Les médecins avaient passé une bonne partie de la nuit à tenter de sauver un des patients blessé par balles avant que son coeur ne lâche. Puis, ils avaient transporté une à une les personnes encore sédatées avant de les attacher à leur lit. Ivy venait tout juste de s'assurer que sa fille qui dormait tranquillement à côté, dans une des pièces vides du dispensaire, allait bien. La jeune médecin était exténuée. La nuit avait été longue mais le repos n'était pas pour tout de suite. Au moins, cette nuit lui avait permis de constater deux choses : ils n'étaient en sécurité nulle part même dans ce camp et ce groupe avait des possibilités médicales qu'aucun autre groupe qu'elle avait croisé jusqu'à présent n'avait.

Quand Ivy revint dans la pièce principale, elle remarqua que plusieurs patients étaient réveillés. Elle se rapprocha, contrôla leurs paramètres vitaux : pouls, tension, et les rassura par un mot ou en posant sa main sur leur épaule. Se réveiller d'un sommeil artificiel pouvait être anxiogène pour certaines personnes alors dans les conditions telles que celles de cette nuit, ce devait être encore plus éprouvant, sans parler des potentiels effets secondaires comme les nausées qui pouvaient mettre à rude épreuve leur corps déjà fatigué. Elle tentait également de retenir leurs prénoms car elle avait vu la plupart de ces personnes pour la première fois cette nuit. Nouvelle, elle n'était donc pas forcément la personne la mieux placée pour les rassurer ou pour prendre des décisions médicales importantes, surtout en ne connaissant pas les lieux non plus. Toutefois, elle s'efforçait d'être présente, rassurante et d'apporter son soutien aux médecins et chirurgiens grâce à ses compétences médicales.

Pour autant une bonne partie des immunisés semblaient avoir le réveil rancunier. Le ton monta rapidement entre eux. Ils semblaient chercher à trouver un coupable à leur état. Ivy s'approcha d'eux et contrôla à leur tour leurs paramètres vitaux  : "Vous devriez garder vos forces et régler vos comptes plus tard." conseilla-t-elle d'une voix douce et ferme, en particulier à une jeune femme, Maddie d'après le prénom qu'elle avait entendu. Ivy ne se permettait pas de juger leur dispute. Ils avaient surement raison de vouloir connaitre la source de leur problème mais ce n'était pas le moment. Elle jeta un coup d'oeil aux autres médecins. Ils avaient perdu un ami, quelqu'un de proche et d'autres personnes étaient encore dans un état grave "Comment ça va ? Pas trop de nausées ?" les questionna-t-elle.

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Elle avait juste… fermé les yeux deux secondes, juste deux secondes. Mais force est d’admettre que cela avait duré plus que ça car la voix de Quinn la réveilla péniblement. Elle avait comme un flash-back de ses années d’internat, quand n’importe quelle chaise, n’importe quel appui contre un mur, pouvoir lui servir pour se reposer avant de reprendre le boulot avec énergie et motivation. Elle cligna des yeux un instant, avant de se relever rapidement quand elle comprit que Quinn était réveillée et ce que cela impliquait.

La chirurgienne s’approche, un léger sourire aux lèvres. « Quinn, tu es réveillée, comment tu te sens ? » Machinalement, Jacqueline prit son pouls, releva ses constantes, mais alors qu’elle voulut pousser l’examen plus loin, Quinn regardait les autres autour d’elle, tous attachés et passablement énervés. La chirurgienne les entendit d'une oreille, mais elle avait d'autres préoccupation sur l'instant. L'épidémiologiste regarda Jackie, tenta de se relever, mais la chirurgienne posa fermement ses mains sur ses épaules pour la maintenir allongée. « Il faut que tu restes allongée Quinn, tu as reçu un gros choc sur la tête, je t’expliquerai, mais laisse-moi t’examiner s’il te plait. » Elle lui demanda de remuer les mains, puis les jambes, avant de revenir doucement jusqu’à son visage. « Les vaccinés ont eu des crises violentes et ont agressé plus d’un d’entre nous, tu ne t’en souviens pas ? » Dit-elle, doucement sans la presser. Une perte de mémoire passagère pouvait être normale après un tel choc. « C’est quoi la dernière chose dont tu te souviens ma belle ? » Dit-elle avec chaleur. Pourtant, elle n’oubliait pas la nouvelle qu’elle était censée lui donner. Mais elle devait d’abord surveiller ses constantes. « Tu veux bien suivre mon doigt ? » C’est à ce moment-là que Jacqueline comprit que quelque chose n’allait pas. « Dis-moi quand tu ne le perçois plus. » Dit-elle, toujours sans la presser. L’hématome avait probablement endommagé le nerf optique car… C’était un fait, Quinn ne voyait plus d’un œil.

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Super, tu penseras à dégager tes affaires et de partir loin de nous alors ! Je grogne, agressive. Les autres ont beau me dire de me calmer, ça ne marche pas d'un pouce. Il vaudrait mieux me rendormir à ce train là, parce que j'ai davantage prévu de lui ramoner la face avec les phalanges plutôt que de piquer un petit somme. Puisque tu es si forte, si indépendante, si miss-parfaite et que tu trouves que ce qu'il se passe ici, c'est ok, oublie que tu as eu une sœur !

Et elle a le culot de me regarder droit dans les yeux en me mentant en plein visage ? J'hallucine. Madame est dans les petits papiers de June, a accès à tout son bordel, et elle ose me dire qu'elle n'en savait rien, pour Vaughn et Sacha ? Ma mâchoire se serre, c'est pas les effets du vaccin qui me donnent envie de lui griffer son petit visage poupon, c'est son audace :

Qui sait Maddie, hein ? T'es dans tes petits secrets, alors va savoir quel cadavre tu caches dans ton placard ! Et la menace qu'elle me pose m'arrache un rire sans joie. C'est une blague j'espère ? Ooooh parce que tu crois que je vais te laisser rapprocher Esther d'une quelconque manière ? Si je te vois à côté de ma fille, tu es morte Maddie, c'est clair comme ça ?

Elle me connait assez pour savoir que je suis sérieuse. C'est la colère qui parle, mais elle est pas prête de redescendre à ce train-là, et dans un an, j'aurais encore une dent contre elle. Quand aux autres, oui, autant qu'ils se rendent utiles, je peux aller garder mon énergie ailleurs :

Si nos jérémiades vous embêtent, vous avez qu'à me bouger de là, je serais bien partie moi-même mais, guess what, je peux pas ! et je dis ça en désignant mes liens : Le plus loin possible de cette personne serait parfait, que j'ajoute en désignant l'autre d'un bref mouvement de tête.

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Pffff... Le garde qui protège l'entrée arrière du bâtiment lui fait clairement comprendre qu'elle n'a aucune chance de sortir prendre l'air. Il en va de même pour son collègue, celui qui se charge de l'entrée principale. Et ses pauvres tentatives d'intimidation ne récoltent rien d'autre que des rires moqueurs. « Y'aura des conséquences ! Du genre chiantes ! » promet-elle en sachant néanmoins pertinemment que June n'enverra pas des gens qui font leur boulot à l'échafaud. Donc bon, forcément, elle est obligée de remplir quelques carafes d'eau, les poser sur un plateau sur roulettes et retourner vers la bande de fous. Et en chemin, elle tombe sur ce qui semble bien être un talkie posé négligemment dans un coin. Peut-être un oubli de la part du personnel médical surchargé ? Elle regarde à droite, à gauche, puis se saisit de l'appareil. Elle ne sait pas vraiment comment ça marche, ni même si c'est la bonne fréquence, mais il lui semble important de faire passer un message à June : « June ? Ici Chihuaha dix ! » Il faudra qu'elle trouve un nom de code qui en impose un peu plus... « Heu... Calamity Jane et Robin des bois allument le barbecue au dispensaire ! Je répète : Calamity Jane et Robin des bois allument le barbecue au dispensaire ! » La rouquine comprendra sûrement qu'elle fait référence à Casey et à Adam et à  leurs propos déplacés à son sujet. Ou pas...

L'ambiance ne s'est pas vraiment calmée, en tout cas, lorsqu'elle revient vers les immunisés. C'est ce qu'elle constate aussitôt qu'elle pénètre dans l'une des trois pièces, celle qui abrite les deux soeurs ennemies. Tant mieux ! Casey parle même de tuer Madisson. Son capital sympathie augmente immédiatement auprès de la jeune espionne. « Tiens, bois ça ! » demande-t-elle gentiment à Sean. Non sans adresser un regard noir à Kassidy ! Puis elle choisit volontairement d'aller vers la moitié de Stanley pour l'abreuver. à son tour. « Esther est avec Hoku dans la première pièce à gauche de l'entrée, si jamais ! » lui indique-t-elle avant de desserrer suffisamment la sangle qui retient son poignet. Elle sait que la jeune maman souffre sans la présence de sa fille. Mais elle espère surtout que Casey optera pour un cassage de gueule en règle de sa soeur avant d'aller retrouver la petiote. Elle l'abreuve à son tour puis passe aux suivants. Et quand, plus tard, il est l'heure d'apporter à manger à toute cette joyeuse bande et que, bien sûr, on la réquisitionne pour cette tâche ingrate, l'australienne se permet de cracher discrètement dans le bol de soupe de Valentine avant d'aller lui tendre : « Bon appétit Madame... heu... J'sais plus votre nom, en vrai... » Merde, c'était quoi déjà ? « Mais si vous avez besoin de quoi que ce soit pendant votre séjour, n'hésitez surtout pas à me le dire ! » Comme ça elle se fera passer pour quelqu'un de chouette et elle ira le répéter à June ! Le plan est par-fait !

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Lentement, elle sort de sa torpeur, la tête lourde et vaseuse, la bouche sèche et pâteuse. Ça lui rappelle les rares gueules de bois qu'elle a vécues plus jeune, et la sensation est aussi désagréable que dans ses souvenirs. Les bruits sont diffus, comme atténués par un casque qu'elle ne porte pas. Des personnes parlent autour d'elle et il règne une certaine agitation mais la doc ne parvient pas à discerner les voix pas plus qu'à comprendre et analyser les mots qu'elle perçoit. Son corps ne répond plus, elle a beau essayer de bouger, de relever ses bras, aucune commande motrice n'est encore réalisable dans son état.
Des flashs de la nuit assomment son esprit encore brumeux. Les cris, les attaques, les vaccinés, les blessés. La peur, la suspicion, le doute. Ses douleurs abdominales semblent l'avoir quittée – pour le moment – mais la jeune femme devine son estomac encore fragile. Cherchant ses derniers souvenirs, elle se remémore sa dernier crise...et....rien...black out total. Elle ne peut que soupçonner un évanouissement et une possible sédation.
Il lui faut plusieurs minutes d'un combat contre son cerveau et le coton dans lequel il baigne pour parvenir à ouvrir les yeux. La lumière artificielle l'aveugle et sa première tentative est un échec. Une bonne minute plus tard et après un nombre incalculable de battements de cil, Maeve parvient à apprivoiser l'éclairage, comprenant vite qu'on l'a transféré de l'école au dispensaire. Combien de temps écoulé ? Vu la dose qu'on a du lui administrer plusieurs heures.

Quand des cris se font entendre non loin du lit dans lequel elle reprend doucement pied dans la réalité, elle tourne lentement sa tête encore lourde vers le groupe, les mots commençant enfin à trouver leur chemin dans toute cette brume. Les informations tardent pourtant à pénétrer et s'ancrer dans sa matière grise. Il est question des sœurs Summers, du vaccin et de ses conséquences, et de...secrets ? Elle ferme les yeux, de découragement et d'agacement cette fois. Le mal de tête persiste, et le bruit n'arrange rien. Elle ne veut qu'une chose, qu'ils se taisent, et certains ont beau en faire la demande plus ou moins directement, les piques continuent de fuser.

Tentant de se redresser, la jeune femme essaie de se passer une mains sur le visage, son poignet rapidement bloqué par une entrave. Baissant les yeux au niveau de ses mains, elle constate qu'on l'a attaché solidement au lit par mesure de sécurité. « Génial... » Un murmure rauque qui lui arrache une toux. Sa gorge est sèche, irritée. « S'il vous plaît... » Maeve ne sait pas vraiment à qui elle s'adresse, rouvre les yeux pour attirer l'attention du premier qui passera dans sa périphérie. « De l'eau... » Se réhydrater, faire passer plus rapidement les effets du sédatif encore présent dans son organisme. Ça, et si possible un résumé des dernières heures.

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Les deux soeurs continuaient à se cracher dessus comme si elles étaient seules dans le dispensaire, et comme si ça intéressait tout le monde de savoir qu’elles se détestaient officiellement maintenant. Valentine continuait de regarder le plafond en supportant ce qu’elle considérait comme une véritable torture, attachée à un lit, à devoir subir les frasques vocales de deux jeunes femmes qui ne semblaient pas se lasser de se vomir des insultes aux visages. Il n’y avait rien à faire sauf supporter et espérer qu’elles arrêtent rapidement, une fois que les deux auront dis des mots qu’elles ne pensent pas et le regrettent dans quelques semaines. c’était vraiment pas une vie.

Son attention se voit alpaguée par Zelda, qui d’habitude déjà irritante, devenait l’épitomé de l’insupportable. Cette adolescente avait un don pour ça, c’était évident. Valentine la regardait de travers, se demandant si l’Australienne avait un cerveau, ou si elle avait été bercée trop près du mur. Dans tous les cas, Valentine ne voulait pas l’avoir dans les parages, elle subissait déjà bien assez sa vie comme ça. « Je n’ai pas faim. » lui répondit-elle sèchement, en refusant ce qu’elle venait de lui tendre. Elle avait déjà la nausée suite à sa crise de violence et cette dose de sédatif, l’idée de manger ne lui venait pas à l’esprit. Et la dernière chose qu’elle souhaitait c’était de se faire donner la béquée par Zelda.

Toute cette histoire la confortait dans le fait qu’elle préférait le silence des plantations, plutôt que ce bordel de paroles, de phrases et de cris qu’elle détestait actuellement avec passion.

« J’ai déjà mangé.» lui fit-elle, mauvaise. Une mauvaise blague, mais il fallait la lui laisser, après tout c’était vrai. Et Zelda l’exaspérait, et un exploit qu’elle avait réussi en Trois phrases. Trois. Phrases.

Elle n'avait pas envie de prendre part à l'engueulade des deux soeurs, et de toute façon, elle n'avait pas sa place entre les deux. La blonde préférait s'assurer que le matériel disponible était à sa place, si une nouvelle urgence devait arriver, jusqu'à ce qu'elle entende Adam dire son nom. Elle se rapprocha. Il était encore là, qu'il disait. Son coeur se serra. Elle posa enfin son regard clair sur lui en se postant à son chevet, et ce qu'il avait affirmé par la suite ne manqua pas de la figer sur place. Se refermer sur lui? C'était si évident? Un peu plus et elle aurait pu jurer qu'il était dans sa tête. Le prof savait très bien ce qu'elle faisait, alors? Il savait que son éternel réflexe était de repousser, de s'isoler, de vouloir tout faire toute seule. Sur le coup, la princesse se sentait mal de lui imposer sa montagne russe d'émotions. Rien de tout ça n'était de sa faute à lui, et pourtant, il en payait le prix. Elle se pencha au-dessus de lui, au bord du lit, l'observant quelques secondes pour se convaincre qu'il n'était plus celui qui l'avait attaqué, avant d'embrasser son front et de poser brièvement la joue sur le dessus de son crâne. Liv ne disait rien - elle lui montrait juste qu'elle avait compris, et qu'elle était toujours là, elle aussi.

Plus loin, Ivy essayait de prendre les signes vitaux des malades, pendant que Zelda s'occupait surtout d'un jeune homme en particulier - rien de surprenant. Valentine était éveillée, dorénavant, et la gosse lui amenait même de quoi manger. Honnêtement, on aurait presque dit qu'elles se détestaient au moins autant les Summers, là, tout de suite. Puis, en voyant la chirurgienne se réveiller aussi, elle bougea rapidement pour aller la voir en remplissant un verre d'eau, non sans lancer un regard à Z qui ne l'avait visiblement pas fait. « Doucement. » dit-elle en tendant le liquide à Maeve, avant de l'aider à boire.

De toute évidence, personne ne voulait manger, et tout le monde semblait avoir la nausée, à en juger par leurs têtes. Elle se rapprocha donc de la nouvelle doc, lui glissant quelques mots au passage. « On peut rien leur donner, pour la nausée? » En comprimé ou dans leurs veines, elle n'en savait rien. Peut-être même qu'un calmant ne serait pas de trop pour certains.

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