Re: Event - When all Hope is gone

Cela avait été difficile, de faire ses adieux à une personne de plus. Silencieuse, elle était restée en retrait pour ne pas avoir à affronter la détresse de Lilou, ou celle des autres membres du campement. Ils avaient finalement repris la route, alors qu'elle s'était enroulée dans une couverture en s'étant persuadée qu'elle ne dormirait pas, encore sous le choc de l'attaque et de la mort de l'un des leurs. Les deux jours qui avaient suivi l'avaient amené à se refermer légèrement sur elle, essayant de calmer ses nerfs à vif pour ne pas s'en prendre à quelqu'un comme avait pu le faire Connor dans le Walmart.

Pourtant, elle avait finit par basculer dans un sommeil si abyssal, qu'il ne pouvait pas être signe de bonne santé. Ce fût un bruit assourdissant qui acheva de la réveiller. Encore une attaque ?
Elle n'eut pas le temps d'y réfléchir d'avantage, se sentant happé vers l'avant sans pouvoir se retenir à quoi que que soit.
Ah, si. Une barre de métal, directement dans sa tête.
Même la peur ne lui avait pas laissé l'occasion de crier, tant la scène s'était déroulé vite. A terre, sa tête semblait désormais prise dans un étau bien trop serré, alors qu'elle portait sa main à son front en grimaçant, essayant de retrouver ses esprits en même temps que la pulpe de ses doigts se teintait d'une couleur écarlate. Super...
Et les autres alors ? Un gémissement de douleur lui échappa alors qu'elle roulait sur le côté en essayant d'apercevoir les autres de sa vision floue. Putain de bordel de merde... C'était bien la première chose qui lui était venue à l'esprit pour résumer la situation. On aurait dû retirer son permis à Alan immédiatement, et ne l'autoriser à utiliser que des vélos, et encore. Tout le monde va bien ?

Non, visiblement pas. Elle avait peiné à se relever alors que la terre entière semblait tanguer autour d'elle. Elle ignora le filet de sang qui coulait le long de sa joue, bien qu'elle dût s'accrocher pour essayer de se relever. Tenir droite était désormais un effort surhumain alors que ses jambes semblaient refuser de porter son poids.

Connor... Elle avait murmuré le prénom de son frère d'une voix étouffée, alors qu'elle s'écroulait aux côtés de son aîné, remarquant l'angle incohérent de l'épaule. Merde...
Une épaule démise. C'était bien sa veine tiens... Ok, ok. Ludwig ? C'était le premier regard qui avait capté le sien dans tout ce bordel. Faisant signe à l'intello de se ramener, elle rajouta à l'attention des deux hommes. Il va falloir remettre ça en place. Tu peux aider ?

Pour une fois qu'il servirait à quelque chose tiens. Mais ça, elle se garda bien de le lui dire à voix haute.

Lors des derniers sacrements apportés à Edwin, Arthur était resté en retrait. Il ne partageait pas la douleur. Peut-être en avait-il trop pris pour Lincoln et Skyler déjà, sans oser le montrer. Peut-être qu'en vérité, la mort du fauconnier lui était douloureuse, mais qu'il était bien trop fier pour se montrer vulnérable. Ou alors, il n'en avait strictement rien à foutre. La réponse devait se trouver quelque part entre ces trois idées. Il respectait cependant Lilou, et Isabel qu'il savait proche du défunt.

Deux jours plus tard, ils avaient repris la route très tôt. Arthur n'avait certes que peu dormi de la nuit, mais il avait profité d'une longue sieste l'après-midi, laissant conduire son binôme en qui il avait confiance. Ainsi donc il se sentait en forme, et ce qu'ils avaient pu récupérer dans l'antre des porcelets avait eu le mérite de calmer sa faim.
Sur le coup de six heure, et encore dans la nuit pour une bonne heure, un bruit aussi violent que soudain retenti à travers le grondement des moteurs. Abel et Arthur se retournèrent immédiatement. Le sergent freina doucement pour ne pas perdre le contrôle.

Il observa la fin de la scène depuis son pick-up, totalement impuissant. Le camion venait de s'encastrer dans une épave... Et il comprit rapidement que le bruit qu'ils venaient d'entendre était celui d'un pneu de camion qui éclatait. Si de prime abord ses pensées allèrent aux dégâts matériels et aux emmerdes que pouvait causer la perte d'un camion, il se souvint rapidement qu'il était lui aussi chargé de gens.

" Merde de MERDE !! Putain pas ça.. ! "

Il sortit de la voiture comme une furie pour courir vers le camion. Elyse était dedans et, maintenant habitué aux catastrophes, il avait peur pour elle. Il avait peur pour eux, simplement. Il grimpa à l'arrière sans en demander la permission.

" Elyse ?!
C'est bon.. t'inquiète j'ai rien. Enfin si mais c'est pas grave.. Occupe toi de Quinn et de Connor .. ils ont morflé.. "

La soeur du sergent avait elle aussi pris un coup à la tête, mais elle ne saignait pas. Elle était juste secouée. Arthur se tourna vers Quinn qui était déjà devant Connor et son épaule.. démise. Digne d'un picasso, le tableau.

" Quinn ? Regarde moi.. Ca va ? "

Mais elle était déjà focalisée sur l'état de son frère, avec Ludwig. Et il ne pouvait que la comprendre. Arthur soupira et jeta un coup d'oeil aux autres. Certes il y avait de la casse, mais il y avait visiblement plus de peur que de mal. Ainsi il ressortit pour aller s'inquiéter de l'état d'Alan et de Christina. Elyse, quant à elle, tendit un mouchoir de tissu propre à Quinn.

" Ca m'étonne qu'un choc à la tête puisse te faire mal mais.. tiens. "

Elle lui adressa un petit sourire, quelque part à mi chemin entre moquerie et.. un peu de sympathie. Elyse avait certes des difficultés à supporter Quinn, mais là.. fallait pas déconner. Elles venaient de vivre un accident !

Nous étions repartis il y a deux jours déjà du Walmart, après une perte, un nouveau deuil à faire, plus difficile pour certains que pour d'autres mais ça ne changeait rien au fait que nous avions perdu l'un des nôtres et que le coup était difficile à encaisser. La fatigue avait continué à s'accumuler, et avec elle le manque d'attention, la nervosité relativement palpable dans le groupe. Tout le monde avait hâte d'arriver et espérait qu'il n'y aurait pas d'autres problèmes sur la route, mais l'espoir n'était plus permis par les temps qui courraient.

Dante avait finalement préféré rejoindre Kassandra pour le reste de la route alors que Christina avait pris la place de copilote. Je m'étais rappelé à de nombreuses reprises cette fois où nous étions partis du chalet, avec Sven ; mais il n'était plus là, et c'était toute une bonne partie du groupe qui faisait office de passager. Si je ne parlais pas trop avec mon épouse, le silence n'était pas réellement pesant, simplement nécessaire pour l'un comme pour l'autre ; encaisser le coup, laisser au temps l'opportunité de panser les plaies. Encore.

Concentré sur la route malgré la fatigue qui pesait de plus en plus, mon regard fut rapidement détourné de la route juste devant. Un bruit assourdissant, le camion que j'avais l'impression de ne plus contrôler. Les roues avaient chassé en un sens, tandis que je tentais de braquer dans l'autre. Contrôler un pneu crevé sur une route normale n'était pas un problème, mais sur une route verglacée... c'était un tout autre problème et, même si nous ne roulions pas vite, ça avait suffit pour je ne puisse rien retenir. Les secousses m'avaient semblé durer longtemps, bien trop longtemps jusqu'à ce que l'avant du camion ne rentre de plein fouet dans un véhicule arrêté au milieu. Les mains toujours sur le volant, je tournais immédiatement ma tête vers Christy, puis à l'arrière.

« Ça va ? Derrière tout va bien ? Personne n'a rien ?! »

Si la course folle du véhicule s'était enfin stoppée, la nervosité quant à l'état de mes pairs était bel et bien présente. Quelques secondes plus tard, alors que je descendais du véhicule, Dante et Kassandra arrivaient jusqu'à nous, la blonde criant de sa voix pleine d'inquiétude.

« Ca va. On va bien. »

Mais mes passagers ne semblaient pas tous aller aussi ''bien''. Me dirigeant rapidement vers l'arrière en compagnie de la modéliste, je hochais la tête en croisant le regard d'Arthur, signifiant de Christy et moi n'avions rien, pour me poster à l'arrière. Lançant un regard à chaque personne encore dans le camion, je bloquais sur l'épaule démise de Connor et du léger filet de sang qui marquait le visage de Quinn. Non. Ça n'allait pas.

BONG !

Ce fut le bruit de sa tête rebondissant contre le véhicule. Il fut totalement sonné durant quelques secondes. La douleur lui irradia tout le corps, si bien qu'il ne parvint pas à crier, ni même à gémir. Tout juste à papillonner des paupières. Il eut l'impression que son corps fondait avant de se crisper entièrement, et ce n'était pas une sensation agréable.
La voix de Quinn lui parvint avec peine. Il porta une main à l'arrière de son crâne mais n'y recueillit pas de sang, contrairement à ce qu'il pensait.
Il se leva cependant : la jeune femme avait sacrément bien volé dans le camion, elle devait souffrir le martyr.

- Oui. Oui, oui, je … je vais aider, balbutia-t-il alors qu'il avait l'impression que sa tête allait éclater.

Il secoua la tête dans l'espoir de retrouver l'usage de ses yeux qui partaient en vrille. En fait, il ne savait pas vraiment ce qu'il fallait remettre en place, mais il comptait sur Quinn pour le guider. Il n'arrivait même pas à savoir ce qu'il s'était passé, et peinait même à se resituer. Dans une sorte d'état second, il s'installa près de la jeune femme et regroupa toute sa concentration du monde pour agir comme il le fallait pour remettre l'épaule de Connor en place.
Arthur débarqua à cet instant, mortellement inquiet. Une autre voix s'éleva, celle d'Alan, pour demander si tout le monde allait bien.
Pour Ludwig, c'était mitigé : de petites tâches brunes venaient obstruer sa vision, et un bourdonnement douloureux lui vrillait les tympans. Mais il n'aurait pas pu dire que ça allait mal : Connor et Quinn était dans un bien pire état.
Il suivit donc les indications de la jeune femme pour venir en aide à son frère.

Christina et Alan sortirent du véhicule intact. La peur s'évapora une seconde alors qu'elle les suivait pour accéder à l'arrière du camion. Tout était sans dessus dessous, les hommes comme le matériel... Arthur s'était déjà engouffré à l'intérieur, et la blonde ne put voir distinctement ce qui s'était produit. Vu l'expression d'Alan qu'elle voyait dans la semi pénombre, elle jugea qu'il y avait des dégâts, et elle n'avait pas attendu plus d'une seconde pour s'engouffrer à l'intérieur et prendre la température du lieu...

Oh merde... Personne n'avait l'air mort, mais le sang qui tâché le visage pâle de Quinn montrait qu'elle avait eu un sacré coup à la tête. Elle semblait d'ailleurs chanceler un peu, mais elle n'était pas sûr. Elle essayait d'ailleurs de s'occuper de l'épaule de son frère... Qui était dans un angle très désagréable à voir. Elle grimaça mais s'approcha tout de même de la scène d'horreur sans pour autant envahir l'espace.

Il faut aussi qu'on s'occupe de ta tête Quinn, tu saignes beaucoup... Mais il était normal qu'elle souhaite d'abord soutenir son frère... Il allait falloir se tasser dans les autres camions, et répartir les ressources au mieux qu'il pourrait... Comme si tout ceci n'était pas suffisant, comme s'il fallait qu'ils meurent tous ici sur la route... Elle mordit l'intérieur de ses joues en pensant à Edwin, un ami à qui elle avait tenue, puis se concentra à aider quelques personnes sonnées à se relever, le temps que Quinn et Ludwig s'occupent de l'épaule du grand. Il était déjà bien amoché... Mais là... Et Quinn qui ne faisait pas attention à elle en premier, alors qu'elle était sûrement tout autant amoché... Elle fit descendre donc Nara et Rebecca avec l'aide de Buzz, pour qu'ils puissent reprendre leurs esprits... Puis remonta dans le camion au coté d'Arthur, d'Alan, de Dante et des autres...
Du monde s'amassait déjà à l'arrière du camion...

La tête contre la vitre, Elena s'était endormie peu de temps après qu'il soit décidé que Joshua prenne le volant à sa place. Même si la jeune femme n'avait pas apprécié l'idée de céder sa place à quelqu'un, et qu'elle s'en voulait un peu de se sentir inutile, elle avait jugé plus prudent d'agir ainsi. Après tout, il y avait des enfants à l'arrière, et si elle se sentait déjà coupable de ne rien faire, elle ne se serait jamais pardonnée d'avoir mis la vie de ses compagnons de route en danger. Depuis le réveil elle souffrait de maux de ventre, mais surtout de vertiges résultant de la faim dont ils souffraient tous.

Plongée dans un demi sommeil, bercée par les bourdonnements incessants du moteur, c'est une puissante détonation qui fit sursauter la jeune femme. Qu'est-ce que ça pouvait bien être encore ? La réponse ne tarda pas, puisque là, sous ses yeux impuissants et apeurés, le camion que conduisait Alan perdit tout contrôle. Son premier réflexe fut d'attraper la portière pour courir vers eux et s'assurer qu'ils n'avaient pas encore perdu quelqu'un. Le mouvement, trop brusque, fit perdre momentanément l'équilibre à la grecque et elle resta quelques secondes paupières closes agrippée à la carrosserie de la voiture. « Putain de merde » jura-t-elle à demi voix dans sa langue natale. Inspirant un grand coup, passablement bien aidée par la brise glacée, elle reprit rapidement ses esprits et s'élança vers le camion accidenté.

Lorsqu'elle atteint leur niveau, Alan et Christina étaient déjà descendus et semblaient saufs. C'est en allant à l'arrière que la jeune femme étouffa un hoquet de stupeur. Son regard fut happé par le visage ensanglanté de Quinn qui s'attelait déjà à remettre une épaule bien amochée avec l'aide d'un Ludwig très pâle. A première vue, les Shepard étaient les plus blessés, ce qui signifiait qu'il y avait eu bien plus de peur que de mal.

Sans dire un mot, Elena ressortit pour aller chercher de la glace qu'elle enveloppa dans le châle fin qui couvrait son cou jusqu'à présent. Elle retourna près de Quinn pour le lui tendre, l'air inquiet « Tiens, j'suis pas médecin mais il me semble que ça peut te soulager. » puis elle tapota le torse de Ludwig, heureuse qu'il n'ait rien eu de grave, et partit retrouver Arthur et les autres. A l'intérieur, elle ne leur était d'aucune utilité.

« Qu'est-ce qu'on fait maintenant ? » demanda-t-elle à McLeod. Le camion était de toute évidence HS et il allait falloir s'activer. Le bruit de l'accident avait du alerter des rôdeurs, et Elena n'avait pas la moindre envie, ni la force de se battre. D'ailleurs, elle grimaça légèrement quand ses entrailles se tordirent à nouveau.

- Merde, non !

C’était ce que s’était exclamé Abel en voyant divaguer le camion conduit par Alan. Ils avaient perdu trop de gens dernièrement, il sentit un glaçon lui descendre le long de la colonne vertébrale : et si ça continuait ? Et si l’intégralité du véhicule mené par son ami basculait dans le vide ? Ce ne fut heureusement pas le cas mais le cinquantenaire ne s’en sentait pas moins fébrile. Ce pont fragile pris dans la glace ne lui disait rien qui vaille, encore moins que celui qu’ils avaient dû déblayer pendant des heures. Il se tourna vers Tamara pour lui énumérer les mêmes consignes avec lassitude mais elle le devança. Non contente de réciter sa leçon, elle lui fit un regard de biche qui réussit à lui tirer un sourire. L’ancien agent l’embrassa, ébouriffa Victoria, caressa délicatement la joue d’Elie, et sortie rejoindre les autres.

Quelques blessés à déplorer. Grave ? Miss « Je-ne-la-ferme-jamais » saignait de la tête et l’une des épaules de son frère dessinait une forme inhabituelle. Super. Tout en avançant vers le couple Karlson, Abel essayait d’évaluer tout le périmètre qu’il pouvait embrasser du regard. Est-ce qu’il y avait beaucoup de morts dans le coin ? Combien aurait entendu l’explosion provoquée par la crevaison ? Manquerait plus qu’ils soient pris en tenaille par des hordes et soient contraints de sauter à l’eau.

- Vous êtes sûrs d’aller bien ?

Son regard oscillait d’Alan à Christina. Depuis leur expédition à Olympia notamment, il se sentait toujours particulièrement proche d’eux. Ce n’était pas qu’il n’était pas ému par les blessures des jeunes déjà prises en charge par plein de petites mains, c’était juste que… symboliquement, perdre les Karlsons, ce serait un coup violent à encaisser.

La question posée par Elena tomba également dans son oreille et le fit tourner la tête. Ce qu’il fallait faire ? Ne pas traîner dans le coin. Ils le savaient tous désormais, même si certains avaient besoin de repos, même s’ils avaient froid, même s’ils étaient éreintés : ils ne pouvaient pas se permettre de s’attarder. Consultant Arthur des yeux, Abel parla assez fort pour que la grecque l’entende :

- Il faut vérifier si le camion peut redémarrer, il n’y croyait pas beaucoup, si ce n’est pas le cas, je suppose qu’on devra récupérer ce qu’on peut et le dispatcher dans les autres véhicules.

Si ce cas de figure était vérifié, ça faisait pas mal de boulot à venir. Sans compter que déjà, une première silhouette décharnée s’approchait, ralentie par la neige mais attirée par le vacarme.