourquoi les choses dérapent aussi vite. L'adolescente marque un temps d'arrêt à hauteur de la porte et se retourne lorsque Madisson les congédie. Elle observe un instant la blonde en plissant les yeux. Oui, d'accord, elle se doute bien que la légèreté dont elle a fait preuve durant les derniers instants n'était pas adaptée à la situation. Mais tout de même... Cette véhémence la surprend et son regard se teinte d'une forme d'incompréhension. Elle finit par hausser les épaules. Raph, lui, préfère opter pour la défiance. Elle lève les yeux au ciel. « Les adultes... » souffle-t-elle, lasse, pour elle-même. Elle n'attendait pas de Madisson une quelconque prise de décision au sujet de Terrance d'autant plus qu'elle peine déjà à choisir le châtiment des rebelles. D'un autre côté, si elle condamne le comportement du vieillard, elle estime quand même que le sort des révolutionnaire doit être placé au sommet des priorités. Elle ne cherche pas vraiment à donner tort ou raison à qui que ce soit. L'important, c'est qu'elle, elle soit innocente. Ou presque. Mais ce sujet-là aussi, elle l'évoquera directement avec la rouquine. Pour l'heure, elle ne songe qu'à s'assurer de l'état de Clayton pour pouvoir rassurer Kassidy en rentrant. Sait-elle seulement ce qu'il est advenu de son père ?

* * *

La nuit fut courte et le réveil laborieux. Il lui a fallu de longues secondes pour se remémorer les événements de la veille. Et bien davantage pour quitter le chaleureux confort de sa couette. Et la voici maintenant avec Kassidy, en train de rejoindre le dispensaire. Sur le chemin, elles apprennent la nouvelle qui occupe la plupart des esprits ou des discussions : Ray est mort, tué par l'un de ses sbires. Il faut croire que les rebelles ont été plus prompts à rendre justice que les autorités du camp... « J'espère qu'ils vont pas annuler les cours ! » glisse-t-elle, sincèrement inquiète, à son amie. « Vas-y, j'te r'joins ! J'vais fouiner un peu ! » Elle a déjà vu Clayton la veille et Kassidy pourra ainsi profiter pleinement de son père. Zelda se dirige donc vers l'école et y trouve, en plus des soldats et des curieux, Quinn et Madisson. Elle leur adresse un petit signe de la main mais se tient à l'écart pour éviter une remarque désobligeante. Non, elle préfère écouter ce que les spectateurs présents pensent de tout ceci. Alors elle laisse traîner l'oreille tout en sirotant le reste de son thé chaud. Peut-être que tous les sympathisants de Ray n'ont pas encore été arrêtés ?

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La nuit a été courte. Je n’ai pas réussi à trouver le sommeil qui m’aurait pourtant fait un bien fou. J’ai somnolé quelques heures avant d’être tirée de mon lit par les cognements de Thad, bien avant l’aube. Et lorsque je lui ouvre, je comprends rapidement qu’il y a un problème. L'homme m’explique la situation alors que nous rejoignons l’école. A mon arrivée, je constate avec une certaine impuissance la situation. Une dispute a éclaté durant la nuit, Monsieur Robertson a été tué. Je m’avance vers son corps, recouvert d’un drap blanc, avant de soulever légèrement le morceau de tissu. L’homme a reçu plusieurs coups, dont un certainement mortel dans le crâne. Et alors que je laisse retomber le drap sur la dépouille, je me redresse avant de jeter un œil dehors. Une certaine agitation semble déjà animer les rues de Ford Ward malgré l’heure matinale.

C’est alors que Quinn me rejoint, visiblement désolée pour ce qui est arrivé. Elle tente de trouver un moyen de me rassurer, disant que nous aurions tous dû prévoir ça. Je la coupe, net, en lui soufflant pour qu’elle seule entende. « Non. C’est moi. C’est de ma faute. J’aurais dû prendre mes précautions. Au moins l’isoler du reste du groupe… » Je comprends vite les erreurs que j’ai pu faire. Et ça me rend malade de savoir que j’aurais pu éviter tout ça. De vulgaires erreurs de débutantes… Jamais tout ça n’aurait dû arriver…

L’épidémiologiste prend alors ma main avant de vouloir s’assurer que Ray ne se relèvera pas. Je l’arrête alors. « Ne t’inquiète pas pour ça… Il ne bougera pas. Mais il va falloir s’occuper des corps… » Je lui dis ça, sans réelle émotion. A vrai dire, j’ai plus important à faire que de m’apitoyer sur le sort de cet homme. Il a eu ce qu’il méritait au final. Je n’aurais pas dû me laisser prendre par le doute, et le faire exécuter pour l’exemple. A présent, je suis encore plus perdue que la veille, m’en voulant terriblement. Que vont penser les gens dehors ? Je vais sûrement passer pour une incompétente !

Il faut que je garde mon calme. Que je gère encore, le temps que June revienne. Je me tourne vers Quinn. « Est-ce que tu pourrais te charger de remettre de l’ordre au complexe, avec les autres scientifiques. Et de me faire un état des lieux, il me le faudrait très vite… Je vais rester ici, et… Tenter de faire ce que je peux… » Ce n’est qu’un murmure, encore. Mon regard ne quitte pas le sien, elle doit certainement y voir un certain désarroi… Je soupire légèrement avant de me tourner vers les prisonniers. Que dois-je faire d’eux ?  Mes yeux s’ancrent sur le dénommé Steve. Je reste impassible quant à la détresse que je peux lire dans son regard. Faut-il lui en vouloir pour ce qu’il a fait ?

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Les discussions sont aussi diverses que variées mais la plupart sont teintées d'incompréhension. Les curieux n'ont, pour la plupart, pas été plongé au coeur de l'action. Zelda se rend compte qu'ils ont surtout entendu des rumeurs sur les événements de la veille ou les raisons qui les ont provoqués. Au final, les rumeurs ont circulé et personne n'a dissipé les doutes. L'adolescente se retourne machinalement avec l'espoir que, peut-être, June et les autres apparaissent dans son champ de vision. Elle espère qu'ils ne tarderont plus et que le camp retrouvera la discipline si chère à la rouquine. En fait, l'australienne se demande quelle sera l'épilogue à tout ceci. Ce que l'ancienne avocate fera des prisonniers restants, comment les blessés de la veille ou de l'expédition se remettront, qui rentrera et qui ne rentrera pas. Elle espère qu'Aodhan a survécu. Rien que pour voir sa tête lorsqu'il apprendra que l'école a été transformée en prison. Et puis... où se trouve Raph ? Elle ne l'a pas vue depuis l'altercation avec Madisson et elle se demande s'il a perçu son départ comme une trahison. « J'peux en avoir une ? » demande-t-elle à un homme qui vient de s'allumer une cigarette. Il répond pas la négative. Pas parce qu'elle est sensée être jeune mais parce que les clopes deviennent de plus en plus rares et qu'il ne tient pas à les partager. Elle plisse les yeux, agacée. Les adultes sont vraiment des humains de la pire espèce...

Zelda s'attarde encore un peu un instant. Elle observe Quinn enlacer brièvement la suppléante de June. Qu'est-ce qui lui a pris de confier le camp à cette fille ? Comment peut-elle respecter une femme qui montre sa faiblesse aux yeux de tous ? June n'aurait pas eu besoin de câlins. June aurait agi. Et Ray serait encore en vie. Pour servir d'exemple et expier ses crimes. Pour devenir une sorte de symbole, une mise en garde contre ceux qui auraient encore dans l'idée de bouleverser la hiérarchie. Robertson aura réussi à se dresser contre les autorités avec ses sbires et même à éviter un procès ou une exécution devant le camp. L'adolescente ne se sent plus vraiment en sécurité en ces lieux. Et son regard glisse à nouveau en direction du nord avec l'espoir de voir une tignasse rousse et une troupe victorieuse. « Eh, gamine ! Viens nous aider, tu veux ? » Qu'elle le veuille ou non, elle n'a pas le choix de toute façon. Alors elle lâche un soupir et va rejoindre le groupe qui s'occupe d'ériger le brasier qui servira sûrement à cramer la dépouille de Ray. Bon, après, il faudra vraiment qu'elle aille voir Clayton !

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