A rush of blood to the head
Mer 25 Juil 2018 - 20:30
Le soleil ne va pas tarder à se coucher sur le ranch. Et putain, c'est pas trop tôt. Quelle foutue journée de merde.
Aujourd'hui avait été le jour de la première récolte. La première levée de vivres pour ceux qui nous avaient envahi, il y a quelques jours. Putain j'arrive même pas à croire que je puisse prononcer cette phrase au vingt-et-unième siècle. A croire qu'on était de retour au Moyen-Age, en colonisant des terres en faisant couler tant de sang. C'était du pillage, ni plus ni moins. Ces gens avait buté des innocents, et voilà que nous, qui avions réussi à rester debout, nous étions assujettis comme des putains d'esclaves des temps modernes, avec pour seules missions de nous tenir à carreaux et de leur filer à bouffer. C'était purement dégueulasse. J'étais loin d'être le seul que tout cela révoltait dans le ranch. Mais je serai aussi de ceux qui ne tenteront aucun acte de résistance aujourd'hui. Le souvenir de nos défunts compères est encore trop présent, et la méfiance des envahisseurs serait encore bien trop élevée à notre égard. La résistance devait être discrète, silencieuse. Aucune chance qu'elle se manifeste aussi rapidement, en tous cas, et ce pour notre sécurité avant tout. Hors de question de perdre à nouveau des hommes. Pas encore.
Si une partie de l'effectif avait été réquisitionnée pour attribuer leur dû à nos chers oppresseurs, le reste des missions avaient été maintenues. Peut-être pour nous garder occuper et nous faire oublier, au moins un moment, l'injustice dont nous étions victimes. Ou pour diminuer au maximum les présences sur le ranch pour prévenir d'éventuels débordements des plus sanguins d'entre nous. En tous cas, comme prévu, j'ai accompli ma tâche. Je suis parti en reconnaissance vers le sud-est cet après-midi, avec quelques collègues. Ma foi, ce fut une mission comme on connait souvent. Pas grand chose d'extraordinaire à signaler. Nous avions seulement croisé une horde d'une demi-douzaine de rôdeurs, dont nous sommes venus à bout plutôt facilement. La routine. Si ce n'est qu'en visitant une maison, j'ai récupéré une poignée de clopes et un fond de bouteille de rhum avec la ferme intention de garder mes trouvailles pour mon loisir personnel.
Bon, en vérité, j'avais prévu de partager cela avec Serena. Je savais qu'elle devait faire partie de l'équipe qui donnerait les vivres à ... ces trous de balles là. Vu l'état dans lequel elle se mettait chaque fois qu'elle mentionnait le siège, j'avais énormément de mal à comprendre pourquoi elle avait tenu à croiser une fois de plus ceux qui étaient à l'origine de sa souffrance. Mes arguments visant à la dissuader de s'infliger un tel supplice n'avaient visiblement pas été les bons. Et mes mots, couplés de mes bras, n'avaient encore ce matin, pas permis de l'apaiser pour de bon.
Chaque conversation avec Serena était comme une corrida. Elle était la bête enragée au regard noir qui courrait dans tous les sens et tapait du pied. Moi, j'étais le bonhomme ridicule vers lequel elle se ruait et qui évitait ses coups après les avoir cherchés. Au final, la plupart du temps, j'avais le dernier mot. Je lui assénais le coup de grâce, et épuisée, elle finissait par capituler. Elle s'effondrait dans mes bras, et moi, la victoire modeste, je l'accompagnais jusqu'à ce que ses yeux finissent par se fermer.
Il est environ vingt-et-une heures quand je pousse la porte du camp. Un rapide tour dans la cuisine et le vol d'une pomme plus tard, me voilà dans les escaliers, à monter jusqu'au troisième étage où se trouve ma chambre et celle de Serena, vers laquelle je me dirige immédiatement. La pomme coincée dans mes dents, je frappe trois petits coups. Aucune réaction. J'appuie doucement sur la poignée et pousse timidement la porte. Personne. Bon. Elle n'est sans doute pas encore rentrée.
Je fais alors volte-face, et entreprends de pénétrer dans la mienne, prenant le soin de laisser la porte entrouverte pour signifier à Miss Martinez que j'étais bel et bien rentré. Après avoir lancé mon sac à dos sur mon lit, je m'accoude à la fenêtre et termine de croquer dans ma pomme en guettant le moindre mouvement à l'horizon.
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Re: A rush of blood to the head
Dim 29 Juil 2018 - 5:10
C'était une dure soirée. Principalement parce que la journée avait été insupportable, épuisante et particulièrement désagréable. À force d'être sur les nerfs pendant si longtemps, sans possibilité de fuite, Sere avait l'impression d'avoir couru un putain de marathon, fatiguée de porter le masque de celle qui était au-dessus de tout ça depuis trop longtemps. De cacher cette anxiété dévorante qui ne demandait qu'à sortir de nouveau. Elle avait un peu poireauter dehors toute seule, profitant du calme plat pour l'apaiser, avant de rentrer. Conclusion; si tout s'était relativement bien passé, elle avait clairement sous-estimé la concentration et la volonté requise pour leur faire croire, à ces connards, qu'ils n'étaient que des petites merdes dociles. Oui, elle avait assuré, fallait bien lui donner ça, mais un drôle de sentiment persistait en elle. Comme si elle savait qu'ils n'étaient si dupes.
Et c'était tout ce qui occupait ses pensées pendant qu'elle grimpait les escaliers pour monter à sa chambre, alors qu'elle se disait qu'une sacrée chance qu'elle s'était trouvé là, avec Fred et Caro. C'était un hasard, enfin, puisqu'ils n'avaient eu aucun moyen de s'annoncer. Et malgré tout, la brune était satisfaite d'avoir pu gérer un peu les choses en cette journée où Ashley et Elena étaient sorties. Ce n'était pas parce que ça lui plaisait, bien loin de là quand même, mais les siens étaient trop éprouvés pour supporter - et mener - une telle visite. Son éternel sérieux - enfin celui qui était là la plupart du temps, vestige de l'armée - avait été utile, d'ailleurs. Mais c'était terminé, heureusement. Tout ce qui subsistait était son humeur maussade teintée de doute, résultat d'avoir vu leurs visages de trop près.
Martinez savait qu'une équipe du Ranch devait sortir aujourd'hui. Ce n'était rien d'inhabituel dans leur quotidien de ravitailleurs pour l'alliance des tarés. Étaient-ils rentrés? Fort probable, à cette heure qui se faisait tardive, mais elle n'avait pas l'énergie de vérifier. Ses yeux se posèrent cependant sur la porte entrouverte d'Emmanuel en passant devant sa chambre, allant ainsi poser les épaules contre le cadrage sans la pousser davantage. La militaire l'observait guetter la fenêtre comme un gosse qui attendait elle ne savait trop quoi. Elle souriait dans l'embrasure de la porte, mordillant un peu son index avant de reculer doucement vers sa chambre. Elle s'était laissé tombée sur le lit, à plat vendre, logeant le menton sur le dessus de ses mains. Non, elle n'était pas allé le voir. La brune n'irait pas non plus. Tout simplement parce qu'elle n'était pas prête à remonter en selle contre lui.
Parce que c'était toujours la même chose, avec Manu. Le bouclé ne semblait jamais tout à fait la comprendre, elle. Son sang chaud était incompatible avec sa tête froide. Reena le savait pourtant brillant, mais merde il serait bien capable de mettre un tas de trucs en péril tant il pouvait être entêté. Ses grands principes étaient bien beaux, certes, mais la demoiselle avait l'impression, parfois, qu'il ne voyait pas plus loin que l'immédiat. Et c'était le problème de beaucoup de gens ici, mais comment pourrait-on les blâmer? Ils avaient besoin d'un plan, et il se bâtissait peu à peu. En revanche, les sacrifices faisaient partie de celui-ci, et il faudrait s'y coller sans faute. Mais Sere avait l'impression qu'il n'approuvait rien de ce qu'elle foutait, et ça l'emmerdait.
Alors non, elle n'avait pas le luxe de pouvoir aller s'échouer dans ses bras. Il s'éviterait une engueulade probable au moindre mot mal placé, et elle n'aurait pas à se concentrer sur autre chose que leur survie post-alliance. Tout le monde en sortait gagnant, au final.
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Re: A rush of blood to the head
Dim 29 Juil 2018 - 18:59
Je suis presque certain d’avoir entendu un éléphant monter les escaliers. Et oui, cela fait partie des joies d’avoir la chambre juste à côté des marches, sur un palier en plancher.
Mais je n’avais pas bronché pour autant. Après tout, cela pouvait être n’importe qui, et ma curiosité n’était pas si affûtée que ça. En début de soirée, il n’est pas rare de constater que les habitants du Ranch faisaient des allers-retours dans leurs chambres, que ce soit pour aller chercher quelque chose et le ramener dans la salle commune, ou simplement partir se coucher après une longue journée de dur labeur. Tourner la tête à chaque grincement du plancher pour connaître l’identité des vagabonds des couloirs ne m’aurait valu qu’un atroce torticolis. Et puis il faut dire que le spectacle qui s’offrait à moi, derrière la fenêtre, ne mérite clairement pas que mon attention se déporte de lui au profil de telles banalités, apriori.
C’est quand j’ai entendu une porte, très rapprochée de mon emplacement, se refermer fort peu discrètement que j’ai compris que c’était un de mes voisins qui venait de rentrer. Et en percevant les grelots métalliques des ressorts et les craquements des lattes du lit d’à côté, j’ai pu conclure que c’était la baleine qui me servait de voisine qui venait de s’échouer sur son pieux. Et qui est ma voisine la plus proche ? Serena Martinez.
Ma pomme terminée, je jette le trognon par la fenêtre en espérant durant un quart de seconde qu’il n’atterrisse pas sur la tête d’un habitant du Ranch, et repousse les battants sans la fermer totalement. Bien décidé à exécuter ma surprise, je récupère dans mon sac la bouteille et les clopes que j’ai chipé aujourd’hui, et sors tranquillement de ma chambre, direction celle de l’ex-militaire.
Tout doucement, j’appuie sur la poignée et pousse la porte en lançant d'une voix calme ; « Toc toc toc, comment va la plus belle ? ». Sans attendre de réponse, je m’avance dans la chambre et m’assois à côté d’elle sur le lit, déposant les cigarettes sur le coin du lit et brandissant fièrement ma bouteille. « J’ai pas trouvé de citrons verts mais y a moyen qu’on trouve de la menthe sauvage et des fruits rouges près du lac. Je t’invite en escapade. Tu viens ? »
Je voulais simplement la faire sourire..
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Re: A rush of blood to the head
Mar 31 Juil 2018 - 2:37
"Je suis d'une humeur massacrante." répondit-elle à sa question en se tournant sur le côté, calant la tempe à sa main en levant les cils vers lui pour mieux le détailler. Son ton était empreint d'une lassitude certaine, mais un sourire éclaira tout de même son regard noisette pour lui montrer qu'elle tenait le coup, comme à l'habitude. C'est alors qu'il avait posé des clopes sur le coin du lit, ayant pour effet d'étirer ses lèvres encore plus, d'autant plus qu'il agitait comme un trésor une bouteille de rhum entamée entre ses doigts.
Elle avait cependant haussé les sourcils à ce qu'il lui proposa ensuite. Une escapade? Et pour quoi faire? Se délecter d'un mojito nouveau genre? Toujours aussi pragmatique et terre à terre, la brune n'était pas convaincue, même si les efforts qu'il déployait pour lui changer les idées étaient louables. Mais sa journée l'avait mise sur les nerfs, et si à l'habitude quelques blagues pouvaient la délier, cette fois il serait visiblement plus difficile de retrouver son humour. On aurait dit que l'adrénaline coulait encore dans ses veines, brûlant la chair au passage, même si le calme était revenu. C'était toujours ainsi, et il le savait. Il était impossible de la détacher de ses objectifs concernant l'alliance, et aujourd'hui elle avait réellement posé les yeux sur ces tarés, rendant la situation bien plus réelle qu'auparavant. Nul besoin d'être un génie pour comprendre qu'elle n'était obsédée que par eux à cet instant. Son petit cerveau façonné par l'US Army roulait à la vitesse de la lumière, et ça la rongeait.
La militaire s'était assise en tailleur au milieu du matelas, penchant la tête en le regardant comme si son idée était trop folle, trop impulsive pour être considérée. Sere ne disait toujours rien. Elle s'étira pour s'emparer d'un briquet dans sa table de chevet, s'allumant tout de suite un bâton de nicotine bien mérité. Elle tira longuement sur la cigarette, savourant la fumée chaude, avant de se lever pour la placer entre ses lèvres à lui, frôlant sa bouche au passage. Puis, retournant poser ses fesses au même endroit, l'hispanique s'en alluma une autre dont elle ne se débarrasserait pas, cette fois.
Et s'il était surpris de la voir aussi peu réactive, plutôt éteinte en fait, il avait pourtant été prévenu dès qu'il avait foutu les pieds dans sa chambre. Or, Reena parla enfin en zieutant l'alcool qu'il tenait toujours. "Faut vraiment descendre au lac pour profiter de cet élixir?" demanda-t-elle en se disant qu'elle venait de passer la journée à courir comme une dingue. Mais en voyant l'air sur son visage, la mexicaine ne pouvait s'empêcher de regretter un peu ses paroles. Elle y tenait, à ce gosse, c'était bien le pire. Mais elle s'entêtait à le repousser, la demoiselle. Elle n'avait pas le temps pour lui. C'était une distraction, et une distraction pouvait coûter bien cher, de nos jours, même lui le savait. Et la seule chose qui l'habitait à ce moment, de toute façon, était la haine qu'elle leur portait à eux, de leur faire subir ça.
"Okay, très bien, Roméo." reprit-elle en changeant d'avis, en profitant pour se foutre de sa gueule, d'ailleurs. "C'est bien parce que c'est toi." ajouta-t-elle ensuite. Oui parce qu'en réalité, Serena était morte de fatigue. Mais voilà, on pouvait aussi crever de solitude ou de folie, et au final, l'un n'était pas mieux que l'autre.
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