In the shadow
Jeu 28 Mar 2019 - 17:52
In the shadow
tomorrow is another day and you won’t have to hide away. you’ll be a woman my girl. but for now it’s time to run...
Pluie et vent, le climat typique de la région, ajouté à cela la nuit qui venait de tomber, et cette maison, qui se tendait au bout de l'allée, aurait pu prendre des allures de cauchemars. Ce n'était pourtant qu'un tas de briques et de tuiles, mais depuis le décès d'une de ses habitants, il lui semblait qu'une aura plus sombre enveloppait la bâtisse. Une simple idée, aussi vague que l'étaient celles qu'on se faisait après avoir visionné un film d'épouvante. Cependant l’œuvre d'horreur, aujourd'hui, était bien le monde dans lequel ils évoluaient. Cain avait enfilé un sweat sous sa veste de cuir, pas que ce style lui plaisait plus que ça, néanmoins étant donné les cordes, la capuche de ce vêtement protégeait ses mèches brunes autant qu'elle préservait d'une potentielle crève, à l'heure actuelle, bien plus dangereuse qu'elle ne l'aurait été jadis. Il devait être là, où serait-il donc à cette heure tardive ? Au labo sans doute ? L'idée lui effleura l'esprit, mais les dernières soirées passées en sa compagnie, aussi rares avaient elle été puisqu'il tentait de mettre le doigt sur un remède potentiel, lui avait soufflé de tenter sa demeure avant de rejoindre un lieu qu'elle appréciait peu.
La demeure Davis n'avait plus rien de ce chaleureux qu'on pouvait lui trouver lorsque Amanda était encore de ce monde. A son humble avis, et puisque Lawrence n'y passait que peu de temps, pas plus que pour fermer l’œil ou se nourrir un minimum, elle n'était plus que le spectre de ce qu'elle avait été. Oui, juste un tas de briques et de tuiles, un dortoir sans âme, enfin si les baraques pouvaient en avoir : des âmes. Mains dans les poches le long de l'allée, Cain en extirpa une pour cogner le poing contre le battant avant de remarquer qu'il s’entrouvrait.
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Un bruissement provenant du fond du couloir la figea sur place. C'était peut-être juste la pluie, l'averse qui s'écrasait contre les pavés et l'herbe de la devanture, aussi repoussa-t-elle le battant avant de se taire une fois ce denier clos. Ce qui c'en suivit ne ressemblait pas à de l'eau ruisselant dans le caniveau, encore moins au vent, plutôt à des râles. Doucement, guidée par la lueur grise de la lune qui filtrait par les vitrages, la Canadienne avança. Elle dégagea sa capuche, s'arrêtant net auprès de cette porte au fond, celle qui menait à la cave. Bien le seul endroit qu'elle n'avait pas visité ici, même sa chambre se rappelait à son bon souvenir. Des râles oui, assez précis pour qu'elle en sourcille, agrippe la clinche et la tourne afin d'aviser l'escalier, plongé dans la noirceur, qui s'imposait à elle. C'était plus précis là, bien plus net, si précis qu'elle se tourna en cherchant des yeux de quoi s'éclairer. Rien, pas même l'interrupteur, le courant avait dû être coupé, une fois encore. Rien qui ne l'aiderait donc, la seule source lumineuse était cette lucarne juste en bas, celle qu'elle voyait cracher le peu de lumière extérieure jusque dans les entrailles de la baraque.
A peu de chose près elle aurait pu être sûre que les marches craqueraient, mais non. Après tout c'était pas un film, plutôt la réalité et le temps qui lui faisait penser à ces scénarios élimés dont les jeunes cons raffolaient à l'époque. En bas, elle plissa les paupières, un cliquetis de métal l'invita à déporter les yeux vers le fond de cette pièce étrange où une chaise trônait, une table et quelques autres choses qu'elle ne distinguait pas plus que ça, du moins pas mieux que la silhouette de dos, sombre de part le peu de lumière, voûtée près d'un mur.
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In-extremis, à bout de souffle puisqu'une chaîne lui coupait la respiration, Cain agrippa le bras de la charogne pour le lui briser avant de siffler lorsque les griffes du monstre lui empoignèrent les cheveux afin de la ramener dos à lui. Son cœur battait vite, trop vite, davantage en sentant cette pression désagréable contre son cou, sa trachée où l'air se raréfiait bien trop vite. Les tambours cardiaques heurtaient son crâne, ses doigts fins glissaient contre le bras squelettique du rôdeur. Impossible de jurer, de parler, de hurler, la faucheuse la lorgnait du coin de l’œil, un sourire mauvais logé contre son faciès désincarné. En un soupir lourd, quasiment étouffé comme se comprimaient ses poumons, la Canadienne recula avec le mort, lui imposant le poids de son corps, sentant le sien heurter violemment le mur derrière elle, jusqu'à se libérer et aviser les maillons brillants aux pieds de l'assaillant. Juste le temps d'y passer le le sien pour tirer les liens vers elle et ainsi voir s'écrouler la bestiole. Juste assez de temps pour saisir l'unique arme à portée : la chaise et ses quatre pieds de métal.
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Re: In the shadow
Jeu 4 Avr 2019 - 14:12
Frissonnant légèrement en rentrant sa tête dans ses épaules, le virologue tirait lentement sur le joint qu'il tenait entre ses doigts, laissant son esprit s'imprégner de cette douce drogue dont il abusait sans doute un peu trop. Réduire serait un bon plan mais autant se le dire : ça ne l'empêchait en rien de travailler et permettait de supporter un peu mieux tout le reste alors à quoi bon s'infliger un tel sevrage ? Alors que la journée touchait à sa fin, il avait ressenti ce besoin urgent de sortir de chez lui, ne pas rester dans cette atmosphère étouffante. Au labo il arrivait à gérer, c'était son monde, sa place. Mais à la maison les choses étaient bien différentes, la plupart du temps il n'y restait que pour dormir quelques heures, rien de plus.
Son regard clair posé sur l'eau devant lui, abrité sous un arbre, il ne retint pas un soupir. Il était descendu la une demie-heure plus tôt. Simplement pour se rappeler une fois encore pourquoi il faisait tout cela, se donner la rage de faire au mieux, se donner un but autre que simplement sauver l'humanité. Depuis le début de cette épidémie, sa motivation n'avait été qu'une satisfaction personnelle, se prouver à lui même qu'il avait les épaules pour accomplir un tel exploit, et peu à peu il y arrivait, les résultats se faisant de plus en plus concluants. Mais depuis que sa moitié n'était plus elle, qu'elle était infectée, sa détermination était toute autre. Il voulait le faire pour elle. Pour se rappeler qu'il risquait également de perdre à n'importe quel instant -et de la même manière- la seule personne qui lui importait encore sur cette terre. Inacceptable. Impensable. Voir le visage en décomposition de sa jumelle ne faisait que lui rappeler pourquoi il devait le faire et que tant qu'il n'aurait pas atteint ce but, Cain serait en danger. Mais cette motivation était restée secrète et il comptait bien garder ce secret bien enfoui dans sa cave.
Il resta planté là quelques minutes encore, le temps de terminer son joint, avant de jeter le mégot d'une pichenette. Le temps était venu de rentrer dans cette maison, vide de toute vie depuis qu'Amanda habitait le sous-sol. Essayer de récupérer un peu de sommeil, peut-être manger quelque chose si la drogue lui ouvrit suffisamment l'appétit, et recommencer une nouvelle journée qui serait semblable à la précédente.
Une étrange sensation, de trouver sa porte d'entrée bien plus entrouverte que lorsqu'il était parti. Sourcils froncés, il fit quelques pas dans la pénombre du logement. Le vent avait très bien pu pousser la porte, sans doute même, parce-que personne ne se risquerait à entrer sans invitation dans la baraque de Davis pas vrai ? Pas vrai. Du bruit parvenant du sous-sol parvint jusqu'à lui. Son sang ne fit qu'un tour, emballant son palpitant dans le même temps. Sans réfléchir il prit dans le salon l'arme à feu qui logeait dans un tiroir, se précipitant dans la cave. Il connaissait ces marches par cœur, toute cette maison qui était la sienne -la leur- depuis trois années déjà. Arrivé en bas, le virologue n'eut aucun mal à distinguer les deux silhouettes qui se dessinaient dans la pièce. Il braqua son arme sur l'invité surprise et appuya sur l'interrupteur au mur. Quelqu'un venait de découvrir ce qu'il cachait ici, qui il cachait ici. Et ce quelqu'un ne ressortirait pas vivant de cette baraque.
Du moins se l'était-il promis avant de voir qui était cette personne. Le temps sembla se figer, l'air venant à lui manquer, sa main se faisant tremblante. Joann était là, face à elle, prête à lui fracasser le crâne avec une chaise. «Je t'interdis de la toucher » siffla-t-il sur un ton qui mêlait rage et panique, surtout de la peur à dire vrai, visible également dans ses prunelles claires. La main qui tenait l'arme levée vers la brune tremblait toujours. De toutes les personnes présentes sur cette île, il avait donc fallu que ce soit la seule qui compte qui se retrouve face au corps en décomposition de celle qu'il avait perdu.
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Re: In the shadow
Ven 5 Avr 2019 - 11:06
In the shadow
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Pour l'instant les questions qui lui filaient le crâne ne trouvaient pas de réelles réponses, le simple fait que Davis ait gardé une charogne dans la cave de sa propre baraque était aussi surprenant que... normal pour elle. Peut-être testait-il différents produits à l'abri des regards insistants et juges de ses sbires, peut-être désirait-il garder tout le crédit d'une potentielle découverte pour lui seul ? Peut-être y avait-il une raison valable au fait qu'il ait cette blatte ici, enchaînée, et que cette dernière ait pu se risquer à la tuer. Ça n'était qu'à un cheveu, si elle n'avait pas eu de réflexe alors la Canadienne n'aurait même pas pu agripper cette chaise et serait là, dans un coin de cette putain de cave humide, à attendre que la fièvre monte, l'emporte et fasse d'elle la jumelle macabre de son bourreau. Son cœur battait à une allure folle, jusqu'à vibrer dans ses tempes et ses phalanges serrées à craquer sur le dossier du siège qu'elle soulevait déjà sans entendre le reste. Les pas rapides dans le hall au dessus d'elle, ceux tout aussi vifs dans les marches qu'elle avait descendu plus tôt, pas même l'écho de l'interrupteur qui fit cracher une lumière vive, aveuglante même, à l'ampoule vacillante du plafond.
Paupières plissées, elle se figea dans son entreprise, laissant ses prunelles agressées reprendre lentement le contrôle de la situation. Rivées sur le corps décharné devant elle, juste là, encore amouraché du sol grisâtre, elles redressèrent lentement le cap vers le propriétaire des lieux sans comprendre le peu de mots, pourtant bien audibles, qui venait de quitter ses lèvres. La toucher... La ? Ses yeux allaient et venaient entre son air froid, ses lèvres pâles et ses yeux clairs où se reflétait une lueur qu'elle n'avait encore jamais capturer en leur sein, puis ce canon, tremblant de part la réaction vive de son corps, rivé sur elle.
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Que pouvait-elle dire d'autre, comment devait-elle réagir au juste ? Ce qui pouvait lui paraître très ordinaire de sa part, propre à l'homme qu'il était, s'évaporait au profit d'une chose impensable qui l'obligea à lâcher prise sur le métal usé du siège entre ses mains. Le meuble heurta bruyamment le sol et l'écho se répercuta autant contre les murs sombres que dans l’entièreté de son corps. Amanda n'était pas à six pieds sous terre comme elle l'avait cru, comme il le lui avait maintes fois suggéré, elle était juste là, vacillante d'un pied à l'autre, l'écume aux lèvres, deux paires de chaînes entravant ses chevilles et ses poignets. Ses longs cheveux sombres en rideaux filandreux devant ses traits rongés par la mort. Depuis des mois elle était là, avec lui tandis qu'elle l'ignorait, tandis qu'elle croyait tout savoir de lui. Plus un mot ne fila ses lèvres roses, simplement les doutes dardaient contre son visage fermé, dans le creux de ses orbes ambres qu'elle eut peine à braquer dans les siennes. C'était comme s'il venait de la gifler, fort, trop fort même, la mettre à terre et piétiner la confiance aveugle qu'elle avait en lui.
Statufiée, Joann observa l'arme entre ses doigts, songeant à ce qu'elle aurait fait s'il n'avait pas s'agit de lui, si elle n'avait pas ressenti tant de choses étranges à son égard, s'il n'avait pas été celui sur qui elle pouvait tant compter, s'il n'avait pas été celui à qui elle avait tout, absolument tout confié. Là, elle l'aurait testé, l'aurait forcé à tirer sans se soucier de ce qu'aurait déclenché ce geste chez lui, parce qu'elle en était intimement convaincue malgré cette impression de ne plus le reconnaître : il l'aurait choisi elle, n'est-ce pas ? Le râle de la créature auprès d'eux l'obligea à réagir néanmoins, et à s'approcher de lui pour lui retirer sèchement le flingue des doigts et lui faire changer de cible entre les siens avant de presser la détente. La détonation la fit sursauter, vive et atrocement brusque dans la pièce étriquée, autant qu'elle brusqua son cœur qui se remit à pulser comme un acharné. Le projectile rejoignit le centre du crâne, le traversa et s'écrasa dans le mur derrière elle. Dans une corolle de mèches sombres, accompagnée d'une constellation de sang et de cartilage, Amanda s'écroula dos à la parois puis s'y affaissa comme si rien n'avait jamais eu lieu.
S'il n'avait pas s'agit de lui jamais elle ne l'aurait pas fait, s'il n'avait pas été lui, Joann l'aurait forcé à le faire pour s'assurer ne s'être trompée sur son compte, pour être sûre qu'il tenait davantage à elle qu'à ce monceau de chair sans plus d'âme ou de conscience. Le bras encore tendu vers la cible, la Canadienne le baissa avant de se hasarder à le fixer. C'était peut-être comme ça que tout se terminait entre eux ? Comme ça qu'elle mettait fin à ce qu'elle ressentait depuis toujours pour lui et qui, malgré la peine qu'elle avait à comprendre, mûrissait au grès des jours, semaines et mois à son égard ? Elle tenait à lui, plus qu'à n'importe qui d'autre, plus que tout, tirer et lui ôter ce poids du cœur en était la preuve, mais peut-être ne le verrait-il pas de cette manière.
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Re: In the shadow
Mar 7 Mai 2019 - 4:21
Arme toujours orientée vers la Canadienne bien que toujours aussi peu assurée, le quarantenaire n'avait pas répondu à sa question. Avait-il seulement entendu ce qu'elle lui disait ? L'avait-il comprise ? Probablement pas. Les mots ne l'avaient même pas percuté. Tout ce qu'il voulait en cet instant précis était qu'elle s'éloigne du putain d'infecté qu'était devenue sa moitié. Qu'elle se recule et ne la touche pas. Sinon quoi ? Il serait bien incapable de tirer. Et la manière dont la brune venait de prononcer son nom mêla en lui une certaine peine à la rage et la peur. Elle ne comprenait pas. Elle aussi devait avoir peur. De mourir ? Peut-être bien. Sûr que si ç'avait été quelqu'un d'autre qu'elle, il n'aurait pas hésité une unique seconde à tirer. Pour protéger son secret, protéger aussi ce qu'était devenue sa jumelle. Mais Joann n'était pas n'importe qui, elle était la seule personne qui comptait tant à ses yeux qu'à son cœur. Et toute la difficulté était là : il se sentait bouffé à l'idée de lui insuffler de la peur, de la décevoir, de la briser, sans pour autant pouvoir aller à l'encontre de ce besoin viscéral de se raccrocher à ce que représentait Amanda depuis qu'elle avait rejoint le rang des infectés.
Le temps se figea à nouveau lorsque Cain posa son regard sur celle qui, auparavant, était pleine de vie, opposé direct du virologue. S'il perçut brièvement les quelques mots choqués qu'elle avait soufflé, il ne s'en étonna pas. Que pensait-elle maintenant ? Qu'il avait complètement vrillé ? Qu'il déraillait bien plus qu'elle ne l'avait pensé jusqu'alors ? Cette éventualité là aussi lui serra le cœur, lui qui, pourtant, se fichait royalement de tout ce que pouvaient penser les autres de sa personne, n'ayant rien à prouver à personne. Mais l'escort n'était pas les autres, et toutes ces émotions contradictoires qu'elle faisait naître en lui en cet instant embrumaient son esprit d'un poids qu'il ne savait même pas comment gérer. Il n'essayait même pas de le gérer à dire vrai, bien trop occupé à laisser son regard voguer de l'une à l'autre, décidé à réagir au moindre geste. Son instinct le savait, que si Amanda s'en prenait à elle, il l'abattrait avant même que ses doigts décharnés n'aient pu se poser sur sa peau. Mais il n'avait pour autant aucune envie d'avoir à en venir à une telle finalité. Pire : une part de lui en était tout bonnement incapable.
Le bruit assourdissant provoqué par cette chaise qu'elle laissait retomber le fit sursauter, forcé à sortir un instant de sa torpeur sans pour autant bouger d'avantage. Les seconde semblaient s'égrener avec une lenteur qui aurait pu rendre fou n'importe qui, l'angoisse de Davis ne faisant que grandir d'avantage au creux de son estomac. Il était bien incapable de dire quoi que ce soit, sa gorge rendue totalement sèche, les mots bloqués sous toute cette couche de panique, d'indécision. Quand un râle brisa le silence de la pièce, il reposa instinctivement ses prunelles claires sur l'infectée qu'il avait tant chérie encore quelques mois auparavant. Cette partie de lui qui désormais n'était plus. Parce-qu'il n'avait pas été assez efficace, pas assez rapide pour trouver le moyen de la sauver. Il se haïssait pour cela. Tout comme il se haïssait en cet instant d'avoir à la confronter elle à ce qu'il gardait bien caché ici.
Et le défilement du temps reprit son cours. Plus rapide. Trop rapide. En quelques secondes, Joann était venue jusqu'à lui, toujours figé. Il n'avait pas réagi plus quand elle lui avait pris l'arme des mains. Ni même quand le coup de feu assourdissant empli la pièce, raisonnant dans son crâne, jusqu'au plus profond de son âme. Une unique expiration fila entre ses lèvres avant que tout ne se bloque à nouveau. Et il la regardait s'effondrer contre le mur. Celle qui avait tant représenté, tant vivante que morte, à des degrés différents. L'angoisse s'était évaporée, cette peine indescriptible suivant le même chemin, ne laissant que l'impuissance. L'impuissance et l'incompréhension. Cette dernière ne tarda pas à se muer en une rage profonde, ses poings se serrant inconsciemment.
Ce fut la voix de celle qu'il estimait tant qui le tira de sa torpeur, le ramenant à cette réalité qu'il aurait préféré ne jamais avoir à affronter. Le deuil de sa jumelle avait été fait quelques temps après sa perte. Le deuil de ce qui représentait sa motivation commencerait de la manière la plus brutale qui soit. Si tout son être n'avait pas été grondant de rage, sans doute aurait-il perçu les nuances dans son ton, probablement qu'il aurait remarqué combien elle était perdue, désemparée, apeurée. Mais les si n'avaient pas leur place dans la situation. Le regard qu'il posa alors sur elle, arraché avec force à la contemplation de ce qui était désormais bel et bien un cadavre, était assombri par la rage. «Tu penses vraiment que j'étais con au point... d'espérer ? » siffla-t-il d'un ton froid, une certaine déception y étant cependant perceptible. «Si y a bien une seule foutue personne qui sait que ce putain d'état est irréversible c'est moi, Joann, et pourtant tu me crois assez aveugle pour me raccrocher à un fantôme ? » De la déception oui. La déception qu'elle soit persuadée qu'il avait gardé l'infectée qu'était son double dans l'espoir bidon de la ramener un jour à la vie. Le connaissait-elle si mal ?
«Si tu m'avais demandé tu aurais compris. Si seulement t'avais été foutue de demander » ajouta-t-il en secouant la tête, une peine réelle venant se mêler à la colère dans ses orbes clairs. Bien trop peu à même de comprendre les sentiments relatifs aux Hommes, Davis ne parvenait même à définir ce qu'il ressentait en cet instant. Un gros bordel. Un bordel plein de haine, d'impuissance, de déception, de peine, de dégoût, de peur, de vide. Si une partie était dirigée envers elle, l'autre partie concernait sa propre personne. Mais il était bien incapable de faire le tri dans ces émotions. Et la déception se fit plus prononcée, accompagnée de cette angoisse justifiée par ce qu'il venait de perdre. Il lui aurait dit oui, si seulement elle avait demandé. Incapable de rester plus longtemps, il se détourna et grimpa rapidement l'escalier, filant dans l'entrée pour quitter la baraque, se fichant pas mal de la pluie torrentielle qui lui tombait sur la gueule. Il avança ainsi jusqu'à la rive et s'arrêta enfin, son regard perdu sur l'immensité qui lui faisait face, incapable de savoir si c'était ce dernier qui s'emplissait de toutes ces émotions ou si seule la pluie ruisselait sur ses joues.
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Re: In the shadow
Mar 7 Mai 2019 - 11:09
In the shadow
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Ce silence là, où seul le faible écho de la détonation résonnait encore, il lui faisait sans doute plus mal que tout ce qu'elle avait vécu jusqu'à présent. Ce silence il lui trouait le cœur, rouvrait les différentes plaies qu'elle pensait cicatrisées, creusait encore et encore ce gouffre qui déversait tout ce qu'elle voulait garder pour elle, tout ce qu'elle mettait sous clé, tout ce qu'il lui avait arraché, impunément, presque contre son gré, avant qu'elle ne s'y enlise, qu'elle s'y laisse prendre et s'échoue plus fort, même brutalement, contre le sol. C'était dur, froid, pesant, elle ne s'en était pas vraiment remise ou à peine, se raccrochant à lui devant elle, à ce qu'il était pour elle depuis des années, à cette manière d'être, au fait qu'il était comme elle avant qu'elle sombre, lorsque les émotions, les sentiments ne l'affectaient pas le moins du monde. Davis était ce pilier auquel elle se cramponnait pour maintenir l'illusion, perdurer après le pire, paraître inchangée aux yeux extérieurs et ici, après ça, elle le perdait tout comme elle s'était paumée dans un univers « édulcoré » dans lequel elle n'avait pas sa place. Avant qu'il parle, elle baissa le bras armé et ravala sa salive en fixant ses mains. Ce n'était plus que des poings serrés, ses phalanges blanchies à craquer lui remémorant celles qui ne se poseraient plus jamais sur elle.
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Sa voix l'acheva et brisa son élan. Figée, la Canadienne redressa les cils vers son regard de givre. Glacial. Son timbre était déchirant, marquant. Jamais il n'avait agi ainsi face à elle, jamais il n'avait été aussi blessant avec elle. Ce n'était que pour lui pourtant, pour le garder jalousement à la place qui était sienne, dans cette réalité là, auprès d'elle, qu'elle avait agi de la sorte. Égoïstement Joann avait besoin de lui, il était ce qui lui restait de son existence précédente, de ce qu'elle était et ce qu'elle n'imaginait jamais changer à ce point. Il n'avait pas le droit de changer, il n'avait pas le droit de...
Son cœur roula durement dans sa poitrine quand il reprit la parole. Elle le voyait se fêler, une immonde lézarde brillante lui fendre le thorax pour libérer ce qu'elle même voulait garder sauf, à l'abri des regards. Ce qu'elle peinait à accepter et qui l'obligeait à composer plus qu'elle ne l'aurait fait avant. Est-ce qu'elle venait de le perdre ? La réponse était là dans ses orbes claires : Oui. Cette évidence la cloua sur place, l'empêcha de lui parler, de lui hurler qu'il était ce dont elle avait besoin pour rester celle qu'il connaissait, qu'il appréciait, celle en qui il avait confiance. Du moins... celle en qui il avait aveuglément confiance encore deux minutes plus tôt. Elle savait pas, ou plus ce qu'il désirait, ce qu'il voulait, ce qu'il espérait en gardant la dépouille de sa sœur ici. Si seulement t'avais été foutue de demander. Sa dernière phrase l'invita à crisper les doigts contre l'arme qu'elle tenait encore, à serrer les mâchoires tandis que son cœur battait plus vite. Quand il tourna les talons, elle avança d'un pas en reposant le flingue sur la première surface disponible, ouvrant la bouche en n'imaginant pas que son timbre serait aussi plaintif, éraillé, douloureux.
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La gorge déchirée par le spectre des larmes, elle heurta le dos au mur avant de souffler puis d'aviser les marches. Elle pouvait choisir, elle pouvait le récupérer encore ? Tout n'était que contradiction dans son crâne néanmoins elle gravit les escaliers, repoussa la porte d'entrée à l'étage et affronta la pluie. Rincée en peu de temps, Joann fixa les alentours, l'écran noir devant elle, jusqu'à capturer sa silhouette un peu plus loin, là bas, près de la rive. Après quelques pas rapides, lourds même, Cain s'arrêta net à bonne distance. Elle n'avait pas peur de lui, il lui avait dit ne jamais la blesser, pourtant là, il venait de la foutre à terre en un battement de cils.
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Re: In the shadow
Mer 8 Mai 2019 - 12:30
Reste. La demande qui avait plutôt sonné comme une supplication n'avait pourtant pas arrêté le quarantenaire qui avait poursuivi son avancée, s'éloignant le plus possible du cadavre de sa moitié, de ce qu'il représentait à ses yeux, d'elle. Parce-que rester était au dessus de ses forces en cet instant, qu'il ne pourrait la regarder en face sans lui cracher sa haine à la figure, sans lui dire combien il était déçu qu'elle en soit venue à penser qu'il gardait l'infecté parce-qu'il espérait pouvoir récupérer un jour sa jumelle. Et cette déception n'était pas anodine, elle n'était pas juste ça, elle l'avait blessé, au plus profond de son être. S'il n'était pas à même de mettre des mots sur ces émotions qui le secouaient, il n'eut pas de mal à comprendre que la douleur qu'il ressentait, celle qui comprimait son cœur et lui retournait les tripes, était bien trop importante pour qu'il puisse simplement rester en face d'elle. Davis n'avait pourtant jamais été du genre à fuir les problèmes, à être lâche, mais il n'avait non plus jamais été du genre à s'encombrer d'émotions aussi destructrices et incompréhensibles que celle qui le secouait actuellement. Et pourtant.
Son regard clair toujours figé sur l'obscurité qui lui faisait face, les vagues se détachant partiellement dans la nuit, le virologue était là sans être. Il se savait physiquement présent mais son esprit, lui, était trop enseveli sous tout ces sentiments qu'il avait à encaisser pour qu'il puisse réellement y voir clair, pour qu'il puisse revenir à lui. Comment canaliser la rage lorsqu'elle était aussi destructrice ? Comment accepter l'attachement quand il venait à vous briser ? Comment simplement composer avec tous ces attraits humains après tant de temps à ne leur laisser aucune place ? Ses mains s'étaient mises à trembler, à l'instar de ses lèvres qui portaient le goût salé de ces larmes qu'il ne cherchait même pas à comprendre. La colère, la déception, la peine, qu'importait. Elles finiraient par disparaître, tout comme il travaillait inconsciemment pour renfermer ces émotions à double tour dans un coin de son crâne. Tout pour stopper cette sensation du sol qui se dérobait sous ses pieds, de ses repères d'insensibilité qu'il avait perdu en une fraction de seconde comme si, après toutes ces années, il s'éloignait finalement de l’œil de la tornade, plongeant contre son gré en plein dans cette rafale chaotique qui le laisserait changé. Et pour la première fois depuis longtemps, il n'aspirait qu'à une chose : succomber à un putain de shot d'héroïne pour faire taire toutes ces voix dans sa caboche, vice de son passé auquel il n'avait pourtant pas songé depuis bien longtemps.
Dans le silence environnant, bien différent du brouhaha qui cognait sous son crâne, sa voix le ramena à la réalité. S'il ne réagit pas aux premiers mots, à son insulte, il sentit cependant son corps se crisper en entendant son nom. Relégué au rang de n'importe qui. Ils en étaient donc réduits à cela désormais mais, là encore, il n'en ressentait qu'une rage sans nom. Resserrant ses poings, il l'entendait lui parler de promesse, celle de ne pas l'anéantir. N'y tenant plus, le quarantenaire se tourna enfin vers elle, captant son regard ambré, bien incapable d'y discerner quoi que ce soit sous la flotte et l'obscurité. «Qui vient d'anéantir l'autre, Joe ? » rétorqua-t-il de ce ton froid, distant, ce ton bourré de la condescendance qui faisait de lui ce type exécrable que la plupart haïssaient. Il laissait clairement entendre que c'était précisément elle qui avait pris ses droits sur lui en s'en prenant à sa moitié, en prenant cette putain de décision pour lui. Elle n'avait pas le droit de le faire, aucun droit, et pourtant elle ne s'en était pas privée le moins du monde. Le voyant retirer la bague de Blackmore pour la balancer à ses pieds, il s'était contenté de froncer les sourcils. Alors quoi ? Elle lui balançait des trucs pour lui montrer qu'elle était blessée et en colère ? Bien. Ils étaient deux, même si lui se contentait de darder sur elle un regard qui, s'il avait été une arme, l'aurait réduite en cendres dans l'instant. Un soufflement dédaigneux fila de son nez alors qu'elle avançait qu'ils étaient tous deux sur un pied d'égalité. C'était à ça qu'ils jouaient ? Qu'elle jouait ? À le foutre aussi bas qu'elle ne l'était depuis la perte du jeune ? Comprenait-elle seulement ce qu'elle avait fait ? Bien sûr que non. Et ça ne l'avait pourtant pas empêchée de porter des conclusions qui n'étaient pas lui, comme si elle ne le connaissait même pas, ou du moins pas si bien qu'il l'avait espéré.
La voyant venir rapidement jusqu'à lui, il s'y était préparé, à parer le moindre coup qu'elle pourrait lui assener sous la colère. Mais il n'en fut rien. Avant même qu'il puisse comprendre son intention, il senti ses doigts glacés enserrer sa nuque, ses lèvres plaquées sur les siennes en un baiser presque douloureux tant il était lourd de tout ce qu'elle portait. Il aurait pu la repousser. Sans doute aurait-il dû le faire. Même ce qu'elle raviva en lui coupa net toute intention. La rage s'évapora en une fraction de seconde, la haine suivi le même parcours, ne laissant que la peine, la peur, comblant un peu du vide qui s'était creusé en lui et dont il ne prenait réellement conscience que maintenant. Il ferma un instant les yeux, se laissant simplement habiter parce-qu'il ne comprenait pourtant qu'à moitié. Elle lui avait arraché ce qui lui permettait de ne pas flancher, de se raccrocher à son objectif, mais l'infecté qu'était devenu sa sœur n'était pas le seul élément de sa motivation. Elle en était un également, sans doute le plus important bien que se rendre à l'évidence était aussi effrayant que décevant. Parce-qu'elle était une faiblesse à ses yeux, lui ôtant la garantie que jamais il n'aurait plus à laisser entrer quelqu'un dans son cœur. Et pourtant il le sentait gronder, là, battre bien trop vite, plus vite que jamais. L'évidence qui s’immisça en lui ne fit que le figer d'avantage, accentuant l'angoisse : il ne servait à rien d'emprisonner son putain de cœur dans une tour, elle y avait déjà sa place, la gagnant chaque jour un peu plus sans même qu'il n'y soit méfiant. Et maintenant il était trop tard pour tirer un trait sur ça.
Et elle se recula, le laissant là, partagé entre l'incompréhension, la peur et une once d'apaisement. Son regard à nouveau dardé sur elle, nettement moins sombre, plus perdu, Davis écoutait ses mots, inspirant profondément alors qu'elle concluait. Mâchoire crispée, il déglutit difficilement. Lui dire maintenant qu'elle avait royalement merdé ? Soit. «Tu sais pourquoi Amanda n'a pas survécu ? » Marquant un temps de silence sans attendre pour autant une réponse, il reprit. «Parce-que je n'ai pas été assez rapide pour trouver une putain de solution. C'est pour ça qu'elle y est passée, parce-que je n'ai pas été foutu d'assurer et de fournir un vaccin viable avant. » Si son ton était toujours relativement sec, son regard, lui, témoignait bien de l'intensité avec laquelle il était touché par ce qu'il disait. «Je l'ai gardée pour me rappeler chaque jour ce que j'avais perdu, me rappeler que si j'avais été plus efficace ça ne serait pas arrivé. -ce qui justifiait son travail acharné depuis la tragédie-Me rappeler que je devais le faire pour que tu ne finisses pas comme ça. » A quel moment sa volonté et son ego avaient-ils été dépassés par ce besoin d'assurer sa sécurité à elle ? Il était bien incapable de le dire, mais c'était bien là, il le sentait pertinemment, et c'était bien ce qui le terrifiait.
«T'avais pas le droit de prendre cette décision à ma place » ajouta-t-il en secouant la tête, son ton légèrement éraillé dû à la boule qui pesait dans sa gorge. Pour autant il soutenait son regard, s'ouvrant à elle simplement parce-qu'elle était la seule à qui il avait le sentiment de devoir rendre des comptes et ce malgré la déception qu'elle avait fait naître en lui. Amenuisant la distance qu'elle avait remis entre eux, le virologue porta une main à sa joue, la forçant à relever le nez pour plonger dans ces prunelles ambrées. «T'en avais aucun droit Joe... » Son nom mourut entre ses lèvres alors qu'il la regardait toujours. Nul doute qu'elle devait voir dans ces orbes bleus combien il était affecté par son acte, combien il lui en voulait, mais aussi combien il était franc en avançant qu'il faisait cela pour elle, que la perdre reviendrait à se perdre lui. Et parce-qu'il avait besoin de se raccrocher au seul pilier qu'il lui restait, celui qu'elle représentait et qui, très ironiquement, le brisait tout autant qu'il état indispensable, il passa ses bras autour de ses épaules, déposant sa joue contre ses cheveux en fermant les yeux. «J'avais besoin de garder ce qu'elle était devenue pour ne pas oublier » murmura-t-il avant de se taire pour de bon, bien incapable de démêler réellement ses pensées sans risquer de complètement s'y perdre.
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Re: In the shadow
Mer 8 Mai 2019 - 12:40
In the shadow
tomorrow is another day and you won’t have to hide away. you’ll be a woman my girl. but for now it’s time to run...
A bout de souffle, suspendue à ses lèvres qu'elle sentait encore fraîches sur les siennes, comme un spectre qui perdurerait, comme s'il remplaçait et balayait tout en ne laissant que du « compliqué », Cain l'observa. Cette complexité là, Joann peinait à l'apprivoiser, parce que ce n'était pas n'importe qui, ni même un type qu'elle pouvait manipuler, contrôler, parce Davis n'avait rien à voir avec tous ceux qui pouvaient l'aimer pour de mauvaises raisons. Des raisons qui l'avaient poussée à se vendre comme un accessoire car elle ne valait que ça, qu'elle ne connaissait que ça, qu'on ne l'estimait que pour ça. Les larmes dévalaient encore ses joues, mais mêlé à la pluie rien n'était visible, encore moins son cœur qui pulsait comme un dingue, un fou furieux, un aliéné prisonnier de sa geôle depuis tellement de temps qu'il en avait oublié, ou peut-être même n'en avait-il jamais eu conscience, la saveur et les odeurs extérieures. Pas un mot de plus ne fila sa trachée nouée, en revanche ses yeux fondaient dans les siens où, lui semblait-il, plus une once de rage ne le nimbait. Il était là à nouveau, devant elle, comme elle l'appréciait bien trop, comme il l'avait promis, pour autant oui, elle voulait savoir. Connaître les raisons de ce qu'elle avait malheureusement découvert malgré elle, ce qu'il lui avait caché, ce qu'elle ne comprenait pas ou si, mais pas de la manière dont lui voulait qu'elle le voit. Sa question la ramena à cette journée, à Agathe, au pont, lui tiraillant le cœur dès lors qu'elle avait compris que sa jumelle y passerait.
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Néanmoins il reprit, s'infligeant la perte de sa sœur et la culpabilité qui allait avec celle-ci. Ils avaient eu beau sourire en l'imaginant messie, à contrario de l'ex routier qui n'était rien de plus qu'une poche de sang – précieuse certes – sur pattes, mais il ne l'était pas. Là encore ce qu'elle avait pu ressentir auprès de l'étudiant lui revint comme une gifle, monstrueuse et magistralement douloureuse. Elle n'était pas invincible, le scientifique tout autant qu'elle. Ils étaient humains bien plus qu'ils ne l'admettaient, bien plus qu'ils n'oseraient se l'avouer, bien plus qu'il ne le désirait sans doute. Mais c'était le cas et ce n'était pas de son fait si les avancées, cette recherche sur un potentiel vaccin, n'avaient guère aboutie avant que le pire se produise.
Joann dévia les cils, fixant l'étendue liquide auprès d'eux où la pluie creusait quelques gouffres miniatures et éphémères. Elle l'entendait, elle imprimait et tout ce qu'elle parvint à faire fut de ramener les mains contre le haut de ses bras. Il lui était difficile de soutenir son regard là, parce qu'elle n'y avait jamais capturé toutes ces choses, pour autant sa conclusion, cette révélation ci fit pulser son cœur bien plus vite. L'organe se tordit, fort et brutalement, elle ne s'y attendait pas même si elle savait avoir son soutien, son aide, sa confiance et son épaule pour s'éviter de nombreuses chutes, mais elle n'avait pas comprit ce qui les liait parce qu'elle ne comprenait pas non plus ce qui la poussait à inlassablement revenir vers lui. La trentenaire ravala cette boule immonde dans le creux de sa gorge nouée, les doigts crispés dans le cuir rincé qui lui couvrait le buste. T'avais pas le droit... Les yeux toujours rivés dans le vague, entre les vagues même, le vent lui cingla l'échine en un souffle glaciale qui l'obligea à serrer les mâchoires. Elle en avait le droit si, mais lui non plus ne pigeait pas son geste, lui non plus ne la comprenait plus ou ne l'avait jamais véritablement comprise. Elle aurait pu le pousser à choisir entre elle et sa sœur, elle aurait pu oui, mais il n'était pas l'un des pions qu'elle se complaisait, jadis, à manipuler à sa guise pour obtenir ce qu'elle convoitait.
S'il avait été l'un d'eux, ce n'était plus le cas depuis des mois, depuis longtemps, si elle avait eu ce désir de gravir les marches pour supplanter tous ces connards bien pensant, pour avoir le contrôle absolue, aujourd'hui, avec lui... chaque geste, chaque mot, chaque fait, n'était là que parce qu'elle le sentait s'enfoncer si loin dans le creux de son cœur qu'il en délogeait tout, pour se l'accaparer en un égoïsme plaisant mais affolant, terrifiant à son regard sombre. Quand elle le vit avancer, qu'elle sentit ses doigts glisser contre sa joue perlée de pluie, Joann sentit cette même joute, ce même courant lui traverser le corps de part en part. Ses paupières en vibrèrent alors qu'elle revenait ancrer ses billes aux siennes. La douleur l'enveloppait autant que sa présence rassurante. Elle aurait dû jubiler, s'extasier de le récupérer mais non, seule l'angoisse, la peur et cette envie y étant mêlée, foutait un bordel monstre dans son crâne autant que dans ce qu'elle ne voulait plus donner à quiconque.
Il répétait qu'elle n'avait pas le droit, elle pensait pourtant avoir fait ce qu'il fallait, vraiment, pour le préserver lui d'une folie qui l'emporterait loin d'elle. C'était sans doute égoïste, sans doute oui parce à le dépeindre ici, en le sentant l'attirer vers lui, contre lui, comme une poupée de chiffon sans plus de volonté sinon la sienne, Joann se sentait coupable pour l'une des rares fois de son existence. Figée entre ses bras, elle ferma les yeux, écouta les battements vifs de son cœur, le bruit de l'averse autour d'eux, puis décroisa les membres pour premièrement serrer sa veste puis enfin ramener une main à ses mèches trempées pour le garder là, contre elle, jalousement. Juste à elle parce que son cœur le lui dictait alors que son crâne partait, fuyait et lui imposait une réflexion qui lui filait mal, mal comme jamais.
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