Les poux… Ces parasites ignobles infestaient la tête des vagabonds du No Man’s Land depuis déjà plusieurs jours ! Et celle de Kilian, aussi "précieuse" fut-elle, n’y avait malheureusement pas échappé… L’homme avait, d’abord, tenté de se convaincre que ses démangeaisons n’avaient rien à voir avec ces nuisibles. Que, bien qu’il se grattât le cuir chevelu depuis un bon moment déjà, ce n’était que des irritations imaginaires. Le fruit de son imagination qui, résultant de ce sujet sensible qui était sur toutes les lèvres, lui jouait de bien mauvais tours… Après tout, ne suffisait-il pas d’entendre parler de poux pour qu’inévitablement, l’on se gratte le fond de la tête ?! Finch avait préférer s’en persuader, avec conviction, plutôt que d’admettre la triste vérité.

Si plusieurs survivants s’étaient tout simplement rasé la tête – un remède drastique, mais efficace – Kilian, lui, n’avait pas pu s’y résoudre. Il tenait beaucoup trop à son apparence physique, à ce "bien paraître" qu’il tentait de conserver coute que coute, pour s’abaisser à un tel traitement barbare ! D’autant plus, qu’il ne souhaitait pas, le moins du monde, passer pour un vulgaire pouilleux, partout où il irait. Sachant trop bien que s’il se retrouvait la boule à zéro, les regards ne manqueraient pas de se tourner vers lui avec une lueur de compassion dérangeante… Et s’il se réjouissait habituellement d’attirer les regards, cette fois-ci, toutefois, ça n’aurait pas été pour des raisons appréciables. Il n'aurait pas voulu qu'on le dévisage pour ça.

Lorsqu’il fut forcé d’admette l’évidence ; que les poux avaient bel et bien élu domicile dans sa précieuse tignasse, Kilian s’était désespérément rabattu sur les remèdes de grand-mères. Parvenant à mettre la main sur du sel de table et sur un galon de vinaigre blanc, il n’avait pas lésiné sur ce shampooing supposer éliminer les parasites. Y allant généreusement avec cette lotion malodorante – et probablement aussi irritante pour la peau vu la tendance de l'homme à laisser macérer un peu trop longtemps – qui, si elle sembla avoir fait effet pendant quelques jours, n’avait malheureusement pas tenu le coup plus longtemps… D'ailleurs, Finch ne parvint pas à dénicher de l’ail ou des oignons, parce qu'autrement, croyez-moi qu'il aurait certainement essayé ce remède-là aussi…

Aujourd’hui, il avait donc décidé de prendre les choses en main – ou enfin, de s'y prendre mieux que ce qu'il avait déjà fait jusque là – et de solliciter les services de cette coiffeuse qui était arrivé, pile poil, au bon moment ! Sortie tout droit d’un groupe qu’ils appelaient tous ; The Haven, la dame en question était de passage au No Man’s Land pour sauver la mise de bien des vagabonds qui, comme Kilian, étaient aux prises avec ces satanés poux. Le cogérant avait donc attendu que la frisée en ait terminé avec son précédent client, avant d'aller à sa rencontre.

« Je suppose que tu ne chôme pas, par les temps qui court, n’est-ce pas ?! Avait-il lâché, à la jeune femme, lorsqu'il arriva à la hauteur de son stand de coiffure. Riant à sa propre remarque, Finch avait alors tendu la main dans sa direction ; Au fait, moi c'est Kilian. On s'est déjà vu, l'autre soir, à cette assemblée. » Il y alla de politesse avec elle, puisqu'après tout, il était le client dans cette affaire et ne gagnerait absolument rien à se montrer trop farouche – à part, peut-être, faire grimper le prix, mais ça, il ne voulait clairement pas en arriver là !

« On m’a rapporté que du bon, de tes services ! Et, disons que dans la situation actuelle, bien évidemment, il faisait référence aux poux, mais n’arrivait tout simplement pas à se résoudre à l’énoncer de vive voix, j’aurais grand besoin qu’on s’occupe de mes cheveux. Enfin... Si tu vois ce que je veux dire. » Il lui avait souri, faisant de son mieux pour lui cacher son malaise.

La vie au No Man’s Land avait quelque chose de vraiment particulier. Shawna avait l’impression d’être au sein d’une fourmilière où chacun allait et venait comme bon lui semblait. Et avec la reprise du troc, l’affluence était plus apparemment plus importante qu’à l’accoutumée. Malgré ses craintes, la métisse avait finalement trouvé ses marques. Le contact avec les « clients » était appréciable. Elle avait réellement l’impression d’avoir fait un bond de quelques années en arrière, lorsqu’elle travaillant dans ce petit salon de coiffure à Seattle. Pouvoir rencontrer un peu de monde, retrouver les gestes qu’elle faisait avant, discuter avec ceux qui venaient lui demander ses services ; Janessa avait eu une idée de génie en lui disant que sa présence dans l’entrepôt serait la bienvenue.

La coiffeuse avait déjà eu pas mal de clients depuis le début de la journée. Mais à vrai dire, elle aurait préféré qu’ils viennent pour se faire coiffer plutôt que te traiter leurs tignasses contre ces satanés poux. Cela faisait déjà deux jours qu’elle passait tout son temps à épouiller la tête de ceux qui venaient la voir. C’était terriblement frustrant pour elle, surtout pour quelqu’un qui avait horreur de ces petites bêtes. Pourtant elle devait bien avouer que l’épidémie qui sévissait ici lui rapportait énormément de monde. Sa présence ici n’était pas passée inaperçu et elle n’arrêtait pas !

Occupée à désinfecter son matériel, elle venait de s’occuper de plusieurs personnes, d’autres attendaient sagement que le vinaigre qui imbibait leurs cheveux fasse effet. Il fallait laisser poser le produit suffisamment longtemps pour tuer tous les poux. Cela lui laissait le temps de discuter un peu avec ceux qui se montrait bavard, comme elle. Parler de la pluie et du beau temps, c’était agréable.

Puis quand une voix l’interpella, elle se retourne, accueillant le nouveau venu avec un beau sourire. Ça aussi, c’était important. Elle se montrait sympathique, chaleureuse, pour convaincre ceux qui passaient par là. Oui, elle savait y faire. « Salut ! Non, je n’arrête pas ! Mais c’est bon pour les affaires ! » Elle s’avança pour serrer la main du l’homme, se présentant à son tour.

« Shawna. Enchantée. » Elle se rappelait l’avoir aperçu lors de la réunion, elle lui offrit un nouveau sourire. « Bien sûr, une idée de ce que tu peux me proposer en échange ? » Dit-elle simplement d’une voix toujours aussi cordiale. Daniella était occupée ailleurs et c’était à elle de gérer les paiements cette fois. Mais en ayant vu la brune faire, elle savait maintenant comment elle devait s’y prendre. Autant dire qu’elle était plutôt douée en affaire !