Cassidy Jenkins - I'm still breathing
Dim 24 Nov 2019 - 11:40
Intuitive Débrouillarde Attentionnée Impliquée Loyale Obstinée Insolente Distraite Caractérielle Impulsive | Blonde aux yeux bleus, plutôt bien foutue, ça fait cliché, mais ça marchait pourtant pas mal. Mais bon, pour le peu que ça m’a intéressé, de plaire aux autres… Maintenant… comme tout le monde, j’ai perdu du poids et je dois avoir l’air à peine plus fraîche que les morts. Faut dire que je dors pas beaucoup , et que je dors mal, depuis que je suis toute seule. Déjà qu’avec les mecs, c’était pas forcément la joie, maintenant, si je dors plus de quelques heures, c’est la panacée. Sans parler de cette bronchite, ou pneumonie, ou que sais-je, qui essaie de me tuer depuis des semaines maintenant. Non, j’exagère à peine, c’est pas mon genre. Heureusement que j’ai quand même une bonne constitution, il faut bien que les années de sport servent à quelque chose, ça commence à aller mieux. Même s’ils disent que ça aurait pas dû durer aussi longtemps, vu que le temps s’est bien réchauffé et tout… Mais en même temps, si le mental joue sur le physique, vu mon état actuel, c’est déjà étonnant que je sois encore capable de bouger… Oh, j’ai un tatouage sur l’avant-bras, depuis mes 18 ans. Trois épées qui s’entrecroisent, avec nos trois initiales. Les trois mousquetaires. Et un autre dans le dos, bien plus récent, une rose des vents, transpercée d’une flèche, entourée de plein de couleurs vives, et de la devise "Unus pro omnibus, omnes pro uno". Les trois mousquetaires encore et toujours. |
Mais on peut dire que j’étais une peste effectivement, et que je le suis potentiellement encore un peu oui.
Je suis pas insupportable pour autant, j’ai de bons côtés, faut juste y accéder. Je prends soin des gens que j’aime, des personnes que je laisse entrer dans mon cercle, je m’arrange pour les écouter ou les faire sourire ou les engueuler selon ce qui est nécessaire. Ils sont pas nombreux certes, mais pour eux, je serais capable de tout. Avec eux, je mens pas, j’ai jamais su tricher ou jouer. Quoiqu’il se passe, je les trahirais pas, ils passeront toujours avant tout. Le temps ne change rien à ça. À la vie, à la mort, un pour tous, tous pour un, ce genre de trucs.
Certes, aujourd’hui, ce n’est plus vraiment d’actualité. Il n’y a plus personne dans le cercle, ils sont… disparus. Perdus de vue. C’est plus facile que de m’avouer qu’ils sont morts, que de me dire que je suis toute seule pour de vrai. Ça me permet de me lever le matin et de continuer. Ou de faire semblant du moins.
Un jour après l’autre. Je me débrouille comme je peux. Je trouve souvent des solutions improbables et comme je suis plutôt adroite, et que j’ai des restes d’athlétisme, j’arrive à m’en sortir… La preuve, je suis toujours en vie. Ce qui n’était pas forcément gagné vu que ma capacité à être tête en l’air est équivalente à ma débrouillardise. J’ai l’attention d’un oiseau mouche il paraît, pourtant j’essaie.
Enfin, au final, je m’en sors plutôt pas mal comme ça. Même si c’est pas toujours évident, même si j’ai tendance à les voir partout, à leur parler comme s’ils étaient là, et que j’ai l’impression de devenir un peu schizo avec le temps, tout va bien. Aussi bien que possible en tout cas.
Mai 1995
Dimanche, c’est la fête des mamans.
Me mordant la langue d’un air concentré, je m’applique à découper les cœurs que j’ai dessinés et coloriés. On va les coller sur la carte madame a dit, pour faire un bouquet de cœurs. Et les miens sont trop jolis et plein de couleurs. On a fait un pot aussi, qu’on a peint et décoré tout seul ! J’ai décidé que ce serait pour mettre une des fleurs de tonton dedans, pas des stylos, ça sert à rien des stylos, alors que les fleurs, c’est joli. Et tata, elle va aimer. Certains ont commencé à se moquer en disant que j’avais pas de maman, alors j’ai dit que ce serait pour ma tata et pas pour ma maman, et les garçons se sont énervés contre eux, et la maîtresse aussi. Mais moi, je m’en fiche de ce qu’ils disent. Je vois pas trop la différence entre tata et tonton et leur papa et leur maman, c’est pareil. C’est pour ça que dès fois, je dis papa ou maman sans faire exprès… Enfin, plus trop maintenant, je suis grande maintenant, j’ai 5 ans, je sais que ce sont pas vraiment mes vrais parents. Ma vraie maman est morte il y 2 ans, d’une maladie grave qui se soigne pas, et je m’en souviens pas vraiment. Je me dis que c’est pas bien, qu’on devrait toujours se souvenir de sa maman, mais c’est difficile. J’ai pas connu mon papa, tonton dit qu’il nous aimait, mais qu’il n’a pas pu rester. Et tonton m’a dit que je devais pas les appeler comme ça, papa et maman, parce qu’ils ne sont pas mes parents, qu’ils veulent pas prendre leur place… J’ai pas trop compris, mais il m’a dit que ça changeait rien et qu’ils m’aimaient très fort tous les deux. Alors je les appelle tonton et tata.
Et c’est pas vrai ce qu’il dit en plus. Si ça change rien, s’ils s’occupent de moi et m’aiment et que je les aime, c’est ma famille. Mes parents. C’est tout. Mais je le dis plus. Je le dis qu’aux garçons parce qu’ils se sont jamais moqués eux.
La maîtresse passe et sourit en me voyant coller avec application les cœurs sur la carte. En même temps, c’est joli, je me suis appliquée, beaucoup même. Mais c’est important. Tata va être trop contente de mes cadeaux. Et après, bientôt ce sera celui pour tonton, et on fera un cadre en plus de la carte. Je demanderais une photo à tata, de nous deux, ça fera plaisir à tonton, il pourra la mettre dans son bureau et nous avoir tout le temps avec lui ! Ça va être trop chouette !
Avril 2001
Jetant mon sac dans l’entrée, je passe par la cuisine pour voler un cookie, ou deux ou trois, avant de ressortir aussi vite. Je vois tata secouer la tête en souriant, alors je fais demi-tour juste pour lui faire un bisou, et reprend ma course folle, un gâteau dans la bouche, comme si chaque seconde était comptée. J’arrive en un temps record à la serre, celle à côté du jardin, là où tonton fait pousser ses expérimentations et ses pousses fragiles. Et là, surtout, en ce moment, il y a notre plante. Celle que j’ai fait moi, avec son aide évidemment, il y a un siècle de ça au moins. J’ai prélevé les étamines, puis le pollen avec le pinceau, pour le mettre sur l’autre fleur. J’ai tout fait doucement, avec beaucoup de délicatesse, pour pas rater. On a fermé le sachet et attendu les graines, que j’ai plantées dans le semis. Et on a attendu. Encore et encore et encore… Des mois et des mois ! Il n’a pas cessé de me répéter que les belles choses mettaient du temps à arriver et qu’il me fallait de la patience et de l’attention si je voulais l’aider.
Je veux l’aider. J’adore ce qu’il fait, j’adore quand il me montre les nouveaux plants qui sortent de terre, quand il m’apprend la différence entre la menthe et la mélisse et ce genre de trucs, quand il m’emmène à la pépinière pour voir les milliers d’arbres, arbustes et autres plantes qu’il cultive et vend. Ça a une part de magie que je trouve géniale ! Surtout qu’il est super fort là-dedans tonton…
Mais quand même, me demander de la patience ET de l’attention ?… C’est beaucoup trop. J’essaie pourtant, et j’y arrive beaucoup mieux là qu’à l’école. En même temps, l’école c’est atrocement ennuyeux. Vous êtes déjà restés assis pendant des heures à écouter des gens parler de ce qu’il s’est passé il y a 1000 ans ou qui vous explique que savoir calculer la médiane d’un triangle vous sauvera la vie un jour ? Et j’y suis pour rien s’il se passe toujours quelque chose de plus intéressant, si Tom a toujours des trucs amusants à raconter, si regarder Nolan froncer les sourcils quand on écoute pas le prof est plus divertissant, ou encore si un papillon passe près de la fenêtre…
Tout ça pour dire, que quand il s’agit de plantes, étrangement, j’y arrive un peu. Mais là, ça fait vraiment longtemps qu’on attend. Le bon côté, c’est qu’il ne manque que la fleur. Tonton est très content, il dit que parfois, les graines ne donnent rien. En même temps, il m’a donné un des plus faciles à faire, genre le truc qui marche 9 fois sur 10. Et encore, certains des semis n’ont rien donné. Mais c’est cool. D’autant qu’on voit le bourgeon qui commence à se former sur la plus grande maintenant ! Ce qui m’intéresse, c’est surtout la couleur, mais je suis quand même super contente ! Même si c’est long. C’est cool. C’est ma première plante ! Faut que je dise aux garçons de venir la voir !
Septembre 2004
Faire partie du club d’athlétisme n’est qu’une formalité, je le sais bien. Vu mes temps en course, je me suis jamais trop fait de soucis pour ça. Alors non, effectivement, le lancé de poids ou de disque, c’est pas la peine, les muscles de mes petits bras n’aiment pas trop comme aime à le répéter Tom. Mais le 100m, 200m, ou même les courses de fond, je sais que j’ai explosé les records au collège. Je me suis répété en boucle que c’était un petit collège, que c’était pas forcément si extraordinaire, que je devais encore m’améliorer.
Mais les différents tests d’admissions ont eu lieu au fur et à mesure dans la semaine, et comme à chaque fois que je mets un pied sur la piste, mon esprit s’est vidé et il ne restait rien d’autres que la ligne d’arrivée. Et je suis arrivée première, presque tout le temps. J’ai même aperçu le haussement de sourcil du capitaine de l’équipe. Et je sais que je serais prise. C’est cool, je vais en avoir besoin, parce que mes résultats scolaires eux par contre ne se sont pas améliorés… Oh, je parviens facilement à avoir la moyenne et même plus selon les matières, mais je sais que je le dois en grande partie aux révisions avec Nolan, et à ses multiples rappels à l’ordre quand je m’égare. Faut dire qu’il est super patient, surtout avec moi, et puis, je peux pas me montrer super chiante avec lui, même si je le voulais. Ni avec Tom. C’est un peu gênant d’ailleurs. Pas de pas parvenir à être insupportable avec eux, parce qu’en vérité, j’y arrive parfaitement bien, mais ils me connaissent tout aussi bien, et ils m’aiment beaucoup trop pour me faire la gueule. Bref, je disais quoi ? Ah oui. Que je me suis mise à les trouver mignons. Tous les deux. Ça fait quelque temps, j’arrive parfaitement à faire comme si de rien n’était, mais c’est excessivement perturbant. Parce que ce sont mes potes, les mousquetaires, ma famille.
Mais Tom a toujours été canon, dans le style sportif accompli, et il est vraiment adorable, ça devrait être incompatible. Et Nolan… Quand il sourit, il est tellement craquant que c’en est indécent et il… peut-être que je craque un peu plus pour lui, sans trop savoir pourquoi.
Mais on s’en fout de toute façon. Ils restent de petits cons insolents et crétins qu’on soit d’accord, faut pas déconner. Et surtout, ils se sont rendu compte de rien, donc tout va bien. Ça me ferait chier de les mettre mal à l’aise ou autre… ou pire, de les perdre. J’ose même pas l’envisager ça, jamais.
Je sautille sur place, avant de sourire et de repartir en courant quand je les vois arriver. Je leur saute littéralement au cou en riant, avant de leur donner mon dernier temps et de leur dire que je serais bientôt capitaine de l’équipe. Ouais, le lycée va être chouette, vraiment chouette.
Septembre 2008
J’ai beau essayer, je n’arrive pas à m’en défaire. De cette douleur sourde et persistante. De cette impression d’avoir été manipulée et trahie. Ce qui est stupide, on parle quand même de Nolan, je le connais beaucoup trop bien pour savoir qu’il ne ferait jamais ça… Pourtant, j’ai toujours cette petite voix, qui revient et insiste, qui me rappelle qu’il m’a laissé tomber bien vite, qu’il m’a peut-être invité en désespoir de cause, ou pire encore qu’il l’a fait pour se débarrasser de sa première fois. Je sais, ce serait horrible et il n’est pas comme ça. Je le sais bien. Mais le fait est qu’il m’a quand même dit que ça servait à rien de continuer, qu’il serait à des milliers de kilomètres et qu’il n’aurait pas de temps…
Le pire dans tout ça ? Moi. Quoique je dise ou ressente, je suis incapable de me passer de lui. Je suis incapable de ne pas lui écrire tous les jours, de ne pas lui raconter ce qu’il se passe, de ne pas attendre de ses nouvelles. Évidemment je passe sous silence mes nuits sans sommeil et mes crises de pleurs, mes caprices et mes colères. C’est Nolan.
Et j’essaie d’aller de l’avant, de me dire que j’ai sans doute rêvé cette… à quel point ça fait ringard de dire magie ? Bref, ce truc entre nous, qu’au final, ça devait pas être du tout réciproque et qu’il a juste voulu arrêter avant d’aggraver la situation, avant que ça n’entache notre relation. Ça, je peux le comprendre. Il aurait dû le dire clairement, ça m’aurait tout autant fait mal, mais au moins, il aurait été sincère. C’est vrai après tout, on s’était promis de jamais se mentir et lui…
Mais au final, mes états d’âme et cette souffrance ne comptent pas vraiment. Les trois mousquetaires sont plus forts que ça, pas vrai ? Et puis, Tom est toujours là, avec moi. Il me supporte, il ne dit rien quand je recommence à pleurer pour rien, il s’efforce de me faire sourire, de m’écouter et il me gave de chocolat. Et si lui aussi me répète que Nolan est juste un idiot maladroit, qu’il a jamais voulu me faire de mal ou que j’ai tort de penser qu’il a pu se servir de moi, c’est que ça doit être vrai non ? Heureusement qu’il est là. J’arrive à dépasser tout ça, cette stupide histoire, à me focaliser sur ma prochaine entrée en fac, dans laquelle j’ai été accepté par je ne sais quel miracle (grâce aux efforts insensés des deux pour m’aider), j’arrive à parler à Nolan, à ne plus vraiment lui en vouloir, de toute façon, je sais bien que je suis incapable de vivre sans lui, sans eux, là-dessus, je me suis jamais trop leurrée. Et je sais que ça doit être difficile pour lui, d’être parti si loin, de se retrouver seul, pour des études qui vont le bouffer. Alors on fait ce qu’on peut pour être là, pour lui rappeler qu’il n’est pas seul, quand bien même le voudrait-il.
Et plus ça va, plus je suis heureuse que Tom soit aussi patient et adorable. Parce que sans lui, j’y serais pas arrivée je crois. Mais ça a toujours été lui le plus fort non ? Je m’en veux parfois, de lui faire subir tout ça, de me reposer autant sur lui, de tant lui demander. Mais je me fais engueuler quand je lui en parle, et ça finit en menaces insensées et en fous rires.
Heureusement qu’il est là. Heureusement qu’il est lui.
Juin 2010
Je fronce les sourcils en regardant Nolan, qui s’efforce de son côté à ne rester concentrer que sur les pancakes qu’il prépare, et je retiens un soupir. On s’est engueulés, parce que j’ai osé dire qu’il avait maigri, et vu qu’il n’était pas bien épais… et là, je me suis pris un tacle gratuit, Tom aussi au passage, même s’il n’est pas encore debout, sur une connerie genre on est pas tous aussi bien foutu que lui ou on a pas tous le temps de passer des heures en salle de muscu. Fort bien. Je comprends pas trop. Pas du tout même. Je pensais que ça lui ferait plaisir de nous voir, après tout ce temps… C’est vrai, à part le Noël de la première année, il n’est quasiment plus rentré, toujours plongé dans ses études et ses boulots. Mais faut croire que son absence, ses absences, à toutes les fêtes et toutes les vacances, ou presque, n’étaient en vérité pas si involontaires.
Pourtant, on a continué de se parler, de s’appeler, de s’envoyer des messagers, presque tous les jours depuis qu’il est parti. Et qu’il nous a parlé des examens de dingues, de cette solitude qui lui pèse, de son manque de temps. Du coup, lui rendre visite, c’était logique non ? Lui dire que grâce à lui et à son insistance hyper reloue, j’ai eu mon diplôme et que je suis officiellement apte à bosser à la pépinière, c’était normal non ? On a pensé que ça lui ferait plaisir, qu’on pourrait profiter de ces quelques jours pour lui changer les idées, le forcer à souffler et à rire, pour lui rappeler qu’on est toujours là. Que même s’il rentre pas, il fait toujours partie de nos vies, que c’est toujours notre mousquetaire… Qu’il nous manque tout simplement.
Si moi j’essaie de comprendre, j’avoue que Tom fait moins d’efforts, et je pige pas non plus. D’habitude, c’est lui le plus pragmatique et positif. Depuis hier, j’ai l’impression qu’il s’est renfrogné pour une raison quelconque. Et il refuse de m’en parler évidemment. Alors ouais, y a peut-être un truc qui s’est passé entre eux, mais putain, déjà, j’ai rien demandé, de deux, ils ont qu’à en parler au lieu de se comporter comme des gamins de 8 ans. Bon, d’accord, de mon côté, je parle pas non plus de ces quelques fois où j’ai réussi à croiser son regard, qui m’ont plus troublé qu’autre chose… Mais c’est juste parce que ça fait longtemps qu’on s’est pas vus, que je dois lui en vouloir encore, qu’il se rend compte qu’on lui manque. Ou pas. Un truc du genre.
Je sais bien qu’il doit se sentir seul et tout… J’aurais peut-être dû me dire que ce serait pire pour lui après notre départ ? Mais si c’est ça, pourquoi il se comporte comme un sale con à faire des réflexions désagréables et à faire la gueule plutôt qu’à essayer de profiter de nous ?
J’ai sans doute pas assez réfléchi. Je pensais que ça comblerait un peu le vide qui s’est créé, cet éloignement qui est peut-être dû à la distance… Mais finalement c’est peut-être ce que lui désire. Après tout, il réussit avec brio ses études pour le moment, il multiplie les petites copines, il se fait sa nouvelle vie. Peut-être qu’on est… en trop ? Mais dans ce cas, pourquoi continuer à autant nous parler quand on est à l’autre bout du pays ?
Je sais que je suis pas très maligne, mais là j’avoue que je comprends pas.
Septembre 2014
Je vérifie une dernière fois que tout est propre, bien rangé et préparé, ce qui fait lever les yeux au ciel à Tom. Lui tirant la langue, je file dans la cuisine vérifier le four – que je n’avais pas éteint, mais personne ne le saura – et reviens juste à temps pour lui voler un baiser avant qu’il n’aille le chercher.
Je sais qu’il n’a pas cessé de me répéter de pas en faire trop, que c’est juste Nolan et pas Gordon Ramsay. Mais justement, c’est Nolan. Qui est revenu il y a peu à Seattle pour y faire son internat. Et qui n’est jamais venu chez nous. Oui, ça continue de me faire bizarre, ce chez-nous, alors que ça fait quelques mois maintenant qu’on a emménagé ensemble. Faut dire qu’on passait déjà presque toutes nos soirées chez l’un ou chez l’autre, alors tant qu’à faire… Mais ça reste étrange. J’aime bien attention, c’est juste encore nouveau, même si on a facilement trouvé nos marques et qu’on parvient à ne pas trop se marcher sur les pieds.
J’inspire alors que cette fois, je vérifie ma tenue et mon maquillage. Ce qui me fait un peu ciller quand je m’en rends compte. C’est juste de la nervosité. Ça fait longtemps qu’on ne l’a pas vu, hormis le jour de son retour quand on l’a aidé, mais c’était pas pareil, et la dernière fois, qui remonte à des années… ça ne s’est pas très bien passé. Même si au final, en rentrant, tout a repris comme si de rien n’était, les échanges et le reste. Presque tout. J’ai soigneusement renié cette pointe de jalousie quand il a parlé, puis qu’il a présente, Sarah… Je peux pas non vouloir les garder tous les deux pour toujours… Même si ça m’avait traversé la tête quand j’avais 15 ans je le reconnais. Après tout, il y a un nombre incalculable de communautés polygames, même si c’est plus du côté des mecs… ça doit exister… Enfin bref, quand j’avais 15 ans donc.
Donc oui, je suis un peu nerveuse. Je ne sais pas trop comment ça va se passer, maintenant qu’il est revenu pour de bon, s’il va encore rester loin de nous, s’il va toujours être débordé de travail, s’il va vouloir qu’on reprenne comme avant… parce que par messages et mails, ce sera bizarre vu qu’il habite à côté non ?
C’est pourtant ce qui finit par se passer, un peu. Si la soirée se passe admirablement bien, qu’on retrouve notre complicité comme si l’éloignement n’avait jamais eu lieu, et que d’autres la suivent, je me retrouve la plupart du temps… mise à l’écart. Je ne sais pas trop si c’est volontaire ou non, de la part d’un des deux ou des deux… Mais le fait est qu’ils se retrouvent régulièrement, souvent, pour des soirées, au stade, au bar, chez Nolan… sans moi donc. Des soirées entre mecs. Je ne suis pas sûre… J’espère de tout cœur qu’aucun d’entre eux ne se rend compte d’à quel point ça me blesse. Ne plus avoir ma place au sein des mousquetaires, ne plus être avec eux… je me dis que je ne devrais pas me sentir autant rejeté, je parle toujours autant à Nolan, malgré l’existence de Sarah, par mail et sms, et je vis avec Tom, seulement… Je ne suis plus incluse dans le groupe. Je ne sais plus trop si j’ai encore ma place parmi eux. Et c’est atrocement douloureux.
Juillet 2015
Les derniers mois ont été… compliqués. Il faut dire que la demande en mariage de Tom m’a prise un peu au dépourvu. Ça n’aurait pas dû, mais on en avait jamais vraiment parlé, alors je pensais pas… Okay, je pense rarement quand ça me concerne directement… Tout ça pour dire que je me suis rendu compte que je ne pouvais pas l’épouser. Que si je ne voyais pas ma vie sans qu’il en fasse partie, je ne m’imaginais pas la passer à ses côtés, pas comme ça. Et c’est horrible je sais bien. Je l’aime pourtant, autant qu’il est possible d’aimer, c’est mon meilleur ami et… et je ne suis pas assez amoureuse pour l’épouser. Ça m’a un peu éclaté à la gueule, et à la sienne par conséquent, et j’ai clairement vu le moment où je lui ai brisé le cœur. Mais c’est Tom. Il m’a juste demandé de prendre du temps et d’essayer, de ne pas tout jeter comme ça.
J’ai essayé, on a essayé. Sauf que plus les semaines passaient, plus les disputes sont apparues et se sont multipliées, pour des broutilles bien souvent. Il a continué de voir Nolan, et j’ai commencé à faire pareil, seule. On l’a rarement revu à deux, mais je crois qu’il n’a même pas capté. Et ça se passait bien avec lui, un peu trop peut-être, même si encore une fois, je m’en suis pas vraiment rendu compte.
Et un soir, ça a été de trop. Je ne sais même plus exactement le pourquoi, mais je me suis retrouvée à bout, en pleurs, à toquer chez Nolan, mon seul refuge. A essayer de lui expliquer, à pleurer dans ses bras, à le laisser me consoler… Comme Tom l’avait fait quelques années auparavant à cause de lui… Ouais, ironie quand tu nous tiens…
Et je sais pas ce qui m’a pris. Je l’ai embrassé. Quelle idiote. Il m’a rendu mon baiser, avant sans doute de s’apercevoir que c’était moi et pas une de ses innombrables conquêtes, et de me repousser. Encore. Et vache, je pensais pas pouvoir à nouveau me sentir à la fois aussi blessée, rejetée et incomprise… Et insultée l’air de rien. Il m’a reprise et m’a dit que Tom m’aimait, qu’il avait besoin de moi, que c’est auprès de lui que je devais être. Pas lui, pas avec lui donc, rien de tout ça. Et après avoir donné l’impression de me consoler dans les bras de Tom, je faisais de même avec Nolan. Une garce, c’est un peu le nom qu’on donne oui. C’est ce qu’il m’a fait ressentir, quand bien même ne le voulait-il peut-être pas. Ou peut-être que c’était l’impression que j’ai eu tout simplement en ressortant de chez lui.
Pourtant, j’ai jamais voulu blesser Tom. Je sais que je me suis pas servi de lui ou qu’il n’a jamais été un lot de consolation, pas plus que Nolan n’a pu l’être… J’étais amoureuse de Tom, je l’ai vraiment été… ça s’est juste estompé avec le temps… et je l’aime toujours, c’est toujours mon meilleur ami… et j’ai continué d’être terrorisée à l’idée de le perdre tout court. Malgré tout ce que j’ai pu faire, dire, lui faire subir consciemment ou non…. Sans lui, je pourrais pas.
J’ai réussi à faire comme s’il ne s’était rien passé avec Nolan, ravalant encore une fois ma douleur et tout le reste. Même si c’est devenu de plus en plus évident que de lui, j’étais toujours amoureuse.
C’est stupide hein ? Après tout ce temps, après qu’il m’ait dit non deux fois… c’est un peu maso aussi, mais j’ai pas vraiment décidé de l’être.
Et puis au final, peu importe, tant que je les perds pas et qu’ils sont là. Tant qu’ils font partie de ma vie, tout ira bien, pas vrai ?
• Octobre 2015 / Seattle
Je dirais bien que le début a été chaotique, mais vu que c’est toujours le cas, c’est pas le plus pertinent à dire.
Enfin ça a quand même sacrément été wtf faut le reconnaître. En même temps, comment vous voulez croire à ce genre d’histoires ? Ça a commencé par mentionner la rage ou des trucs se rapprochant, de gens devenus fous, mais bon, après tout, y en a toujours eu, des cinglés, c’était pas si choquant… Et puis, presque du jour au lendemain, ça a dépassé tout ce à quoi on aurait pu s’attendre. Comme le tsunami qu’on voit pas arriver et qui détruit tout.
Je me souviens de Nolan qui débarque et raconte des histoires abracadabrantes d’accidents arrivés à l’hôpital, collant pourtant un peu trop aux diverses infos commençant à circuler, d’autant que ce n’est pas son genre d’inventer de telles choses. Je me souviens que partir, retrouver Burlington a été compliqué, alors qu’on a été dans les premiers à le faire… En même temps, je pense que les suivants ne sont pas allés bien loin, pas vivants en tout cas.Je me souviens du début, où on a pensé être à l’abri, loin de l’agitation de la ville, protégés par la maison familiale, comme lorsqu’on se réfugie sous les couvertures pour se protéger des monstres quand on est enfant. Sauf que les monstres sont arrivés. Et que les monstres étaient humains.
En sécurité. Cette notion a vite disparu de notre vocabulaire. On peut plus se sentir en sécurité, plus vraiment, quand le danger se relève face à toi. Et je reste tétanisée, figée, quand ça nous saute dessus, littéralement, alors que Tom réagit, alors même que Nolan me protége de sa… de ce qui a été sa sœur. Il n’aurait pas dû avoir à faire ça, si je n’avais pas été aussi stupéfaite et horrifiée. Sans y penser, je me promets de plus être un poids, de ne plus les mettre en danger, de tout faire pour les protéger.
Mes yeux s’écarquillent quand je réalise. Oui, il me faut du temps, je sais. Nolan vient de perdre toute sa famille en un claquement de doigt. Je cille, un sanglot se formant dans ma gorge, et mes mains montent devant mon ma bouche, comme pour l’empêcher de sortir. J’ose enfin le regarder, les regarder, et je suis pas certaine de ce qu’ils peuvent voir. De la peur, de l’horreur, et encore, c’est en deçà de la réalité.
Et de nouveau illumination. Je me mets à courir alors que les garçons n’ont pas encore réagis, je sais bien qu’ils me rattraperont pas, et je m’en fiche. Tout ce qui importe c’est d’arrivée à la maison, c’est de ramener ma famille, de les mettre en sécurité, comme eux l’ont toujours fait avec moi.
Mais je ne cours pas assez vite. Je suis pas assez rapide.
Quand j’arrive, je vois ma tante sourire, accueillir les voisins, s’inquiéter en voyant du sang. Et je les vois lui sauter dessus alors que j’arrive au portail. Je dois hurler, parce qu’ils se retournent vers moi. Mais… on me sauve. Sauf que lui n’est pas armé, sauf qu’il n’a pas le temps de pleurer sa femme, il rattrape les autres qui se précipitaient sur moi avant que j’ai pu lui dire de ne pas le faire. Il sait déjà, je le vois dans ses yeux. Et il me dit de courir, qu’il m’aime ou des trucs du genre. Et je suis juste incapable de faire autre chose que de hurler son nom. Et il sourit. Parce que je l’appelle papa. Alors qu’ils m’avaient interdit de le faire. Et j’ai toujours besoin qu’on me sauve. Les garçons encore. Nolan m’entraîne, et je sursaute en entendant un coup de feu alors que les cris de mon oncle cessent enfin.
Je dors avec eux cette nuit-là. Et toutes les nuits suivantes. Je ne les quitte plus. Je dois être plus forte. Vivre. Tenir. Les protéger.
• Novembre 2015 – Août 2016
Je pensais pas, que le silence pouvait être aussi assourdissant. Mais faut dire qu’on s’attend rarement à guetter un bruit, un râle, un hurlement chaque minute qui passe. J’ai l’impression de devenir folle, peut-être que je le suis devenue et qu’eux aussi, du coup, on remarque rien qui sait. Enfin, j’espère que si je le deviens vraiment, j’arrêterais d’avoir aussi peur, d’avoir aussi mal, d’être aussi angoissée et terrorisée.
Je trouve pas vraiment de mot pour décrire. Difficile ne suffit pas, pas plus qu’horrible.
Burlington n’est pas une petite ville, mais ce n’est pas Seattle, on connaît ses voisins, le vendeur de glaces du coin ou le facteur qui passe chaque matin. On salue les gens qu’on croise dans la rue, on achète les cookies de la petite voisine, on s’enquiert des petits-enfants de l’ancienne maîtresse et on apporte des plats aux voisins pour Thanksgiving et Noël.
Et ce sont ces gens qu’on a vu partir dans des crissements de pneus, ce sont eux qu’on a vu courir pour essayer d’échapper aux morts qui étaient là, ce sont eux qu’on a entendu hurler de douleur et de terreur… ce sont eux à qui nous avons refusé d’ouvrir en voyant une marque de morsures sur leur bras… qui sont morts devant chez nous, avant de se relever et de repartir à la poursuite des survivants.
Et petit à petit, le silence est revenu. Un silence presque plus oppressant que le reste. Celui dont est fait les cauchemars et qui prend toute la place quand la nuit tombe.
Ça va faire un an qu’on survit ici, avec de moins en moins de monde, parce qu’après tout, il faut parfois sortir, aller chercher des réserves, de l’eau ou tout simplement pour voir autre chose que les murs étouffants de la maison. Et parfois, ces sorties nous rappellent que le silence environnant est en constitué de morts. Toujours plus nombreux, toujours aussi dangereux.
J’essaie de me dire que tant que nous sommes encore tous les trois, tout ira bien, j’essaie de me convaincre qu’on s’en sortira. Et je l’ai promis. De survivre. De tenir. Je n’ai pas le choix.
Et tant qu’on est à trois, ça ne peut qu’aller pas vrai ?
• Septembre 2016 – Début 2018
J’inspire en regardant la route qui semble s’étirer à l’infini devant nous. J’ai réussi à quitter les maisons sans trop de mal, me focalisant sur le fait qu’on ne pouvait plus vraiment rester, pas alors que les provisions devenaient inexistantes, contrairement aux morts qui hantent toujours les rues. Et quand on croise les gens qu’on a connus, qu’on a aimés, transformés en ces choses… C’est mieux de partir. J’espère. Tom en est convaincu, et il a souvent raison, alors on le suit. De toute façon, on se sépare pas.
Mais c’est difficile, j’ai beau avoir grandi à la campagne, j’ai toujours adoré mon confort et les choses basiques genre le chauffage, l’eau chaude… Ou l’eau courante déjà tout simplement. Et j’avoue que les derniers mois ont déjà été compliqués… Alors dehors ? Avec les morts qui traînent partout ?
Pourtant on y arrive. Et je devrais pas dire ça, parce que c’est la fin du monde, que la majorité des êtres humains sont morts, mais… être avec eux me fait du bien. On parvient à sourire, à rire parfois, on parle et on retrouve ce qui s’était délité au fil du temps. On se retrouve tous les trois, comme avant. Et c’est ce qui me permet de tenir, qui nous permet de tenir à tous les trois. C’est parfois compliqué, mais en étant H24 ensemble, c’est un peu obligé qu’on se fritte parfois, non ? C’est même plutôt sain, ça évite de garder les choses pour soi et d’envenimer les choses.
Avec Tom, on a beau avoir parlé un peu, ça reste tendu. Je l’ai blessé, et je me rends compte que je peux pas faire grand-chose pour aider, et c’est horriblement frustrant. Il sait que je l’aime, que je ne veux pas le perdre, mais peut-être que ça fait plus de mal que de bien… Mais je peux pas faire autrement, et je me dis que c’est Tom, qu’il parvient à prendre de la distance sans doute plus facilement que moi. Et avec Nolan… j’ai arrêté de compter les fois où je me réveille dans ses bras, même si techniquement on dort tous les trois, j’ai arrêté de relever les regards qu’on échange…. Parce que c’est douloureux et stupide, et que malgré tout ce que je peux – encore – ressentir, je ne suis pas maso au point de relancer une troisième fois. On se rapproche, comme les dernières semaines avant tout ça, mais… ça s’arrête là.
Quant au reste… Tom nous pousse à nous rapprocher d’autres survivants, de certains groupes établis. Et sans trop savoir pourquoi, j’aime pas. Sans doute par possessivité mal placée, par peur de qu’ils pourraient cacher, par manque de sociabilité aussi… Mais on en croise parfois, on discute, on échange, on commence à faire du troc. Ça se passe bien la plupart du temps, sans doute parce qu’avoir deux mecs costauds en face aide à rester sage.
Et dehors, comme je l’avais dit, c’est la merde. Que ce soit les orages, la chaleur, le gel, la pluie, il y a toujours quelque chose pour compliquer une situation déjà invivable. On s’abrite la plupart du temps dans des maisons, sans rester longtemps au même endroit, on évite évidemment les zones encombrées et les morts. Même si on s’habitue à leur présence, au bruit de leurs pieds qui raclent sur le sol, aux râles qui s’échappent de leur gorge, à la lueur vide de leur regard. Et c’est peut-être le pire. Ils n’en restent pas moins dangereux, mais ils font partie du décor, ils font partie de nos vies. Et c’est terriblement désolant d’en arriver à cette conclusion.
• Mars 2018
Non, non, non et non.
Les yeux bien trop écarquillés, je fixe Nolan, incapable de comprendre ce qu’il dit. Parce qu’il ne peut clairement pas demander ce que je crois entendre. Il n’est quand même pas aussi con. Si, bien sûr que si, il l’est, tout petit génie qu’il soit, mais là, ça dépasse l’entendement. Pourtant, il ne s’adresse qu’à moi, pourtant, je suis la seule à protester. Tom reste étrangement silencieux, comme si parler était trop difficile, comme s’il était d’accord. Mais c’est ridicule, totalement impensable. Et si j’avais encore quelques neurones en état de marche, ils s’électrocutent entre eux quand il m’embrasse, pour me laisser encore plus embrouillée et perdue. Mais je refuse toujours, secouant la tête, recommençant mes protestations sans même entendre ce qu’il dit.
Mais avant que je n’aie pu l’envoyer bouler, ou lui dire d’arrêter de jouer au con, je sens les bras de Tom m’attraper par la taille et me serrer contre lui. Non, il va pas oser ? J’ai arrêté de réfléchir il y a un moment, j’ai arrêté de voir réellement ce qu’il se passe, et très honnêtement, je m’en fous complètement. On peut pas le laisser ça, on a pas le droit, il peut pas s’en sortir sans nous, pas avec la jambe comme ça, et on peut pas continuer sans lui. Je sais pas exactement ce que je dis, combien de fois je me répète, ni à quel point je me débats. Mais c’est Nolan.
Je reprends un peu mes esprits quand Tom finit par me lâcher et par me plaquer contre un mur à l’extérieur, l’air aussi désespéré que moi, mais bien plus résolu à s’en sortir, pour me faire comprendre qu’il n’y a pas le choix, que si on se dépêche pas, tous les morts vont arriver à la maison et le bouffer. Qu’on reviendra le chercher dès qu’ils nous auront suivi et se seront dispersés. Un gémissement se fait entendre, je crois que ça vient de moi, et je m’apprête à ouvrir de nouveau la bouche quand il me rappelle la promesse qu’il vient de faire à Nolan. Bande de sales cons machistes. Je sais pas trop d’où vient cet élan de colère à ce sujet, mais il a le bon goût de prendre le dessus durant une seconde sur l’horreur du reste. Juste une seconde, juste assez pour que j’entende leurs râles et leurs pas. Juste assez pour que je songe à Nolan seul à l’intérieur… Bon mauvais plan de penser à ça. Mais j’acquiesce et il n’attend pas pour m’attraper la main et se mettre à courir.
Évidemment on fait tout le bruit possible, et je le force même à prendre de l’avance, m’assurant que le gros du groupe nous suit, qu’il n’en reste pas, que Nolan puisse être en sécurité.
Et ils viennent. Tous. Trop longtemps. On s’éloigne beaucoup trop, et le temps qu’on parvienne à s’en débarrasser, à les contourner, à souffler, il se passe un temps infini.
Pas de sang, pas de traces de combat, ce que ne cesse de me répéter Tom.
Mais ça ne change rien. Il n’est pas là. Ni dans les maisons alentours.
Et il ne vient pas au Mémorial. Jamais.
• 2018
Je n’ai qu’un vague souvenir de cette période. Période sacrément longue j’en conviens. Presque un an de survie qui reste plutôt flou et brumeux. J’ai quasiment pas écrit durant cette période, alors que jusque-là, je le faisais plus ou moins régulièrement.
Au début, on a fait le tour du quartier un nombre incalculable de fois, on a trouvé des craies, de la peinture, n’importe quoi pour laisser des messages, on est retournés régulièrement au Mémorial.
Tom garde espoir, ou s’efforce de me le faire croire, je ne sais pas trop. Les journées qui ont suivi la disparition de Nolan, notre abandon plutôt, ont été épouvantables. Je ne parle pas quand on se traînait la horde, là, on avait pas trop le temps de penser, mais des premiers jours suivant, quand on est revenus et qu’il n’était plus là.
Je me sentais tellement mal, tellement vide, totalement déconnectée, incapable de réfléchir ou de manger. L’angoisse qui m’enserrait la gorge s’est transformée en boule de plomb que je trimballe en permanence. Tom a été obligé de m’engueuler… enfin, pas vraiment de m’engueuler, c’était encore pire vu qu’il parlait comme s’il m’annonçait des évidences. Comme s’il parlait à un enfant, il m’a prévenu que si je ne mangeais pas, j’allais mourir, ce qui ne m’a évidemment pas fait réagir. Avant d’ajouter, que tout seul, sans moi, il ne survivrait pas. Quel intérêt ? Et il était sérieux. Et c’est l’idée de le perdre, qu’il n’ait plus envie de vivre, qui m’a fait manger. Ce qui est stupide, vu que de toute façon, je n’aurais plus été là pour le voir. Mais j’ai mangé, pour lui.
Et les jours, les semaines, les mois se sont accumulés. On continue d’aller de temps à autre au Mémorial, laissant des messages sans réponse qui se perdent au milieu de la pluie, du vent et des morts.
J’ai dessiné notre tatouage une fois. Sans l’épée de gauche, celle de Nolan. Espérant presque qu’il le voit et comprenne, espérant presque qu’il le complète. Ce qu’il n’a jamais fait. Ni sur celui-là, ni sur les autres, Tom ayant trouvé que c’était une bonne idée. Et Tom… reste égal à lui-même. Il me parle, me sourit, m’entraîne avec lui, ne me laisse jamais seule. Je sais que l’absence du petit génie lui pèse autant qu’à moi, qu’il essaie de le retrouver, mais je ne sais pas s’il se force à être optimiste ou s’il pense vraiment qu’il s’en est sorti.
Je sais juste qu’il me force à avancer et à survivre durant toute l’année, subissant mon apathie et mon marasme. Il me protège des morts, des vivants, de moi-même. Je continue de cauchemarder, d’être incapable de dormir sans lui, de ne tenir que parce qu’il est là. Si je me rends compte que les saisons passent, qu’on se retrouve à croiser d’autres survivants, à commencer à parler avec eux, à échanger avec eux, je suis incapable de m’y intéresser. Je reste dans son ombre, incapable de m’en détacher, incapable de relever la tête.
• Hiver - Printemps 2019
Ça s’est pas fait du jour au lendemain, loin de là, ça a dû prendre des semaines, petit à petit, sans que j’y prenne garde. Et j’aimerais bien dire que c’est arrivé rapidement, ou que c’est arrivé parce que j’étais un poids et qu’il se démenait pour deux, mais ce serait faux.
Un rire s’échappe, remplissant la pièce où nous nous trouvons, rebondissant sur des murs trop longtemps abandonnés, et il me faut quelques secondes pour m’apercevoir qu’il m’appartient. Mon rire. Et Tom qui me fixe, avec cette douceur et cette patience qui est la sienne, et une indéniable trace de soulagement, comme s’il attendait sagement depuis des mois une quelconque trace de vie sur mon visage.. Je me tais alors que les larmes me montent aux yeux, et son soulagement se mue en inquiétude, encore. Je m’excuse, sans pouvoir retenir les larmes, je m’excuse pour tout ce que j’ai pu faire, pour tout ce temps, pour ce que j’ai dit ou fait, ou ce que je n’ai pas dit ou pas fait, comme si un barrage avait soudainement rompu. Et il sourit, me menaçant de manger le dernier morceau de barre dégueu qu’on a trouvé si je n’arrête pas de suite. Je secoue la tête en souriant, me réfugiant dans ses bras en le traitant d’idiot.
Ça fait presque un an. Que je… que nous n’avions pas ri. Bien évidemment, je m’en veux encore plus par la suite, comme si m’autoriser à paraître un peu heureuse était interdit, mais je ne dis rien. Je continue de sourire, de rire de temps à autre, un peu plus souvent alors que le temps passe. Et les mots qui m’ont manqué durant tout ce temps ressortent petit à petit eux aussi. J’attends que Tom accepte, et je lui parle, finissant par lui dire presque tout ce que j’ai sur le cœur. Sur lui, sur nous… un peu sur Nolan, mais j’évite ce sujet la majeure partie du temps. On finit par suffisamment parler pour qu’il sache à quel point il compte pour moi… et à quel point lui peut m’aimer malgré tout ce qui a pu se passer… malgré moi… et malgré Nolan…
On continue de le chercher, de laisser des messages, mais ils ne tiennent pas, et on a toujours aucune trace de lui. Néanmoins, je garde le sourire et me force à me montrer positive. Je l’aide autant que possible, dans ses tentatives de chasses, rarement fructueuses, dans les recherches d’abris, de survivants, d’eau,… comme pour me faire pardonner. Rien ne sera suffisant, mais j’essaie. Je parle trop, de tout et de rien, du passé, de nos souvenirs, de nos espoirs, de la bouffe dégueu et du temps merdique, autant pour combler le silence que pour, encore une fois, me faire pardonner mon apathie. Et je surprends son regard désespéré parfois, ce qui ne fait qu’amener un sourire sur mes lèvres.
Et je crois que j’y arrive plutôt bien. À faire comme si. Comme si tout allait au mieux, comme si je n’avais pas chaque soir, cette douleur lancinante qui s’accroche, comme si une partie de moi n’aurait pas préféré que ce soit Nolan qui soit là. À ma place, pas à la sienne. Sans lui non plus je n’aurais pas pu.
Sauf que je finis par le dire. Mais mal, de travers, et il n’entend évidemment que le plus simple : « j’aurais préféré Nolan. » Et j’ai beau tenter de lui expliquer et de lui faire comprendre, c’est inutile. Toute sa douleur, sa rancœur, sa colère se déversent sans que je puisse l’en empêcher. Et ça fait plus que mal, même s’il a raison, même si je m’y attendais. Une éternité, pendant ce qui me semble être une éternité, je vois et j’entends Tom me hurler tout ce qui ne va pas, tout le mal que j’ai pu lui faire, qu’on lui a fait, tout ce qu’il a fait pour moi, toute cette incompréhension et cette injustice. Et ce n’est même plus une question d’être amoureux, puisqu’il ne l’est plus, mais de tout le reste. Je reste tétanisée, abasourdie, et il se calme tout seul. Avant de se rendre compte de tout ce qu’il a pu dire. Il s’excuse, même s’il n’a pas à le faire, il tente à son tour de m’expliquer plus calmement. Il semble tellement attristé et perdu que je finis par le prendre dans mes bras, alors que les larmes coulent autant de mon côté que du sien.
Et on parle. Quelque chose s’est peut-être cassé, mais… on parle. Je l’ai peut-être perdu, mais… Mais sans lui, qu’est-ce que je pourrais faire ? La réponse est simple. Sans Tom, je ne suis rien, je n’y arriverais pas.
• Avril 2019
Inspire, expire. Je sais pas trop quand j’ai commencé à me parler à moi-même, enfin pas vraiment. Je me parle dans ma tête, mais à Nolan ou à Tom, même s’il n’est pas loin. Parce que je ne peux pas vraiment tout lui dire, j’ai déjà fait assez de mal. Mais tant que ça reste entre moi et eux dans ma tête tout va bien non ? Je vais éviter de dire quand même, que parfois, il m’arrive d’apercevoir Nolan. Depuis un moment même, mais j’évite de trop m’y appesantir, comme si m’attarder sur lui le rendrait trop réel. Et puis oui, ça fait un peu schizo… Un peu. Mais ça me fait du bien. Schizo ou pas.
Si je me concentre assez, j’arrive à mettre de côté, à presque faire taire cette souffrance. On dit que ça passe avec le temps, mais c’est faux. Surtout quand de nouvelles viennent rallumer et nourrir les anciennes douleurs. Et la peur d’avoir perdu Tom, que cette fêlure ne se répare pas, me donne la sensation de tomber dans un puits sans fond. Pourtant, j’arrive encore à lui sourire, à lui parler et il me prend encore dans ses bras pour dormir. Mais… je finis par me demander s’il ne reste pas avec moi juste par loyauté ou par acquit de conscience, une connerie du genre. Je sais bien qu’il tient à moi, qu’il m’aime malgré tous les reproches, mais ça ne suffit pas toujours.
Et on erre dans cette zone indéfinie, celle où le meilleur ami côtoie le coupable, celle où l’amour frôle la douleur. Et c’est fatiguant, usant, en plus d’être douloureux.
En dehors de ça, de mon esprit qui se fait un peu la malle et des angoisses qui nourrissent cette tendance névrosée, on continue de voir des gens, de temps en temps. Je ne sais plus trop quand on a croisé pour la première fois des gens de ce groupe, mais ils avaient l’air réglo et on avait fait un peu de troc en discutant. Et il a l’air bien leur groupe, j’ai pas plus envie qu’au début d’en rejoindre un, contrairement à Tom qui est toujours plus réceptif à ce genre de trucs.
Sauf qu’il n’y a pas que des gentils, ce serait trop facile forcément, même si on peut l’oublier. Et quand vous vous faites courser par des vivants, après autant de temps à juste éviter les morts, ça fait flipper. Bon plus que ça, mais l’adrénaline montant en bloc, on retrouve vite les réflexes, mettant de côté les émotions pour se concentrer sur la course. Et pour courir, on court. Et je glisse. Pas qu’un peu. Si Tom dévale la pente comme un cabri, je la finis sur le cul sans pouvoir m’arrêter, plongeant la tête la première dans la rivière. Et même en avril, elle est froide cette satanée rivière. Je retrouve la surface sans savoir comment, le courant m’emportant un peu trop rapidement à mon goût. Vache que ce serait con de mourir noyée. Mais je parviens à me rapprocher du bord, sans trop savoir comment, et Tom m’aide à remonter. Pour mieux recommencer à courir. Pendant un certain temps. Mais ils abandonnent avant nous.
Et si on se planque quelques jours, je me mets à tousser de plus en plus, façon fumeuse de 60 ans. Mourir noyée, c’était moche, mourir d’un rhume, c’est la honte, avec ou sans pénurie de médicaments. Mais ça va, je vais bien, je m’en remettrais, même si Tom n’est pas convaincu.
Et il me fait le coup en traître ce fourbe, en m’expliquant qu’il me faut du repos, du vrai et un semblant de confort. Je le regarde avec des yeux ronds avant de comprendre.
Ce truc qui semblait vouloir me dire sans savoir comment. Cette peur qui revenait de plus belle en surprenant ses regards. Je. Pas on. Pas une seule fois il ne dit on. Pas de on va rester. Pas de on sera bien et en sécurité. Pas de on va pouvoir se poser et pouvoir reprendre des forces. Rien que des tu seras bien, en sécurité, au chaud, à l’abri. Sans lui. Je réplique et commence à refuser, niant tout besoin de repos. Ce qui aurait été plus convaincant sans la quinte de toux en plein milieu. Mais passons.
Besoin d’être seul. Il a besoin d’être seul.
Il me laisse. Il part. Sans moi. Il ne veut plus de moi. Besoin d'être seul. Ces quelques mots sont plus efficaces que tout le reste. Je cille, la respiration sifflante et difficile, le regard braqué sur lui. S’il l’évite au début, il finit par le rendre, ce qui m’achève. Il est sérieux. Je bats des paupières en chassant les larmes, je refuse de pleurer. Parce que si je parviens à ne plus être un poids, si j’arrête d’être un boulet incapable de survivre seule sans tomber, sans être dépressive, alors peut-être que…
Il a dit qu’il allait continuer à chercher Nolan, que j’étais entre de bonnes mains Qu’il m’aimait quoi que j’en pense. Qu’il repasserait, prendre de mes nouvelles et en donner. Qu’il avait juste besoin de temps.
Alors j’ai encaissé. Pas trop eu le choix non plus, pas vrai ?
Il est resté pour la nuit. Et il est parti. Je l’ai laissé partir.
• Mai - Juillet 2019
Je l’ai laissé partir, après avoir trouvé et parlé aux survivants du camp qu’on avait déjà croisés. J’ai juste acquiescé, incapable dé réfléchir, trop épuisée par la nuit blanche que je venais de passer. J’avais cherché une solution, tout en sachant que j’arriverai pas à le faire changer d’avis. Alors je l’ai laissé partir et je les ai suivis.
J’ai traversé leur camp, sans parvenir à m’intéresser à ce que je voyais, le cœur bien trop serré. J’ai rencontré le conseil, beaucoup trop de personnes responsables qui me faisaient face, à m’interroger et à se renseigner sur moi. Je sais même pas comment j’ai réussi à répondre des trucs cohérents et à faire en sorte d’être une candidate acceptable. Les conditions m’ont pas aidés à être enjouée, Tom savait qu’on pourrait pas se revoir de suite, mais quand même, plusieurs semaines ? Non mais je comprends, la méfiance et la volonté de protéger tout le monde. Donc j’ai été sage et j’ai même pas cherché à répliquer quand ils m’ont parlé de la période test, de plusieurs semaines. Ça a été un peu plus compliqué d’accepter de laisser mon arme. Etre sans défense, quoi qu’ils en disent, c’est devenu un peu contre-nature. J’ai dû répondre un peu, mais j’avais promis à Tom. Alors je me suis tue et j’ai accepté.
Et ils ont accepté de me laisser une chance. Je suppose que j’aurais dû avoir l’air plus ravi que je ne l’étais, mais après tout, je venais de leur dire que j’avais perdu ceux que j’aimais, ça doit pouvoir justifier mon absence de sauts de joie.
Mais je suis restée. J’ai commencé à faire connaissance, à essayer de comprendre comment ça marchait ici, à tenter de m'y intégrer, à défaut de pouvoir faire autre chose j’ai commencé à faire le tour du camp en courant. C’était pas super probant, vu que je me suis arrêtée plus d’une fois en crachant mes poumons, à bout de souffle. Mais j’ai continué, encore et encore.
La plupart des personnes ici sont sympas, ce qui est sans doute encore pire. Parce que malgré ça, j’y arrive pas, pas vraiment. J’agis en automate, je réponds, je souris parfois en réflexe, mais je cherche pas vraiment à m’intégrer ou faire copains. Je peux pas. Je finis quand même par me rendre utile, essayant d’aider à la mise en place et l’entretien des cultures. Les plantes, c’est facile, même si l’image de mon oncle revient me hanter parfois. Et puis, personne ne fait gaffe quand je parle seule dans ces cas-là. Je parle aux plantes et je les vois à mes côtés, et j’essaie de faire comme si tout était normal, comme si je ne commençais pas à attendre une réponse de leur part… de sa part.
Je me retrouve seule. Je suis entourée de plus de personnes que depuis des années, et ça me file le tournis un peu. Je suis seule au milieu d’une foule de gens.
Je me redresse en grimaçant, m’étirant sans ouvrir les yeux. Il est encore tôt, le soleil ne doit pas être levé, j’entends les autres dormir, les enviant légèrement, tout en m’efforçant de ne pas prendre de trop grandes inspirations, histoire de ne pas partir en quinte de toux. Je récupère mes affaires avant de sortir, saluant d’un mince sourire les personnes que je croise.
Je commence à avoir une certaine régularité je crois, presque un rituel, même si je préférerais amplement réussir à passer une nuit complète à dormir à la place. Ce n’est pas faute d’être fatiguée pourtant, les cernes descendant jusqu’en bas des joues, ça n’a jamais été très glamour. Il y a du mieux, mais plus de quelques heures, j’y arrive pas. Pourtant, il faudrait, pour enfin aller vraiment mieux, blablabla. Comme si je décidais d’être insomniaque et de cauchemarder, comme si je n’avais pas l’impression d’être de nouveau âgée de 6 ans, quand j’avais peur du noir… Bon, j’ai toujours un peu peur, ou beaucoup, mais ça n’a rien à voir pour le coup.
Je secoue la tête, les sourcils froncés, me dirigeant vers un des bacs d’eau pour faire une toilette sommaire. Le bon côté, c’est qu’à cette heure-ci, elle est fraîche et parvient presque à me réveiller. Le mauvais, c’est que ça n’arrange pas ma santé.
Je me dirige déjà vers les cultures. Et comme tous les jours depuis qu’ils ont accepté que j’aide ici, je fais le tour, passant la main au-dessus des épis qui pointent le bout de leur nez, effleurant les quelques légumes qui apparaissent, et je me sens presque bien.
Je me dis qu’il fait encore trop froid, qu’on risque de perdre des plants, que certains manquent d’eau ou de soleil, qu’il faudrait semer davantage de sorgho que de blé pour l’année prochaine, je me dis qu’avec des betteraves, on pourrait avoir du sucre – oui, je sais, mais qui dit sucre dit bonbons… quoique des ruches et des abeilles sont une solution aussi, sans doute meilleure même – que la patate douce plairait aux enfants… que des choses auxquelles les autres ont sans doute déjà pensé. Après tout, même si j’ai appris, je suis plus calée en plantes et fleurs, mais c’est chouette de pouvoir apprendre de nouveaux trucs et de se rendre utile…
Et surtout oui, j’arrive parfois, à ne pas trop penser à eux. Ça ne dure jamais longtemps, la preuve, et je me retrouve souvent à désherber un coin ou à amender certains plants, en leur parlant. En lui parlant. Parce que… Tom est en vie, je le sais, comme il a promis, j’ai des nouvelles ou une visite de temps à autre. Mais Nolan… Mon cœur se serre et j’évite de tourner la tête, parce que je vois déjà son ombre à côté de moi, assis en tailleur avec un livre ouvert sur les genoux. Mais comme toujours, je suis faible. Et il me sourit. Et comme toujours, je lui rends, les larmes aux yeux, et je reprends mon monologue sur tout ce qui m’entoure.
J’arrive à m’occuper presque toute la journée en faisant divers petits trucs, en sortant parfois, jamais seule… ou presque jamais. Je mange parfois. Je dors un peu. Et je regarde la vie se répandre autour de moi. Je parviens à sourire sans y penser en voyant les enfants jouer comme si tout allait bien.
Et tout va sans doute aussi bien que possible.
Même si le soir, je regagne mon lit toujours aussi perdue.
Pathétique, c’est le mot que vous cherchez. Mais je suis toujours debout. C’est tout ce qui compte non ?
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Re: Cassidy Jenkins - I'm still breathing
Dim 24 Nov 2019 - 11:41
Ta fiche est déjà bien avancée mais bon courage quand même pour la terminer!
- Levi M. Amsalem
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Re: Cassidy Jenkins - I'm still breathing
Dim 24 Nov 2019 - 11:48
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Re: Cassidy Jenkins - I'm still breathing
Dim 24 Nov 2019 - 12:24
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Re: Cassidy Jenkins - I'm still breathing
Dim 24 Nov 2019 - 12:47
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Re: Cassidy Jenkins - I'm still breathing
Dim 24 Nov 2019 - 13:46
Bonne rédaction !
Bonne rédaction pour la fin de ta fiche n'hésite pas si tu as des questions.
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