If we can't protect the earth, be damn sure we'll avenge it
Mar 31 Juil 2018 - 21:10
16 ans ≡ Américaine ≡ lycéenne ≡ Travelers
J’étais ce qu’on pouvait appeler une geek. Dans le bon sens du terme. Je crois. Mon père m’inspirait, j’avais tout le temps de bonnes idées pour construire des petites machines, coder des sites internet voire essayer de développer des applications. Je trouvais toujours de quoi atteindre mon but avec les moyens à sa disposition et jamais je ne m’avouais vaincue ! Parait que j’étais un peu surdouée. Quand je n’étais pas plongée dans les sciences informatiques, je passais énormément de temps sur les jeux vidéo ou à lire des bandes dessinées. Occidentales ou asiatiques, qu’importe, mais pourvu qu’il y ait de l’action ! Je vous raconte pas combien de fois j’ai rêvé d’avoir des attributs High-tech, comme le bras métallique du Soldat de l’hiver. Ça aurait été dément !
Vous allez vous en rendre compte peut-être : il m’arrivait d’être bavarde. Quand je suis lancée sur un sujet, on ne m’arrête pas – et quand je ne suis pas lancée, je me lance toute seule. Pas difficile quand on a autant de chose dans la tête que moi et… oh bah oui, j’avoue aussi que je suis « un peu » imbue de ma personne. Je suis surdouée, je ne l’ai pas déjà dit ? Du coup, il m’arrivait – et m’arrive encore – de prendre les autres un peu de haut. Je fais pas exprès, c’est juste… voilà. Y’a un monde entre mon cerveau et celui des autres.
Par logique, ma vivacité est autant une qualité – je suis la meilleure quand il s’agit d’analyser très vite une situation ou de jouer au Tabou – qu’elle ne peut se transformer en défaut – elle me rend impertinente, du style la sale môme qui répond à tout et à tout le monde. Surtout que quand j’estime avoir raison, je ne lâche rien ! Je suis plus intelligente que la plupart des gens… je l’ai déjà dit ?
Je pense beaucoup – et surtout – à ma gueule. Pourtant j’avais un frère, mais c’était comme ça. Je vivais comme une fille unique, réclamais toute l’attention et puisque j’estimais avoir toujours raison, et bien le monde devait tourner autour de moi. CQFD. Pour avoir la paix, il fallait que je sois concentré dans mes activités : là je me montrais concentrée et d’une extrême patience. Il fallait être patient(e) quand on était geek informatique de toute façon, sans quoi c’était foutu d’avance.
Le pire de mes défauts ? C’est celui qui m’a posé le plus de soucis quand il a fallu survivre : je suis gourmande. Genre une putain de morfale. Je pense que la croissance de la pré-adolescence m’a sauvé de l’obésité, clairement. S’il n’y avait pas eu les grogneurs, je serai une petite boule de lycéenne.
Vous allez vous en rendre compte peut-être : il m’arrivait d’être bavarde. Quand je suis lancée sur un sujet, on ne m’arrête pas – et quand je ne suis pas lancée, je me lance toute seule. Pas difficile quand on a autant de chose dans la tête que moi et… oh bah oui, j’avoue aussi que je suis « un peu » imbue de ma personne. Je suis surdouée, je ne l’ai pas déjà dit ? Du coup, il m’arrivait – et m’arrive encore – de prendre les autres un peu de haut. Je fais pas exprès, c’est juste… voilà. Y’a un monde entre mon cerveau et celui des autres.
Par logique, ma vivacité est autant une qualité – je suis la meilleure quand il s’agit d’analyser très vite une situation ou de jouer au Tabou – qu’elle ne peut se transformer en défaut – elle me rend impertinente, du style la sale môme qui répond à tout et à tout le monde. Surtout que quand j’estime avoir raison, je ne lâche rien ! Je suis plus intelligente que la plupart des gens… je l’ai déjà dit ?
Je pense beaucoup – et surtout – à ma gueule. Pourtant j’avais un frère, mais c’était comme ça. Je vivais comme une fille unique, réclamais toute l’attention et puisque j’estimais avoir toujours raison, et bien le monde devait tourner autour de moi. CQFD. Pour avoir la paix, il fallait que je sois concentré dans mes activités : là je me montrais concentrée et d’une extrême patience. Il fallait être patient(e) quand on était geek informatique de toute façon, sans quoi c’était foutu d’avance.
Le pire de mes défauts ? C’est celui qui m’a posé le plus de soucis quand il a fallu survivre : je suis gourmande. Genre une putain de morfale. Je pense que la croissance de la pré-adolescence m’a sauvé de l’obésité, clairement. S’il n’y avait pas eu les grogneurs, je serai une petite boule de lycéenne.
Vous m’avez regardez non ? Je suis petite (1m63) pas très grosse (49 kg) et pas très jolie. J’ai la bouille de l’adolescente lambda avec des traits un peu fort, des lèvres charnues, un grand front, un grand menton… bref, j’aurais jamais une place comme top model. Mes yeux sont d’un vert crocodile pas transcendant, mes cheveux sont censés être blonds – maintenant ils sont plutôt « blond sale » et mes fringues, bah… je fais dans le pratique. Avant, j’étais un peu « garçon manqué », toujours avec des jeans et des sweat-shirt – non désolée, pas de baggy, c’était déjà démodé quand j’ai eu l’âge d’en porter. Maintenant, je fais garçon manqué mais un peu crado. Le genre qui a encore quelques traces de sang, de boue et de… substances impossible à définir.
La force des choses m'a rendue relativement athlétique dirons-nous. La jeunesse s'adapte vite alors après presque 3 ans à vagabonder à pieds - principalement - je suis peut-être sèche, mais c'est que du muscle !
Dans mon sac à dos, j’ai plus grand-chose : un couteau, une lampe torche, une poignée de munitions pour le 9 mm à ma ceinture, une gourde et… quand j’en ai : les réserves de nourriture que j’ai pu faire. Je sais, je suis une pouilleuse.
La force des choses m'a rendue relativement athlétique dirons-nous. La jeunesse s'adapte vite alors après presque 3 ans à vagabonder à pieds - principalement - je suis peut-être sèche, mais c'est que du muscle !
Dans mon sac à dos, j’ai plus grand-chose : un couteau, une lampe torche, une poignée de munitions pour le 9 mm à ma ceinture, une gourde et… quand j’en ai : les réserves de nourriture que j’ai pu faire. Je sais, je suis une pouilleuse.
Savez-vous qui est Mina ? La légende raconte qu’elle est la première femme de Dracula. La première qu’il ait transformée, qui avait un lien télépathique avec lui. Elle n’a pas inspiré les légendes pour rien : en Roumanie au XVè siècle, une femme cherchait à percer le mystère de Vlad L'Empaleur a.k.a comte Dracula. Elle s'appelait Mina. Après avoir été portée disparue, elle a été retrouvée morte avec deux trous dans la gorge. Une scène qui a corroboré les légendes sur le vampire. Rien de plus normal dans une Europe de l’est avide d’histoire de sorcellerie. Entre ça et la comtesse Bathory...
Comme on disait sur internet avant que tout parte en vrille : je suis une 2000. Autrement dit, j’appartiens à la génération Z, soit cette race de personne profondément méprisée sur la sphère par les « 90 » qui ont eu le monopole des podcasts, Vlog, Insta’, Blog de cuisine et j’en passe. Plus précisément, je suis née le 17 avril 2002. La même année que la Xbox et la Gamecube donc, deux ans après la playstation 2 – ça c’est pour resituer le contexte historique.
Dans mon monde, les machines et le web ont toujours existé. Plus particulièrement parce que mon père était ingénieur pour une grosse boîte d’informatique et de robotique. Plus concrètement, il travaillait sur les robots intelligents et des programmes d'intelligence artificielle. On avait une grande maison à Elwha, au pied des montagnes de l’Olympic National Park. L’ancienneté de mon père – Benjamin Moon – lui avait permis de négocier de travailler principalement chez lui. Oui j’ai oublié de dire qu’il avait 49 ans quand je suis née : il a 12 ans de plus que ma mère, Carol. Ils ont eu leur premier enfant à respectivement 30 et 18 ans : mon frère Charles. Je ne suis venue que 19 ans plus tard. Je suppose qu’entre la carrière de mon père et ma mère qui a tenu à reprendre ses études en bio-alimentaire, un deuxième enfant n’était pas une priorité.
J’ai cru aussi comprendre qu’autour de ses 25 ans, plutôt que de se mettre à travailler – mon père gagnait assez bien sa vie pour trois – ma maman a voulu se lancer dans l’humanitaire. Faire des missions ici et là pour aider les populations sur place. En Amérique du sud d’abord, puis en Asie et en Afrique. Il était question de participer à l’acheminement de denrées ou d’enseigner dans une école ou encore d’aider le développement de circuits archaïques mais indépendant. Par exemple : elle m’a parlé d’un village en Haïti vegan jusqu’au bout des ongles qui cultivent leurs plantes, fabriquent leurs ustensiles avec des végétaux, recyclent leurs propres excréments recueillis dans des toilettes sèches, mais n’ont pas de protocole d’hygiène adapté. Elle s'est donc occupée de le faire. Bref, tout un programme.
De mon côté, aussi loin que je me souvienne, notre sous-sol avait des allures de souterrain futuriste, avec des ordinateurs, des machines et des prototypes partout. J’y jouais très souvent. J’aimerais dire que je restais dans un coin sans déranger mon père, mais je crois que je touchais un peu trop à tout et tout le temps. Pourtant, il avait la patience de m’expliquer le rôle de la plupart des objets que je voyais. C’est peut-être pour ça que j’ai été un peu en avance ? J’étais très éveillée petite et je savais lire mon prénom et quelques mots simples comme « papa », « maman » « chien » ou « chat » à 4 ans.
Inutile de dire que d’une part, j’avais des facilités à l’école et d’autre part, j’étais une mordue d’informatique. Je tenais plus du côté paternel, même si j’ai eu l’occasion de beaucoup voyager – ma mère tenait à ce que je vois du monde – impossible de me décoller d’un appareil connecté. Faut dire que j’ai grandi avec ! Je suis entré au middle school à 9 ans – soit deux ans en avance pour ceux qui n’ont pas suivi – et j’étais toujours aussi douée. J’étais pas un crack à proprement parlé, alors je ne suis jamais allé dans une école spécialisée, mais… j’étais vive d’esprit quoi et je savais ce que je voulais faire.
A mes 10-11 ans, défaut d’avoir une relation très proche avec mon frère – il bossait à Seattle et avait sa vie avec copine et bébé –, ma différence d’âge ne m’empêchait pas de me faire des amis. Un petit cercle de geeks aussi passionnés que moi. J’étais bien sûr inscrite au club informatique de mon collège et notre plus gros passe-temps, quant on n’était pas sur des consoles, c’était coder des sites, construire des maquettes de robot ou essayer d’inventer des applis. Je crois que pour le commun des mortels, on était des OVNIS.
Mes 12-13 ans étaient dans la même lignée : j’y connaissais rien en garçon mais je savais monter un Meccano super dur en un temps record. J’assistais aussi parfois mon père dans ses projets – en bénévole bien sûr ! J’avais des étoiles plein les yeux. La maison était pleine de prototypes de robots intelligents, depuis celui qui passait l’aspirateur au gadget connecté qui pouvait nous donner le trafic à Tokyo en temps réel. J’avais l’impression d’être la fille de Tony Stark parfois, c’était génial ! Et puis… il y a eu octobre 2015. J’avais 13 ans et demi…
Mais ceci n’est pas une histoire de vampire. C’est mon histoire. Elle est pire.
Comme on disait sur internet avant que tout parte en vrille : je suis une 2000. Autrement dit, j’appartiens à la génération Z, soit cette race de personne profondément méprisée sur la sphère par les « 90 » qui ont eu le monopole des podcasts, Vlog, Insta’, Blog de cuisine et j’en passe. Plus précisément, je suis née le 17 avril 2002. La même année que la Xbox et la Gamecube donc, deux ans après la playstation 2 – ça c’est pour resituer le contexte historique.
Dans mon monde, les machines et le web ont toujours existé. Plus particulièrement parce que mon père était ingénieur pour une grosse boîte d’informatique et de robotique. Plus concrètement, il travaillait sur les robots intelligents et des programmes d'intelligence artificielle. On avait une grande maison à Elwha, au pied des montagnes de l’Olympic National Park. L’ancienneté de mon père – Benjamin Moon – lui avait permis de négocier de travailler principalement chez lui. Oui j’ai oublié de dire qu’il avait 49 ans quand je suis née : il a 12 ans de plus que ma mère, Carol. Ils ont eu leur premier enfant à respectivement 30 et 18 ans : mon frère Charles. Je ne suis venue que 19 ans plus tard. Je suppose qu’entre la carrière de mon père et ma mère qui a tenu à reprendre ses études en bio-alimentaire, un deuxième enfant n’était pas une priorité.
J’ai cru aussi comprendre qu’autour de ses 25 ans, plutôt que de se mettre à travailler – mon père gagnait assez bien sa vie pour trois – ma maman a voulu se lancer dans l’humanitaire. Faire des missions ici et là pour aider les populations sur place. En Amérique du sud d’abord, puis en Asie et en Afrique. Il était question de participer à l’acheminement de denrées ou d’enseigner dans une école ou encore d’aider le développement de circuits archaïques mais indépendant. Par exemple : elle m’a parlé d’un village en Haïti vegan jusqu’au bout des ongles qui cultivent leurs plantes, fabriquent leurs ustensiles avec des végétaux, recyclent leurs propres excréments recueillis dans des toilettes sèches, mais n’ont pas de protocole d’hygiène adapté. Elle s'est donc occupée de le faire. Bref, tout un programme.
De mon côté, aussi loin que je me souvienne, notre sous-sol avait des allures de souterrain futuriste, avec des ordinateurs, des machines et des prototypes partout. J’y jouais très souvent. J’aimerais dire que je restais dans un coin sans déranger mon père, mais je crois que je touchais un peu trop à tout et tout le temps. Pourtant, il avait la patience de m’expliquer le rôle de la plupart des objets que je voyais. C’est peut-être pour ça que j’ai été un peu en avance ? J’étais très éveillée petite et je savais lire mon prénom et quelques mots simples comme « papa », « maman » « chien » ou « chat » à 4 ans.
Inutile de dire que d’une part, j’avais des facilités à l’école et d’autre part, j’étais une mordue d’informatique. Je tenais plus du côté paternel, même si j’ai eu l’occasion de beaucoup voyager – ma mère tenait à ce que je vois du monde – impossible de me décoller d’un appareil connecté. Faut dire que j’ai grandi avec ! Je suis entré au middle school à 9 ans – soit deux ans en avance pour ceux qui n’ont pas suivi – et j’étais toujours aussi douée. J’étais pas un crack à proprement parlé, alors je ne suis jamais allé dans une école spécialisée, mais… j’étais vive d’esprit quoi et je savais ce que je voulais faire.
A mes 10-11 ans, défaut d’avoir une relation très proche avec mon frère – il bossait à Seattle et avait sa vie avec copine et bébé –, ma différence d’âge ne m’empêchait pas de me faire des amis. Un petit cercle de geeks aussi passionnés que moi. J’étais bien sûr inscrite au club informatique de mon collège et notre plus gros passe-temps, quant on n’était pas sur des consoles, c’était coder des sites, construire des maquettes de robot ou essayer d’inventer des applis. Je crois que pour le commun des mortels, on était des OVNIS.
Mes 12-13 ans étaient dans la même lignée : j’y connaissais rien en garçon mais je savais monter un Meccano super dur en un temps record. J’assistais aussi parfois mon père dans ses projets – en bénévole bien sûr ! J’avais des étoiles plein les yeux. La maison était pleine de prototypes de robots intelligents, depuis celui qui passait l’aspirateur au gadget connecté qui pouvait nous donner le trafic à Tokyo en temps réel. J’avais l’impression d’être la fille de Tony Stark parfois, c’était génial ! Et puis… il y a eu octobre 2015. J’avais 13 ans et demi…
• Octobre 2015 -> Janvier 2016 : Elwha.
Soyons honnête : quand on est jeune, on adore les scénarios morbides. Quand les informations ont commencé à parler de violences inexpliquées, d’intoxication alimentaire, j’étais à fond ! Avec mes potes, on avait l’impression de suivre une série télévisée mais dans le monde réel. Internet pullulait de rumeurs, de théorie du complot et autres fake news. Un jour mon frère a téléphoné pour dire que sa femme avait été mordue au sang par quelqu’un et je me souviens… avoir rigolé. Arrêtez, c’est marrant quand même quand on ne connait pas le contexte ! A l’époque, c’était marrant en tout cas.
Mi-octobre, il a rappelé pour dire qu’elle était en quarantaine, c’était un peu moins drôle. A la même période, on a fini par voir les informations fuiter : des histoires de contamination, de mort qui se relèvent, d’émeutes… de la pure science fiction. Mais que font les Avengers ?! Quand le net est tombée, mon père a essayé de se rendre sur la métropole pour voir ses collègues mais il n’a jamais pu passer les embouteillages à l’approche du Tacoma Narrow Bridge, alors il a fait demi-tour. Ça lui avait pris une journée entière.
Autour du 20 octobre, on avait plus de nouvelles de mon frère et de sa famille : là, ce n’était plus marrant du tout. J’ai bien essayé de contacter certains de mes potes mais je me heurtais soit à la coupure du réseau, soit au fait qu’ils étaient partis de chez eux. Les messages disaient bien de joindre les camps de réfugiés les plus proches mais… on était pas des réfugiés, pas vrai ? Alors… on est restés chez nous.
Fin octobre, c’était carrément la merde. Plus que des messages en boucle sur les téléviseurs ou à la radio. Impossible de joindre personne, y compris ma mère qui était en mission humanitaire au Venezuela depuis deux mois. Pas de nouvelles d’elle depuis trois semaines. Le village était déserté, hormis quelques agriculteurs irréductibles qui ne laisseraient leurs plantations pour rien au monde.
Début novembre, je n’étais plus qu’avec le paternel Moon, on voulait aller voir ce que donnait le camp de Sequim – d’après les dernières informations, c’était le plus proche. On a été accueillis par des gens un peu… bizarres. Livides, l’œil torve, ils ne parlaient pas et n’avaient pas l’air très habile. On a compris que quelque chose n’allait pas quand ils se sont jetés sur nous. Mon père a empêché in-extremis une femme de me mordre en la tirant par les cheveux et il l’a repoussé en hurlant qu’elle été folle. Je l’avais jamais vu comme ça : encore la pêche à 62 ans l’ancêtre !
Ensuite on s’est enfuis. Ils étaient quatre ou cinq derrière nous. Obstinés et visiblement absolument pas choqués à l’idée de gnaker une pré-adolescente. Le temps qu’on atteigne notre voiture, il y en avait d’autres et on en laissait tout un troupeau dans notre sillage. Dès le lendemain, on faisait le tour des quelques voisins encore là. Le couple Brooner chargeait un 4x4 de bagages et en entendant notre témoignage, ils nous incitèrent à faire comme eux : partir pour Seattle. D’après eux, s’il y avait des refuges dignes de ce nom et des administrations en mesure de les aider, ce serait là-bas.
Autant dire que ça n’avait pas convaincu monsieur Benjamin Moon. On était restés à Elwha. Une fois nos placards vides, on s’était résignés à aller « voler » la seule épicerie du village. J'avoue être coupable : dalleuse comme j'étais, je criais famille du matin au soir. On a d'abord commis notre méfait de nuit, en profitant que la porte n’ait pas été verrouillée par le propriétaire parti un peu vite – sans doute – puis en pleine journée. Les choses ne s’amélioraient pas et personne ne se manifestait, alors…
La première fois qu’un mordeur est arrivé jusqu’à chez nous, c’était en fin décembre. On allait se servir dans ce qui restait à l’épicerie et un type qu’on ne connaissait pas nous a attaqué. Il était clairement mort – l’odeur ne trompe pas – et pourtant, on a pas été trop de deux pour le maîtriser ! Mon père était fatigué et moi bah… j’étais une gamine de 13 ans putain ! C’est le fusil d’un fermier du village qui nous a sauvé alors que le monstre refusait de rester au tapis. Il nous a expliqué que c’était le sixième qu’il abattait en trois semaines, que ces choses n’étaient plus vivantes, qu’elles ne comprenaient qu’un langage : le plomb dans le crâne.
Je vous dis pas le choc. Résumons : j’ai plus internet (donc je suis comme un camé sans sa drogue), on a plus d’électricité (donc même mes consoles ne marchent plus), ma mère me manque (elle est toujours portée disparue) et les humains se transforment en mort-vivant affamés quasiment intuables (qu'est-ce que je peux dire là-dessus ?). Ça fait un super scénario de Marvel, sauf que je ne suis ni spider-girl, ni Black Widow. Avant, c’était méga-chiant mais excitant à la fois – le côté hors-la-loi de la survie. D’un coup, ça devenait flippant. C’est le même fermier qui nous a expliqué le mécanisme de la morsure, la maladie foudroyante, la mutation. Tout ça. C’était arrivé à son fils…
• Février 2016 -> mars 2017 : Les montagnes et la campagne.
Début février 2016 : l’épicerie était vide et notre copain le fermier s’était fait sauté le crâne. Il ne faisait que des céréales – rien qu’on puisse exploiter – et un cadavre était tombé dans son puits. On a tenu quelques jours de plus en pillant les maisons alentours cette fois mais finalement, la situation était si critique que mon père à ré-envisager l’idée de se rendre sur Seattle. Pour ça, on était parés ! Ma mère étant dans l’humanitaire, ce n’était pas les gros sacs à dos qui manquaient. On avait : lampe torche, boussole, des tas de piles, du chatterton, une carte de Washington, des allumettes, deux gros couteaux, des sacs de couchages, des produits de toilette, trousse de premiers secours, deux bouteilles d’1,5L d’eau et quelques vivres qu’il restait. Pensant aller plus vite, mon père voulut couper par les routes de montagne et arriver directement à Shelton, pour ensuite remonter à la ville d’émeraude par Olympia. Qui étais-je pour dire que c’était une mauvaise idée ? Et puis j'avais faim.
Difficile de dire ce qui m’a réveillé. Le froid ? Le goût du sang sur ma langue ? La douleur généralisée ? Le bruit du vent à travers les vitres brisés ? Putain. On avait eu un accident. Un bouquetin à la con sur une route de montagne vertigineuse complètement enneigée. On avait basculé sur le bas côté, dévalé la pente dans une suite de tonneaux, jusqu’à ce qu’un choc à la tête me fasse m’évanouir. J’ai eu de la chance je crois. L’airbag a dû me sauver la vie. Mon père par contre, je le vois à côté de moi alors que la grosse voiture repose miraculeusement sur ses quatre roues éclatées… il a le cou qui décrit un angle bizarre. Il est si blanc qu’il parait vert. Il ne dégage aucun volute de buée comme je le fais à chaque respiration. Il est mort.
Mettez vous à ma place : j’ai 13 ans, je ne suis douée que sur un ordinateur ou avec des jeux de construction, je n’ai personne à (re)joindre et mon seul responsable légal encore dans les parages est décédé. J’ai d’abord pleuré pas mal. Je n’arrivais pas à le regarder et en même temps, son corps sans vie attirait ma pupille. Je suis restée des heures comme ça, à côté de lui, à attendre dieu sait quoi. Notre épave était perdue au milieu de nulle part, dans les montagnes enneigées de l’Olympic National Park. J’allais mourir aussi, pas vrai ?
J’ai eu un espoir. Douloureusement fulgurant, quand mon père s’est mis à bouger. J’ai bêtement cru qu’il sortait du coma ou un truc comme ça. Et puis… il m’a attrapé pour essayé de me mordre. Heureusement – putain d’heureusement – sa ceinture de sécurité l'entravait. Je me suis débattue comme une diablesse, j’ai jamais été aussi terrorisée, déboussolée et traumatisée de ma vie. J’ai dû lui laisser mon manteau entre les doigts pour réussir à ouvrir ma portière et me laisser tomber dehors. J’ai grelotté encore des heures, plantée comme une cruche à côté de la bagnole à voir ce qui était jadis mon vieux père gesticuler en tendant les bras vers moi. L’air sauvage, inhumain, désincarné. Avec le recul, je me dis que j’aurais dû avoir le courage de l’achever, mais sur le coup, j’ai pas pu. J’étais qu’une gosse, vous vous souvenez ? Et j’avais déjà eu le temps de me résigner à une décision importante : j’allais prendre nos deux sacs et partir seule. C’était ça ou mourir.
Être surdouée et débrouillarde, c’était une chose. La réalité en était une autre. Tout était difficile : se repérer avec une carte et une boussole, marcher en étant chargée comme une mule, rationner sa nourriture, faire du feu, éviter les dangers, etc…. La logique me soufflait quelques astuces : comme trouver des refuges souterrains ou dans les arbres (pour éviter autant les grogneurs que les prédateurs), me montrer prudente et ne pas me faire remarquer. J’avais tenu le choc deux mois comme ça, à ruminer notamment la nature de la maladie qui transformait tout le monde, pas uniquement les mordus. J'étais pas moins en état de choc. Écorchée à l'intérieur et à l'extérieur. Foutue vie sauvage.
Je devais avoir eu mes 14 ans quand je débarquais à Grisdale – soit fin avril 2016. Complètement épuisée, affamée et, je l’admets, déprimée. J’ai eu la chance de rencontrer un groupe de campeurs complètement pacifiste. Ils étaient étonnés de savoir que j’avais survécu seule et pour ma part, j’étais heureuse de ne plus avoir à manger des lapins mal cuits, des oiseaux mal déplumés et des insectes dégueulasses. Ils étaient sept, ouverts et familiaux. Ils se déplaçaient régulièrement, s’établissaient dans des endroits reculés pour quelques jours puis bougeaient. Leur théorie c’était que de cette façon, ils étaient impossibles à repérés pour des bandits – car l’évidence voulait qu’il y en ait –, évitaient les grosses populations de mordeurs et n’épuisaient pas les ressources qui les entouraient.
Je n’avais pas mieux à faire alors je suis restée avec eux. Mes deux mois de survie en solitaire m’avait rendue plus que compétente pour participer à l’allumage des feux, la gestion des denrées et l’installation/désinstallation des campements. A la marche aussi, car on ne se déplaçait qu'à pattes. Je ne savais juste pas me défendre à proprement parler. Henry m’a appris à manier une arme de poing et un couteau. Un étudiant policier de la bande. Pour tuer les rôdeurs quand c’est nécessaire. N’étant pas bien grande ni très costaude, c’était plus préventif qu’autre chose. C’était ce que j’ai cru pendant presque un an en leur compagnie.
En mars 2017, le groupe était monté à douze personnes. On avait eu des hauts et des bas, des pertes et des arrivés mais globalement, la mécanique était rôdée. C’était même devenu tellement naturel qu’on s’était trouvé des instruments de musique pour parfois, se faire quelques soirées au coin du feu. C’est d’ailleurs au cours de l’une de ces soirées qu’on a été attaqués par des pilleurs, alors qu’on se pensait tranquilles dans la Capitol State Forest. Ils ont débarqué, ont tiré un peu dans tous les sens et tués ceux qui n’avaient pas réussi à s’enfuir. Par chance – ou pas – j’étais dans ma tente à ce moment là. Pétrifiée. J’ai pas osé sortir. Les réflexes de survie ont pris le dessus, bien sûr, mais j’ai eu l’impression de rester immobile pendant une éternité. Quand un sale type à pointé son nez dans ma tente pour la fouiller, il y a eu un moment de flottement. Je crois qu’il ne s’attendait pas à se retrouver face à un canon tenu par une adolescente de presque 15 ans. J’ai tiré entre les deux yeux et j’suis partie en courant sans regarder en arrière. J’entendais des balles s’écraser partout sur les arbres autour de bois, mais aucune ne m’a touché. J’étais putain de chanceuse encore…
• Avril 2017 -> avril 2018 : retour en métropole.
Là, j’étais de nouveau seule. Seule et démunie. Traumatisée, à nouveau. Je venais de tuer un être vivant. J'en ai vomi tout le contenu de mon estomac et perdu l’appétit plusieurs jours - moi, la grande vorace. J’avais un couteau à ma ceinture, un 9 mm et mes fringues. En remontant sur Olympia, j’ai pu subsister un mois mais ensuite : je serai morte sans Daniel. C’était un gars de 38 ans je crois, avec une grosse moustache brune, une calvitie et un air jovial, comme si le simple fait d’être en vie suffisait à lui laisser le sourire. Il s’était barré d’un camp militaire qui avait mal tourné apparemment, non sans avoir gardé un fusil d’assaut et un peu de matériel. Je crois qu’il a eu pitié de moi, parce qu’il m’a adopté.
Au début, c’était plutôt cool. A la différence des campeurs, ils préféraient rester à proximité des grosses agglomérations, car ils disaient que c’était là qu’on avait encore le plus de chance de dénicher à manger. On a vogué d’Olympia à Lakewood, Tacoma puis Federal Way. Le but étant de rester mobile mais de ne pas se paumer dans la cambrousse. Toujours à pieds, encore. Finalement, je me rapprochais de la destination que j’avais voulu atteindre un an plus tôt. Daniel m’apprenait à savoir où fouiller, à ne définitivement plus avoir peur, à être plus efficace contre les morts en dépit de ma taille. Après trois mois ensemble, il alla même jusqu’à me montrer le fonctionnement de son M16. Il disait qu’à deux, ce n’était pas comme dans un groupe : il était obligé de me faire confiance comme une égale, il ne pouvait pas me traiter comme une gamine. Il me traitait comme une vraie survivante, j'avais l'impression d'être une super-héroïne.
Avec le recul, je me demande s’il n’a pas dit ça pour une autre raison. Faut dire que je l’oubliais, mais je continuais de grandir : j’avais pris mes formes de femmes et à tous les coups, la survie me donnait l’air plus âgée que je ne l’étais. Vers l’automne 2017, on avait atteint le sud de Seattle et je pus faire deux constats : le premier, c’était que la métropole était un cimetière à ciel ouvert. Au même titre que le reste de l’état. Pendant un mois on a cherché un potentiel camp organisé, en vain. Le deuxième, c’était que le regard de Daniel changeait. Je ne sais pas si c’était à force d’être avec moi, ou s’il perdait la boule, ou s’il cachait un sacré désespoir derrière ses sourires, mais… il devenait bizarre. Il laissait ses mains s’attarder sur moi quand il m’apprenait des choses, je l’ai surpris en train d’essayer de me mater pendant que je me changeais et il commençait à tenter d’avoir des conversations gênantes à propos de ma sexualité. Quand je lui ai rappelé que j’avais 15 ans, il a rigolé en répondant que jusqu’au XVIIIè siècle, on pouvait marier des filles de 13 ans avec des hommes de 60. Ça m’a pas fait rire.
Je suis sûre que des gens vont se dire que j’aurais dû partir mais… j’étais qu’une gamine, encore. Une gamine qui avait toutes les armes pour survivre seule et savait manier un M16, mais j’étais qu’une gamine quand même. Alors je n’ai pas eu le déclic en décembre 2017 quand il m’a embrassé, je ne l’ai même pas eu en janvier 2018 quand on a… enfin… vous voyez. J’en suis sûre. D’abord, je me suis dit que c’était peut-être normal, qu’il avait peut-être raison après tout. Il m’avait appris tellement de chose, il avait toujours été sympa avec moi, il m’avait sauvé la vie… pourquoi je dirais non ? Si c’était un besoin pour lui que je pouvais satisfaire, alors ok.
Au début, ça n’avait été qu’une fois comme ça. Puis il y avait eu une autre fois le mois suivant. Puis deux fois en mars 2018. On survivait toujours au jour le jour, chassant des petits animaux qui n’avaient plus peur de revenir en ville, quand on ne trouvait plus de conserve. Parfois on squattait des maisons pas trop abimées, parfois, on échouait au No man’s land – entrepôt qu’on avait trouvé par « hasard » pendant notre quête de camp de réfugiés. En avril 2018, je sentais qu’il était en plein débat intérieur mais ça ne l'a pas empêché de réclamer à le faire plus d’une fois par semaine. Là j’ai commencé à vraiment sentir comme c’était malsain, comme je n’en voulais pas et comme c’était dangereux ! Et si je tombais enceinte ? S’il m’infectait ? Si je continuais à être de moins en moins une alliée pour être de plus en plus un défouloir sexuel ? Merde, j'étais vierge avant tout ça. Ça devenait hyper... hyper... j'ai pas les mots.
• Mai 2018 -> juillet 2018 : solitude.
Alors en mai 2018, j’ai pris mon courage à deux mains et je suis partie. De nuit, après être certaine qu’il dormait. Pas sans rien, j’avoue. J’ai pris mon 9 mm, mon couteau, une lampe torche, un sac et quelques réserves en munitions et nourriture. Depuis, je me démerde comme je peux. J’ai été à bonne école pendant deux ans et demi, je ne crois pas être moins douée qu’un autre pour prendre la vie au jour le jour. Même le contraire. J’évite le No man’s land et les endroits où on est déjà passés avec Daniel pour ne pas le recroiser. Bon, ok, parfois je me fais des blagues à moi toute seule pour avoir une bonne raison de rigoler et trouver le temps moins long. Je crois que pour l’instant, j’ai du mal à prendre du recul sur ce qu’à fait Daniel… je préfère ne pas y penser. Je ne me sens pas très bien à ce sujet. C’est ça le pire dans la survie, non ? Pas les morts, pas les bandits, mais le retour en arrière des mentalités.
Soyons honnête : quand on est jeune, on adore les scénarios morbides. Quand les informations ont commencé à parler de violences inexpliquées, d’intoxication alimentaire, j’étais à fond ! Avec mes potes, on avait l’impression de suivre une série télévisée mais dans le monde réel. Internet pullulait de rumeurs, de théorie du complot et autres fake news. Un jour mon frère a téléphoné pour dire que sa femme avait été mordue au sang par quelqu’un et je me souviens… avoir rigolé. Arrêtez, c’est marrant quand même quand on ne connait pas le contexte ! A l’époque, c’était marrant en tout cas.
Mi-octobre, il a rappelé pour dire qu’elle était en quarantaine, c’était un peu moins drôle. A la même période, on a fini par voir les informations fuiter : des histoires de contamination, de mort qui se relèvent, d’émeutes… de la pure science fiction. Mais que font les Avengers ?! Quand le net est tombée, mon père a essayé de se rendre sur la métropole pour voir ses collègues mais il n’a jamais pu passer les embouteillages à l’approche du Tacoma Narrow Bridge, alors il a fait demi-tour. Ça lui avait pris une journée entière.
Autour du 20 octobre, on avait plus de nouvelles de mon frère et de sa famille : là, ce n’était plus marrant du tout. J’ai bien essayé de contacter certains de mes potes mais je me heurtais soit à la coupure du réseau, soit au fait qu’ils étaient partis de chez eux. Les messages disaient bien de joindre les camps de réfugiés les plus proches mais… on était pas des réfugiés, pas vrai ? Alors… on est restés chez nous.
Fin octobre, c’était carrément la merde. Plus que des messages en boucle sur les téléviseurs ou à la radio. Impossible de joindre personne, y compris ma mère qui était en mission humanitaire au Venezuela depuis deux mois. Pas de nouvelles d’elle depuis trois semaines. Le village était déserté, hormis quelques agriculteurs irréductibles qui ne laisseraient leurs plantations pour rien au monde.
Début novembre, je n’étais plus qu’avec le paternel Moon, on voulait aller voir ce que donnait le camp de Sequim – d’après les dernières informations, c’était le plus proche. On a été accueillis par des gens un peu… bizarres. Livides, l’œil torve, ils ne parlaient pas et n’avaient pas l’air très habile. On a compris que quelque chose n’allait pas quand ils se sont jetés sur nous. Mon père a empêché in-extremis une femme de me mordre en la tirant par les cheveux et il l’a repoussé en hurlant qu’elle été folle. Je l’avais jamais vu comme ça : encore la pêche à 62 ans l’ancêtre !
Ensuite on s’est enfuis. Ils étaient quatre ou cinq derrière nous. Obstinés et visiblement absolument pas choqués à l’idée de gnaker une pré-adolescente. Le temps qu’on atteigne notre voiture, il y en avait d’autres et on en laissait tout un troupeau dans notre sillage. Dès le lendemain, on faisait le tour des quelques voisins encore là. Le couple Brooner chargeait un 4x4 de bagages et en entendant notre témoignage, ils nous incitèrent à faire comme eux : partir pour Seattle. D’après eux, s’il y avait des refuges dignes de ce nom et des administrations en mesure de les aider, ce serait là-bas.
Autant dire que ça n’avait pas convaincu monsieur Benjamin Moon. On était restés à Elwha. Une fois nos placards vides, on s’était résignés à aller « voler » la seule épicerie du village. J'avoue être coupable : dalleuse comme j'étais, je criais famille du matin au soir. On a d'abord commis notre méfait de nuit, en profitant que la porte n’ait pas été verrouillée par le propriétaire parti un peu vite – sans doute – puis en pleine journée. Les choses ne s’amélioraient pas et personne ne se manifestait, alors…
La première fois qu’un mordeur est arrivé jusqu’à chez nous, c’était en fin décembre. On allait se servir dans ce qui restait à l’épicerie et un type qu’on ne connaissait pas nous a attaqué. Il était clairement mort – l’odeur ne trompe pas – et pourtant, on a pas été trop de deux pour le maîtriser ! Mon père était fatigué et moi bah… j’étais une gamine de 13 ans putain ! C’est le fusil d’un fermier du village qui nous a sauvé alors que le monstre refusait de rester au tapis. Il nous a expliqué que c’était le sixième qu’il abattait en trois semaines, que ces choses n’étaient plus vivantes, qu’elles ne comprenaient qu’un langage : le plomb dans le crâne.
Je vous dis pas le choc. Résumons : j’ai plus internet (donc je suis comme un camé sans sa drogue), on a plus d’électricité (donc même mes consoles ne marchent plus), ma mère me manque (elle est toujours portée disparue) et les humains se transforment en mort-vivant affamés quasiment intuables (qu'est-ce que je peux dire là-dessus ?). Ça fait un super scénario de Marvel, sauf que je ne suis ni spider-girl, ni Black Widow. Avant, c’était méga-chiant mais excitant à la fois – le côté hors-la-loi de la survie. D’un coup, ça devenait flippant. C’est le même fermier qui nous a expliqué le mécanisme de la morsure, la maladie foudroyante, la mutation. Tout ça. C’était arrivé à son fils…
• Février 2016 -> mars 2017 : Les montagnes et la campagne.
Début février 2016 : l’épicerie était vide et notre copain le fermier s’était fait sauté le crâne. Il ne faisait que des céréales – rien qu’on puisse exploiter – et un cadavre était tombé dans son puits. On a tenu quelques jours de plus en pillant les maisons alentours cette fois mais finalement, la situation était si critique que mon père à ré-envisager l’idée de se rendre sur Seattle. Pour ça, on était parés ! Ma mère étant dans l’humanitaire, ce n’était pas les gros sacs à dos qui manquaient. On avait : lampe torche, boussole, des tas de piles, du chatterton, une carte de Washington, des allumettes, deux gros couteaux, des sacs de couchages, des produits de toilette, trousse de premiers secours, deux bouteilles d’1,5L d’eau et quelques vivres qu’il restait. Pensant aller plus vite, mon père voulut couper par les routes de montagne et arriver directement à Shelton, pour ensuite remonter à la ville d’émeraude par Olympia. Qui étais-je pour dire que c’était une mauvaise idée ? Et puis j'avais faim.
[…]
Difficile de dire ce qui m’a réveillé. Le froid ? Le goût du sang sur ma langue ? La douleur généralisée ? Le bruit du vent à travers les vitres brisés ? Putain. On avait eu un accident. Un bouquetin à la con sur une route de montagne vertigineuse complètement enneigée. On avait basculé sur le bas côté, dévalé la pente dans une suite de tonneaux, jusqu’à ce qu’un choc à la tête me fasse m’évanouir. J’ai eu de la chance je crois. L’airbag a dû me sauver la vie. Mon père par contre, je le vois à côté de moi alors que la grosse voiture repose miraculeusement sur ses quatre roues éclatées… il a le cou qui décrit un angle bizarre. Il est si blanc qu’il parait vert. Il ne dégage aucun volute de buée comme je le fais à chaque respiration. Il est mort.
Mais qu’est-ce que je vais faire ?!
Mettez vous à ma place : j’ai 13 ans, je ne suis douée que sur un ordinateur ou avec des jeux de construction, je n’ai personne à (re)joindre et mon seul responsable légal encore dans les parages est décédé. J’ai d’abord pleuré pas mal. Je n’arrivais pas à le regarder et en même temps, son corps sans vie attirait ma pupille. Je suis restée des heures comme ça, à côté de lui, à attendre dieu sait quoi. Notre épave était perdue au milieu de nulle part, dans les montagnes enneigées de l’Olympic National Park. J’allais mourir aussi, pas vrai ?
J’ai eu un espoir. Douloureusement fulgurant, quand mon père s’est mis à bouger. J’ai bêtement cru qu’il sortait du coma ou un truc comme ça. Et puis… il m’a attrapé pour essayé de me mordre. Heureusement – putain d’heureusement – sa ceinture de sécurité l'entravait. Je me suis débattue comme une diablesse, j’ai jamais été aussi terrorisée, déboussolée et traumatisée de ma vie. J’ai dû lui laisser mon manteau entre les doigts pour réussir à ouvrir ma portière et me laisser tomber dehors. J’ai grelotté encore des heures, plantée comme une cruche à côté de la bagnole à voir ce qui était jadis mon vieux père gesticuler en tendant les bras vers moi. L’air sauvage, inhumain, désincarné. Avec le recul, je me dis que j’aurais dû avoir le courage de l’achever, mais sur le coup, j’ai pas pu. J’étais qu’une gosse, vous vous souvenez ? Et j’avais déjà eu le temps de me résigner à une décision importante : j’allais prendre nos deux sacs et partir seule. C’était ça ou mourir.
Être surdouée et débrouillarde, c’était une chose. La réalité en était une autre. Tout était difficile : se repérer avec une carte et une boussole, marcher en étant chargée comme une mule, rationner sa nourriture, faire du feu, éviter les dangers, etc…. La logique me soufflait quelques astuces : comme trouver des refuges souterrains ou dans les arbres (pour éviter autant les grogneurs que les prédateurs), me montrer prudente et ne pas me faire remarquer. J’avais tenu le choc deux mois comme ça, à ruminer notamment la nature de la maladie qui transformait tout le monde, pas uniquement les mordus. J'étais pas moins en état de choc. Écorchée à l'intérieur et à l'extérieur. Foutue vie sauvage.
Je devais avoir eu mes 14 ans quand je débarquais à Grisdale – soit fin avril 2016. Complètement épuisée, affamée et, je l’admets, déprimée. J’ai eu la chance de rencontrer un groupe de campeurs complètement pacifiste. Ils étaient étonnés de savoir que j’avais survécu seule et pour ma part, j’étais heureuse de ne plus avoir à manger des lapins mal cuits, des oiseaux mal déplumés et des insectes dégueulasses. Ils étaient sept, ouverts et familiaux. Ils se déplaçaient régulièrement, s’établissaient dans des endroits reculés pour quelques jours puis bougeaient. Leur théorie c’était que de cette façon, ils étaient impossibles à repérés pour des bandits – car l’évidence voulait qu’il y en ait –, évitaient les grosses populations de mordeurs et n’épuisaient pas les ressources qui les entouraient.
Je n’avais pas mieux à faire alors je suis restée avec eux. Mes deux mois de survie en solitaire m’avait rendue plus que compétente pour participer à l’allumage des feux, la gestion des denrées et l’installation/désinstallation des campements. A la marche aussi, car on ne se déplaçait qu'à pattes. Je ne savais juste pas me défendre à proprement parler. Henry m’a appris à manier une arme de poing et un couteau. Un étudiant policier de la bande. Pour tuer les rôdeurs quand c’est nécessaire. N’étant pas bien grande ni très costaude, c’était plus préventif qu’autre chose. C’était ce que j’ai cru pendant presque un an en leur compagnie.
En mars 2017, le groupe était monté à douze personnes. On avait eu des hauts et des bas, des pertes et des arrivés mais globalement, la mécanique était rôdée. C’était même devenu tellement naturel qu’on s’était trouvé des instruments de musique pour parfois, se faire quelques soirées au coin du feu. C’est d’ailleurs au cours de l’une de ces soirées qu’on a été attaqués par des pilleurs, alors qu’on se pensait tranquilles dans la Capitol State Forest. Ils ont débarqué, ont tiré un peu dans tous les sens et tués ceux qui n’avaient pas réussi à s’enfuir. Par chance – ou pas – j’étais dans ma tente à ce moment là. Pétrifiée. J’ai pas osé sortir. Les réflexes de survie ont pris le dessus, bien sûr, mais j’ai eu l’impression de rester immobile pendant une éternité. Quand un sale type à pointé son nez dans ma tente pour la fouiller, il y a eu un moment de flottement. Je crois qu’il ne s’attendait pas à se retrouver face à un canon tenu par une adolescente de presque 15 ans. J’ai tiré entre les deux yeux et j’suis partie en courant sans regarder en arrière. J’entendais des balles s’écraser partout sur les arbres autour de bois, mais aucune ne m’a touché. J’étais putain de chanceuse encore…
• Avril 2017 -> avril 2018 : retour en métropole.
Là, j’étais de nouveau seule. Seule et démunie. Traumatisée, à nouveau. Je venais de tuer un être vivant. J'en ai vomi tout le contenu de mon estomac et perdu l’appétit plusieurs jours - moi, la grande vorace. J’avais un couteau à ma ceinture, un 9 mm et mes fringues. En remontant sur Olympia, j’ai pu subsister un mois mais ensuite : je serai morte sans Daniel. C’était un gars de 38 ans je crois, avec une grosse moustache brune, une calvitie et un air jovial, comme si le simple fait d’être en vie suffisait à lui laisser le sourire. Il s’était barré d’un camp militaire qui avait mal tourné apparemment, non sans avoir gardé un fusil d’assaut et un peu de matériel. Je crois qu’il a eu pitié de moi, parce qu’il m’a adopté.
Au début, c’était plutôt cool. A la différence des campeurs, ils préféraient rester à proximité des grosses agglomérations, car ils disaient que c’était là qu’on avait encore le plus de chance de dénicher à manger. On a vogué d’Olympia à Lakewood, Tacoma puis Federal Way. Le but étant de rester mobile mais de ne pas se paumer dans la cambrousse. Toujours à pieds, encore. Finalement, je me rapprochais de la destination que j’avais voulu atteindre un an plus tôt. Daniel m’apprenait à savoir où fouiller, à ne définitivement plus avoir peur, à être plus efficace contre les morts en dépit de ma taille. Après trois mois ensemble, il alla même jusqu’à me montrer le fonctionnement de son M16. Il disait qu’à deux, ce n’était pas comme dans un groupe : il était obligé de me faire confiance comme une égale, il ne pouvait pas me traiter comme une gamine. Il me traitait comme une vraie survivante, j'avais l'impression d'être une super-héroïne.
Avec le recul, je me demande s’il n’a pas dit ça pour une autre raison. Faut dire que je l’oubliais, mais je continuais de grandir : j’avais pris mes formes de femmes et à tous les coups, la survie me donnait l’air plus âgée que je ne l’étais. Vers l’automne 2017, on avait atteint le sud de Seattle et je pus faire deux constats : le premier, c’était que la métropole était un cimetière à ciel ouvert. Au même titre que le reste de l’état. Pendant un mois on a cherché un potentiel camp organisé, en vain. Le deuxième, c’était que le regard de Daniel changeait. Je ne sais pas si c’était à force d’être avec moi, ou s’il perdait la boule, ou s’il cachait un sacré désespoir derrière ses sourires, mais… il devenait bizarre. Il laissait ses mains s’attarder sur moi quand il m’apprenait des choses, je l’ai surpris en train d’essayer de me mater pendant que je me changeais et il commençait à tenter d’avoir des conversations gênantes à propos de ma sexualité. Quand je lui ai rappelé que j’avais 15 ans, il a rigolé en répondant que jusqu’au XVIIIè siècle, on pouvait marier des filles de 13 ans avec des hommes de 60. Ça m’a pas fait rire.
Je suis sûre que des gens vont se dire que j’aurais dû partir mais… j’étais qu’une gamine, encore. Une gamine qui avait toutes les armes pour survivre seule et savait manier un M16, mais j’étais qu’une gamine quand même. Alors je n’ai pas eu le déclic en décembre 2017 quand il m’a embrassé, je ne l’ai même pas eu en janvier 2018 quand on a… enfin… vous voyez. J’en suis sûre. D’abord, je me suis dit que c’était peut-être normal, qu’il avait peut-être raison après tout. Il m’avait appris tellement de chose, il avait toujours été sympa avec moi, il m’avait sauvé la vie… pourquoi je dirais non ? Si c’était un besoin pour lui que je pouvais satisfaire, alors ok.
Au début, ça n’avait été qu’une fois comme ça. Puis il y avait eu une autre fois le mois suivant. Puis deux fois en mars 2018. On survivait toujours au jour le jour, chassant des petits animaux qui n’avaient plus peur de revenir en ville, quand on ne trouvait plus de conserve. Parfois on squattait des maisons pas trop abimées, parfois, on échouait au No man’s land – entrepôt qu’on avait trouvé par « hasard » pendant notre quête de camp de réfugiés. En avril 2018, je sentais qu’il était en plein débat intérieur mais ça ne l'a pas empêché de réclamer à le faire plus d’une fois par semaine. Là j’ai commencé à vraiment sentir comme c’était malsain, comme je n’en voulais pas et comme c’était dangereux ! Et si je tombais enceinte ? S’il m’infectait ? Si je continuais à être de moins en moins une alliée pour être de plus en plus un défouloir sexuel ? Merde, j'étais vierge avant tout ça. Ça devenait hyper... hyper... j'ai pas les mots.
• Mai 2018 -> juillet 2018 : solitude.
Alors en mai 2018, j’ai pris mon courage à deux mains et je suis partie. De nuit, après être certaine qu’il dormait. Pas sans rien, j’avoue. J’ai pris mon 9 mm, mon couteau, une lampe torche, un sac et quelques réserves en munitions et nourriture. Depuis, je me démerde comme je peux. J’ai été à bonne école pendant deux ans et demi, je ne crois pas être moins douée qu’un autre pour prendre la vie au jour le jour. Même le contraire. J’évite le No man’s land et les endroits où on est déjà passés avec Daniel pour ne pas le recroiser. Bon, ok, parfois je me fais des blagues à moi toute seule pour avoir une bonne raison de rigoler et trouver le temps moins long. Je crois que pour l’instant, j’ai du mal à prendre du recul sur ce qu’à fait Daniel… je préfère ne pas y penser. Je ne me sens pas très bien à ce sujet. C’est ça le pire dans la survie, non ? Pas les morts, pas les bandits, mais le retour en arrière des mentalités.
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Chloe Grace Moretz • <bott>Mina Moon</bott>
≡ recensement du prénom. (prénom utilisé uniquement)- Code:
• Mina
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• Lycéenne
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Re: If we can't protect the earth, be damn sure we'll avenge it
Mar 31 Juil 2018 - 22:17
Preums et RE RE RE RE........ y en a déjà trop
#faible mais chouette perso <3
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Re: If we can't protect the earth, be damn sure we'll avenge it
Mar 31 Juil 2018 - 22:52
Hop hop hop hop hop c'est quoi cette arbalète sur le gif mademoiselle ?
Bref, t'as été aussi faible que moi
Et aussi bienvenue pour la millionième fois (je t'ai épargné les vieilles versions)
Bref, t'as été aussi faible que moi
Et aussi bienvenue pour la millionième fois (je t'ai épargné les vieilles versions)
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Re: If we can't protect the earth, be damn sure we'll avenge it
Mer 1 Aoû 2018 - 8:35
Hey t'es qui toi ?!! hinhin
Chouette compte en tout cas !! Vive les jeuuuunes !
Chouette compte en tout cas !! Vive les jeuuuunes !
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Re: If we can't protect the earth, be damn sure we'll avenge it
Jeu 2 Aoû 2018 - 1:14
Tu es maintenant validée ! Tu vas pouvoir commencer à survivre par tes propres moyens !
Si tu as la moindre question supplémentaire, tu peux contacter le staff par MP pour de plus amples informations.
Afin que ton intégration se passe bien :
• Poste ta fiche de liens pour trouver des copains
• Mais aussi tes annexes
• Et pour te lancer dans l'aventure viens faire une demande de RP !
• N'oublie pas non plus de recenser ton/tes PNJ.
N'hésite pas non plus à venir faire un petit tour dans le FLOOD et sur la CHATBOX, nous serons contents de t'y accueillir !
Le staff au complet, y compris toi-même, te souhaite une excellente apocalypse et un très bon jeu sur TWD
Si tu as la moindre question supplémentaire, tu peux contacter le staff par MP pour de plus amples informations.
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