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Reese - Whatever you are be a good one
Lun 25 Avr 2016 - 18:08
28 yo • Américaine • Avocate • Travelers
J'me sens d'humeur philosophe ce soir. Ça fait longtemps que j'ai pas eu quelqu'un a qui parler...
On peut débuter là et parler de comment l'enfer change n'importe quel personne sur terre. Comment côtoyer des morts nous fait mourir nous aussi, à l'intérieur. Je vais pas dire que c'était pas couru d'avance. J'ai longtemps espérer que les âmes les plus pures arrivent à survivre, avant de me rendre compte que c'est elles qui se font bouffer en première. Mais faut croire que le mal, c'est comme la gangrène. Il se cache dans des détails insignifiants dont on avait pas tenu compte dans un premier temps et nous prend à la gorge avant même qu'on se rende compte que ça nous gratte.
Je devrais arrêter de vous baver des conneries de ce genre pour en venir directement au fait : J'vais pas vous dire que j'étais déjà préparer à devenir le repas le plus apprécier du coin, ça serait vous mentir. On comprend pas même quand ça nous tombe sur la pomme. Mais j'ai lu tellement de livres en tout genre de paranoïaques fantasmant sur la fin du monde que quand toute cette merde a commencé à nous éclabousser, j'ai pas été la plus prise de court. On peut pas en dire autant de mes voisins qui ont, au sens propre comme au figuré, assez mal tournés. Je viens d'un coin ou si t'es pas débrouillarde de base, t'es sûr de mal finir. Alors j'peux dire que la vie en elle-même m'a formée pour que je devienne une survivante.
C'est un peu ce que j'ai toujours fait. Survivre, je veux dire. Je vais pas m'en plaindre parce que je sais que tout aurait pu être pire. J'crois que c'est également l'une des phrases que je dis le plus : "ça aurait pu être pire". Quoi qu'on en dise, savoir que je pourrais être le quatre heure du type à la sale gueule me fait apprécier les petites choses de la vie plus facilement. Avant, j'avais l'impression de pas vivre. D'être en pause, constamment. Genre, comme si je voyais ma ligne de vie défiler devant mes yeux sans pouvoir y prendre part. Vivre dans une peur indicible et invisible finalement, une peur propre au commun des mortels qu'on a réussi à nommer "Névrose" pour faire propre sur le papier. Aujourd'hui, même si notre situation est carrément pas enviable, être le potentiel repas de la quasi-totalité de la population mondiale m'a fait prendre conscience d'énormément de choses. La première, c'est que j'ai de très bonnes raisons aujourd'hui d'avoir peur et de fuir.
Mais surtout que j'ai pas envie de mourir. En soi, c'est déjà une bonne nouvelle. Disons que j'ai moins envie de crever en me faisant becter par un pauvre type qu'a pas été foutu de courir plus vite. J'l'aurais trop mauvaise. La seconde, c'est que même si je déteste les Hommes en générale en tant que bonne misanthrope convaincue, je suis moins dérangée par leur conversation maintenant que les autres sont plus capables d'aligner deux mots. Ça peut même me manquer, parfois. Enfin pas trop, parce que faire la route seule en volant deux trois bouquins de ci de là pour passer le temps, c'est aussi vachement mieux qu'un débat politique sur comment on est censé survivre tous ensemble.
Je suis pas faite pour la vie de groupe. Et on pourra vous certifier qu'être constamment avec moi, ça n'a rien de très simple. Moi, pénible ? Moi, compliquée ? Si peu. J'ai juste des principes d'indépendances qui sont importants pour moi. Et pour lesquels je pourrais m'emporter et me battre pour de vrai. Ma vie, ma liberté, ma dignité, et celles des gens qui rentrent dans ma sphère, sont précieuses. Surtout maintenant que la population a drastiquement réduite et que je deviens également un gibier d'un autre type. Les joies d'un bond prodigieux en arrière dans tous les acquis et les batailles qu'ont mené les féministes jusqu'à nos sombres jours...
Je savais de toute façon, il n'y aurait que certaine catégorie de gens parmi les survivants : Les psychopathes qui n'hésitent pas à tuer et qui s'en amusent même en se cachant derrière l'idée qu'il n'y a plus de règles, donc tout se justifie. Les paranoïaques que je mets avec les misanthropes, qui, en fréquentant assez peu les gens en générales avaient forcément moins de chances d'en croiser et donc plus de se démerder pour survivre. Les rats et les parasites, qui vivent aux dépends des faux-héros. J'fais partie des misanthropes et des rats. Cachés bien en évidence au milieu du monde. Mais comment j'aime pas vraiment être assimilée à un animal pas forcément valorisant, je préfère être une souris. C'est de la même graine mais en plus mignon.
Tu me trouves cynique ? Ça se pourrait bien. On a besoin du cynisme pour vivre ici, tu sais ?
Bon, c'était une chouette conversation, mais je ferais mieux de filer. J'ai piscine.
A toute.
On peut débuter là et parler de comment l'enfer change n'importe quel personne sur terre. Comment côtoyer des morts nous fait mourir nous aussi, à l'intérieur. Je vais pas dire que c'était pas couru d'avance. J'ai longtemps espérer que les âmes les plus pures arrivent à survivre, avant de me rendre compte que c'est elles qui se font bouffer en première. Mais faut croire que le mal, c'est comme la gangrène. Il se cache dans des détails insignifiants dont on avait pas tenu compte dans un premier temps et nous prend à la gorge avant même qu'on se rende compte que ça nous gratte.
Je devrais arrêter de vous baver des conneries de ce genre pour en venir directement au fait : J'vais pas vous dire que j'étais déjà préparer à devenir le repas le plus apprécier du coin, ça serait vous mentir. On comprend pas même quand ça nous tombe sur la pomme. Mais j'ai lu tellement de livres en tout genre de paranoïaques fantasmant sur la fin du monde que quand toute cette merde a commencé à nous éclabousser, j'ai pas été la plus prise de court. On peut pas en dire autant de mes voisins qui ont, au sens propre comme au figuré, assez mal tournés. Je viens d'un coin ou si t'es pas débrouillarde de base, t'es sûr de mal finir. Alors j'peux dire que la vie en elle-même m'a formée pour que je devienne une survivante.
C'est un peu ce que j'ai toujours fait. Survivre, je veux dire. Je vais pas m'en plaindre parce que je sais que tout aurait pu être pire. J'crois que c'est également l'une des phrases que je dis le plus : "ça aurait pu être pire". Quoi qu'on en dise, savoir que je pourrais être le quatre heure du type à la sale gueule me fait apprécier les petites choses de la vie plus facilement. Avant, j'avais l'impression de pas vivre. D'être en pause, constamment. Genre, comme si je voyais ma ligne de vie défiler devant mes yeux sans pouvoir y prendre part. Vivre dans une peur indicible et invisible finalement, une peur propre au commun des mortels qu'on a réussi à nommer "Névrose" pour faire propre sur le papier. Aujourd'hui, même si notre situation est carrément pas enviable, être le potentiel repas de la quasi-totalité de la population mondiale m'a fait prendre conscience d'énormément de choses. La première, c'est que j'ai de très bonnes raisons aujourd'hui d'avoir peur et de fuir.
Mais surtout que j'ai pas envie de mourir. En soi, c'est déjà une bonne nouvelle. Disons que j'ai moins envie de crever en me faisant becter par un pauvre type qu'a pas été foutu de courir plus vite. J'l'aurais trop mauvaise. La seconde, c'est que même si je déteste les Hommes en générale en tant que bonne misanthrope convaincue, je suis moins dérangée par leur conversation maintenant que les autres sont plus capables d'aligner deux mots. Ça peut même me manquer, parfois. Enfin pas trop, parce que faire la route seule en volant deux trois bouquins de ci de là pour passer le temps, c'est aussi vachement mieux qu'un débat politique sur comment on est censé survivre tous ensemble.
Je suis pas faite pour la vie de groupe. Et on pourra vous certifier qu'être constamment avec moi, ça n'a rien de très simple. Moi, pénible ? Moi, compliquée ? Si peu. J'ai juste des principes d'indépendances qui sont importants pour moi. Et pour lesquels je pourrais m'emporter et me battre pour de vrai. Ma vie, ma liberté, ma dignité, et celles des gens qui rentrent dans ma sphère, sont précieuses. Surtout maintenant que la population a drastiquement réduite et que je deviens également un gibier d'un autre type. Les joies d'un bond prodigieux en arrière dans tous les acquis et les batailles qu'ont mené les féministes jusqu'à nos sombres jours...
Je savais de toute façon, il n'y aurait que certaine catégorie de gens parmi les survivants : Les psychopathes qui n'hésitent pas à tuer et qui s'en amusent même en se cachant derrière l'idée qu'il n'y a plus de règles, donc tout se justifie. Les paranoïaques que je mets avec les misanthropes, qui, en fréquentant assez peu les gens en générales avaient forcément moins de chances d'en croiser et donc plus de se démerder pour survivre. Les rats et les parasites, qui vivent aux dépends des faux-héros. J'fais partie des misanthropes et des rats. Cachés bien en évidence au milieu du monde. Mais comment j'aime pas vraiment être assimilée à un animal pas forcément valorisant, je préfère être une souris. C'est de la même graine mais en plus mignon.
Tu me trouves cynique ? Ça se pourrait bien. On a besoin du cynisme pour vivre ici, tu sais ?
Bon, c'était une chouette conversation, mais je ferais mieux de filer. J'ai piscine.
A toute.
Je ne suis pas très grande, mais est-ce vraiment important ? J'ai l'habitude de me dire que les talons aident à compenser ce que la nature ne me donnera pas. Par contre, cette dernière a eu la sympathie de me donner un corps assez enviable. Je ne suis pas bien grosse, mais j'ai des formes, et fut un temps ou je m'en servais lors des soirées un peu trop arrosées. A côté de ça, j'ai une longue crinière brune et bouclée, qui s'emmêle systématiquement. J'ai arrêté d'essayer d'en faire quelque chose quand j'ai compris que mes cheveux ont leur propre envie, et mode de pensées, et qu'un jour ils gouverneront le monde. Ou un truc du genre.
Je ne sais pas si je ressemble plus à ma mère ou à mon père, vu que je ne les connais pas, mais je suis sûre que l'un des deux avait les iris noirs, très sombres, et des petits yeux en amandes. On me dit souvent que j'ai une bouille sympathique, souvent surmonté d'un petit sourire cynique. Armé de mon meilleur humour (ou en tout cas, j'aime le croire), mes expressions ont tendance à facilement filtré sur mon visage.
Je n'ai pas de style particulier, par contre. Je m'habille selon mes envies, mes humeurs. Enfin, habituellement, c'est plutôt un jean et des bottes avec un pull simple, selon la saison, ou des robes d'été lorsque le beau temps revient. Maintenant, je ne suis plus certaine qu'un jour, j'aurais l'occasion de reporter une jupe ou des talons, mais il ne faut jamais perdre espoir.
Je ne sais pas si je ressemble plus à ma mère ou à mon père, vu que je ne les connais pas, mais je suis sûre que l'un des deux avait les iris noirs, très sombres, et des petits yeux en amandes. On me dit souvent que j'ai une bouille sympathique, souvent surmonté d'un petit sourire cynique. Armé de mon meilleur humour (ou en tout cas, j'aime le croire), mes expressions ont tendance à facilement filtré sur mon visage.
Je n'ai pas de style particulier, par contre. Je m'habille selon mes envies, mes humeurs. Enfin, habituellement, c'est plutôt un jean et des bottes avec un pull simple, selon la saison, ou des robes d'été lorsque le beau temps revient. Maintenant, je ne suis plus certaine qu'un jour, j'aurais l'occasion de reporter une jupe ou des talons, mais il ne faut jamais perdre espoir.
Je suis née dans le coin. Enfin... Je crois. Tout du moins, c'est ce qu'on m'a dit quand j'ai été en âge de demander. Et vu que personne savait vraiment d'où je venais ni de qui, j'ai vite été obligé d'arrêter de poser des questions, malgré mon envie d'en savoir plus... Chose assez courante quand on grandit dans un foyer ou un RTC qui ramasse des gamins sortant de dieu sait où. Je me suis faite une raison. Et avec un effort d'imagination, j'ai su combler les trous de mon histoire : Je faisais partie de ces petits êtres non-désirés, non-attendus, issus de l'union de deux anonymes qui ne savaient comment s'occuper de moi... Poétique, non ? Alors que la vérité, en elle-même, l'est beaucoup moins. Ma mère n'était probablement qu'une bêcheuse, à moitié droguée qui ouvrait trop facilement les jambes, tombée enceinte avant sa majorité mais ne voulant surtout pas le dire à papa maman pour pas avoir de problème... J't'en foutrai des problèmes, moi. Et mon père, un pauvre type qu'est probablement décédé d'une overdose peu de temps après. Ou d'un autre truc de camé, sans intérêt finalement. Là encore, je me suis faite une raison.
Au milieu de tous ces gosses à problèmes sans buts dans la vie, des raisons, j'ai toujours su en trouver. J'en avais à la pelle, me servant à justifier un peu tout et n'importe quoi. J'étais peut-être pas la plus mal lotie au milieu de ces échantillons d'emmerdes en puissance. Ouais, j'porte pas dans mon coeur tous ces gens qui m'ont vu grandir et que j'ai côtoyé pendant toutes ces années. Mais faut dire ce qui est, j'avais jamais vraiment trouvé ma place au milieu de ces gosses à problème qu'avaient des crises d'identités existentielles... J'étais plutôt du genre à me foutre dans mon coin avec un livre à la main, à aller voir ailleurs si l'herbe était plus verte. Elle l'était, définitivement. Et c'était pas bien dur d'avoir autre chose à offrir qu'un lit dégueulasse dans un bâtiment qui tombe en ruine.
C'est sûrement parce que j'étais déjà aigrie par la vie qu'on a jamais voulu me sortir de tout ça. Et aussi parce qu'à part pour dire des gros mots, je l'ouvrai pas beaucoup. Au fond, j'étais un peu comme une bête blessée, qui se terrait dans son coin pour pas avoir à faire au monde. Et ma blessure, un énorme égo meurtri qui m'avait contrainte, une grande partie de mon enfance, à ne pas vouloir me mêler aux autres et à me construire seule. Je trouvai refuge dans les livres, de petits comme de grands auteurs, qui m'offraient à chaque fois mille réponses à une question. Grâce a eux, j'ai fini par me faire une raison pour un peu tout, j'ai fini par comprendre pourquoi et à me dire que "parce que". Mais comme tout, ça laisse des séquelles. Les miennes ont marqués chacune de mes décisions, faisant de moi une belle névrosée.
Mais, je peux pas dire, j'ai pas eu de bons moments là-bas. J'y ai compris la vie à coup de poings, à coup de griffes. J'y ai appris l'amitié le plus simplement possible, bien loin du monde perché qu'on regardait de nos fenêtres. J'y ai appris à me défendre comme une sacrée furie. Je connaissais le monde de la rue, embarquée à chaque fois avec des compères de fortune, sur le bout de mes dix doigts. J'ai volé, j'ai frappé, été frappé, mais j'ai jamais pleuré. Toujours la tête haute derrière mes airs chétifs. Et quoiqu'on en dise, j'ai été une gamine sacrément heureuse parce que j'avais au moins une personne pour croire en moi.
Moxley.
Celui qui a été mon meilleur ami, et qui a su tirer dans la merde le meilleur de moi. Nous étions toujours ensemble et depuis mes dix ans, et ses treize ans pour lui, nous connaissions tout l'un de l'autre. Moxley était arrivé à ses douze ans, avec son petit frère, Jonathan. D'une famille visiblement à problème, puisque son père avait fini par tuer sa mère à force de coups sous les yeux de ses gamins avant que la police n'intervienne, alertée par l'appel d'un voisin un peu trop concerné par la survie des gosses de la famille Good.
Moxley Good n'a jamais aussi mal porté son nom, puisque depuis ce soir là et bien avant finalement, ce qu'il y avait de bien en lui avait toujours eu du mal à ressortir. J'aimais à croire que j'y arrivais pour ma part, à le rendre meilleur, et sûrement que je me berçais de faux espoirs en tentant de construire et réparer quelque chose qui nous appartenait à tous les deux. Le temps a passé, Moxley est parti en premier sans jamais cessé de revenir pour son frère et pour moi. Il y eut cinquante aventure dans ces moments-là, des aventures troublantes comme amusantes qui me changeaient de mon quotidien et qui auraient du me mettre la puce à l'oreille, cinquante moment au téléphone où il me racontait ce qu'il faisait pour travailler et pour se payer son appartement, et les quelques problèmes qu'il pouvait avoir. Moxley avait sa fierté, il se refusait à demander de l'aide, et refusait encore plus d'admettre qu'il en avait besoin.
C'est ce qui a tout gâché, mais fondamentalement, ça n'arrive que plus tard.
A mes dix-huit ans, on m'a foutu à la porte avec un sac et dix dollars pour un repas. En m'disant que j'aurais qu'à en faire ce que je voulais. On pouvait s'en douter, mais j'étais seule et terrifiée, et aucun des bouquins que j'avais tant aimé lire ne m'aurait sauvé la mise à ce moment-là. Heureusement, il y avait Moxley. Il m'a ramené chez lui, là au rendez-vous sans que je n'ai à le lui demander, et m'a laissé quelques jours pour me retourner. C'est durant la deuxième semaine dans sa piaule misérable qu'est né ma vocation et mon désir de carrière : quand je suis revenue un soir avec un boulot minable de serveuse et une feuille d'inscription aux cours de droit de l'université de Seattle. La tête de mon ami devant cette annonce valait bien ce moment, bien que ma décision donnait l'impression de n'être qu'un coup de bluff, elle n'empêcha pas la crise et une séance d'explication suivante. Moxley finit par accepter que je continue dans cette voie et de me soutenir encore comme il l'avait toujours fait.
A cette période là, j'avais à peine dix huit ans et je ne connaissais pas grand chose à la vie, Moxley et moi, nous nous sommes mis ensemble. Comme un vrai couple, et comme nous avions toujours été jusque là. Amour de jeunesse ? A cette époque, j'aimais croire qu'on était fait pour s'aimer et encore plus que j'arrivais à l'apaiser. C'était parfois vrai. Parfois seulement. Le temps se décomposa alors ainsi, entre Moxley, le travail et mes études, où nous arrivions plus ou moins les premiers temps à venir à bout du loyer et des factures. Le sommeil se fit rare, et on s'en sortait difficilement. Jonathan finit par nous rejoindre, chercha du travail aussi et prit son indépendance en choisissant consciemment de s'éloigner de son frère après une discussion dont je n'eus jamais les détails. Ni l'un ni l'autre n'accepta d'en parler avec moi, l'un estimant qu'il n'avait pas le temps ou que ce n'était pas grave, l'autre que ce n'était pas à lui de me le dire.
C'est à la fin de ma licence de droit que je compris que cette séparation entre les deux frères n'étaient pas anodine. Je m'en doutai, certes, mais je n'envisageai pas les proportions que ça pouvait sérieusement prendre. Jonathan avait coupé les ponts avec son aîné, un an plus tôt, sans chercher plus loin. Depuis ma deuxième année de droit, nous vivions sensiblement mieux Moxley et moi, au point où je n'étais plus obligée d'enchaîner les services au restaurant tout en révisant mes cours le reste du temps. On s'en tirait à bon compte, parce que Mox' en faisait plus que nécessaire, et j'avais confiance en lui.
Je me souviendrais toujours de cette discussion avec le policier qui l'avait arrêté et des charges qui pesaient sur lui. Je me souviendrais longtemps de l'odeur de sueur et de cigarette flottant dans le couloir où j'attendais depuis des heures, des allées et venues des policiers devant moi sans jamais qu'ils ne me regardent vraiment. De ces avocats en costume miteux sortant avec un client sous le bras, ou sans, et de leurs calvities bien entamées. Et du moment où on était venu m'annoncer de but en blanc que mon petit ami était un dealer, violent, et si nous vivions « si bien » tous les deux, c'était en partie grâce à son magnifique travail dont il m'avait si peu parlé. J'aurais du m'en douter. Travailler dans le bâtiment, c'était beau, mais ça ne remplissait pas si bien l'assiette à notre niveau. Et ça collait pas.
Mais je tombai des nues pour tout dire. J'avais fixé mon vis-à-vis qui m'interrogeait sur le pourquoi du comment je ne savais rien de tout ça et je ne me doutais de rien. Comment est-ce que je n'avais pu ne pas m'en rendre compte. Peut-être parce qu'il connaissait un Moxley qui m'était inconnu. Même si j'avais toujours su pour cet aspect violent qui couvait en lui, pour son caractère enflammé, je ne pensais pas qu'il tomberait dans l'illégalité alors que justement il connaissait la vocation à laquelle je me vouais.
J'ai du mal à comprendre comment une fille comme vous peut être avec un homme comme lui, m'avait dit le flic en me regardant de haut en bas. Le regard que je lui lançais traduisait parfaitement l'incompréhension que je ressentais. Nous venions du même endroit lui et moi, nous étions faits du même bois. Que l'on soit ensemble était une évidence qui crevait les yeux. Il m'expliqua alors de quoi il en retournait : Ils le connaissaient depuis des mois. Ils n'attendaient que de pouvoir l'arrêter, et ce soir Moxley s'en était pris à un type qui refusait de payer et à qui il avait infligé une petite correction. Le type en question était à l'hôpital, avec la main cassée et des côtes fêlées. Moxley, lui, allait être inculpé pour coups et blessures, revente de drogues, et d'autres charges diverses qu'on voulait lui coller sur le dos.
Et moi, j'étais là comme deux ronds de flan, humiliée comme jamais par la seule personne en qui j'avais jamais eu confiance.
Vous voulez le voir ?
Non.
Je voulais m'enterrer dans un coin, dans un trou, sans fond, et ne plus jamais en ressortir. Je ne voulais plus le voir, plus entendre parler de lui, plus jamais savoir qu'il pouvait exister quelque part. Je ne voulais pas savoir comment il allait, ni ce qu'il faisait. Ni où on l'amenait pour les inculpations et compagnie.
A l'aube, je retrouvais mon chez moi et ma « routine » drastiquement bousculée par ces révélations. Dans notre appartement, il y avait trop de nous que je ne pouvais plus supporter. Sans réussir à me défaire de ses affaires, à devoir continuer en doublant mes horaires aux restaurants pour un salaire misérable, en sacrifiant un peu plus mon sommeil et ma santé pour terminer mes études et réussir le barreau. Je crois que me consacrer à cette survie là m'aida à passer le cap de la séparation avec Moxley. Même si Jonathan revint me voir pour prendre de mes nouvelles, je crois que couper les ponts avec la famille Good était la chose à faire, quand bien même Jon n'avait rien à voir avec tout ça.
A mes vingt quatre ans, je passais le barreau pour le réussir du premier coup. Ces nuits blanches consacrées, cette spécialisation en droit pénal comme pour me mettre un peu plus le nez dedans et m'obliger à ne plus jamais me laisser avoir, tout ça, c'était finalement pas pour rien. Je pus commencer à exercer avec quelques stages de ci de là, m'usant encore quelques années avant de faire partie de la liste des commis d'office au commissariat. Inutile de prétendre à rentrer au bureau du procureur de Seattle vu que je n'étais que madame personne malgré mes résultats plus qu'appréciables. Les postes de stagiaires comme d'assistants furent très vite pris par des collègues de l'université, et souvent des collègues fils ou filles de. Pas pour moi.
Les premiers temps furent une véritable galère. Je réussis à rentrer dans un petit cabinet d'avocats, Stone & Calvin, un peu frileux qui ne décollait pas vraiment mais qui avait des affaires. Des boulots misérables, mais avec lesquels je me suis formée, décidée, appliquée, toujours. J'ai pu lâcher mon job au restaurant pour me consacrer à mon travail, bien que la vie ne fut pas rose du tout. Je perdais du poids, j'étais épuisée, mais bosser me permettait de ne pas trop réfléchir à tout le reste, et de toute façon j'en avais besoin pour boucler mes fins de mois. La fatigue m'aidait à être plus sèche et déroutante dans mes plaidoiries comme dans mes interrogatoires, et je compris vite que c'était ce qu'il fallait pour continuer. Cynique et implacable. J'étais peut-être toute neuve chez les commis d'offices, mais je commençais à me faire ma réputation progressivement.
Le soir de mes vingt six ans, je fus appeler pour représenter un jeune homme qu'on accusait d'avoir tuer sa petite amie. J'avais plusieurs dossiers qui traiter de crimes divers, mais rarement des aussi violents. Je représentais des jeunes en difficultés la plupart du temps, des petits voleurs pas très habiles, mais les flics m'appelaient rarement pour des meurtres sans doute parce qu'ils avaient fini par me connaître, même par m'apprécier, et qu'ils voulaient m'épargner ça. Fallait croire que ce soir là, j'étais la seule disponible, même pour mon anniversaire. J'avais aussi une vie assez pathétique disons.
Les choses se déroulèrent comme à leurs habitudes : je pris connaissance du dossier et des photos de la scène sur la route dans le bus avant de rejoindre mon client. Le crime avait été violent, le corps de la victime avait de quoi choquer des personnes sensibles, mais en débarquant et en croisant le regard de ce gosse d'à peine vingt ans qu'on accusait de la mort de sa copine, je fus comme prise d'une certitude criante : Jusqu'ici, je ne savais pas quoi en penser, m'attendant à un peu tout et rien, un peu sur mes gardes. Mais lui, celui que j'avais en face, était en larmes, terrifiés, encore couvert du sang de sa victime prétendue, et forcément innocent à mes yeux.
Sauf que les preuves contre lui étaient trop importantes. Il avait marché dans le sang, pris le corps de son amie dans ses bras, avait été trouvé sur les lieux du crime par les policiers, bref. Il s'était mis dans une merde monstrueuse. Et on m'avertit par avance que je me lançai dans une bataille probablement perdue d'avance, surtout que l'assistant du procureur se faisait déjà un plaisir de prendre l'affaire. Tout ne se passe pas évidemment en quelques jours, les procédures prennent du temps. Le transfert du suspect, le traitement de l'enquête, le début du procès. Déjà durant l'enquête, l'assistant du proc nous fit une proposition qu'il nous vendit comme la plus légère qu'il pouvait envisager. Perpet. Rien que ça. Il essuya un refus en s'enthousiasmant par avance de me confronter au procès.
C'était David contre Goliath, à la différence que David était une petite brune d'un mètre soixante avec un mauvais caractère. Et que Goliath portait un costard très cher aussi. Et comme il était hors de question que je me fasse rouler dessus, j'ai profité de tout ce que je pouvais pour obtenir tous les comptes rendus de l'enquête et de m'aventurer dans les archives. Je ne saurais dire combien de personnes je suis allée voir pour poser des questions, juste parce que j'avais la conviction intime que mon client n'avait rien fait même si tout était contre lui, mais en plus parce que le crime était trop spécifique pour être fait sous une impulsion ou pour n'être qu'un crime passionnel comme les policiers et le procureur voulaient le faire croire.
Mes recherches portèrent leurs fruits. En revenant lors d'une seconde confrontation avec une proposition à la clef de la part de l'assistant du procureur, Monsieur Baker, si lui n'avait pas les mains vides, moi non plus. Mais j'eus la surprise de voir que le procureur Harrington lui même voulait assister à cette entrevue, de quoi me mettre la pression. Mais sans attendre que l'un ou l'autre prennent la parole, je les ai laissé me contempler et leur exposer ce que j'avais trouvé. Deux autres crimes avec le même mode opératoire qui n'avaient pas eu de suite, ni des suspects très convaincant, donc pas de procès. Des crimes laissés pour compte qui correspondaient au mien. Les photos se succédaient pour comparer et avancer ce que je disais, mettant du poids dans ma balance. J'avais instillé un doute, raisonnable, mis en avant le fait que mon client s'était retrouvé au mauvais endroit au mauvais moment, avec d'autres éléments encore qui installèrent une certaine gêne dans la petite pièce où nous nous trouvions. Baker argua que ce n'était pas suffisant pour instaurer un doute raisonnable, le procureur avança la main vers les dossiers pour les lire plus attentivement. Et objecta qu'avec une défense rodée, ça l'était.
Il fut décidé de décaler le procès pour me laisser le temps de prouver ce que j'avançais pour voir si ça valait le coup de poursuivre mon client. Et je mis ce mois à profil.
En sortant du palais de justice ce jour-là, je bondis sur le premier type à la tête d'enquêteur que je croisai dans l'un des couloirs, comprenant au détour d'une conversation que j'avais écouté d'une oreille intrusive qu'il était agent du FBI. Inutile d'essayer de comprendre pourquoi je m'étais ruée sur lui en tentant de le convaincre de travailler avec moi, tout ce que vous devez savoir c'est que Shane Evans accepta après un harcèlement justifié de jeter un coup d'oeil à mon histoire et de voir ce que ça valait. Sans doute pour que je lui lâche la grappe. Ça porta ses fruits. D'une preuve en menant à une autre, ma théorie se vérifia progressivement et mon client fut écarté pour qu'on mène une seconde enquête. Même si j'aurais dû être retiré du dossier, le procureur me fit la faveur de m'y laisser pour la mener à son terme. Et suite à ça, il m'embaucha dans son cabinet pour que je travaille à ses côtés, arguant qu'il avait besoin d'une personne investie et bornée comme moi pour plaider.
Un grand tournant de ma vie.
Pas le dernier pourtant.
Au milieu de tous ces gosses à problèmes sans buts dans la vie, des raisons, j'ai toujours su en trouver. J'en avais à la pelle, me servant à justifier un peu tout et n'importe quoi. J'étais peut-être pas la plus mal lotie au milieu de ces échantillons d'emmerdes en puissance. Ouais, j'porte pas dans mon coeur tous ces gens qui m'ont vu grandir et que j'ai côtoyé pendant toutes ces années. Mais faut dire ce qui est, j'avais jamais vraiment trouvé ma place au milieu de ces gosses à problème qu'avaient des crises d'identités existentielles... J'étais plutôt du genre à me foutre dans mon coin avec un livre à la main, à aller voir ailleurs si l'herbe était plus verte. Elle l'était, définitivement. Et c'était pas bien dur d'avoir autre chose à offrir qu'un lit dégueulasse dans un bâtiment qui tombe en ruine.
C'est sûrement parce que j'étais déjà aigrie par la vie qu'on a jamais voulu me sortir de tout ça. Et aussi parce qu'à part pour dire des gros mots, je l'ouvrai pas beaucoup. Au fond, j'étais un peu comme une bête blessée, qui se terrait dans son coin pour pas avoir à faire au monde. Et ma blessure, un énorme égo meurtri qui m'avait contrainte, une grande partie de mon enfance, à ne pas vouloir me mêler aux autres et à me construire seule. Je trouvai refuge dans les livres, de petits comme de grands auteurs, qui m'offraient à chaque fois mille réponses à une question. Grâce a eux, j'ai fini par me faire une raison pour un peu tout, j'ai fini par comprendre pourquoi et à me dire que "parce que". Mais comme tout, ça laisse des séquelles. Les miennes ont marqués chacune de mes décisions, faisant de moi une belle névrosée.
Mais, je peux pas dire, j'ai pas eu de bons moments là-bas. J'y ai compris la vie à coup de poings, à coup de griffes. J'y ai appris l'amitié le plus simplement possible, bien loin du monde perché qu'on regardait de nos fenêtres. J'y ai appris à me défendre comme une sacrée furie. Je connaissais le monde de la rue, embarquée à chaque fois avec des compères de fortune, sur le bout de mes dix doigts. J'ai volé, j'ai frappé, été frappé, mais j'ai jamais pleuré. Toujours la tête haute derrière mes airs chétifs. Et quoiqu'on en dise, j'ai été une gamine sacrément heureuse parce que j'avais au moins une personne pour croire en moi.
Moxley.
Celui qui a été mon meilleur ami, et qui a su tirer dans la merde le meilleur de moi. Nous étions toujours ensemble et depuis mes dix ans, et ses treize ans pour lui, nous connaissions tout l'un de l'autre. Moxley était arrivé à ses douze ans, avec son petit frère, Jonathan. D'une famille visiblement à problème, puisque son père avait fini par tuer sa mère à force de coups sous les yeux de ses gamins avant que la police n'intervienne, alertée par l'appel d'un voisin un peu trop concerné par la survie des gosses de la famille Good.
Moxley Good n'a jamais aussi mal porté son nom, puisque depuis ce soir là et bien avant finalement, ce qu'il y avait de bien en lui avait toujours eu du mal à ressortir. J'aimais à croire que j'y arrivais pour ma part, à le rendre meilleur, et sûrement que je me berçais de faux espoirs en tentant de construire et réparer quelque chose qui nous appartenait à tous les deux. Le temps a passé, Moxley est parti en premier sans jamais cessé de revenir pour son frère et pour moi. Il y eut cinquante aventure dans ces moments-là, des aventures troublantes comme amusantes qui me changeaient de mon quotidien et qui auraient du me mettre la puce à l'oreille, cinquante moment au téléphone où il me racontait ce qu'il faisait pour travailler et pour se payer son appartement, et les quelques problèmes qu'il pouvait avoir. Moxley avait sa fierté, il se refusait à demander de l'aide, et refusait encore plus d'admettre qu'il en avait besoin.
C'est ce qui a tout gâché, mais fondamentalement, ça n'arrive que plus tard.
A mes dix-huit ans, on m'a foutu à la porte avec un sac et dix dollars pour un repas. En m'disant que j'aurais qu'à en faire ce que je voulais. On pouvait s'en douter, mais j'étais seule et terrifiée, et aucun des bouquins que j'avais tant aimé lire ne m'aurait sauvé la mise à ce moment-là. Heureusement, il y avait Moxley. Il m'a ramené chez lui, là au rendez-vous sans que je n'ai à le lui demander, et m'a laissé quelques jours pour me retourner. C'est durant la deuxième semaine dans sa piaule misérable qu'est né ma vocation et mon désir de carrière : quand je suis revenue un soir avec un boulot minable de serveuse et une feuille d'inscription aux cours de droit de l'université de Seattle. La tête de mon ami devant cette annonce valait bien ce moment, bien que ma décision donnait l'impression de n'être qu'un coup de bluff, elle n'empêcha pas la crise et une séance d'explication suivante. Moxley finit par accepter que je continue dans cette voie et de me soutenir encore comme il l'avait toujours fait.
A cette période là, j'avais à peine dix huit ans et je ne connaissais pas grand chose à la vie, Moxley et moi, nous nous sommes mis ensemble. Comme un vrai couple, et comme nous avions toujours été jusque là. Amour de jeunesse ? A cette époque, j'aimais croire qu'on était fait pour s'aimer et encore plus que j'arrivais à l'apaiser. C'était parfois vrai. Parfois seulement. Le temps se décomposa alors ainsi, entre Moxley, le travail et mes études, où nous arrivions plus ou moins les premiers temps à venir à bout du loyer et des factures. Le sommeil se fit rare, et on s'en sortait difficilement. Jonathan finit par nous rejoindre, chercha du travail aussi et prit son indépendance en choisissant consciemment de s'éloigner de son frère après une discussion dont je n'eus jamais les détails. Ni l'un ni l'autre n'accepta d'en parler avec moi, l'un estimant qu'il n'avait pas le temps ou que ce n'était pas grave, l'autre que ce n'était pas à lui de me le dire.
C'est à la fin de ma licence de droit que je compris que cette séparation entre les deux frères n'étaient pas anodine. Je m'en doutai, certes, mais je n'envisageai pas les proportions que ça pouvait sérieusement prendre. Jonathan avait coupé les ponts avec son aîné, un an plus tôt, sans chercher plus loin. Depuis ma deuxième année de droit, nous vivions sensiblement mieux Moxley et moi, au point où je n'étais plus obligée d'enchaîner les services au restaurant tout en révisant mes cours le reste du temps. On s'en tirait à bon compte, parce que Mox' en faisait plus que nécessaire, et j'avais confiance en lui.
Je me souviendrais toujours de cette discussion avec le policier qui l'avait arrêté et des charges qui pesaient sur lui. Je me souviendrais longtemps de l'odeur de sueur et de cigarette flottant dans le couloir où j'attendais depuis des heures, des allées et venues des policiers devant moi sans jamais qu'ils ne me regardent vraiment. De ces avocats en costume miteux sortant avec un client sous le bras, ou sans, et de leurs calvities bien entamées. Et du moment où on était venu m'annoncer de but en blanc que mon petit ami était un dealer, violent, et si nous vivions « si bien » tous les deux, c'était en partie grâce à son magnifique travail dont il m'avait si peu parlé. J'aurais du m'en douter. Travailler dans le bâtiment, c'était beau, mais ça ne remplissait pas si bien l'assiette à notre niveau. Et ça collait pas.
Mais je tombai des nues pour tout dire. J'avais fixé mon vis-à-vis qui m'interrogeait sur le pourquoi du comment je ne savais rien de tout ça et je ne me doutais de rien. Comment est-ce que je n'avais pu ne pas m'en rendre compte. Peut-être parce qu'il connaissait un Moxley qui m'était inconnu. Même si j'avais toujours su pour cet aspect violent qui couvait en lui, pour son caractère enflammé, je ne pensais pas qu'il tomberait dans l'illégalité alors que justement il connaissait la vocation à laquelle je me vouais.
J'ai du mal à comprendre comment une fille comme vous peut être avec un homme comme lui, m'avait dit le flic en me regardant de haut en bas. Le regard que je lui lançais traduisait parfaitement l'incompréhension que je ressentais. Nous venions du même endroit lui et moi, nous étions faits du même bois. Que l'on soit ensemble était une évidence qui crevait les yeux. Il m'expliqua alors de quoi il en retournait : Ils le connaissaient depuis des mois. Ils n'attendaient que de pouvoir l'arrêter, et ce soir Moxley s'en était pris à un type qui refusait de payer et à qui il avait infligé une petite correction. Le type en question était à l'hôpital, avec la main cassée et des côtes fêlées. Moxley, lui, allait être inculpé pour coups et blessures, revente de drogues, et d'autres charges diverses qu'on voulait lui coller sur le dos.
Et moi, j'étais là comme deux ronds de flan, humiliée comme jamais par la seule personne en qui j'avais jamais eu confiance.
Vous voulez le voir ?
Non.
Je voulais m'enterrer dans un coin, dans un trou, sans fond, et ne plus jamais en ressortir. Je ne voulais plus le voir, plus entendre parler de lui, plus jamais savoir qu'il pouvait exister quelque part. Je ne voulais pas savoir comment il allait, ni ce qu'il faisait. Ni où on l'amenait pour les inculpations et compagnie.
A l'aube, je retrouvais mon chez moi et ma « routine » drastiquement bousculée par ces révélations. Dans notre appartement, il y avait trop de nous que je ne pouvais plus supporter. Sans réussir à me défaire de ses affaires, à devoir continuer en doublant mes horaires aux restaurants pour un salaire misérable, en sacrifiant un peu plus mon sommeil et ma santé pour terminer mes études et réussir le barreau. Je crois que me consacrer à cette survie là m'aida à passer le cap de la séparation avec Moxley. Même si Jonathan revint me voir pour prendre de mes nouvelles, je crois que couper les ponts avec la famille Good était la chose à faire, quand bien même Jon n'avait rien à voir avec tout ça.
A mes vingt quatre ans, je passais le barreau pour le réussir du premier coup. Ces nuits blanches consacrées, cette spécialisation en droit pénal comme pour me mettre un peu plus le nez dedans et m'obliger à ne plus jamais me laisser avoir, tout ça, c'était finalement pas pour rien. Je pus commencer à exercer avec quelques stages de ci de là, m'usant encore quelques années avant de faire partie de la liste des commis d'office au commissariat. Inutile de prétendre à rentrer au bureau du procureur de Seattle vu que je n'étais que madame personne malgré mes résultats plus qu'appréciables. Les postes de stagiaires comme d'assistants furent très vite pris par des collègues de l'université, et souvent des collègues fils ou filles de. Pas pour moi.
Les premiers temps furent une véritable galère. Je réussis à rentrer dans un petit cabinet d'avocats, Stone & Calvin, un peu frileux qui ne décollait pas vraiment mais qui avait des affaires. Des boulots misérables, mais avec lesquels je me suis formée, décidée, appliquée, toujours. J'ai pu lâcher mon job au restaurant pour me consacrer à mon travail, bien que la vie ne fut pas rose du tout. Je perdais du poids, j'étais épuisée, mais bosser me permettait de ne pas trop réfléchir à tout le reste, et de toute façon j'en avais besoin pour boucler mes fins de mois. La fatigue m'aidait à être plus sèche et déroutante dans mes plaidoiries comme dans mes interrogatoires, et je compris vite que c'était ce qu'il fallait pour continuer. Cynique et implacable. J'étais peut-être toute neuve chez les commis d'offices, mais je commençais à me faire ma réputation progressivement.
Le soir de mes vingt six ans, je fus appeler pour représenter un jeune homme qu'on accusait d'avoir tuer sa petite amie. J'avais plusieurs dossiers qui traiter de crimes divers, mais rarement des aussi violents. Je représentais des jeunes en difficultés la plupart du temps, des petits voleurs pas très habiles, mais les flics m'appelaient rarement pour des meurtres sans doute parce qu'ils avaient fini par me connaître, même par m'apprécier, et qu'ils voulaient m'épargner ça. Fallait croire que ce soir là, j'étais la seule disponible, même pour mon anniversaire. J'avais aussi une vie assez pathétique disons.
Les choses se déroulèrent comme à leurs habitudes : je pris connaissance du dossier et des photos de la scène sur la route dans le bus avant de rejoindre mon client. Le crime avait été violent, le corps de la victime avait de quoi choquer des personnes sensibles, mais en débarquant et en croisant le regard de ce gosse d'à peine vingt ans qu'on accusait de la mort de sa copine, je fus comme prise d'une certitude criante : Jusqu'ici, je ne savais pas quoi en penser, m'attendant à un peu tout et rien, un peu sur mes gardes. Mais lui, celui que j'avais en face, était en larmes, terrifiés, encore couvert du sang de sa victime prétendue, et forcément innocent à mes yeux.
Sauf que les preuves contre lui étaient trop importantes. Il avait marché dans le sang, pris le corps de son amie dans ses bras, avait été trouvé sur les lieux du crime par les policiers, bref. Il s'était mis dans une merde monstrueuse. Et on m'avertit par avance que je me lançai dans une bataille probablement perdue d'avance, surtout que l'assistant du procureur se faisait déjà un plaisir de prendre l'affaire. Tout ne se passe pas évidemment en quelques jours, les procédures prennent du temps. Le transfert du suspect, le traitement de l'enquête, le début du procès. Déjà durant l'enquête, l'assistant du proc nous fit une proposition qu'il nous vendit comme la plus légère qu'il pouvait envisager. Perpet. Rien que ça. Il essuya un refus en s'enthousiasmant par avance de me confronter au procès.
C'était David contre Goliath, à la différence que David était une petite brune d'un mètre soixante avec un mauvais caractère. Et que Goliath portait un costard très cher aussi. Et comme il était hors de question que je me fasse rouler dessus, j'ai profité de tout ce que je pouvais pour obtenir tous les comptes rendus de l'enquête et de m'aventurer dans les archives. Je ne saurais dire combien de personnes je suis allée voir pour poser des questions, juste parce que j'avais la conviction intime que mon client n'avait rien fait même si tout était contre lui, mais en plus parce que le crime était trop spécifique pour être fait sous une impulsion ou pour n'être qu'un crime passionnel comme les policiers et le procureur voulaient le faire croire.
Mes recherches portèrent leurs fruits. En revenant lors d'une seconde confrontation avec une proposition à la clef de la part de l'assistant du procureur, Monsieur Baker, si lui n'avait pas les mains vides, moi non plus. Mais j'eus la surprise de voir que le procureur Harrington lui même voulait assister à cette entrevue, de quoi me mettre la pression. Mais sans attendre que l'un ou l'autre prennent la parole, je les ai laissé me contempler et leur exposer ce que j'avais trouvé. Deux autres crimes avec le même mode opératoire qui n'avaient pas eu de suite, ni des suspects très convaincant, donc pas de procès. Des crimes laissés pour compte qui correspondaient au mien. Les photos se succédaient pour comparer et avancer ce que je disais, mettant du poids dans ma balance. J'avais instillé un doute, raisonnable, mis en avant le fait que mon client s'était retrouvé au mauvais endroit au mauvais moment, avec d'autres éléments encore qui installèrent une certaine gêne dans la petite pièce où nous nous trouvions. Baker argua que ce n'était pas suffisant pour instaurer un doute raisonnable, le procureur avança la main vers les dossiers pour les lire plus attentivement. Et objecta qu'avec une défense rodée, ça l'était.
Il fut décidé de décaler le procès pour me laisser le temps de prouver ce que j'avançais pour voir si ça valait le coup de poursuivre mon client. Et je mis ce mois à profil.
En sortant du palais de justice ce jour-là, je bondis sur le premier type à la tête d'enquêteur que je croisai dans l'un des couloirs, comprenant au détour d'une conversation que j'avais écouté d'une oreille intrusive qu'il était agent du FBI. Inutile d'essayer de comprendre pourquoi je m'étais ruée sur lui en tentant de le convaincre de travailler avec moi, tout ce que vous devez savoir c'est que Shane Evans accepta après un harcèlement justifié de jeter un coup d'oeil à mon histoire et de voir ce que ça valait. Sans doute pour que je lui lâche la grappe. Ça porta ses fruits. D'une preuve en menant à une autre, ma théorie se vérifia progressivement et mon client fut écarté pour qu'on mène une seconde enquête. Même si j'aurais dû être retiré du dossier, le procureur me fit la faveur de m'y laisser pour la mener à son terme. Et suite à ça, il m'embaucha dans son cabinet pour que je travaille à ses côtés, arguant qu'il avait besoin d'une personne investie et bornée comme moi pour plaider.
Un grand tournant de ma vie.
Pas le dernier pourtant.
C'est plus gros que ce qu'on pense, Reese. La voix du procureur était préoccupée, comme les regards qu'il me jetait par-dessus ses lunettes. Quand les militaires viendront vous chercher pour évacuer votre quartier, partez avec eux, d'accord ? Nous fermons le cabinet, et tout, l'état va fonctionner comme il pourra pendant... Un temps indéterminé.
C'était parti de rien pourtant. Des anecdotes glissées dans une discussion, à la radio, à la télévision, des notes dans le journal, mais rien de fondamentalement dérangeant au commencement. C'était juste une tâche sombre dans notre champ de vision, prenant progressivement un peu plus d'ampleur. Tout était allé si vite et paradoxalement si lentement. Les premiers cas de violences diverses s'étaient éparpillés sur un ou deux mois, je ne saurais dire, avant que tout dégénère. On parlait de violence au début, puis des gens bizarres, puis d'une épidémie, puis il parait d'une pandémie. Difficile de savoir ce que ça faisait, d'où ça venait, les informations nous parvenaient de manière diffuses par instant, même si le procureur avec qui j'avais eu le temps de me lier au moins d'amitié m'avait prévenu que c'était plus grave et large encore que ce que laissaient entendre les médias. Que les affaires sur lesquelles je continuais à travailler allaient être ajournées pour un temps indéterminé.
Mais même avec tout ça, c'était très dur à comprendre. Je devais, comme des millions de personnes, mettre entre parenthèses ma vie et sans trop piger les conséquences que ça pouvait avoir. Qu'est-ce que ça voulait dire laisser de côté une affaire ? Des gens qui attendaient après la justice ? Pour moi, c'était nébuleux, si bien que le temps passa encore plus vite avant l'inévitable. Néanmoins, je ne tins pas compte des ordres tacites du procureur quand il me somma de partir avec les militaires. Oui, ils vinrent évacuer mon quartier, un peu dans l'urgence, mon immeuble se vida a une vitesse incroyable de ses habitants. Certains partirent seuls, d'autres se ruèrent vers les militaires. Humains comme "infectés" comme on les appelait. Mais au même moment, ce fut Jonathan qui vint me chercher pour m'amener à l'abri. Le cadet Good avait fait le déplacement jusqu'à chez moi, après des années sans se parler, pour que je ne sois pas seule.
Dans la précipitation, j'acceptai de m'enfuir avec lui et d'essayer de trouver un refuge adéquate. Pas question de se retrouver parqué avec des inconnus dans des « safe zone » instable pour lui. Digne de son frère. Et pour moi, c'était un peu la même, je ne savais pas trop comment envisager les choses. Les téléphones sonnèrent à ne plus en avoir de batterie, les lignes coupèrent avec l'eau finalement, les infectés remplirent les rues et se présentèrent à moi pour la première fois, me laissant impuissante face à l'étendue de la pandémie. En voiture, Jonathan m'amena jusqu'à la sortie de la ville, avant de bifurquer vers l'Est de l'état et rejoindre des agglomérations plus petites. On passa quelques jours sur les routes en duo, avant d'être accueilli par un petit groupe de survivants d'une dizaine de personnes tenant un motel en bord de route. L'électricité se coupa à ce moment là, nous mettant dans des conditions encore plus précaires. Mais nous avions une radio branchée à des batteries de voiture en état de marche pour tenter de capter les évolutions en ville et ce qu'il se passait. Si au début, les dites radios fonctionnaient encore, il n'y eut progressivement plus aucune fréquence, rien.
Juste rien.
J'appris à me défendre sur le tas. Faisant face à un phénomène nouveau et incompréhensible. Des morts qui marchaient, qui se relevaient et qui ne vivaient paradoxalement que pour nous dévorer. Dans la masse de Seattle, j'avais du en voir à travers la vitre de la voiture alors que Jon enfonçait l'accélérateur en essayant de mettre de la distance avec cette folie. Mais cette boucherie n'avait aucun sens et je n'y comprenais rien.
Le confort était devenu bien secondaire, les priorités devaient être revu. Viser la tête comme m'avait dit Louis à chaque fois qu'un infecté venait près de chez nous. Frapper une créature qui ressemblait à s'y méprendre à un homme mais qui n'en était plus un. Apprendre à se détacher de ces considérations. Il s'agissait d'un mort qui devait le rester. Louis avait, semble-t-il, de l'expérience en la matière. Et les premières semaines à devoir me faire à cette idée furent compliquées. Et puis... Nous avions peu d'armes mais à force de fouille et de pillage en tout genre pour trouver de quoi vivre, on parvint à s'équiper un minimum. Une hache de service, un pistolet de femme, un couteau abandonné,... Tout pouvait faire l'affaire, même si de ce côté là nous n'étions pas bien riches. Même encore aujourd'hui, j'ai l'impression que le monde pourrait repartir, que quelqu'un cherche une solution quelque part et que ça aura une fin.
Je réappris à connaître Jonathan au passage. Le frère de Moxley avait bien changé durant toutes ces années, et nous avions beaucoup à nous dire apparemment. Il s'était débrouillé jusqu'ici, était même allé voir son frère en prison durant les trois ans dont il avait écopé. Moxley était sorti, et n'avait pas cherché à me recontacté après que Jonathan lui ait dit que je ne voulais plus avoir à faire à eux, qu'importait qu'il ait changé ou non. Et il n'avait pas vraiment changé. Même si Jon semblait ne pas douter un seul instant que son frère se porte bien quelque part. Et à dire vrai, moi non plus.
Tout ça pour dire que Jonathan était probablement le pendant positif de la famille Good. Mais ça, c'était sans doute un passé révolu pour l'un comme pour l'autre, puisqu'il ne nous restait que nous deux pour continuer. Toutes les choses que nous avions connu avant avaient tout bonnement disparu. Plus de famille, plus d'institutions. Progressivement, le monde était devenu une zone de non-droit à mesure que le temps passait. Ca devait bien faire un mois que nous étions installé au motel quand notre groupe fut confronté à ce qu'on appelait une horde, et contraint de quitter notre abri. Avec la moitié des nôtres à terre après ça, en plein hiver. Jonathan manqua de se faire mordre ce soir-là et s'embrocha l'épaule dans une tige de métal, et ceux encore avec nous ne voulant pas s'encombrer d'un blessé pouvant mourir à tout instant d'une infection ou pire décidèrent de l'abandonner. Impossible pour moi de me résoudre à en faire autant, si bien qu'on resta finalement en arrière.
On trouva un abri dans une vieille maison abandonnée, le temps que Jonathan guérisse de sa plaie. Je fus contrainte de tout faire pour deux, son état se détériorant progressivement un peu plus. Ça plus le froid et la neige, le fait que nous n'étions plus que deux et que les rôdeurs étaient toujours plus nombreux dans les villes que nous évitions, le ravitaillement était de plus en plus compliqué et l'état de Jonathan ne s'améliorait pas. Je dus me mettre en danger pour récupérer une boite d'antibiotique, manquant de me faire déchiqueter pour lui. Mais à grand renfort de chance et d'endurance, je réussis à rentrer pour permettre à Jon de continuer avec moi. Être seule dans ce monde, ça serait tout bonnement insupportable. Il était la seule famille qui me restait.
L'hiver passa, avec lui la tempête qu'on essuya enfermé dans une maison mal isolée. Jon se remit doucement mais sûrement. Nous n'avions pas quitté notre abri de fortune, n'étions pas vraiment dans un bon état quand la neige commença à fondre. Même si celle-ci nous avait laissé tous les deux dans une relative tranquillité vis-à-vis des rôdeurs, au niveau du ravitaillement, c'était une toute autre paire de manches. Jon et moi étions contents de voir autre chose que du blanc, et contents de pouvoir aussi prendre le large de la piaule glaciale qu'on squattait depuis deux mois.
Il était temps de passer à autre chose, de trouver ou de construire autre chose. La belle saison s'annonce éprouvante de toute façon, et difficile de savoir combien de temps cette situation allait durer.
C'était parti de rien pourtant. Des anecdotes glissées dans une discussion, à la radio, à la télévision, des notes dans le journal, mais rien de fondamentalement dérangeant au commencement. C'était juste une tâche sombre dans notre champ de vision, prenant progressivement un peu plus d'ampleur. Tout était allé si vite et paradoxalement si lentement. Les premiers cas de violences diverses s'étaient éparpillés sur un ou deux mois, je ne saurais dire, avant que tout dégénère. On parlait de violence au début, puis des gens bizarres, puis d'une épidémie, puis il parait d'une pandémie. Difficile de savoir ce que ça faisait, d'où ça venait, les informations nous parvenaient de manière diffuses par instant, même si le procureur avec qui j'avais eu le temps de me lier au moins d'amitié m'avait prévenu que c'était plus grave et large encore que ce que laissaient entendre les médias. Que les affaires sur lesquelles je continuais à travailler allaient être ajournées pour un temps indéterminé.
Mais même avec tout ça, c'était très dur à comprendre. Je devais, comme des millions de personnes, mettre entre parenthèses ma vie et sans trop piger les conséquences que ça pouvait avoir. Qu'est-ce que ça voulait dire laisser de côté une affaire ? Des gens qui attendaient après la justice ? Pour moi, c'était nébuleux, si bien que le temps passa encore plus vite avant l'inévitable. Néanmoins, je ne tins pas compte des ordres tacites du procureur quand il me somma de partir avec les militaires. Oui, ils vinrent évacuer mon quartier, un peu dans l'urgence, mon immeuble se vida a une vitesse incroyable de ses habitants. Certains partirent seuls, d'autres se ruèrent vers les militaires. Humains comme "infectés" comme on les appelait. Mais au même moment, ce fut Jonathan qui vint me chercher pour m'amener à l'abri. Le cadet Good avait fait le déplacement jusqu'à chez moi, après des années sans se parler, pour que je ne sois pas seule.
Dans la précipitation, j'acceptai de m'enfuir avec lui et d'essayer de trouver un refuge adéquate. Pas question de se retrouver parqué avec des inconnus dans des « safe zone » instable pour lui. Digne de son frère. Et pour moi, c'était un peu la même, je ne savais pas trop comment envisager les choses. Les téléphones sonnèrent à ne plus en avoir de batterie, les lignes coupèrent avec l'eau finalement, les infectés remplirent les rues et se présentèrent à moi pour la première fois, me laissant impuissante face à l'étendue de la pandémie. En voiture, Jonathan m'amena jusqu'à la sortie de la ville, avant de bifurquer vers l'Est de l'état et rejoindre des agglomérations plus petites. On passa quelques jours sur les routes en duo, avant d'être accueilli par un petit groupe de survivants d'une dizaine de personnes tenant un motel en bord de route. L'électricité se coupa à ce moment là, nous mettant dans des conditions encore plus précaires. Mais nous avions une radio branchée à des batteries de voiture en état de marche pour tenter de capter les évolutions en ville et ce qu'il se passait. Si au début, les dites radios fonctionnaient encore, il n'y eut progressivement plus aucune fréquence, rien.
Juste rien.
J'appris à me défendre sur le tas. Faisant face à un phénomène nouveau et incompréhensible. Des morts qui marchaient, qui se relevaient et qui ne vivaient paradoxalement que pour nous dévorer. Dans la masse de Seattle, j'avais du en voir à travers la vitre de la voiture alors que Jon enfonçait l'accélérateur en essayant de mettre de la distance avec cette folie. Mais cette boucherie n'avait aucun sens et je n'y comprenais rien.
Le confort était devenu bien secondaire, les priorités devaient être revu. Viser la tête comme m'avait dit Louis à chaque fois qu'un infecté venait près de chez nous. Frapper une créature qui ressemblait à s'y méprendre à un homme mais qui n'en était plus un. Apprendre à se détacher de ces considérations. Il s'agissait d'un mort qui devait le rester. Louis avait, semble-t-il, de l'expérience en la matière. Et les premières semaines à devoir me faire à cette idée furent compliquées. Et puis... Nous avions peu d'armes mais à force de fouille et de pillage en tout genre pour trouver de quoi vivre, on parvint à s'équiper un minimum. Une hache de service, un pistolet de femme, un couteau abandonné,... Tout pouvait faire l'affaire, même si de ce côté là nous n'étions pas bien riches. Même encore aujourd'hui, j'ai l'impression que le monde pourrait repartir, que quelqu'un cherche une solution quelque part et que ça aura une fin.
Je réappris à connaître Jonathan au passage. Le frère de Moxley avait bien changé durant toutes ces années, et nous avions beaucoup à nous dire apparemment. Il s'était débrouillé jusqu'ici, était même allé voir son frère en prison durant les trois ans dont il avait écopé. Moxley était sorti, et n'avait pas cherché à me recontacté après que Jonathan lui ait dit que je ne voulais plus avoir à faire à eux, qu'importait qu'il ait changé ou non. Et il n'avait pas vraiment changé. Même si Jon semblait ne pas douter un seul instant que son frère se porte bien quelque part. Et à dire vrai, moi non plus.
Tout ça pour dire que Jonathan était probablement le pendant positif de la famille Good. Mais ça, c'était sans doute un passé révolu pour l'un comme pour l'autre, puisqu'il ne nous restait que nous deux pour continuer. Toutes les choses que nous avions connu avant avaient tout bonnement disparu. Plus de famille, plus d'institutions. Progressivement, le monde était devenu une zone de non-droit à mesure que le temps passait. Ca devait bien faire un mois que nous étions installé au motel quand notre groupe fut confronté à ce qu'on appelait une horde, et contraint de quitter notre abri. Avec la moitié des nôtres à terre après ça, en plein hiver. Jonathan manqua de se faire mordre ce soir-là et s'embrocha l'épaule dans une tige de métal, et ceux encore avec nous ne voulant pas s'encombrer d'un blessé pouvant mourir à tout instant d'une infection ou pire décidèrent de l'abandonner. Impossible pour moi de me résoudre à en faire autant, si bien qu'on resta finalement en arrière.
On trouva un abri dans une vieille maison abandonnée, le temps que Jonathan guérisse de sa plaie. Je fus contrainte de tout faire pour deux, son état se détériorant progressivement un peu plus. Ça plus le froid et la neige, le fait que nous n'étions plus que deux et que les rôdeurs étaient toujours plus nombreux dans les villes que nous évitions, le ravitaillement était de plus en plus compliqué et l'état de Jonathan ne s'améliorait pas. Je dus me mettre en danger pour récupérer une boite d'antibiotique, manquant de me faire déchiqueter pour lui. Mais à grand renfort de chance et d'endurance, je réussis à rentrer pour permettre à Jon de continuer avec moi. Être seule dans ce monde, ça serait tout bonnement insupportable. Il était la seule famille qui me restait.
L'hiver passa, avec lui la tempête qu'on essuya enfermé dans une maison mal isolée. Jon se remit doucement mais sûrement. Nous n'avions pas quitté notre abri de fortune, n'étions pas vraiment dans un bon état quand la neige commença à fondre. Même si celle-ci nous avait laissé tous les deux dans une relative tranquillité vis-à-vis des rôdeurs, au niveau du ravitaillement, c'était une toute autre paire de manches. Jon et moi étions contents de voir autre chose que du blanc, et contents de pouvoir aussi prendre le large de la piaule glaciale qu'on squattait depuis deux mois.
Il était temps de passer à autre chose, de trouver ou de construire autre chose. La belle saison s'annonce éprouvante de toute façon, et difficile de savoir combien de temps cette situation allait durer.
passeport :recensement de l'avatar. - Code:
Anne Hathaway <bott>Reese B. Maddox</bott>
recensement du prénom. (prénom utilisé uniquement)- Code:
Reese
recensement du nom. (nom utilisé uniquement)- Code:
Maddox
recensement du métier. - Code:
Avocate
Je sais pas si ça m’est déjà arrivé, enfin, on va essayer de ramasser tous les morceaux et de recommencer à zéro, ça va pas être facile mais on est tous ensemble maintenant et je me sens bien.
- Yulia Iojov
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Re: Reese - Whatever you are be a good one
Lun 25 Avr 2016 - 18:11
Oh oui, le retour de Reese avec son caractère tellement extra Bon retour avec elle
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Re: Reese - Whatever you are be a good one
Lun 25 Avr 2016 - 18:17
REEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEE *reprend son souffle* EEEEEEEEEEEEEEEEEEEEESE !!!!!!!!
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Re: Reese - Whatever you are be a good one
Lun 25 Avr 2016 - 18:18
TU DEFORMES PAS MA PAGE OH
♥ ♥ ♥
♥ ♥ ♥
Je sais pas si ça m’est déjà arrivé, enfin, on va essayer de ramasser tous les morceaux et de recommencer à zéro, ça va pas être facile mais on est tous ensemble maintenant et je me sens bien.
- Yulia Iojov
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Re: Reese - Whatever you are be a good one
Lun 25 Avr 2016 - 18:22
C'est super de revoir Reese! Je pensais pas que tu la reprendrais. Amuse toi bien avec ce perso!
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Re: Reese - Whatever you are be a good one
Lun 25 Avr 2016 - 18:42
Merci ♥
Elle me manquait **
Elle me manquait **
Je sais pas si ça m’est déjà arrivé, enfin, on va essayer de ramasser tous les morceaux et de recommencer à zéro, ça va pas être facile mais on est tous ensemble maintenant et je me sens bien.
- Yulia Iojov
The Exiles | Right Hand
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