The rains of Glenwood
Ven 27 Aoû 2021 - 21:07
Août 2021.
Les directives fusent, implacables, ne soufflant aucune protestation. Comme tous les retours de mission, chacun ici sait ce qu’il a à faire, qu’il soit du corps médical ou qu’il fasse partie des civils aidant. Chacun est affecté à un référent et à un potentiel blessé. Le pire est le manque cruel d’informations. Chaque fois Maeve ignore qui passera la porte et l’étendue des dégâts. Son pragmatisme est mis à rude épreuve, de même que son professionnalisme. Parce qu’elle les connaît tous. Quand ils ne sont pas des proches, ils sont le compagnon ou le meilleur ami de l’un d’eux et ça ne rend pas la tâche plus aisée, bien au contraire. Parfois, elle regrette de ne pas pouvoir les renvoyer dans l’anonymat pour ne pas risquer des erreurs qu’incombe parfois le personnel.
Les arrivées s’enchaînent. Les visages noircis, une odeur persistante de soufre et de fumée dans l’air, la chirurgienne les dirige un à un vers ses collègues et ceux venus en renfort, la boule au ventre. Une cuisse touchée qui le fait déglutir péniblement, une clavicule apparemment cassée où elle tente de ne pas associer de visage à la blessure et puis...Sarah.
C’est Luke qui passe la porte avec la jeune femme dans les bras qui tente vainement de conserver les yeux ouverts. Se ruant auprès de l’homme, elle lui fait signe de la suivre et lui désigne le premier lit à l’écart des autres, embarquant Lucy avec elle. La laissant la déposer le plus délicatement possible, elle n’attend pas et compartimente au mieux tandis que ses yeux se posent dans un réflexe immédiat sur sa tête. Là, dans sa tignasse, une plaie importante et…. déjà recousue. Parce que Ivy est blessée et visiblement dans un sale état, la doc s’interrompt un instant, dans l’incompréhension la plus totale. Relevant ses yeux sur Luke, il semble presque gêné des mots qu’il ravale une première fois avant de souffler. “Ces enfoirés l’ont choppé. Les ont choppé. Elle est la seule qui est revenue dans son équipe.” Lucy émet une exclamation désabusée tandis que le regard de la quadragénaire se perd un instant dans le vide.
Stan, Logan, Denver et tous les autres…
Elle déglutit à nouveau péniblement, fermant les yeux de longues secondes. Parce que cet extérieur ne doit malheureusement pas exister ici mais qu’il lui retourne littéralement l’estomac qui semble soudain peser une tonne dans son abdomen. Un long frisson parcourt sa colonne vertébrale et ses yeux se rouvrent sur le corps de la jeune femme. Elle a été prise par New Eden. Elle repense à tout ce qu’elle a entendu sur eux, les photos vues lors d’une réunion avec les responsables et quelque chose se casse là, à l’intérieur.
“Va me chercher Hokulani” murmure-t-elle à Lucy, qui comprend la raison sous-jacente de cette requête et doit contenir une nouvelle exclamation avant d’opiner du chef et de quitter la pièce.
Maeve n’a pas le temps de poser de nouvelles questions à Luke que quelqu’un déboule dans la salle d’auscultation et sans préambules, sans se soucier de ce qui se passe ici, avise le militaire. “June veut un rapport!” Recevant un regard meurtrier de la part de la chirurgienne, cette dernière perd patience. Se retenant de justesse de l’envoyer sur les roses, elle le fixe pourtant avec intensité. “Elle reste ici!” Certes, Maeve était du style compréhensive et à l’écoute mais la plupart savait que quand le ton montait et qu’il était ponctué d’une telle intransigeance, mieux valait ne pas trop tenter le diable. “Je peux le faire. Elle… Sarah m’a tout raconté” propose finalement Luke pour trancher dans cette situation. La doc acquiesce. “Merci Luke.”
Les deux hommes s’éclipsent et le silence revient, seulement perturbé par l’agitation en dehors de la pièce et le remue-ménage qui règne dans le dispensaire. Se rapprochant de la jeune femme, elle se rend bien compte que le pantalon qu’elle porte est celui d’un homme, trop grand qui plus est, de même que les chaussures qui menacent de quitter ses pieds. Les retirant prudemment, arrachant des gémissements plaintifs à la militaire, elle constate les nombreuses entailles, brûlures et saletés qui couvrent la voûte plantaire. “Merde…” souffle-t-elle de manière presque inaudible. Allant au chevet de la jeune femme, elle tente de la faire revenir dans l’éveil. Il le faut. “Sarah? Sarah c’est le doct… c’est Maeve. J’ai besoin que tu ouvres les yeux. J’ai besoin que tu sois consciente. S’il te plaît…” quémande-t-elle d’une voix douce tandis que la gynécologue s’infiltre doucement dans la salle. “Tu es à la maison. Tu ne risques plus rien. Je te le promets.”
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Re: The rains of Glenwood
Dim 19 Sep 2021 - 15:17
La militaire n’a pas fermé l'œil depuis qu’elle a quitté le bâtiment de Glenwood où elle était retenue, elle s’est simplement reposée dans le fourgon à plusieurs kilomètres de là après cette randonnée pieds nus forte en émotion et en douleur. Déshydraté, épuisée, torturée, c’est l’état dans lequel Luke l’aura retrouvé sous ce soleil de plomb.
Elle a échappé de peu à l’enfer, c’est ce que lui a soufflé le jeune homme après avoir écouté son histoire. Elle n’en est pas si sûre et n’a rien trouvé à répondre, elle-même ignore ce par quoi elle est passée avant de s’éveiller pleinement, peut-être était-ce déjà l’enfer. À ce stade, l’ignorance a un arrière goût d’horreur. Soignée, changée, lavée, c’était bien les seuls constats qu’elle pouvait en tirer. Quoi d’autre ? Le saura-t-elle un jour ? Veut-elle vraiment le savoir ? Elle n’a pas vraiment l'occasion de se poser la question, le jeune homme lui donne sa gourde et part à la recherche de chaussures et d’un pantalon en meilleur état que le lambeau qui lui servait de pyjama.
Elle vient nerveusement chercher ses plaques militaires à son cou quand elle entend l’arrivée de l’hélicoptère mais ne les trouve pas sous la chemise du pyjama qu’on lui a imposé dans son sommeil. Un instant de courte panique puis elle retrouve son calme à l’aide de trois grandes inspirations sans pour autant retrouver sa voix. Sa gorge est désormais sèche, elle a tout dit à Luke quelques heures plus tôt et ne se sent clairement pas de recommencer immédiatement l’expérience. Elle est laissée dans son coin dans l’hélicoptère, Luke occupant le rôle d’un fidèle bouclier entre elle et les autres s’occupe de relayer les informations qu’elle lui a transmises au reste de l’équipe.
Outre le traumatisme de ces dernières vingt-quatre heures à fuir pour survivre, le poids de l’échec la cloue sur place, elle a échoué. Seule rescapée de son groupe devient ainsi un des pires rôles que l’avenir pouvait lui attribuer. Le recul met un temps à venir progressivement grignoter sa conscience pour qu’elle puisse se ravir d’être en vie et s’en contenter, mais il ne suffit pas. Incapable de renseigner qui que ce soit sur le sort de ses compagnons, elle rechute aussitôt, au plus mal.
Quand Sucre se pose, enfin arrivée à Fort Ward, ses nerfs cèdent et sa conscience s’embrume peu à peu. Elle est soudainement exténuée et ne rêve désormais que d’une chose : dormir. Luke est là pour ne pas la laisser sombrer et l’aide à sortir de l’hélicoptère mais chaque pas lui arrache une grimace et un râle de douleur. Sa voûte plantaire n’est plus en état de toucher le sol, la militaire est aussitôt portée par son sauveur direction le dispensaire et elle n’a pas clairement pas son mot dans cette affaire. Ses paupières sont désormais lourdes et la supplient de céder à leur demande. Ce qu’elle fait pour vriller dans une première phase d’endormissement alors qu’on la porte jusqu’au dispensaire.
Contre ses paupières closes, les images animées de son passé auprès des siens défilent à grande vitesse. Douce pause, douce sérénité incontrôlée et salvatrice, mais trop vive coupée par une vive douleur suivi de la voix de la chirurgienne. “La maison” dit-elle, comme si la maison signifiait encore quelque chose, comme si l’on pouvait employer ce mot sans mentir, comme si il existait encore.“La maison...” Répète la militaire à voix basse sans même déguster le mot alors que ses paupières se décident enfin à se relever.“Ce.n’est.pas.ma.maison, Maeve.” Les mots sont mâchés, eux aussi sont sans saveurs. Sa maison n’est pas là, elle est à Tacoma et c’est clairement où elle baignait avant que la doc’ ne vienne l'en extirper pour la ramener en enfer. Malgré son désir d'y retourner, elle fait l'effort de rester consciente sans ajouter quoique ce soit de plus.
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Re: The rains of Glenwood
Dim 19 Sep 2021 - 17:10
Le sarcasme latent et la réponse de la jeune femme lui font baisser la tête quelques instants. Peut-être que la formulation est effectivement indélicate et inexacte, surtout avec son arrivée récente. Mais après ce que la militaire avait fait pour elle, après les confidences engagées et les moments partagés, Sarah n’était déjà plus qu’une patiente à ses yeux. Cette dernière l’avait vu fragilisée, le moral dans un gouffre abyssal. Ça n’était pas sans importance sur ce qui les liait déjà, malgré les réticences de la chirurgienne à s’ouvrir d’ordinaire. Il n’y avait pas eu de jugement, ni de paroles creuses mais des actes et un écho certain qui avait su trouver la corde sensible. “Il y a des gens qui tiennent à toi, c’est tout ce qui compte là maintenant” souffle-t-elle comme pour la ramener au présent, dans cette réalité qui lui paraît futile. Elle ne l’était pas. Et tant pis si la doc était la seule. Ça devait avoir du poids, aujourd’hui plus qu’hier.
Et sans plus attendre, elle s’éloigne, juste le temps de préparer une poche pour réhydrater la jeune femme. L’installant sur un pied, elle enfile une paire de gants et prépare l’aiguille pour une voie veineuse. Posant un garrot, elle désinfecte soigneusement le poignet de la jeune femme, préférant cette option au pli du coude qui peut parfois créer une dérivation. “Ne bouge pas” murmure-t-elle en cherchant une veine, qu’elle ne tarde pas à trouver, avant d’apposer de quoi empêcher l’aiguille de bouger. Revenant à sa voûte plantaire, elle se dit que la militaire va déguster un peu vis-à-vis des soins mais il ne semble rien avoir de plus grave que des coupures et de la peau à vif.
Hokulani choisit ce moment précis pour entrer dans la pièce et après avoir marqué un temps d’arrêt, reprend bien vite son masque de professionnalisme. Un simple acquiescement signifie à Maeve que Lucy l’a informé sur les circonstances du retour de la jeune femme et des possibles sévices subies là-bas. L’inconscience l’a peut-être préservé des souvenirs d’un éventuel abus, mais il leur faut être certaines. Au-delà même du traumatisme psychologique qui pourrait en découler, la chirurgienne pense d’abord aux possibles maladies et grossesse. Sarah a beau avoir vécu longtemps à l’extérieur, favorisant l’absence de ses menstruations, les derniers mois ici, nourrie, lui ont permis de reprendre un cycle un tant soit peu normal. Reste pourtant encore à la prévenir et tenter d’obtenir son accord pour un examen plus poussé.
Revenant au chevet de la blessée, la quadragénaire déglutit difficilement, prenant place sur le bord du lit comme pour conserver un minimum cette conversation entre elles. Sa collègue referme d’ailleurs la porte sans attendre la demande de la responsable. “On m’a dit que tu avais été inconsciente un long moment. Que c’est eux qui ont soigné ta plaie au crâne et qu’ils t’ont lavé et changé.” Elle marque une pause. La psychologie, ça n’avait jamais été son rayon et elle avait dû apprendre sur le tas. “Voici Hokulani. Elle est gynécologue.” Et le simple statut évoqué devrait enclenché le reste chez la militaire. “Je veux que tu saches que peu importe ce qu’on découvrira, rien ne sortira jamais de cette pièce.” Les deux docteurs l’avaient déjà fait pour Layla et plus récemment May. Ce n’était pas le genre de choses que tout le monde devait connaître, ni dans la population, ni dans les chefs. “Mais il va falloir que l’on t’examine aussi ici, pour palier à tout risque éventuel.” Maeve préfère néanmoins le consentement de sa patiente.
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