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Charlie Johansson

Jeu 26 Nov 2020 - 20:06


Charlie Johanssontell me more about you

prénom(s) : Charlie
nom : Johansson
date de naissance : 31 mais 1992
âge : 28 ans.

ville de naissance : Castle Rock, WA.
métier : Paysagiste
groupe : Travelers

avatar : Sophie Cookson

what i am

qualites
Maladroite
Obsessionnelle
Possessive
Manipulatrice
Impudique
defaults
Loyale
Adaptative
Directe
Observatrice
Maligne
Equipement :
Ayant appris à tirer au fusil lors des premières années de sa survie avec un ex militaire, ses anciens compagnons de route lui ont laissé une carabine Browning avant de continuer leur route, sans toutefois lui céder les munitions associées. De son ancien petit ami, décédé de la fièvre qu'il avait contractée une semaine avant qu'elle ne tombe elle-même malade, elle a récupéré un cran d'arrêt qui ne la quitte jamais. Dans son sac à dos, quelques spécimen de graines de plantes sauvages récupérées au gré de ses pérégrinations.
       
Details physiques :
Dépassant à peine le mètre soixante pour une cinquantaine de kilos, Charlie ne se démarque que par un joli minois dont elle n'a pourtant aucune conscience. Elle est dans cette norme dans laquelle elle aspire tant à être, ni plus, ni moins. Peu athlétique et encore moins sportive, n'ayant jamais trouvé d'intérêt dans le fait de souffrir et de transpirer pour un but qu'elle ne perçoit pas, le corps de la jeune femme a subi les affres de la survie ces dernières années et elle commence à peine à reprendre du poil de la bête.
Elle porte le plus souvent des vêtements confortables, les derniers jeans qu'il lui reste, quelques t-shirts de groupe de rock et de métal qu'elle n'a jamais écoutés et légués il y a plusieurs années par sa « soeur » et les chemises à carreaux trop grandes pour elle que son « frère » avait abandonné dans un carton.

Elle possède un seul et unique tatouage, deux cygnes qui s'entrelacent sur l'omoplate gauche, l'un blanc, l'autre noir, témoignage de son affection indéfectible à sa mère d'accueil qui portait comme nom de famille Swan.

Psychologie


Traits angéliques et candeur apparente, il est facile de se méprendre sur Charlie. Au premier abord plutôt docile et malléable, elle semble peu contrariante et encline à donner raison à son vis-à-vis. Directe dans ses interactions avec autrui, elle peut parfois vexer ou blesser sans volonté réelle de le faire, n'ayant seulement pas de filtre et disant souvent tout haut ce qu'elle pense tout bas sans réellement réfléchir à la portée de ses mots. C'est une inadaptée qui n'a jamais vraiment compris la complexité des rapports humains et qui perçoit mal l'implicite dans la parole ou les gestes, que ce soit l'ironie, le sarcasme, ou tout ce langage du corps et les regards qui ne trompent pas – en tout cas pour les autres –
Une maladresse qui donne souvent lieu à des quiproquos avec ses congénères quand les deux parties interprètent mal les intentions de l'autre et ne savent de ce fait plus comment agir ou réagir.
D'aucuns diraient que son enfance, au moins les dix premières années avec sa mère biologique, y est pour beaucoup responsable, mais la jeune femme ne semble pas marquée plus que cela par la négligence de sa génitrice la concernant. Charlie n'est pas du genre à rester enfermée dans un passé peu glorieux, se contentant de cette normalité qui n'en était pourtant pas une sans jamais regarder en arrière. C'est un fait, c'est arrivé, et elle n'a aucun pouvoir là-dessus, autant tenter de gérer un présent déjà compliqué plutôt que s'acharner sur des événements qui ne sont plus.

La jeune femme a cependant conscience qu'elle diffère de cette norme tacite du genre humain, ne comprenant pas réellement sa ''bizarrerie''. Désireuse de se fondre dans la masse et ne pas faire de vagues, elle a su s'adapter à son environnement au fil des années par un sens de l'observation très aiguisé et une capacité à calquer le comportement des autres dans un jeu de miroir qu'elle maîtrise à la perfection. Ça ne veut pas dire qu'elle est forcément en accord avec ce qui se dit ou ce qui se fait, mais elle préfère ce déguisement et ce jeu des masques plutôt que les regards interrogateurs ou emplis de jugement la concernant. Elle est donc, inconsciemment, quelque peu manipulatrice. Pas dans le sens où elle cherchera à tromper l'autre mais plus parce qu'en calquant le comportement des autres elle ne révèle finalement jamais le sien. Cette dernière est pourtant loin d'être secrète. Impudique dans tout les sens que peut contenir ce mot, rien n'est choquant pour Charlie, rien n'est grossier et encore moins tabou. Elle ne comprend pas, par exemple, que le racisme ou l'homophobie peuvent choquer et ne s'en formalise pas, sans en adopter les préceptes pour autant. Tout comme la nudité. Peu consciente de son propre corps, pour elle, une paire de seins ou de fesses ne sont finalement que ça, rien de plus. Elle n'en voit pas forcément la portée érotique. C'est un caméléon par la force des choses. Pas forcément intelligente dans le sens scolaire du terme, elle est néanmoins maligne et sait s'adapter à toute situation.

Trop souvent on l'a baptisé ''loufoque'', ''bizarre'' ou encore ''autiste''. Elle aspire à la normalité. Au fil du temps elle s'est donc enfermée dans un schéma de normalité qui ne lui convient pas forcément mais qui se veut logique pour sa personne. Et si les relations intimes sont quelque chose de peu accessibles pour elle, n'y trouvant finalement que peu d'intérêt ou de plaisir, elle n'est pas complètement indifférente aux autres et peut s'attacher. Loyale, elle n'est pas du genre à laisser quelqu'un en arrière une fois accrochée. Elle a cependant tendance à se focaliser sur une seule personne et une seule relation à la fois, devenant parfois possessive sans même s'en rendre compte et un peu trop insistante. C'est une obsessionnelle, fixée sur une tâche, un travail, une personne, et allant au bout de chaque projet, professionnel ou humain qu'elle entame quitte à parfois en faire trop, surtout vers les femmes d'âge moyen, figures maternelles qu'elle n'a finalement jamais eu, les mettant sur un piédestal et contestant rarement leur autorité et leurs décisions.




Story of survival


Un rire enfantin rompt le silence morne de la maison aux relents de nicotine. Dans un coin du salon aux meubles dépareillés, une carton fait office de dînette et deux enfants, assis en tailleur, s'amusent à imiter les grands avec de faux couverts en plastique à la couleur délavée.
« Maman dit que c'est les pédés qui jouent à la dînette Johnny. »
« C'quoi un pédé ? »
La petite fille de neuf ans, et qui en paraît six ou sept avec son petit gabarit, se contente de hausser les épaules.
« J'sais pas. Mais maman a vu Steve Calwell passer devant la maison déguisée en fille l'autre jour avec sa sœur et elle a dit qu'il finirait pédé ! »
« Et t'as pas demandé ? »
« Maman aime pas que je pose des questions. Elle dit que j'ai qu'à les poser à la maîtresse. Que c'est pas son travail d'y répondre. Que son travail à elle c'est d'aligner deux putain de job à la con pour payer les factures et la bouffe. »
« Elle dit vachement beaucoup de gros mots ta maman. »
Une nouvelle fois la gamine hausse les épaules.
« C'est parce qu'elle est fatiguée je crois. Elle dort tout le temps. Ou parce que j'ai pas de papa. Elle aime bien les messieurs dans les films à la télé. »
Dans les films, les séries, les émissions où ils chantaient fort ou celles où les gens cuisinaient et disaient tout le temps du mal des autres.
« C'est pour ça que j'ai pas le droit de regarder les dessins animés. Les autres à l'école ils en parlent tout le temps mais je les connais pas alors ils me traitent de nulle. »
« T'es pas nulle ! Tu fais très bien le thé ! »
Un nouveau rire s'échappe des lèvres de la fille dont les cheveux emmêlés lui retombent de chaque côté du visage. Tous deux boivent de nouvelles gorgées de faux breuvage, se retenant de ricaner trop fort.
« T'es un vrai ami Johnny merci. »

Un nouveau rire emplit la pièce, entrecoupé par des pas lourds en direction du salon.
« A qui tu parles ? »
Charlie sursaute devant l'arrivée impromptue de sa mère, les bras croisés dans l'embrasure de la porte, le regard cerné, suspicieux, et dénoué de réel intérêt. Jane a toujours cet air las. On a toujours l'impression qu'elle est énervée pour quelque chose ou par quelqu'un.
« Personne maman. »
Cette dernière jette un coup d'oeil au salon histoire de vérifier que la gamine ne lui ment pas. Une fois elle avait retrouvé ce petit con de Jackson dans son salon et avait piqué une crise sur Charlie, qui n'avait alors pas compris pourquoi elle ne devait pas fréquenter ce ''genre de personnes''.
« Je monte faire une sieste alors baisse le volume sonore ok ? »
« Oui m'man. »
« Y'a des céréales si t'as faim. »
« D'accord m'man. »

Jane se détourne sans un regard et la petite fille repose sa tasse en plastique sur le carton, ses yeux se posant sur la place vide à ses côtés. Sur le mur face à elle, un poster de Johnny Cash, le chanteur préférée de sa mère.

Seattle, WA, 2002.

(Joan Pov.)

Les résultats de l'IRM pratiquée sur la patiente Charlie Johansson montrent de manière significative une diminution de l'épaisseur des faisceaux neuronaux situés dans le cortex préfrontal. Ces résultats tendent à prouver un manque de stimuli environnementaux extérieurs, qu'ils soient culturels, sociaux, et plus spécifiquement émotionnels. Le peu d'intérêt de la mère pour l'enfant et les diverses négligences qui ont poussé au placement de ladite patiente chez Mrs. Swan sont les causes principales des carences émotionnelles détectées à ce jour.
En raison du jeune âge de la patiente, je garde bon espoir de voir s'inverser cette tendance une fois dans un environnement sain et sécuritaire. Cependant, en ma qualité, je recommande un suivi et une observation de Charlie afin de détecter au plus tôt tout signe d'un éventuel état psychopathologique tels que troubles anxieux, dépression, troubles alimentaires, bipolarité...

Dr. S. Green.
Pédopsychiatre.


La jeune femme a beau relire le compte rendu du médecin et des services sociaux ce ne sont que des mots vides de sens. Des diagnostics. Des suppositions sur un futur encore flou. Charlie n'est qu'une patiente à leurs yeux. Une statistique. C'est elle qui doit composer avec cette enfant plongée dans un mutisme duquel elle ne parvient pas à l'en sortir. Certes, elle obéit, elle est docile, peu contrariante, fait ce qu'on lui dit de faire quand on lui dit. À la recherche d'une approbation qu'elle a déjà. Elle mange pour deux, ce qui est bon signe et se remplume de jour en jour. Mais elle semble inatteignable. Et Joan à beau user de douceur, de compréhension, de toute l'affection qu'elle possède pour ces trois enfants placés chez elle et qui ne sont pourtant pas les siens, il y a ce mur invisible et elle ne sait comment le percer […]

[...]Elle a placé Charlie dans la même chambre que Mary, la seconde fille à sa charge et de deux ans son aîné, dans l'espoir que le contact avec une autre enfant l'ouvre un peu à ce nouveau foyer.

[…] Six semaines déjà et toujours aucun son sortant de sa bouche. On ne peut pas lire au travers de ses deux pupilles marrons.

[...]Elle a appris il y a deux jours que l'ancienne voisine de Charlie la laissait parfois jouer avec son chien. Un pitbull du nom de Shadow. Alors quand l'enfant est revenue de l'école, sur son lit se trouvait une peluche ressemblant au chien et avec son nom inscrit sur l'étiquette. Un peu désuet pour une enfant de dix ans mais ça a fait mouche. Avant de se coucher, la peluche dans les mains, Charlie est venue dans le salon, l'a longuement regardé et a lâché un « merci » avant de sourire et de remonter dans sa chambre.
Première victoire.

(Charlie Pov.)
Ici ça ne sent pas la cigarette. Ici ça sent bon. Elle sent toujours bon. Joan. Avec ses beaux cheveux blonds et ses grands yeux bleus. Elle cuisine, m'a acheté de nouveaux vêtements, et m'a offert une peluche qui s'appelle Shadow. Elle est gentille, me demande toujours comment je vais, m'aide pour les devoirs, et elle m'apprend à jardiner. On plante des fleurs pour la décoration et des légumes dans le potager. J'aime bien. Être avec elle. Et la regarder.
Le docteur Green dit qu'il comprend que ma maman me manque. Sauf que non. Il a essayé de me dire que ce n'était pas de ma faute, et pas de la sienne non plus. Mais je n'ai pas tout compris. Est-ce qu'elle a fait quelque chose de mal ?
Mary et Parker sont gentils aussi. Je n'aime pas quand ils font le contraire de ce que dit Joan. Ni quand ils l'imitent derrière son dos. Mais je n'ai pas envie de partir alors je me tais. Si je fais une bêtise, est-ce qu'ils me renverront avec maman ?


2005
J'ai essayé de me faire des amis comme Joan m'a incité à le faire mais je n'y arrive pas. Les garçons sont stupides et les filles futiles. Elles ne parlent que maquillage et vêtements, de musique qui ne m'intéresse pas et d'acteurs que je ne connais pas. Les filles aiment parler des garçons et les garçons aiment parler de tout sauf des filles. C'est ce que j'observe sur le banc de la cour de récréation. La solitude ne me dérange pas. Ils me trouvent bizarre, je les ai entendu et moi je ne les comprends pas. Je dessine. Beaucoup. Les profs disent que j'ai du talent. Alors Joan m'emmène dans des expositions. La plupart du temps je trouve ça moche, comme si l'artiste s'était mouché sur la toile mais je passe du temps seule avec elle et ça ma plaît. Parfois j'aimerais qu'il n'y ait qu'elle et moi. Et personne d'autre.

2007
J'ai eu droit à mon premier sermon après être sortie de la salle de bains nue comme un ver devant Parker. Apparemment ça ne se fait pas. Ce crétin est devenu tout rouge et ses yeux ne se sont plus détachés de mes seins. Joan m'a expliqué au moins pendant une heure pourquoi je devais cacher certaines parties de mon corps, ce qu'il était acceptable de faire ou non, même dans l'intimité de ce foyer. Que j'arrivais à un âge où les garçons allaient commencer à me regarder et à s'intéresser à moi de manière plus intime, plus explicite. Et que possiblement moi aussi. J'ai trouvé ça complètement absurde. Ce n'est qu'un corps. Des seins. Des fesses. Un sexe. Tout le monde en a. Pourquoi la nudité choque-t-elle à ce point ? Pourquoi être fixé sur une partie du corps plus qu'une autre ?
Mais j'ai obtempéré. Comme toujours. Après tout Joan a toujours raison.

(Joan Pov.)
Nouvel âge, nouveaux problèmes. Elle avait eu tellement de travail d'ouverture d'esprit avec Charlie. Il lui avait fallut peu de temps pour comprendre le racisme et l'homophobie de sa mère biologique. Mais beaucoup de temps pour défaire ce qu'une gosse a entendu  pendant dix ans en l'assimilant à la normalité. Il avait fallut travailler l'acceptation, instaurer de nouveaux codes, de nouvelles façons de penser sans la brimer dans ses choix. Composer avec le peu de filtres qu'avait l'adolescente. Mais elle avait fini par adoucir ses avis trop tranchés qui n'étaient finalement pas vraiment les siens.
À présent, elle essayait de la rendre moins... ouverte d'esprit. Un virage qu'elle n'avait pas envisagé quelques années plus tôt. Plus les années passaient et plus Joan se rendait compte du peu de tabou que possédait la gamine. Rien ne semblait la choquer, ni les comportements, ni les attitudes, pas plus que les paroles ou les actes. Si elle avait du symboliser le ressenti de Charlie sur les choses elle aurait tracé une ligne droite, plate. Elle était linéaire dans ses réactions. Voilà. Linéaire. Comme le fait de la voir se balader nue, à présent formée et presque femme, devant son Parker qui en avait été tout....ému. Mais la jeune fille n'avait pas semblé comprendre le problème. Ne semblait pas avoir conscience de son corps, de la beauté qu'elle était en train de devenir et des soucis qu'une telle attitude pourrait lui causer ou même de la portée érotique de certaines parties du corps.
Nouvel âge, nouveaux problèmes.

2009.
J'ai enfin réussi à me faire des amis. Force est de constater que ce n'est pas si difficile de s'intégrer dans un groupe quand on en a compris les codes. Toutes ces années d'observation auront au moins servi à cela. D'un côté les sportifs, les musiciens, les intellos, les différents clubs, et les marginaux. Les mêmes fringues, les mêmes goûts, le même humour. Une fois un groupe ciblé, il suffisait de calquer ses codes et de les appliquer et vous rentriez dans le lot.
J'ai fini par comprendre que je n'appartenais à aucun d'eux. J'ai fini par porter mon dévolu sur quelques isolés comme moi. Trop souvent j'ai été traitée de bizarre, de cinglée, d'autiste. Ce n'est pas la solitude qui me pèse mais ce désir de normalité. Je ne veux pas être regardée. C'est moi qui observe, dessine, retranscris à l'identique sur feuille ce que le monde a à offrir. Et être normale veut dire avoir des amis.
Il m'a suffit de jouer ce jeu de miroir qu'ils ne voient pas, trop centrés sur leurs problèmes et ce besoin d'attention et de validation qu'ils recherchent tous si cruellement. Je suis attentionnée. Et je valide. Et ça leur plaît. Je mens évidemment, dis souvent le contraire de ce que je pense, mais c'est le prix à payer pour enfin ne plus être pointée du doigt. Ça n'a pas que des mauvais côtés. Dans le fond, ils sont plutôt sympas. Inintéressants mais sympa. Je crois quand même que je préfère Kate.

[…] Je les ai invité à la maison samedi soir, pour prouver à Joan que je pouvais m'intégrer.

(Joan Pov.)
Elle avait été heureuse, dans un premier temps, de connaître les amis de Charlie. Heureuse de constater qu'après tant d'années dans sa bulle à ne s'ouvrir qu'à elle et les deux autres enfants du foyer elle avait finalement réussi à s'inclure dans un groupe, à nouer des relations durables. Jusqu'à ce qu'elle comprenne, en les observant, que tout ceci n'était qu'une façade. Un rôle qu'elle jouait à la perfection. Car cette Charlie n'avait rien à voir avec la vraie.
Et ce qui l'avait profondément attristée était les regards qu'elle avait détecté envers son amie Kate. Car même après des années à essayer de lui faire comprendre que toutes les attirances étaient normales, sa mère biologique avait fait déjà trop de dégâts. Pour Charlie, certains comportement n'étaient pas normaux. Et c'était ce qui l'avait attristé. La conviction qu'elle ne s'épanouirait jamais dans une relation cataloguée comme normale par la jeune fille mais qui ne lui conviendrait pas.

2011
J'ai entrepris une formation pour devenir paysagiste. Je crois que Joan m'a donné son goût pour la nature, les fleurs, les plantes en général. Loin de la foule, les mains dans la terre, ne pas avoir à parler à qui que ce soit et travailler en plein air. J'y trouve également un certain aspect artistique dans la conception, la symétrie, l'esquisse sur papier de ce que rendra mon travail une fois achevé. J'apprends beaucoup en parallèle, sur les plantes médicinales, sauvages, culinaires, et je partage avec Joan mes nouvelles connaissances. Je crois qu'elle approuve. Et c'est tout ce dont j'ai besoin.

2013
J'ai vingt et un an et je viens de coucher avec un garçon pour la première fois. Apparemment, à mon âge, il commençait à devenir anormal de ne pas avoir été aussi loin avec un homme ou même de ne pas s'y intéresser. J'ai écouté pendant plusieurs années mes amies en parler. La douleur des premiers instants, et le plaisir ressenti avec les fois suivantes. Quelque chose dont elles ne pouvaient visiblement plus se passer. De magique. D'incomparable. D'extatique.
Alors j'ai essayé. Pour être normale. En effet, les premiers instants furent douloureux. Et c'est tout.

[…] J'attends encore le plaisir des fois suivantes. La magie. L'incomparable. L'extase. Je trouve ça insipide. Moite. Brouillon. Ce n'est certes plus douloureux mais je ne ressens rien et je commence à croire que, comme pour beaucoup de sujets, les gens en rajoutent des tonnes pour se rendre intéressant. Un mensonge collectif qui fonctionne apparemment pour tout le monde sauf pour moi. Alors je fais ce que je sais faire le mieux pour paraître normale. Je fais semblant. Ça demande de la pratique. Ne pas en faire trop. Ne pas en faire trop peu. Mais finalement, l'orgueil masculin est comblé et j'ai mon premier petit ami. Garrett.  À défaut d'être intéressant il est gentil. Joan a toujours dit qu'il fallait choisir un garçon gentil.

2015
Je loue une maison à Castlerock. Retour au point de départ. Ma mère ne semble plus vivre ici mais ça ne m'intéresse pas vraiment. Je travaille, je suis indépendante, j'ai un petit ami depuis deux ans, je vais souvent rendre visite à Joan les dimanche et nous nous retrouvons en famille. Je dessine. Je vis une vie normale.

[…] J'ai allumé les infos ce soir, alors que je ne les regarde jamais. Un de mes clients est tombé malade et apparemment, il est loin d'être le seul. Un espèce de virus qui se propage dans la ville et sa périphérie. Je ne comprends pas vraiment ce genre de choses mais j'ai l'impression que tout le monde en parle ces derniers temps et que l'inquiétude est de plus en plus grande.


3 octobre 2015.
Les patrouilles de police s'intensifient à Seattle et je ne sais que penser des événements. Les informations parlent d'un virus et mes amis voient sur internet des faits insensés sur des morts qui se relèveraient. Certains rient quand d'autres crient déjà à la théorie du complot. Je ne suis les informations que pour constater de nouveaux cas tous les jours. L'un de mes clients est tombé malade récemment et je n'ai plus de nouvelles depuis. Castle Rock est pour le moment épargné, loin du centre et de sa folie qu'ils disent temporaire.

15 octobre 2015.
Des barrages ont été installés sur les grands axes reliant la périphérie à Seattle. Les militaires sont venus en renfort des forces de police et je ne peux plus travailler. Le président à parler, tentant de calmer les foules de plus en plus à cran. Mes amis disent qu'il nous cache des choses, que c'est plus grave que ce qu'il laisse paraître. Je ne comprends pas leur paranoïa. Tout semble sous contrôle.

22 octobre 2015.
La loi martiale est tombée. Ici je vois les hélicoptères survoler la ville en direction de Seattle. Aux infos on ne voit plus que des émeutiers et les forces de l'ordre dans des affrontements violents. La folie semble avoir gagné la ville et je m'inquiète pour Joan, au centre de cette violence. Elle m'a rassuré au téléphone mais refuse à présent de sortir de chez elle.
Les voitures défilent dans la rue principale, en direction du sud. Garrett m'a proposé de venir chez lui pour plus de sécurité et j'ai accepté. J'ai pris un sac d'affaires et suis partie pour Tolède.

27 octobre 2015.
Je n'arrive plus à joindre Joan au téléphone. Toutes les lignes sont saturées. Garrett dit que certains centre commerciaux sont en rupture de stock et que la ville est maintenant sous contrôle entier de l'armée. Certains de ses amis, aux dernières nouvelles, ont affirmé que les personnes malades sont insensibles aux coups et aux balles. Je n'y crois pas. Je ne connais rien à la médecine, ni à ce virus qui est à présent mondial mais ça ressemble à tous ces mauvais films qu'il m'a fait regardés ces dernières années.
Nous nous sommes regroupés avec ses amis et nous évitons de sortir mais la situation devient compliquée et je suis forcée de cohabiter avec eux. Ils sont plus supportables maintenant qu'ils ont épuisé leur stock d'alcool et de cannabis. J'ai hâte que tout revienne à la normale.

Automne 2015.
Les semaines perdurent et rien ne s'arrange. L'un des amis de Garrett nous a proposé de se rassembler à l'église Baptiste dans laquelle sa mère est bénévole. Ils sont une trentaine à s'y être installés en attendant que la situation change. J'ai suivi le mouvement, faute d'autres solutions. Coincée avec des gens qui m'indiffèrent mais consciente que je ne pourrais pas me débrouiller seule. […]
Ils avaient raison. Il y a eu un accident sur la route, devant nous. Et je l'ai vu de mes yeux. Il semblait avoir la rage et a foncé sur la conductrice qui tentait de fuir, la mordant à la gorge. Elle s'est écroulée et devant nous il l'a éventré simplement avec ses ongles et ses dents. Je déteste le sang. Tout ce sang... sur ses mains, sur son visage, au sol. Les boyaux apparents. Garrett a fait marche arrière, ce qui a attiré son attention. Trop de véhicules arrivant derrière nous. Alors, dans un accès de peur ou de stupidité, il a enfoncé la pédale d'accélérateur et l'a percuté à plus de quatre-vingts kilomètres heure. Les mains devant les yeux, j'ai entendu le choc plus que je ne l'ai vu mais quand j'ai regardé dans le rétroviseur, je suis sûre de l'avoir vu se relever comme si rien ne s'était passé. Il l'a percuté pourtant. Je l'ai entendu. Je l'ai senti. Et il s'est relevé.
Ils avaient raison. […]

L'accueil a été bon. Il paraît que les gens d'église sont comme ça. Le bâtiment est tout en bois et en hauteur par rapport à la route. La salle de cérémonie a été reconvertie en dortoir et l'autre en réfectoire. Il y a un bon stock de nourriture. Des dons pour les pauvres, ce qui fait rire certains de mes amis, je ne comprends pas pourquoi. Des rations ont été mises en place pour durer plus longtemps et certains membres de la paroisse font des rondes, armes à la main, pour prévenir toute menace. C'est assez étrange mais quelque part rassurant. Il y a quelques anciens militaires, ils doivent savoir ce qu'ils font.

Hiver 2015/2016.
Les températures ont sacrément chuté mais heureusement l'église possède un stock de vêtements. Encore des dons pour les pauvres. Le générateur, qui nous offrait encore un certain confort a rendu l'âme, à sec, de même que l'eau courante. Une certaine hiérarchie s'installe, organisée par le père Andrews et qui fait grincer les dents de certaines de mes amies. Les hommes s'occupent d'installer des barricades en contrebas des bâtiments principaux et les femmes s'occupent de la gestion et l'intendance des locaux. Je les entends dire que c'est un retour au siècle dernier et encore une fois je ne comprends pas. Les gens ne vivaient pas comme ça au siècle dernier, j'en suis certaine. Je n'étais pas la meilleure élève au monde mais j'étais attentive. Et l'Histoire ne parle pas de ça. Je fais ce qu'on me demande et c'est assez simple. Les tâches sont notées sur un tableau et je n'ai qu'à suivre les instructions. Les mères de famille parlent et je les écoute, faisant semblant de m'intéresser à leur ancienne vie insipide. Elles m'aiment bien. Je ne parle pas beaucoup, je suis calme, et surtout attentive à leur besoin de s'épancher sur leur moindre problème.
Je m'occupe parfois des sept enfants présents dans les locaux, à peu près tous du même âge. J'ai toujours préféré les enfants. Ils sont directs, n'usent pas de sarcasme ou d'ironie, sont faciles à comprendre et ont des besoins primaires aisés à satisfaire. Ça m'occupe l'esprit. Garrett aide les autres hommes pour les barricades et il est trop fatigué le soir pour réclamer mon attention. Il n'a de toute façon, heureusement, jamais été très demandeur. La promiscuité des autres semble être un facteur également répulsif, ce qui n'est pas pour me déplaire. Visiblement, l'acte sexuel est sensé rester exclusivement privé.

Printemps 2016.
Le père Andrews ayant appris que j'étais paysagiste, il m'a demandé de m'occuper du potager qui rend l'âme derrière l'église. Les plants sont presque tous morts après un hiver rigoureux mais ce dernier possède quelques graines. Il m'a dit qu'à l'origine le projet devait aider l'ouvre caritative pour les plus démunis. Malgré le peu d'intérêt pour toute cette bienveillance, j'ai feint de prêter une oreille attentive à ses propos, hochant et souriant avec autant d'enthousiasme possible. J'ai évidemment accepté. Premièrement pour m'éloigner des mères de famille et leurs discussions ennuyeuses au possible, ensuite pour retrouver le goût de l'extérieur et du travail de la terre et enfin parce que les boîtes de conserve commencent à me retourner l'estomac.
C'est un projet d'envergure et c'est la première fois que je me sens utile ici.

Le père Andrews est finalement fascinant. Il a un avis sur tout et semble s'intéresser à tout le monde. Ce n'est pas tant ça qui me charme mais plus cette façon bien particulière qu'il a de faire se sentir les gens comme sur un piédestal chaque fois qu'il leur parle. Il m'aide parfois avec le potager et me parle de religion. Mes mères n'ont jamais été très portées sur la chose alors Jésus, la Croix, je n'y connais pas grand chose mais l'histoire reste intéressante. Je l'écoute et j'apprécie sa présence. C'est étrange. Je n'ai jamais eu de père et il est celui de tout le monde. Je suppose que dans une certaine mesure, si j'étais croyante il serait aussi le mien ?

Nous avons vu une horde de ces infectés passer en contrebas, dans les champs et l'ancienne route principale. Elle arrivait du nord, de Seattle, ils étaient des milliers. Des milliers. Nous avons pris conscience des dégâts réels de cette maladie seulement maintenant. Que les choses ne reviendraient pas à la normale. Nous nous sommes tous réunis à l'intérieur pour ne pas attirer l'attention sur nous et je les ai regardé passer pendant plusieurs jours, me demandant si Joan faisait partie de ces monstres.

Le père Andrews pense qu'ils sont toujours là. Que c'est un état temporaire. Que derrière ces signes de malédiction, derrière la putréfaction des chairs et cette animosité, la personne est toujours là. Alors parfois quand ils ne sont qu'un ou deux à s'aventurer le long des barricades, je m'approche, tentant de percevoir dans le vide de leur regard et au travers du grillage une étincelle qui me prouverait qu'il dit vrai. Ils ont finalement quelque chose de fascinants eux aussi, à leur manière. Ils sont primaires. Garrett m'a vu une fois et en a planté un dans le crâne, me disant que j'étais bizarre. Je déteste ce mot. Mais je n'ai pas envie qu'il le répète aux autres. Avec la fin des travaux de fortification il est revenu plus présent, et apparemment plus en manque. Il profite que je sois seule dans le potager pour réclamer mon attention. Alors l'abri de jardin est devenu l'endroit où nous le faisons. Heureusement pour moi, il a souvent peur de se faire surprendre et se contente de vagues préliminaires. Il n'est pas difficile à satisfaire et plutôt rapide, ce n'est pas si pénible.

Printemps 2017.
Nouveau printemps, nouveau travail. L'hiver a été long et ennuyeux et je suis satisfaite de pouvoir sortir à nouveau. J'ai fini par trouver ma place ici. Apparemment, contribuer à nourrir les gens vous garantie une certaine sympathie et reconnaissance. C'est nouveau pour moi mais je ne m'en plains pas. Jeremy a proposé de m'apprendre à tirer au fusil, ce qui a rendu Garrett jaloux. Il dit que c'est dégueulasse parce que ce mec a au moins cinquante ans. Je ne comprends pas vraiment ce que l'âge vient faire là-dedans et j'ai accepté. C'est un ancien militaire et il a des tas d'histoires à raconter sur tous les bronzés qu'il a tués en Irak et en Afghanistan. Il m'a demandé de ne pas le répéter au père Andrews qui prône l'acceptation de tous. Je me suis contenté de hocher la tête. Il me rappelle parfois Jane, ma mère biologique, avec ces « enturbannés » et ces « pédés » à chaque histoire, mais j'aime les cours qu'il me dispense. La concentration, le calme, viser, contrôler sa respiration, suivre la cible et anticiper ses mouvements. Il est un peu tactile par moment mais je crois qu'on ne peut apprendre que comme ça non ?


Hiver 2017/2018.
Ils étaient une centaine au moins. On ne sait pas ce qui les a attiré mais une des fortifications a cédé. Les cris, les coups de feu, la panique ! Les gens qui courent, les enfants qui pleurent, et les monstres qui finissent par percer les dernières défenses et envahir l'église. Je n'ai pas su quoi faire, comment réagir. Là, immobile, les yeux écarquillés, à regarder les mères de famille tenter de protéger leurs enfants déjà condamnés. J'ai repensé à ce que Jeremy m'avait dit. Toujours avoir un sac à portée de mains et être prêt à décamper. Je n'avais jamais compris pourquoi, jusqu'à ce cet instant. Mais parce que je suis moi j'avais obtempéré et promis de le faire. C'est d'ailleurs lui qui m'a attrapé la main au moment où je plaçais mon sac sur les épaules et entraîné vers l'extérieur par une sortie latérale. Une balle, deux balles, dix... quinze. Je ne sais plus combien de détonations j'ai entendues avant que l'un deux me percute et me fasse tomber au sol. Ouvrant les yeux, je suis tombée face à face avec ce visage en lambeaux et à l'odeur de putréfaction, cette bouche qui cherche à mordre, et ce regard vide, avec pour seule volonté de tuer. Il n'y avait rien à lire, pas de colère, pas de folie, et rien à trouver. Le père Andrews s'est trompé. C'est finalement Garrett qui est venu à ma rescousse, alors que je tentais de le repousser de mes bras, lui plantant son cran d'arrêt dans le crâne. Encore sous le choc, ils ont fini par me relever et on s'est remis à courir sans regarder en arrière.

Après un temps indéterminé, nous nous sommes arrêtés, et, derrière nous, sur les hauteurs, l'église était en train de brûler. J'ai regardé autour de moi. Douze. Nous n'étions plus que douze. Ça m'a rappelé les apôtres du Christ durant le dernier repas. Douze apôtres, mais pas de Messie.

Été 2018.
L'extérieur n'est plus qu'un champ de ruines. Il n'y a presque plus âme qui vive et je me sens parfois comme l'une des dernières survivantes de ce nouveau monde que je ne reconnais pas. Pour la première fois je me suis retrouvée face à la dure réalité. Le froid, la faim. Je n'ai pensé qu'à ça ces derniers mois. La chaleur d'un intérieur accueillant et la nourriture. La chasse ne donne rien et les quelques réserves que nous avions s'envolent trop vite. Les magasins que nous découvrons ont été pour la plupart tous pillés et ne reste que trop peu de choses.
Nous remontons vers le Nord en faisant des pauses régulières dans des maisons abandonnées et saccagées. Le moral des autres en a pris un coup et je dois avouer que je ne suis pas au meilleur de ma forme. Serait-ce ça qu'on appelle spleen ? Dépression ? Il n'y a plus d'enfants pour faciliter les échanges, seulement des adultes taciturnes qui ne parlent presque plus. Non pas que ça me dérange en soit, mais ça n'a rien de rassurant.
Heureusement avec les beaux jours la nature s'est à nouveau éveillée et je trouve des plantes sauvages comestibles. Je crois que c'est la seule chose qui assure ma place dans ce nouveau groupe réduit. La nourriture, il n'y a plus que ça qui compte présentement.

Les rares humains que nous croisons sont méfiants et restent à distance. Je crois qu'ils ont vécu ces deux dernières ici dans ce chaos et je ne les envie pas.

Les villes défilent au gré de nos pérégrinations. Winlock, Napavine, Chehavisn Centralia puis finalement Grand Mound. À chaque fois nous nous arrêtons plusieurs semaines, sans jamais nous installer. Sans but précis sinon celui de trouver peut-être un autre groupe. Plus solide. Plus fort. Mais la région est morte. En tout cas c'est l'apparence qu'elle donne à présent.

La chasse nous offre parfois de la viande mais trop peu. J'ai perdu du poids durant ces longs mois et les journées entières de marche puisent toute notre énergie.

Hiver 2018/2019.
Ne voulant pas affronter un nouvel hiver comme le dernier nous avons pris la décision de nous installer dans le lycée de Rochester, du moins une partie. Nous avons nettoyé un bâtiment secondaire des monstres qui y séjournaient, à l'écart du reste du complexe et grillagé de toute part.
Il est trop tard pour cultiver le lopin de terre aux abords du bâtiment. Ne reste que les plants de pomme de terres sauvages récupérés à l'été au sud-est d'ici. Ça ne fera pas l'hiver entier mais c'est toujours ça.

Tiraillés par la faim, un petit groupe a décidé de s'aventurer dans le bâtiment principal pour trouver de possibles stocks de nourriture. Certains étaient contre. Trop dangereux. Je n'ai pas pris part aux pourparlers. Certes, l'entreprise est périlleuse, mais je ne vais pas cracher sur la possible nourriture. Et s'ils veulent prendre ce risque, ce n'est pas moi qui les en empêcherait.

Ils ne sont pas tous revenus. Trois y ont laissé leur vie. Mais nous avons des conserves pour quelques semaines si on se rationne bien. Je les ai regardé pleurer leur mort, les prenant dans mes bras avec une compassion feinte. Après tout, c'était leur décision. Et les haricots sont bons.

Été 2019.
J'ai tenté de relancer un potager sommaire avec les graines accumulées l'année passée. Il y a peu de variétés différentes mais certains pieds ont donné. Nous ne mangeons tout de même pas à notre faim et les humeurs s'en ressentent. Moi même ai du mal à faire semblant et je commence à voir certains regards un brin trop familiers se poser sur moi. Ils commencent à me trouver étrange, trop distante, trop indifférente je le sais. Même Garrett ne me touche presque plus. Je crois qu'il a été vexé de notre dernière fois, quand je n'ai pas eu la force de faire ce que je fais le mieux, simuler. Blessé dans son ego, il m'évite depuis. Et je n'ai pas l'énergie pour feindre que ça me peine.
Les tensions se font ressentir entre nous et les disputes sont de plus en plus fréquentes. Je ne les supporte plus mais ai conscience d'avoir besoin d'eux pour survivre. Mon truc ce sont les plantes. Je ne chasse pas, je ne sais pas me battre, je sais tirer mais ne suis pas une combattante. Sans eux, je suis morte, et je dois les supporter pour rester en vie.

Hiver 2019/2020.
Nous nous sommes faits attaquer en pleine nuit. Pas par ces monstres, mais par des humains. Ils n'étaient que cinq ou six mais l'effet de surprise a été un avantage certain. Garrett a réussi à en maîtriser plusieurs avant de se faire désarmer et jeter au sol, rué de coups. Le reste est flou, comme si je m'étais détachée de mon propre corps. J'ai vu son cran d'arrêt au sol qu'il tentait de reprendre alors que deux mains enserraient son cou et ensuite, la lame dans la gorge de l'assaillant et mes mains chaudes et poisseuses de son sang. Je me suis reculée, les yeux écarquillés sur mes mains rouge vif. Je déteste le sang. Et il y en avait partout. Partout.
Nous n'avons pas repris le dessus et nous devons notre survie qu'à notre lâcheté. Nos sacs en mains, nous avons fui, laissant les autres se faire massacrer. Nous ne sommes plus que cinq.

Les esprits sont moroses. Et je suis également silencieuse. J'ai tué un homme. De sans froid. Et encore l'impression d'avoir son sang sur les mains. Les autres sont compréhensifs et compatissants, affirmant que je n'avais pas le choix. Ils se méprennent. Au moins ils ne me voient plus comme bizarre. Je ne suis pas perturbée parce que j'ai tué un homme de sang froid et que ça me hante. Je suis perturbée parce que j'ai tué un homme de sang froid et que ça me laisse de marbre. Et je sais que ce n'est pas normal.
Je crois qu'ils s'en veulent d'avoir abandonner les autres. Je ne comprends pas pourquoi. C'était ça ou se faire tuer non ? Ce n'est pas ça la survie ?

Nous n'avons pas eu le temps de prendre des réserves. À ce rythme, nous ne tiendrons pas longtemps.

Fin septembre 2020.
Nous sommes à bout de force. La décision est tombée quelques semaines plus tôt. Rejoindre Seattle dans l'espoir de trouver un gros groupe. La nourriture se faire rare et nous passons nos journées à marcher en direction du nord. Nous sommes malnutris, épuisés, et le moral en berne rend notre progression lente. Nous ne faisons que quelques kilomètres par jour tout au plus et les joues creusés, les estomacs vides et la motivation en chute libre.
Même parler devient un effort que nous fournissons de moins en moins. Les maisons que nous trouvons n'offrent que peu de vivre au fur et à mesure qu'on se rapproche de la grande ville.
Comme pour terminer de nous abattre, Garrett s'est mis à tousser et à avoir de la fièvre. Nous avons du nous arrêter pour le laisser récupérer, dans l'espoir que le repos l'aiderait à se remettre sur pieds. Son état n'a fait qu'empirer. Les nuits entrecoupées par ses longues quintes de toux, l'ambiance est électrique. Je les ai entendu parler de l'abandonner et continuer leur route. Garrett est gentil, mais je ne suis pas contre.

Il est mort. Dans la nuit. Épuisés, nous ne l'avons pas entendu arrêter de tousser. Je crois qu'inconsciemment, nous étions soulagés de pouvoir dormir plus de quelques heures. Nous l'avons enterrés sommairement dans un trou trop peu profond pour que les bêtes sauvages ne s'occupent pas de lui d'ici quelques jours.
Parce que je sais que c'est la bonne attitude, j'ai pleuré. La fatigue a aidé je crois. Et les trois autres m'ont consolé du mieux qu'il le pouvait. À vrai dire, bien que triste, je crois que j'ai été soulagée. De ne plus l'entendre tousser et gémir de douleur. De ne plus avoir à faire semblant d'aimer ses baisers et ses caresses. De ne plus avoir à faire semblant de l'aimer.

Garrett est mort. Il était gentil.

Nous avons repris la route pour le Nord. Direction Seattle.

Octobre 2020.
J'ai commencé à tousser et à moi aussi avoir de la température. J'ai vu les regards inquiets mais ai assuré aux autres que je pouvais continuer. Au moindre signe de faiblesse, je le sais, ils me laisseront. Alors nous avons continué. Ils gardent leur distance et je mange le peu que nous avons de mon côté. Heureusement nous retrouvons des plants sauvages comestibles mais ce n'est pas suffisant. J'ai encore maigri et la ceinture qui tient mon pantalon n'a plus de cran.
Plus les jours passent et plus mon état empire. La toux, les courbatures comme si chaque muscle de mon corps me faisait souffrir, ma vision qui devient parfois floue et mes jambes qui ne me portent presque plus. Je tiens bon mais je les ralentis et trop souvent ils doivent attendre que je les rattrape. Ils s'agacent, je le sens. Bientôt ils me laisseront sur le bord de la route.

J'ai fini par m'évanouir au moment où nous atteignons Olympia. […]


[...]Je suis sur un lit. C'est impossible. Mes muscles me lancent, ma gorge est en feu et la douleur dans ma poitrine chaque fois que je tousse s'irradie dans tout mon corps, me faisant grimacer à chaque fois. J'ai chaud, j'ai froid. Quand je parviens à ouvrir les yeux, entre deux phases de sommeil, j'aperçois des murs, des meubles. Je délire. C'est la fièvre. Parfois j'ai l'impression de sentir un linge humide et frais sur mon front et quand j'ouvre difficilement les paupières je ne peux distinguer qu'une masse de cheveux roux. Je pense à Joan, mais les siens étaient blonds. Je dors. Je m'éveille. Les cheveux roux. Un sourire chaleureux. Un matelas douillet. Un oreiller sous ma tête. Je délire. Je suis épuisée. Je dors. J'ouvre les yeux. Une voix rassurante. Féminine. Je veux dormir cent ans.
Je ne sais combien de temps dure ce manège. Des jours, des semaines....

Je ne sais même plus quand nous sommes.

Quand la fièvre redescend et que je peux rester éveillée plus de quelques minutes, je prends conscience que ce n'était pas un rêve. Je suis dans une chambre, dans un lit, sous des draps. Une femme est à mes côtés. Allegra. C'est ainsi qu'elle se présente. Allegra.
C'est elle qui m'apprend que mes compagnons ne m'ont finalement pas abandonné sur le bord de la route. Ils sont néanmoins partis, trop inquiets à l'idée de tomber malade eux aussi. Ça ne m'attriste pas. J'aurais fait pareil. J'ai besoin de repos, de reprendre des forces et si je comprends mes anciens compagnons de route, je ne comprends pas pourquoi cette femme a pris soin de moi.

Il me faut du temps pour réussir à sortir de ce lit, aidée par les repas offerts un peu trop généreusement. Allegra n'est pas seule ici. D'autres personnes vivent dans cette maison, et j'observe les allées et venues de ces différents protagonistes depuis la fenêtre de la chambre. J'écoute les conversations quand ils pensent que je dors. C'est une famille. Une mère, et ses enfants. Enfin, pas vraiment. Ils ne sont clairement pas du même sang et ça se voit. Ils sont... comme moi ? Ils me rappellent mon ancienne vie. Cette famille d'accueil où j'ai grandi. Allegra me rappelle Joan....
Et depuis la fenêtre de cette chambre qui n'est pas la mienne je me plais à fantasmer une place qui ne m'appartient pourtant pas. Ce n'est pas ma famille. Mais je ne peux survivre seule. Je n'ai que ma connaissance des plantes. Je ne suis ni une combattante, ni une survivaliste. Je ne chasse pas, je ne pêche pas. J'ai tué un homme. Mais je n'ai jamais vaincu une seule de ces choses. Je suis lâche. Et opportuniste. Mais je sais m'adapter. C'est même ce que je fais de mieux. Derrière ce visage lisse.

Et ils semblent y parvenir. Survivre.
Pourquoi tenter ma chance à Seattle où je ne retrouverai sans doute jamais personne quand Olympia semble une porte de sortie acceptable et plutôt... séduisante ?


Charlie se remet à peine de la fièvre qui a emporté son petit ami. Après une longue errance sur les routes en direction de Seattle, ses compagnons l'ont finalement laissé à Olympia avant de repartir sans elle.
Durant trois semaines, elle a alterné des phases de sommeil profond, de delirium en tout genre et de lucidité où seule une masse de cheveux roux a réussi à pénétrer son cerveau embrumé.
Depuis son réveil, elle reprend des forces en s'alimentant à nouveau correctement et en tentant d'appréhender ce nouveau décor et ces nouveaux visages. Les gens ici lui rappellent sa vie d'avant, sa famille d'accueil. Allegra et est comme Joan. Ils sont restés en famille, eux.

Plus le temps passe, plus l'envie de tenter de rejoindre ses anciens compagnons s'estompe. Elle ne sait pas si elle a sa place ici mais elle compte bien essayer de creuser son trou et de proposer ses services à cette famille multiculturelle qui semble fonctionner.


time to met the devil

• Pseudo (sur internet) : Vulféconde Chinoiroukmane
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Re: Charlie Johansson

Jeu 26 Nov 2020 - 20:12

j'ai l'impression d'avoir gagné au loto et d'avoir gratté une nouvelle petite soeur sans l'avoir mérité. drama drama
trop trop hâte de rp tous ensemble. :135:
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Re: Charlie Johansson

Jeu 26 Nov 2020 - 20:26

Wow ! L'est magnifique cette dame ! Charlie Johansson  686010672

R'bienvenuuue !! :smile34:
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Re: Charlie Johansson

Jeu 26 Nov 2020 - 20:31

Rebienvenue !



Us against them
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Tori H. Watanabe-Hayworth
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Inglorious Fuckers
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Re: Charlie Johansson

Ven 27 Nov 2020 - 0:05

Ça me dit un truc ? scratch scratch



Coucou ! :MisterGreen:
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Re: Charlie Johansson

Ven 27 Nov 2020 - 1:43

Rebienvenue ! I love you
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Re: Charlie Johansson

Ven 27 Nov 2020 - 8:19

Re bienvenue Charlie !!! I love you
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Re: Charlie Johansson

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