Un vrombissement lui avait fait lever le visage vers le ciel, alors qu'elle observait les premiers hélicoptères quitter le sol, lui donnant l'étrange impression qu'un poids tombait dans sa poitrine. Après tout ce temps passé auprès d'eux, les militaires quittaient le navire, et chacun devait prier pour espérer pouvoir s'en sortir. Les cheveux balayés par la bourrasque alors qu'elle observaient certains visages qu'elle avait connu au cours de sa vie ici, tenter de forcer le passage pour tenter de récupérer les vivres abandonnées à même le sol. Sauf que pour le coup... Elle ne se voyait absolument pas tenter de risquer sa peau pour une couverture et trois conserves qu'allaient s'arracher jalousement toute une bande de suicidaires. Norman compressant son bras pour ne pas perdre sa mère d'un millimètres, alors qu'elle le tirait vers elle pour éviter de croiser un nouveau malade. Courir, reprendre leur souffle, courir. Elle ne savait même plus comment Hope et elle avaient trouvé le moyen de se perdre de vue.

Rose !

Dans la mêlée, elle avait tout juste eu le temps de relever le regard avant que sa meilleure amie ne lui saute dans les bras. Perdue dans cette marée de morts et de vivants, ne sachant plus vraiment ou donner de la tête. Elle lui rendit son étreinte une demi seconde à peine alors que l'ex mannequin, blanche comme un ligne, débitait sans reprendre son souffle.

Faut qu'on s'tire de là en vitesse, sinon on est tous morts. Ton mec te cherche partout.
Il est vivant ?

Pourquoi avait-elle cette désagréable sensation d'être en état de choc ? Parce qu'elle avait vu un pauvre gars - Keith, avait hurlé une nana non loin - se faire dévorer vivant ? Parce que le monde qu'elle avait toujours connu et dont elle menait la barre était en train de s'effondrer dans le sang et les cris ? C'était ça, le monde que connaîtrait son fils désormais ? Sans doute que oui. Elle était toujours aussi sonnée, alors que Lara continuait de crier pour se faire entendre, quand elle remarqua le malade dans son dos qui s'approchait. Une demi seconde, l'hispanique croisa le regard laiteux de l'homme, si elle pouvait encore l'appeler ainsi. Elle n'avait plus cherché à comprendre, quand ce dernier avait eu cet espèce de râle qui lui glaça le sang, avant qu'elle ne bouscule sa meilleure amie sur le côté, l'empêchant d'être happée par la chose.

Cours !

Juste le temps de l'aider à se relever, que le trio s'était à nouveau mis à reprendre leur course infernale dans la direction que Lara lui avait indiqué, maintenant crispé entre ses mains le colt qu'elle gardait chez elle le soir à l'époque ou elle avait été harcelé par son ex petit ami. Pendant une demi seconde, Rose avait vraiment cru qu'elles allaient s'en sortir et qu'elle pourrait rejoindre son mari. Que tout finirait par s'arranger, même dans un monde comme celui-ci. Mais comme à chaque fois qu'elle avait eu l'impression de sortir la tête hors de l'eau, le destin trouva intéressant de la forcer à replonger dans le chaos. Elle avait juste senti la main de Norman lâcher la sienne une seconde, alors qu'elle faisait volte face pour chercher son fils du regard et comprendre qu'il ne l'avait pas quitté par pure volonté. Planter son piquet de tente dans le torse du malade ne lui fit pas grand chose, mais au moins, eu le mérite de faire basculer l'infecté en arrière alors qu'elle récupérait Norman en le prenant dans ses bras. Lui murmurant de fermer les yeux, alors qu'elle se retournait pour constater que si à un moment, le stade s'était partagé entre morts et vivants, désormais la donne avait largement été inversée. Lara avait disparue de la circulation, et bien qu'elle hurla son nom, elle ne se sentit jamais aussi perdue qu'en cet instant précis. Aucun visage n'était plus amical désormais, et le peu de vie qui continuait de palpiter autour d'elle mourrait sur les visages des civils qui n'avaient pas eu la chance d'échapper aux morts, se faisant dévorer vivant.

Sans doute que ce serait bientôt la fin, mais il était hors de question que son fils ne s'en rende compte. Reculant d'un pas pour se diriger dans la direction opposé au malade qui continuait de se traîner dans leur direction, attirant le convoitise des autres de son espèce, cherchant une échappatoire sans grand succès.
Il y avait forcément un moyen de s'en sortir, il le fallait.

Et si elle devait y rester, son fils au moins devrait s'en sortir. Dieu ne pouvait pas être cruel à ce point.

Enfin ! Enfin ils en venaient à bout, enfin ils s'apprêtaient à partir. Quelques minutes de plus ! C'est tout ce qu'il fallait ! Les dernières caisses arrivaient et ceux à l'extérieur des véhicules ainsi que ceux qui sont à l'intérieur chargeaient aussi vite qu'ils pouvaient. Ils s'en sortiraient, tous. Comme certains survivants, Ed fit le tour du secteur, rien à signaler. Chacun s'affairait à détruire les infectés qui approchaient un peu trop de leur périmètre de sécurité. Puis vint les hurlements et l'appel à l'aide. De nombreux survivants tournèrent le nez vers la source des cris mais personne ne réagit aussi vite qu'Ed, qui, insouciant, s'était lancé jusqu'aux survivants qui réclamaient l'intervention de quelqu'un.

Le fauconnier s'arrêta quelques instants pour comprendre la scène qui se jouait. Est-ce que les deux autres agressaient l'homme ou tentaient-ils de te retenir ? En entendant les éclats de voix et surtout les mots hurlés, l'homme sentit son coeur se serrer. On annonçait à son ami qu'il venait de perdre sa femme et son fils. Hésitant le temps de trois secondes , après avoir repensé à son ex compagne qui s'était fait mordre sous son nez, Edwin prit finalement la décision d'intervenir. Dans le dos du brun déchaîné, il s'approcha rapidement et passa les bras sous ses aisselles, bloquant alors les mouvements de ses siens serrant les dents et donnant ses dernières forces pour le traîner en arrière, loin des malades qui s'agglutinaient déjà autour d'eux.

- Gary ! LA FERME ! Arrête !

L'employé de zoo cherchait à calmer la fureur du père mais il savait bien que ça ne marcherait pas. Évidemment, perdre sa famille, c'était désastreux alors dans les conditions actuelles, ça l'était encore plus. Le michiganais comprenait parfaitement mais ce n'était pas une raison. Serrant plus fortement sa prise, Ed haletait. L'adrénaline aidait grandement dans ce gens de situations mais bordel que c'était compliqué de tenir bon quand on était à bout. Ce n'est pas pour autant qu'il abandonnait et lâchait prise, d'autant que les compagnons du dément aidait l'ornithologue à emmener de force jusqu'aux camions. Putain c'est qu'il cassait les couilles à tirer dans le sens inverse. On ne pouvait pas lui en vouloir mais il mettait toute la troupe en danger à hurler comme un con. Cet imbécile rameutait tous les ennemis vers eux.

- Arrête ! Arrête, putain !

Ed ne voyait pas l'expression de Gary, il ne pouvait pas voir les différentes émotions qui brillaient dans les yeux de l'homme et c'était tant mieux car il se savait assez bête pour l'aider à foncer dans le tas pour retrouver sa compagne et leur enfant. Non, vraiment, heureusement qu'il ne pouvait pas le voir en face.

Pourtant, plus ils approchaient du camion, plus le fauconnier avait l'impression que son captif redoublait d'efforts pour s'enfuir. Que faire ? Que faire ?! Réfléchissant à toute allure, Ed eut une idée à la fois stupide et brillante. Pour empêcher son ami de lutter il fallait le neutraliser. S'il lui donnait un simple coup de boule, ça le sonnerait à peine et il reprendrait sa rebellion alors que le coup de crosse de son flingue... Evidemment, s'il ne controlait pas son coup, il pourrait lui briser le crâne, pas assez fort, là encore ça le sonnerait alors que bien réglé... Non, ça restait trop dangereux... Mais il le fallait.

Finalement, Ed soupira. S'il lâchait le monsieur, il était persuadé que ce dernier foncerait tout de suite dans le tas. Dégainant son arme, il frappa, d'un coup, d'un seul, le crâne de son comparse. Il eut l'impression que le survivant lutta avant d'enfin s'écrouler. Le fauconnier observa les regards consternés des amis du ronchon et haussa les épaules. Aidé de l'autre homme et des gens dans le camion, ils hissèrent le corps inanimé à bord. Laissant enfin le temps au duo de grimper ainsi que le chien que le soigneur remarquait que maintenant, il tira une fois sur un bouffeur d'humain pour l'achever avant de monter à son tour, tapant contre la carrosserie pour signifier à Tam, au volant, qu'il était prêt à partir.

S'approchant du corps endormi, Ed posa ses doigts dans la gorge de Gary, cherchant son pouls. Soupir de soulagement. Il vivait encore ce con.

Alors que les autres semblaient déjà tous avoir une tâche à accomplir pour se rendre utile, il n'y avait que lui qui restait là à ne rien faire. Il pensa alors à sa moto qui lui avait été confisquée et mise au garage à son arrivée. Dire que la laisser là l'embêtait était un euphémisme, cette bécane qu'il avait mis tant d'années à économiser pour se la payer, tant d'années à bosser comme un malade et à danser à poil sur scène. Mais bon, la survie avant tout non ?  Avant que quelqu'un ne lui dises quoi faire, le jeune homme se décida à prendre les devants et saisit une caisse au sol pour la ranger avec d'autres dans le camion. Au passage il remarqua la jeune blonde au béret, plutôt discrète, aller aider à neutraliser des infectés. Discrète peut-être mais elle tirait plutôt bien la p'tite !

Au même moment il voyait la jeune femme inconsciente transportée par ses amies, tout avait l'air normal hormis le fait qu'elle avait juste un bras en moins... La suite semblait plutôt inquiétante mais bon ça lui permettrait au moins de savoir s'il y a  moyen de prévenir l'infection ou pas. Curieux comme toujours il sauta dans le même camion que la p'tite infirme. En plus c'était la tatouée qui conduisait, seule personne qu'il à qui il avait adressé la parole jusque-là, une potentielle alliée ? Un seul moyen de le savoir. Quoiqu'il en soit les personnes présentes à l'arrière du camion étaient toutes au chevet de l'éclopée, auraient-ils la force de la descendre si leur théorie s'avérait fausse ? Dans le cas contraire, lui n'aurait aucune hésitation. Parce que oui peut-être lui avaient-ils sauvé la vie mais un bras coupé était loin d'être quelque chose d'anodin et désinfecter la plaie avec un chiffon de fortune aussi stérile qu'un préservatif usagé et de la tequila trouvée pas chère à Wallmart n'empêcheraient probablement pas une éventuelle infection limite plus grave.

Oui, la jeune femme dont le nom était June si ses oreilles ne l'avaient pas trahi avaient de grandes chances de devenir un problème sérieux pour les heures à venir... Où cela allait-il les mener ? La survie mais à quel prix ? Survivre avant tout. D'une manière ou d'autre autre. Mais survivre. Toutes ces questions dansaient dansaient dans son esprit, occupant ses pensées. Le bruit sourd du corps inanimé du fameux Gary qui gueulait depuis le début des ordres le sortit de sa torpeur. Le blond qu'il avait croisé au tout début de tout cirque était toujours vivant. Véritable héros de cette histoire qui n'avait peur de rien et était prêt à tout pour sauver ses amis, tout l'opposé de Kurtis qui sourit à le voir monter à son tour dans le camion, fermant la marche.

Soudain un bruit de de moteur vint se mêler avec ceux tirs et des râles des morts vivants, il était temps de dire adieu à CenturyLink...