Ils étaient douze. Leurs silhouettes décharnées se dessinaient depuis le bout de la rue, dans la chaleur pesante de ce mois d'août. L'atmosphère était moite, lourde. Ils avançaient vers une destination inconnue, attirés certainement par un écho ancien. Parmi eux se trouvait une adolescente. Bien vivante. Elle s'était barbouillée le visage de sang, entre autre. Ce dernier lui collait à la peau dans un poisseux mélange avec sa transpiration. Elle s'en moquait. L'aspect, l'odeur. Elle suivait ces macchabées sans but précis si ce n'était de découvrir le leur. 

Quand elle avait fugué du lycée, Kaycee s'était souvent glissée ainsi dans le sillage des morts comme Rowen le lui avait appris. Leur présence l'avait toujours galvanisée. Parmi eux elle se sentait étrangement en sécurité. Elle s'était ainsi souvent servi d'eux pour se déplacer. Puis en rencontrant Hannah et ensuite Roxanne, elle avait perdu l'habitude de le faire. Les filles n'étaient pas fans du concept et à plusieurs, elles étaient moins vulnérables.

Mais elle était aujourd'hui de nouveau seule. Entourée de plein de gens, Kara, Clarke, ses parents, Kerwan, Jimmy, les autres mais seule pourtant. Avec eux, elle devait faire semblant. D'avoir le goût de vivre, de bouillir de projets et d'aller de l'avant. Ici, loin du No Man's Land, parmi les morts, c'était inutile. Ils ne la voyaient pas... Elle aimait ça.

Elle suivait alors la marche de ces compagnons. Le regard planté dans leurs nuques nécrosées, leurs cheveux éparses et sales. Son cerveau déconnecté, pour ne surtout pas penser. Son regard partit cependant droit devant, quand le groupe choisit de s'approcher des bâtiments. Mauvais calcul de trajectoire ? En voyant les pics autour d'un garage recouvert de taule, elle ne le pensa pas. Il y avait probablement quelqu'un là-dedans, peut-être même un groupe, qui avait du faire le bruit de trop. Celui qui attire les morts des environs tranquillement. Un corps était déjà empalé sur l'un des pics et agitait ses bras vers l'avant. Instinctivement, Kaycee ralentit sa marche jusqu'à se retrouver en arrière des rôdeurs et s'arrêta. Un instant. Elle pouvait rebrousser chemin et disparaitre au plus vite. Ou agir.

- Désolée les copains, murmura-t-elle. Déjà trois de ses camarades s'étaient empalés à leur tour sur les pics, quand la gamine choisit de dégainer sa batte à pics – aussi ! - en acier. Elle explosa le crâne d'un premier monstre, puis d'un second. Mécaniquement, par des gestes répétés depuis plus de trois ans, l'adolescente méconnaissable mit à terre presque tous les rôdeurs autour d'elle.