Tout c’est passé a une vitesse folle, l’accident, les chocs, notre capture. Même dans le noir, danc ce camion, bercé par le rythme de la route j’ai du mal a réaliser. Et Selene ? J’espère qu’elle est en vie. La route fut longue pourtant, mais rien n’a pus me faire décrocher de cet état second, où mon cœur battait si rapidement que j’avais l’impression que tous mes organes allaient exploser. Le moteur finit par se taire et ils nous ont descendu du camion non sans une brutalité gratuite. Ils nous ont séparé, je l’ai entendu quand les pas de mes camarades se sont éloignés des miens. Ce bâtiment est immense, nous avons marché un moment avant qu’on me lance brutalement une chaise et qu’on m’y attache sèchement.

Le bruit de la porte qui se ferme, puis plus rien. Un silence glacial, une obscurité familière et affreusement pesante. J’attends quelques minutes, m’assurant que personne n’est avec moi dans cette pièce, tendant l’oreille dans chaque direction. Je finis par essayer d’enlever le sac sur mon visage, me disant que j’y verrais sûrement plus clair. J’arrive, je ne sais par quel miracle à dégager mon visage du bout de tissu. Je n’y vois pas plus clair, à part un léger filet de lumière passant sous la porte rien n’éclaire l’endroit où je me trouve. Je ne sais pas combien de temps a duré le voyage, ni combien de temps ça fait que je suis ici. J’ai la soudaine impression d’être hors du temps et de l’espace.

La porte finit par s’ouvrir, je sursaute presque. Mes yeux se plissent alors qu’une lumière aveuglante vient frapper la rétine. Une silhouette se dessine alors dans l’encadrure de la porte. Et dire que c’était censé être une simple livraison. Alors que l’homme en question prend la parole, la gravité de la situation me saute soudainement à la gorge. Je suis prisonnier, dans un endroit que je ne connais pas et cet individu n’a pas l’air de me vouloir du bien. Au contraire, il me formule que si je veux ne serait- ce que boire ou manger il va falloir que je lui obéisse. Manger, ce n’est pas un problème, dehors je suis arrivé certaine fois à tenir des jours sans rien manger. Mais sans boire je sais que je n’en ai pas pour longtemps. L’air sadique qu’il prend me glace le sang.

Je garde un air grave, sans rien laisser transparaître. Même pas mes doutes ou ma peur de mourir seul ici. Je plante mes yeux verts dans les siens, me redressant sur ma chaise.

« Qu’est ce que tu veux ? »

L’homme prend un air menaçant, me disant que je ne dois pas poser de questions car c’est lui qui a le monopole de la parole. Je fronce les sourcils, silencieux. J’essaie de garder un respiration stable et régulière, ne voulant pas laisser le stress naissant prendre le pas sur mon système. Une idée me vient soudainement en tête, et si j'essayais de me le mettre dans la poche ? Non seulement pour avoir de quoi survivre mais aussi pour gagner du temps. Essayer de faire en sorte qu’il se méfie le moins possible de moi pour que je puisse profiter de la situation par la suite. Je me mets une claque intérieure m’obligeant à prendre un air plus détendu. Même si c’est du bluff il faut que j’essaie, pour essayer de sortir mes camarades de là. En mourant seul dans cette cellule je ne saurais utile à personne.

Sa première question m’interpelle, il me demande mon nom et ceux du reste de l’équipe. Il n’avaient donc aucune idée de qui se trouvait à bord de ce camion. Je ne sais pas ce qu’est leur but et pourquoi il nous ont amené ici. Je prends une grande inspiration m’interrogeant intérieurement sur la suite. Donner leur nom… De toute façon, j'imagine qu’elles doivent subir le même cirque que moi. Alors, ils doivent déjà le savoir. Je me lance, roulant mon cou avant de prendre la parole. Je me force à prendre un air plus simple et moins menaçant.

« Je m’appelle Corray Haner. Et mes collègues, je ne connais que leur prénom. Je ne suis spécialement proche de personne. Certaines d’entre elles, je ne l'avais même pas côtoyé avant aujourd’hui. Je soupire. Je vais vous dire ce que je sais: Nahima, Raina, Selene et… Juliet, je crois… Je ne peux malheureusement rien te préciser de plus. »

Même ça c’est compliqué. J’ai l’impression de les trahir rien qu’en leur donnant leur prénom. Mais il ait absolument que j’arrive a trouver une solution pour les sortir d’ici.

Mon cœur saute un bâtiment alors qu’il me dit qu’il a bien fait de commencer par moi. Je suis le premier et j’ai déjà donné tous leurs prénoms ?! Fait chier… Je sais que Selene et Nihima ne lâcheront rien, quitte à se faire réduire en miette, par ego peut-être. Donner leur prénom sans même spécifier à qui appartient quel nom ça ne devrait pas mettre qui que ce soit encore plus en danger qu’on ne l’est déjà. Ma réponse a l’air de lui convenir en tout cas. Finalement, ce que j’ai dis est une grande partie de la vérité. Je me sens un peu plus confiant, me disant que ma stratégie pourrait déjà me permettre de gagner plus de temps. Il m’interroge sur George. Il essaie peut-être de savoir quel genre d'informations nous avons sur la ville. Donc nous avons belle et bien affaire à Éden. Ou pas, qui sait. Tout est flou, tout ce passe a une vitesse folle. A tel point que j’ai du mal à traiter toutes les informations à la fois.

« Euh, je monte les yeux au ciel faisant mine de réfléchir.. C’est une grande ville, bien protégée. J’ai pas eu l’occasion de beaucoup papoter avec les habitants, ils sont un peu… rustres ? Mais en tout cas ça m’a l’air confortable. Même si les étrangers n’y sont pas bien accueillis. Et… C’est tout ? Je suis pas du genre très observateur, c’est clairement pas moi le cerveau, je préféré miser sur le physique. »

Jouer au soldat bête et méchant. Voilà ma stratégie, je n'ai pas l’habitude de jouer la comédie mais j’aime bien ce personnage. Je pourrais m’y habituer. Quelqu’un qui n’a pas d’attache et qui prend les choses comme elles arrivent. Tout le contraire de moi qui pourrait sacrifier ma santé pour les membres de mon groupe.