Bandes de cons.

Enfin, la journée se terminait. Enfin. L'équipe qu'elle avait emmené au ravitaillement était un ramassis de bras cassés, et bien évidemment il avait fallût qu'Isha joue les sages Powathan alors qu'elle poussait une gueulante. "Ils sont nouveaux, laisse leur le temps" et gna gna gna. Elle lui aurait bien collé un coup de tomahawk dans le crâne si elle n'avait pas autant d'amour pour ce petit con qui savait parfois la moucher avec un sourire poli. Allez Mendoza, tu vas t'en remettre. C'est pas comme si ils avaient explosé le ran- Qui est assez con pour appuyer sur le klaxon de cette putain de Jeep sérieux ! Moins fort ! chuchota rageusement le brun en refermant silencieusement la porte derrière eux. Après l'essence perdue pour rien et le temps de remplir les réservoirs, la patrouille avait mis d'avantage de temps à rentrer. Et si Carmen se doutait bien qu'aux alentours de deux heures du matin, la plupart des membres du camp devaient dormir profondément, elle n'en avait strictement rien à faire sur le moment.

Elle ne s'en remettait pas tiens. Un abruti avait appuyé malencontreusement sur l'appareil en plein ravitaillement, ramenant les trois quarts des Wendigo du coin, les forçant à abandonner sur place la plupart de leur trouvailles, les forçant à revenir le lendemain. Une journée et de l'essence gaspillée à cause d'un con, des vivres qui seraient certainement disparues le lendemain, voilà ce qu'était la journée. La Navajo était entrée en trombe dans le salon, cigarette au coin des lèvres alors qu'Isha essayait de la tempérer, sans succès. Maintenant quand je pars en ravitaillement j'exigerai au moins un vrai pro à mes côtés. Que ce soit Axel, Elena, toi ou qui vous voulez, mais plus jamais une bande qui hurlent comme des gosses à l'approche d'un cadavre après deux ans d'épidémie. Même Quinn aurait fait mieux ! Quinn est une alarme à wendigo, c'est... différent. On passera par le sud de la ville, et tu verras qu'on y arrivera en étant discret. promit Isha en la regardant se laisser tomber sur le canapé, inspirant une nouvelle bouffée de nicotine en fixant le plafond. Pose toi cinq minute, va. Jolan est parti pour dormir encore deux bonnes heures, je m'en occupe. promit le Cheyenne en la laissant à ses sombres pensées, ne récoltant pour réponse qu'un vague grognement plus proche de celui du loup que d'un être humain. Cet abruti de Kareem allait finir par la métamorphoser à force de la surnommer Louve tiens pensa t-elle avec amertume avant d'entendre des pas se diriger vers elle. Elle venait tout juste de finir de détacher ses cheveux nattés quand une nouvelle tête fit son apparition dans la pièce vide, ses yeux noirs se relevant vers la personne.

T'es là toi.

Loana. Elle ne lui avait que très rarement parlé, et sa curiosité innocente avait tôt fait d'être envoyé sur les roses dès l'instant ou elle avait tenté d'en savoir plus sur son deuil. Si elle ne l'observa pas avec animosité pour autant, la pauvre Loana avait rapidement dû comprendre qu'elle n'était pas d'humeur... Vas-y, fais comme chez toi.

Ce n'était même pas sarcastique pour le coup. Elle lui avait réellement indiqué le fauteuil en face d'elle, tirant à nouveau sur sa cigarette après avoir jeté dans un coin sa veste en cuir, ne conservant que son débardeur gris tâché de sang séché. T'es pas sensé dormir vu l'heure ?

Peut-être était-elle de garde ce soir ? Ca ne lui venait même pas à l'esprit que peut-être le moteur des voitures et les éclats de voix n'aient pu la réveiller tiens...

Ahun.

De garde, évidemment. C'était toujours quand elle cherchait le calme absolu qu'il fallait qu'elle tombe sur des gens de toute manière. Elle aurait pu suivre les conseils d'Isha en allant se la jouer chaman Navajo en plein milieu de la forêt pour parler à grand mère feuillage, qu'il y aurait eu un con pour venir la chercher.
Et quand bien même, chaman n'était pas réellement inscrit dans son emploi du temps comme un passe temps essentiel à sa santé mentale.

Du café ? Carmen releva lentement ses yeux noirs vers Loana, cherchant à la sonder. Cherchait-elle à devenir une hôte cordiale et sympathique ? Si c'était le cas, elle devait bien admettre qu'elle acceptait volontiers l'idée, plutôt que de la voir comme une fouine. C'est la meilleure proposition qu'on m'ait faite de la journée. avoua t-elle en soupirant, s'étirant à la manière d'un chat. et si en plus tu y rajoute du sucre, je vais te voir comme une déesse. plaisanta en lui offrant un de ses rares sourires sincères, tirant à nouveau sur sa cigarette.
Remerciant la brune d'un signe de tête quand elle récupéra la tasse du bonheur, la Navajo en but une gorgée, soupirant d'aise. Il ne manque plus qu'un air de Sinatra, et je me sentirai presque comme à la maison... murmura t-elle pour elle même avant d'entendre la question de la jeune femme qui la fit rire légèrement, secouant la tête.

C'était moi. admit-elle en haussant les épaules, tirant à nouveau une bouffée de nicotine. Tu vas t'habituer, je suis réputée pour mes crises de nerfs quand un ravitaillement tourne mal.

Ou que quelque chose ne tournait pas rond dans le ranch. De la dernière tasse de café prise, à un règlement de compte entre deux survivants qui se disputaient, nul doute que chaque membre de ce ranch avait dû l'entendre s'époumoner au moins une fois. On avait trouvé un super endroit. Une vieille épicerie, mais personne n'avait fouillé dedans. On bataillait depuis plusieurs jours pour défoncer le cadenas, et on avait récupéré pas mal de trucs. Des conserves, de l'eau, même quelques paquets de bonbons. Et il à fallût qu'en rentrant les premiers cartons, un abruti appuie sur le volant. Ca à ramené tous les wendigo du coin en moins de trente secondes, et on à dû partir en abandonnant les trois quarts des trouvailles par terre...

La navajo soupira longuement, signe que le simple fait d'en discuter lui donnait envie d'aller chercher le fautif pour le secouer comme un prunier dans son sommeil. Y'en à certains qui ont paniqué, crier pour faire remarquer les morts, donc ça en à ramené deux fois plus. On à perdu de l'essence en faisant un détour, et le temps de faire le plein et trouver un autre chemin pour rentrer ben... Regarde l'heure qu'il est.

Une bonne journée de merde, en somme. Heureusement qu'Axel n'avait pas été avec eux. Il aurait été capable de pousser le malheureux vers les rôdeurs pour lui apprendre le concept de la discrétion. Et forcément, on à très peu de chance de retrouver un jour ces foutus vivres intact, une fois que les morts auront zoné dessus.
En tout cas, malgré la fatigue, cela lui avait suffisamment mis les nerfs pour en vouloir au monde entier encore maintenant. Bandes de bras cassés quoi, franchement. Et toi, ta journée ? C'était palpitant aussi ?

Elle pouvait bien prendre le temps de discuter avec elle. Si elle n'aimait pas le côté fouine de Loana, au moins ce soir, elle avait proposé du café quand elle en avait le plus besoin. A défaut d'enterrer la hache de guerre, une discussion serait plus propice qu'un règlement de compte dans le sang et les larmes.