The heart was made to be broken
Jeu 2 Avr 2020 - 1:46
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Lorsque je m’étais réveillé, ce matin-là, à l’aube, les évènements de la veille n’avaient pas tardé à remonter à la surface… Par brides un peu confuses, pour commencer. Des images et des sensation floues, qui peinaient à filtrer à travers ce voile encore somnolant de mes pensées. Et si – pendant les trop brèves secondes où je flottais encore dans cet état paisible de mi conscience – j’étais parvenu à me convaincre que ça n’avait été qu’un simple mauvais rêve, la dure réalité ne tarda toutefois pas à me frapper de plein fouet… Tout ça avait été bel et bien réel.
Par réflexe, j’avais tourné mon regard vers le lit vide d’Oliver, avant de me souvenir, un peu trop tard, que mon meilleur ami n’était plus de ce monde pour m’écouter et m’épauler. Pourtant, là, plus que jamais, j’aurais eu besoin de lui… J’aurais eu besoin de son sourire et de ses précieux conseils pour m’aider à passer au travers de ce merdier qui me tombait sur la tête et m’empêchait d’y voir clair. Comprenant, toutefois, que ça ne serait plus jamais possible, que mon ami n’était plus et lorsque cette triste vérité me frappa, ce fut le signal qu’attendaient mes émotions pour rappliquer à la puissance mille. Me percutant, tel un coup de poing en plein ventre qui me coupa le souffle, avant de me prendre à la gorge pour m’étrangler. J’avais brusquement eu l’impression de plonger en pleine crise de claustrophobie. Prisonnier de cette chambre qui me rappelait l’absence d’Oliver. Prisonnier de moi-même et de mes souvenirs de la veille. Paniquant devant cette vague beaucoup trop puissante d’émotions, que je n’arrivais pas à contrôler, j’avais cherché mon air. Ayant soudainement l’impression de suffoquer, de ne plus pouvoir respirer. J’étouffais sous le poids de ce retour brutal à la dure réalité…
M’extirpant du lit, j’attrapai mon couteau et mon fusil posés sur ma table de chevet, avant d’aller décrocher mon manteau de ce clou dépassant du mur près de la porte. M’empressant de sortir dans l’air frais du matin, j’avais fait plusieurs pas dans la cour intérieur du Fort. Tentant de reprendre mon souffle. Pourquoi est-ce que toute cette histoire avec Daniella me faisait-elle encore aussi mal ?! J’avais bêtement espéré que la douleur s’estomperait, quelque peu, au courant de la nuit… Mais visiblement, j’avais eu tort, c’était tout le contraire. Notre engueulade d’hier soir avait frappé fort, pourtant, j’avais l’impression qu’elle frappait encore plus fort ce matin ; alors que je prenais subitement conscience de toute l’ampleur que ça prenait pour moi… J’étais très loin de m’être réveillé aussi "serein" que je l’aurais espéré et ma guérison serait longue, très longue. Probablement plus encore que ce que je m’imaginais.
Autour de moi, le Fort commençait tranquillement à se réveiller. Les gens sortaient, ici et là, pour aller vaquer à leurs occupations habituelles ; labourer les champs, s’occuper des bêtes, prendre la relève de la garde, faire la cuisine, la lessive… Peu importe quels étaient ces occupations, la vie reprenait tout simplement son court, comme si de rien était. Mais moi, il m’était impossible de faire comme si de rien était… Il m’était impossible de penser à autre chose qu’à Daniella et ça, ça m’en rendait malade. La tête me tournait, je ne savais plus très bien où j’en était.
N’ayant pas le moins du monde envie de me mêler aux autres, ni de participer à ce va et viens qui commençait à s’activer autour de moi, j’avais plutôt mis le cap vers le portail. «Salut Greg ! Lançais-je, pour saluer l’ancien vendeur de voiture qui montait la garde sur le rempart. Surpris d’entendre le ton parfaitement calme de ma voix et non pas cette détresse que je sentais pourtant faire rage en moi…Tu peux m’ouvrir ? Je vais juste faire un tour, mais ne t’en fait pas, je reviens vite. » Je lui en fus reconnaissant, lorsqu’il me laissa passer sans me poser plus de question. Je n’avais pas spécialement envie de m’étendre sur la raison du pourquoi avec lui, ni, non plus, de lui mentir. En fait, j’avais juste besoin de sortir d’entre ces murs et d’aller me perdre, quelque temps, dans le boisé qui entourait le camp… Besoin de fuir cette blessure que m’avait fait Dani – même si, peu importe où j’irais, je n’arriverais jamais à m’en défaire.
Je ne marchai pas bien longtemps avant de croiser un premier mordeur. En fait, je l’entendis râler, bien avant de le voir sortir d’en arrière les épines de cet arbre. Debout, au centre d’une petite clairière, je l’avais laissé s’approcher. L’attendant, mon couteau à la main, sans toutefois prendre de posture de défense… Planté là, impassible, j’attendis à la toute dernière seconde avant de bouger. Attendant même qu’il m’ait agrippé l’épaule de sa main désincarnée avant de lui planter ma lame dans l’orbite. Regardant l’expression de son visage – tout près du miens – se figer dans un dernier râle avant qu’il ne s’écroule au sol comme une poupée de chiffon. Puis, me penchant sur sa dépouille putréfié, j'avais braqué mon regard à quelques centimètres du sien, avant de lui crier dessus. Crier aussi fort que je le pus, comme si j’avais pu y déverser toute ma colère et mon mal. Vidant toute l’air de mes poumons avant de recommencer.
Dans mon délire, je n’entendis pas les pas qui s’avancèrent derrière moi… Qu’ils appartiennent à un mort ou à un vivant, je ne les entendis pas.
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Re: The heart was made to be broken
Jeu 9 Avr 2020 - 6:36
Un seul regard à Greg avait suffit pour lui indiquer qu'elle s'occupait de la situation. Fred pouvait bien essayer de se cacher depuis son retour au camp sans son fidèle Oliver, mais même la militaire se rendait compte que son copain tombait en morceaux. Il était aussi abîmé que l'épave des voitures sur lesquelles il bossait. Le pire était qu'il n'osait même pas se plaindre. Et c'était exactement pour cette raison qu'elle savait que rien n'allait plus. Ne pas l'entendre rire, rager, déconner - c'était peut-être normal pour elle, mais pas pour lui. Sere n'avait donc pas eu le choix de le suivre, autant parce que c'était lui que parce qu'elle ne laisserait personne sortir seul - en état ou pas - avec tous les décomposés qui se promenaient dans le coin, depuis les récents événements.
Elle baissa la tête, aussitôt ramenée à cette sensation de merde qui l'habitait depuis tout ce qui s'était passé au centre médical. Cette impuissance qui, visiblement, n'était pas présente chez tous les résidents du fort - surtout pas Ashton. Est-ce qu'elle était aussi en colère? Certainement. Reena ne pouvait s'empêcher de penser que ça avait été une erreur de venir les secourir. Que le camp aurait accusé moins de pertes en les laissant crever sous les décombres. Au lieu de ça, ils avaient tout à réparer et un tas de rôdeurs qui ne se lassaient pas de vouloir les dévorer dans les environs.
Oh, rien n'était simple, bien entendu. Elle était encore assez rationnelle pour le comprendre. Les siens n'avaient pas eu le choix d'agir rapidement, et sans une tonne d'options à disposition. Dans tous les cas, il avait fallu éloigner la horde, d'une façon ou d'une autre. Si elle avait été celle qui devait prendre les décisions, ce jour là, aurait-elle autorisé une équipe à partir en mission sauvetage? La brune s'en voulait d'hésiter. Elle n'était pas sans savoir que de s'attacher affectait les prises de décision, pourtant. Un autre truc qui l'emmerdait. Il semblait aussi qu'elle n'était jamais au bon endroit au bon moment, visiblement - jamais en mesure de protéger qui que ce soit autour d'elle, au final. Quel fiasco.
La miss chassa aussitôt ces idées de son crâne, reportant son attention sur son ami qu'elle suivait depuis quelques minutes déjà. Sauf qu'elle s'arrêta net en le voyant s'immobiliser. S'immobiliser alors qu'un mort approchait - et il s'en battait les couilles, visiblement. Si elle se demandait plus tôt ce qu'il était venu faire dehors, la réponse était simple, dorénavant: rien du tout. Il était venu errer, tenter le karma, ou une connerie du genre. Martinez avait approché à grand pas derrière Fred, se préparant à devoir agir à sa place. Elle était folle de rage, hors d'elle même, de le voir risquer ce qu'il y avait de plus précieux sans raison valable. Si Serena avait été au fond du baril à la mort de Jesse, si elle-même avait souhaité le rejoindre, à ses yeux, le danois n'en avait pas le droit, lui.
Mais en le voyant se pencher sur le cadavre, la demoiselle n'avait pas eu besoin de réfléchir bien longtemps pour comprendre ce qui se passait. Il n'était plus lui-même, et la vision de son copain qui hurlait lui glaça le sang. Il criait à en réveiller la pauvre dépouille immobile, et il ne semblait pas prêt de s'arrêter de si tôt. C'était comme si sa douleur était un venin dont il essayait désespérément de se débarrasser pour ne pas s'empoisonner. Sauf qu'à s'époumoner de la sorte, il allait finir par en attirer d'autres. Peut-être était-ce son but - sauf qu'elle ne le laisserait pas faire. Sans attendre, elle agrippa son épaule par derrière, comme pour le sortir de sa torpeur. Il résistait, le con. Elle n'arrivait pas à le faire bouger, à le reconnecter avec la réalité. Et en trébuchant sur une branche, elle tomba à la renverse, le cul au sol. Levant les cils sur lui quand il se retourna enfin, elle planta son regard noisette dans le sien, sans détour. Le mécano serait sûrement furax, elle n'en doutait pas. Enfin, il l'était déjà, c'était plutôt évident. Mais il lui reprocherait d'être là, elle le savait. Le stress de toute cette merde la gagnait, d'ailleurs, à en voir le rythme trop rapide des soulèvements de sa cage thoracique. Les yeux de Reena demandaient déjà des explications. Son visage était froid, et ses lèvres toujours entrouvertes de cette colère qu'elle s'efforçait de contenir. Comment avait-il osé? Elle voulait le lui demander, lui demander en criant autant que lui, mais elle n'allait pas s'abaisser à ça. Au lieu de ça, sa voix glacée, défiante, lui demanda autre chose. «C'est bon, t'as fini? »
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Re: The heart was made to be broken
Sam 11 Avr 2020 - 0:44
- Spoiler:
- Meme si ça sert à rien, je voulais quand même répondre une dernière fois à Sere
De voir le rôdeur fondre sur moi de la sorte, m'avait rappeler la mort d'Oliver… M'avait rappelé que c'était des visages putréfiés comme celui-là qu’il avait vu pour la toute dernière fois – des visages, pas qu'un seul, des centaines de visages penchés sur lui pour le dévoré vivant… Et si j'avais été là, cette journée-là, à quelques mètres seulement de mon meilleur ami, ce n’était pas ça qu’il avait perçu, mais uniquement la mort, la peur et la douleur. J'entendais encore son hurlement résonner dans mon esprit tel une lame rouillée qui me transperçait le cœur et me déchirait de l’intérieur. Son hurlement qui m’avait glacé le sang et qui s'était, petit à petit, noyé dans la boue du marécage où je l’avais tout droit conduit…
C’était ces images-là que je voyais défiler devant mes yeux alors que je fixais ceux laiteux et éteint du mort. Ces images-là qui m’écrasaient comme dans un étau alors que je me penchais sur sa dépouille, à mes pieds, pour lui hurler toute ma douleur au visage. Hurlant aussi fort que je le pouvais et jusqu’à m’en casser la voix. Vidant jusqu’à la toute dernière onze d’air dans mes poumons, jusqu’à ce qu’ils me brulent, avant de recommencer. Encore et encore. Comme si je pouvais atteindre chaque dépouille de ce monde au travers celui-ci. Comme si je pouvais faire ressentir toute ma colère et ma souffrance à ces macchabés qui avaient sauvagement assassiné Oli ! Comme si je pouvais expulser tout ce mal qui me grugeait de l’intérieur…
Alors, non, je n’entendis pas Serena lorsqu’elle s’approcha par derrière. Je ne senti pas, non plus, sa main qui m’agrippa l’épaule en cherchant à me tirer de ma torpeur… Ou du moins, si je l’avais senti, j’avais inconsciemment résisté ; résisté à cette tentative pour me reconnecter avec la réalité. Et dans une inspiration qui marqua une pause entre deux hurlements, j’avais roulé mon épaule pour me libérer de sa prise. La faisant, sans le vouloir, trébucher sur cette branche au sol. Je l’avais alors perçu, du coin de l’œil, qui tomba à la renverse et c’est probablement ce qui me fit brusquement revenir à moi. Tournant enfin mon regard dans la direction de la militaire, un peu surpris de la voir là. Surpris, mais surtout très gêné, en fait… Mal à l’aise, même, à l’idée qu’elle ait pu assister à cet instant de totale vulnérabilité de ma part. Qu’elle ait pu voir au plus profond de mon être, qu’elle ait vu ma souffrance à nu.
Pinçant les lèvres – malgré mon essoufflement d’avoir autant crié – j’avais été pétrifier par ses prunelles noisettes. Plongé dans ce silence réciproque qui en disait probablement plus long que les mots. Et si, effectivement, j’aurais dû être furax de la voir là, j’en était étrangement incapable. En fait, en y repensant bien, j’étais en quelque sorte soulagé… Soulagé qu’elle ait répondu à mon appel au secours. Même si elle, par contre, était furax ! S’efforçant de contenir sa colère, elle braquait sur moi un visage froid et un regard qui me demandait déjà maintes explications… Pourtant, je n’avais aucune bonne réponse à lui donner.
«Ouais, c’est bon… Je crois qu’il est mort. » Lui avais-je répondu, en baissant les yeux vers le mort – surtout pour fuir ceux de Serena et lui cacher les larmes qui avaient sournoisement commencées à s’accumuler au pied de mes cils – poussant sa dépouille du bout de ma botte, comme si j’avais voulu validé qu’il était bel et bien mort. «Il n’a pas aimé ma performance d’opéra… » J’avais tenté de plaisanter, comme je savais habituellement si bien le faire. Toutefois, cette tentative était probablement plus triste que drôle… Et elle n’était même pas parvenue à me décrocher un sourire.
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