Ed revenait enfin d'un énième voyage avec les caisses. Au moment de ramener la troisième, Nara, l'amie de Buzz, un des hommes qui l'aidait à transporter les matériaux de survie jusqu'aux véhicules, tira pour prévenir d'un danger. Non loin du groupe qui emmenait se trouvait un cadavre Un de plus parmi tant d'autres. Après avoir posé la caisse après de ceux qui chargeaient les camions, Ed s'empressa de rejoindre Tam qui attendait au niveau d'une quatrième caisse. Etait-ce vraiment la quatrième ? Avec toute cette agitation, il avait perdu le compte. Qu'importe, tout ce qui importait c'est qu'il aidait à en ramener le plus possible. Au passage, il croisa le jeune homme qui les avait aidé pour le premier voyage.

- Hey, petit ! T'es armé, va aider les autres à sécuriser le deuxième camion ! On a besoin de bras là bas aussi !

Le fauconnier n'était certes pas un des meneurs du groupe, mais il avait bien remarqué qu'ailleurs, bras armés manquaient à l'appel et il fallait combler le vide important que cela représentait, surtout concernant la survie des autres civils.

Reprenant sa marche rapide vers la tatouée, Ed se stoppa vivement quand il entendit son nom résonner à travers les autres cris, bruits de tirs ou même grognement d'outre tombe. Il connaissait cette voix, il la connaissait même très bien ! Sans réfléchir, il se dirigea vers la source en cherchant du regard la personne qui l'avait interpellé. Non, il avait rêvé, il avait forcément rêvé ! Pourtant, la voix se fit entendre de nouveau. L'homme continuait d'approcher et trébucha quand une main s'agrippa à sa cheville. Se retournant sur le dos, il frappa se faciès livide avec colère. Oh non ! On ne l'empêcherait pas d'arriver jusqu'à cet humain qui lui demandait de l'aide. Après un nouveau coup, il décida d'enfoncer la lame qu'il tenait dans ce crâne. Enfin, plus rien. Se redressant vivement, l'homme reprit sa course folle et c'est là qu'il la vit. Julia était là, dans le stade, encerclée de nombreux morts. Mais... Pourquoi elle était sur Seattle ?! Et Travis ?!

Sans plus de réflexions, le michiganais dégaina son arme et tira à quelques reprises pour achever trois des agresseurs. La femme tenta d'arriver jusqu'à lui et Ed s'approcha comme il pu. Malheureusement, elle se fit mordre à l'épaule alors que son ancien compagnon s'empressait d'aller à son secours, faisant fit du danger. N'écoutant que son courage, il repoussa les agresseurs qui tombèrent et aida la belle à trouver un endroit sécurisé même si ce n'était que pour très peu de temps.

- Julia, chérie, où est Travis ?! Où est Trav' ?!

Plus que paniqué à l'idée que son fils soit mort ou devenu une de ses choses, Edwin n'avait plus les idées claires et surnommait son ex comme autrefois. Il l'aidait tant bien que mal à arrêter le sang qui coulait de son épaule où un morceau de chair manquait. La monstruosité n'avait pas manqué son coup, cet enculé.

- Emporté par les militaires, avec Jason. Aide les autres ! J'suis foutue, Ed ! Casse toi ! Je sais ce qui va m'arriver, je l'ai entendu !

Edwin prenait le temps d'assimiler les informations, Julia, Jason et Travis étaient au stade. Depuis quand ? Il ne les avait pas vu ! Il ne les avait pas trouvé ! Pourquoi ?! Mais son ex venait de lui dire que Jason et Travis étaient des rares survivants que les soldats avaient daignés embarqués. Mais vers où ils étaient partis ?! PUTAIN ! NON ! SON FILS ! Instinctivement, il serra sa main contre sa cuisse, tenant fermement Jonah, la mâchoire serrée. Non, il ne pouvait pas abandonner Ju' aussi. Il ne pouvait pas. Bien que plus rien ne subsiste entre eux, ils étaient amis. Il ne pouvait pas faire ce choix. Impossible. C'est les larmes aux yeux qu'il embrassa le front de celle qu'il avait un jour aimé. Un adieu déchirant entre eux. Délicatement, la femme retira le couteau d'entre les doigts du fauconnier et se leva pour faire face aux morts qui approchaient. Une grimace de douleur sur le visage, il la laissa partir. Elle se sacrifiait pour aider le reste de la communauté à s'enfuir. Elle lui laissait l'espoir de retrouver leur petit, cependant. S'essuyant rageusement la figure pour éviter que les larmes ne coulent, Ed se retourna pour rejoindre son point initial, Tam, aux caisses restantes.  

Son coeur tambourinait sans limites et ses poumons brulaient comme si un une forge avait prit place en eux. Alors qu'il s'approchait de Tam, il était essoufflé et les grondements se firent et c'est Lilou qui vint à sa rescousse, abattant une de ces choses. Un remerciement et l'homme renvoya son amie avec les autres, auprès des camions, elle ne devait pas risquer sa vie ainsi. Et lui, il ne mourrait certainement pas aussi bêtement. Pas tant qu'il n'aurait pas vu son fils. Mettant en joue un rôdeur, il lui tira dessus une fois, puis deux avant qu'elle ne s'écroule.

- Tam ! Prend la caisse avec les autres, je vous couvre !

Cette fois, il prenait son tour, il n'avait plus la force de soulever ces énormes trucs, ses bras souffraient et ses mains tremblaient à cause des efforts qu'il avait dû fournir. Ne pas mourir. Survivre. A tout prix. Il jeta finalement un coup d'oeil vers l'endroit où il avait vu la mère de son fils disparaître mais il se doutait que c'était trop tard. Pourvu qu'elle ne se relève jamais...

Il n’était plus là. Durant d’interminables minutes, elle le chercha dans la foule. Non, pas encore… Autour d’elle, des silhouettes chancelantes s’avançaient vers elle. Elle était en train de perdre pied, de sombrer dans la terreur la plus totale. Cette peur qui tétanise, qui empêche d’avancer. Elle n’avait plus que son arme pour se défendre, mais elle était incapable de tirer… Une nouvelle fois, elle prit une grande bouffée d’air et pressa la détente plusieurs fois, visant comme elle pouvait. Elle toucha à plusieurs reprises une première créature qui ne tomba que lorsqu’elle prit une balle en pleine tête. Elle reproduit la même chose pour une autre de ces choses… A cette vitesse, elle n’aurait plus beaucoup de munitions. Elle devait se ressaisir. Mais seule au milieu de tout ça, elle en était incapable…

Elle entendit alors sa voix. Il l’appelait. Il criait son prénom. Il était revenu pour la sauver. Mais elle comprit rapidement que quelque chose clochait. Il lui hurla de se baisser. Elle hésita un instant, puis en le voyant pointer son arme vers elle, en entendant le râle repoussant dans son dos, elle fit ce qu’il lui avait demandé, se laissant tomber lourdement au sol. Là, elle prit conscience de l’horreur de ce spectacle sanglant. Des cadavres… Il y en avait plusieurs autour d’elle… Certains semblaient toujours vivant… Elle releva alors les yeux vers Arthur. Il était revenu pour la protéger, comme il l’avait promis. Mais là aussi, le voir tirer ainsi sur l’un de ces monstres, la marqua énormément. Son regard avait changé, il n’était plus le même. Ce n’était plus l’homme qu’elle connaissait. Elle… Elle avait l’impression de voir un inconnu.

Mais… Celui qu’elle connaissait si bien revint rapidement vers elle.  Elle se releva alors qu’il s’approchait d’elle. Il la prit dans ses bras et elle ne put s’empêcher de s’accrocher à lui. Ce qui venait de se passer l’avait chamboulé. Dans sa gorge, une boule se forma alors qu’il s’excusait de l’avoir laissée là, seule. Ses doigts se refermèrent encore un peu plus sur lui. L’envie de pleurer la gagnait peu à peu mais elle fit son possible pour ne pas craquer. Non, il n’avait pas à être désolé… « Je… Je n’ai pas fait attention… J’ai, j’ai trébuché… Et… Je ne te voyais plus… Ça… Ça va. Je n’ai rien… » Elle aurait aimé rester là, accrochée à lui… Parce qu’ainsi blottit dans ses bras, la peur se faisait moins présente, parce qu’il lui redonnait du courage. Mais encore une fois, sa voix sonna le glas de la fuite. Ils devaient rejoindre les camions, retrouver les autres. Il l’entraîna encore avec lui puis brusquement l’étranger refit son apparition. L’expression de son visage avait changé, elle avait beau chercher… Elle avait du mal à le reconnaître. Même sa voix ne semblait plus être la même. Dans ses mots, l’espoir semblait avoir disparu. Qu’allaient-ils devenir ?

Puis il lui souffla un « je t’aime », une main sur sa joue. Non, il était toujours là celui qu’elle aimait… Elle aurait aimé lui répondre, lui dire qu’elle l’aimait aussi mais elle n’arrivait plus à parler. Il l’embrassa alors, brièvement. Mais cela suffit à lui donner la force de continuer. Il lui demanda d’avancer vers le camion, il serait derrière elle, il la protégerait… Il quitta son rôle d’époux pour reprendre celui de soldat, de guerrier… Puis il sonna le départ de la course…

Elle se mit alors à courir, aussi vite qu’elle pouvait, se concentrant sur le camion. Mais elle ne put s’empêcher de se retourner vers lui, pour s’assurer qu’il allait bien. Rien qu’une fraction de seconde, pour être certaine qu’il était toujours près d’elle. Malheureusement, en détournant de nouveau son regard vers le véhicule elle aperçut que d'autres visages morbides étaient en approche. Elle visa alors avec son arme puis tira de nombreuses fois. Deux corps tombèrent, encore.

Elle arriva près du camion. Arthur ne tarda pas à la rejoindre… Là, il se mit de nouveau à proclamer quelques paroles pour remotiver ses troupes. Elle l’observa un instant jusqu’à ce que leurs regards se croisent. Elle n’arrivait pas à s’y faire… Elle n’aimait pas le voir comme ça… Mais elle n’avait pas le temps de se préoccuper de ça. A son tour, elle se mit à tirer, aidant Arthur à couvrir le reste du groupe. Elle fit deux nouvelles victimes… A croire qu’elle s’améliorait à force de tirer…

« Encore un petit effort, on va y arriver! »

Plein de mots très encourageants dans lesquels je ne crois qu'à moitié. En tout cas, j'essaie de me montrer la plus convaincante possible quand je les dis à l'attention de la mère de Josh qui se trouve juste à côté de moi. Je tente d'avoir les yeux partout. Je dois faire attention à tout ce qui se passe. Enfin, je ne suis pas la seule bien entendu. On doit tous le faire. Regarder où l'on marche pour éviter de se prendre les pieds dans les cadavres sur lesquels on est forcés de marcher pour avancer vers la sortie, surveiller que ceux avec qui on se déplace sont toujours là et n'ont pas trop de mal à suivre, veiller à ce qu'aucun de ces foutus rôdeurs ne s'approchent de trop. Et j'en passe, parce que je n'ai pas vraiment envie de me mettre à faire une liste de tout ce que chacun d'entre nous a à faire en ce moment même. Je tends le bras et en moins de temps qu'il n'en faut pour le dire, je tire une balle dans le crâne de chacun des deux rôdeurs qui s'approchaient. Encore une fois, je remercie mon père pour m'avoir appris à me servir d'une arme. J'avoue que je n'aurais jamais imaginé que ça puisse me servir pour autre chose que pour me défouler sur un champ de tir. Je tourne la tête et vois Hope qui se redresse grâce à l'aide de Josh, puis nous reprenons notre fuite de plus belle. Ah oui, j'ai oublié de dire aussi que je garde un oeil plus qu'attentif sur Hope, en plus du reste. Je ne dis pas que je n'en ai rien à faire si les autres ne parviennent pas à s'enfuir, mais pour moi le plus important c'est que ma meilleure amie sorte d'ici saine et sauve.

« Ils chargent des camions. Faut leur filer un coup de main, ils ont sûrement des vivres avec eux, je pense pas qu'ils prennent le temps d'emmener des trucs inutiles. »

En réalité je me parlais plus à moi-même à voix haute qu'à quelqu'un en particulier. Pourtant la mère de Joshua me répondit que je n'avais pas tort, sa phrase entrecoupée par ses halètements dus à son épuisement. C'était compréhensible après tout. Elle n'avait plus vingt ans non plus. D'un coup, j'entendis la fille de Daryl dire à sa mère qu'il y en avait un qui approchait. J'allais me précipiter pour aider Hope, Daryl et Josh quand je vis du coin de l'oeil une femme et son fils en train de se recroqueviller après être tombés. Bien vite, je vis un rôdeur s'approcher d'eux. J'allais tirer une balle quand je me suis rappelée que le chargeur était vide. Merde. Je glissais rapidement le Beretta entre mon dos et la ceinture de mon pantalon avant de sortir le couteau de chasse que j'avais accroché à ma cuisse grâce à un holster récupéré dans l'armurerie. L'attaquer au corps à corps était la seule solution qu'il me restait à présent si je voulais vraiment les aider. Je me suis donc précipitée vers eux, n'ayant que le temps de projeter le rôdeur au sol en le plaquant de toutes mes forces. Sauf que je me suis retrouvée par terre également, légèrement plus sonnée que le macchabée qui se fit un malin plaisir à tenter de venir me croquer. Sans réfléchir plus que cela, j'esquivais de justesse un coup de dents avant de planter la lame de mon couteau sous le menton de mon adversaire du moment. Il ne fallut pas très longtemps pour que son corps cesse toute activité. Le seul souci c'est qu'au passage je me suis fait très mal à la cheville et un peu au poignet en tombant. Mais bon. Je me redressais lentement, essuyant le sang qui se trouve sur mon visage avant de tendre la main vers la mère et son fils pour les aider à se remettre debout à leur tour. Je vis le jeune poser son regard sur mon couteau ensanglanté que je venais de ranger dans mon holster.

« T'apprendras bien assez vite mon p'tit. Maintenant traînez pas, barrez-vous. Vous avez eu de la chance que je vous vois alors gâchez pas ça. Vite! »

Ils détalèrent bien vite et je jetais quelques rapides coups d'oeil autour de moi avant de recharger mon arme au plus vite et de rejoindre de nouveau mon groupe au pas de course. A nouveau j'avais du sang qui coulait sur mon visage, mais ce n'était toujours pas le mien, fort heureusement. Rapidement, j'étais de retour auprès de Hope et les autres. Avec un peu de chance ils ne m'ont même pas vue m'éclipser. Je lâche un juron avant de me remettre à avancer.

« J'sais pas pour vous mais moi je compte pas utiliser toutes mes balles sur ces trucs et pour rien. Alors on ferait mieux de pas rester plantés là. »

Je passais peut-être pour une briseuse d'ambiance ou je ne sais quoi. Mais au moins, c'était clair. Et vrai. Si on continuait de rester ici à se reposer sur nos lauriers, on finirait bien rapidement en goulache. Et puis Hope aussi venait de le dire. On n'a pas de temps à perdre. Il fallait que l'on se remette en route. Qu'on ait des affaires pour survivre, même s'il fallait les voler aux autres qui sont dans les camions et qui voudraient tout garder pour eux.

Dans ses bras, sa meilleure amie tremblait comme une feuille. Les mots rassurants qu'elle avait tenté de lui délivrer avec calme n'avaient pas eu l'effet escompter. Qu'était-elle sensée faire dans ce genre de moment ? Réagir à l'instinct plutôt que de tenter de réfléchir ? La jeune femme aux cheveux courts l'avait bien dit, elle venait mais sans son bras. Ces mots avaient été reçu comme un impact de balle dans son cerveau, les éclats de métal brûlaient son esprit et elle était incapable de réagir.

« Qu... No... » Hachait la brune, perché entre rêve et réalité et elle ne savait pas si elle était audible. Mais un croisement de regard avait suffi à Kassandra pour comprendre qu'elle voulait bien, sans avoir besoin de hocher la tête. Elle levait finalement les yeux vers un homme qui tenait une hache. Elle regarda la hache, plus aussi sur que cela du choix dans son ami.

« Vous la loupez pas hein... » Marmonna t-elle, une lueur de défit dans le regard. Elle ne savait pas réellement si c'était le stress, mais elle n'avait pas aussi confiance que les autres dans les talents du grand homme. Quoiqu'il avait l'air assez confiant avec sa hache... Malgré son appréhension et sa peur qui ne cessait de grandir, elle suivit le mouvement en pressant l'épaule de son amie. Qu'aurait-elle fait si Dante n'avait pas été présent pour soutenir June ? Elle serait certainement rester en haut des gradins, dans le danger et la cohue, et elle serait morte. Une image désagréable d'elle déambulant dans les gradins, ensanglantés et le regard vide, manqua de lui couper le souffle et de lui donner la nausée quelques secondes plus tard. Mais ce qu'elle allait voir maintenant, ça allait être bien pire.

« June, June. Regarde-moi. Ça va bien se passer, j'te le jure. » À continuer à faire des promesses de merde qu'elle ne tiendrait pas, elle allait finir par en mourir de chagrins. Mais Kassandra n'en était pas à faire attention à tout ça. Elle voulait rassurer June qui marmonnait toujours des mots incompréhensibles avant de lâcher un okay résigné. Le genre d'accord qui venait de déchirer quelque chose en elle... Contrairement à June à qui elle demanda de fermer les yeux après avoir caler entre ses dents son écharpe pour qu'elle puisse mordre, elle regarda toute la scène. Elle vit lentement la puissante hache s'abattre sur le bras de sa plus chère amie, tranchant net celui-ci dans une giclée de sang tout aussi peu agréable. Elle sursauta, violemment, et fut prise de violentes nausées alors qu'elle plaquait sa main libre sur sa bouche pour réfréner cette envie. Le corps frêle de June se crispa brutalement en arrière, de tel façon qu'elle eut du mal à la retenir uniquement avec son autre bras et qu'elle en oubliant son envie de dégueuler. Le hurlement venait d'être étouffée par l'écharpe alors qu'elle serrait la jeune femme dans ses bras en se forçant de ne pas regarder le sang qui commencer à s'écouler de la plaie, non du moignon... Impossible. Comment pouvait-elle avoir accepter ça ? Pour le droit de vivre quelques années de plus, dans un monde prêt à s'effondrer ? Elle entendit la voix de plusieurs personnes et perçut l'une d'elle, celle d'une jeune femme aux cheveux décolorés, ce qui la réveilla et l'obligea à agir en conséquence pour faire le plus tôt possible un garrot. « June. June. Ça va. C'est... C'est... C'est fi... Fini. » À part serrer le plus fort possible le tissu, elle savait qu'il fallait à tout prix cautériser et elle regarda autour d'elle pour demander de l'aide pour la suite. Elle ne remercierait jamais assez l'homme avec la hache pour avoir été là pour secourir son ami... Aurait-elle réussi, elle, à couper net le bras de sa copine qui... « June ? JUNE ? » Les hurlements avaient cessé, et c'était à peine si elle l'avait remarqué dans ce brouhaha de tirs et de cris. Elle s'était juste évanouie hein ? Juste ?

- Reste avec nous…

Combien de fois Christina avait-elle répété ces trois mots à Alan au cours de ces dernières heures ? L’avait-il écoutée ? Jamais. Et elle n’avait jamais trouvé d’autres arguments pour le faire rester. Parce qu’il y avait tant de gens à sauver, tant de vivres à récupérer, tant à faire, tout bêtement. Ainsi était-il reparti, l’abandonnant au fond d’un camion dans lequel ils espéraient s’enfuir. Mais tout se passait trop lentement au goût de l’hôtesse de l’air. Pourquoi devaient-ils récupérer ces caisses ? Comment pouvaient-ils penser à leur survie future, quand ils ignoraient déjà s’ils pourraient sortir de là ?

- On n’a pas le temps ! Répétait ainsi la femme en boucle, en observant la menace de plus en plus oppressante. Mais encore une fois, personne ne l’écoutait. Sa voix ne portait pas comme celle de Gary, sa stature n’en imposait pas une seconde.

Sa frustration était à son comble, si bien qu’elle sauta en dehors du camion pour essayer de faire avancer la cadence. Elle récupéra une caisse, et la haussa avec l’aide de d’autres pour la charger à l’arrière des véhicules. Avant de se ruer vers une seconde. Son Beretta avait été abandonné depuis longtemps, vidé de ses balles qu’elle avait tenté de planter inutilement dans le thorax d’un infecté. L’activité occupait une partie de son esprit, mais l’urgence restait là ! Ses nerfs étaient à vif, et visiblement ils n’étaient pas les seuls ! En effet, à peine quelques minutes plus tard, la voix d’Alan lui parvenait, alors qu’il déversait un flot de colère sur son fils. D’autant plus inattendu que le scandinave ne s’énervait jamais. Jamais ! Ce fut la douche froide. Elle le vit ainsi agripper le jeune homme avec une force qu’il ne contrôlait pas, pour le trainer jusqu’à elle. Ses yeux s’arrondirent, comme si elle ne le reconnaissait plus. Avec une pointe d’effroi, elle l’avait vu se réveiller ce matin en vaillant viking, puis se transformer progressivement en un guerrier sanguinaire. Il était recouvert d’hémoglobine et achevait ces pauvres gens malades sans le moindre scrupule. Elle aurait pu lui répondre sur le même ton, mais la vérité était qu’il lui faisait peur…

Elle le laissa ainsi s’excuser sans un mot, le corps raide, et le vit repartir à la même seconde. Ses yeux marron croisèrent ceux de Sven, tout aussi effaré qu’elle.

- Remonte dans le camion, dit-elle d’une voix éraillée, en posant une main sur son bras avec douceur. Elle voyait dans son regard qu’il se retenait, du haut de ses vingt années, pour ne pas pleurer. On va réceptionner les caisses de là-haut.

Elle se hissa à sa suite, et ils poussèrent les quelques caisses présentes et aidèrent à attraper celles que d’autres leur tendaient. Parfois c’était un enfant qui tendait les bras vers elle et qu’elle aidait à monter dans le camion. Elle aperçut ainsi Alan revenir vers eux et l’observa du coin de l’œil, alors qu’il s’entretenait avec Nara. Son attention fut détournée par une nouvelle caisse qui arrivait. Elle aida Sven à la caler près des autres, et quand elle reposa ses yeux en contrebas, elle ne croisa que le regard de Rebecca, qui lui fit un léger signe. Elle ne vit pas son mari jouer au médecin de champ de bataille.

Un instant plus tard, ils avaient chargé plusieurs caisses et il paraissait de plus en plus évident qu’ils avaient fait le tour de tout ça. Il était temps d’embarquer pour de bon les vivants… en espérant survivre.

- Venez, montez ! Dépêchez-vous ! Cria-t-elle ainsi à Isabel que se tenait devant le véhicule.

Elle lui tendit la main pour l’aider a grimper.