Mallowe allait de mieux en mieux; s'en était presque miraculeux.
Ce matin, Vaughn était passé lui ôter les bandages qui entouraient son crâne; ils étaient devenus inutiles, la cicatrice s'étant bien refermée et la fracture en bonne voie de guérison.
Elle était un peu faible sur ses jambes d'être restée alitée si longtemps et se promit de reprendre ses exercices de gymnastique quotidienne dès qu'elle en aurait le feu vert. En attendant, une petite marche jusqu'au No man's land lui ferait du bien.

Elle avait croisé Nina qui s'activait au bar, lui avait décroché un sourire presque vainqueur avant de lui annoncer joyeusement qu'elle sortait prendre un peu l'air tout en lui promettant d'être prudente.
Malgré les dangers potentiels elle avait envie de prendre son temps, de flâner, de respirer enfin l'air de la ville malgré les mouches qui reprenaient leurs droits en cette fin de printemps, comme tous les ans depuis que le mangeurs d'hommes étaient là pour vicier l'atmosphère de leur puanteur.

Main contre le slot de son casse-tête pour au cas où, elle déambula dans les rues adjacentes pour s'apercevoir que rien ou presque n'avait changé hormis les arbres plus feuillus et la végétation plus dense là où le bitume s'était fendu pour ensuite diriger ses pas à l'intérieur du grand hangar où se tenait le troc.
Elle n'avait rien de particulier à échanger mais fureta avec délice sur chaque étal, fouillant dans les vêtements, examinant les chaussures, cherchant des yeux parmi les armes un fouet comme celui qu'elle avait à l'arène sans le trouver puis passa aux rayonnages de nourriture.

Les viandes la dégoûtèrent comme d'habitude mais fut surprise de voir un arrivage de poissons frais qui lui donnèrent presque l'eau à la bouche tant elle aimait cela.
Elle passa les légumes en revue, lorgna sur les bouteilles d'alcool en se disant qu'elle enverrait son bras droit échanger des choses pour les avoir étant donné qu'elle n'avait pas encore le droit de porter du lourd avant d'aller vers la tente médicale pour dire bonjour à Kaycee qu'elle n'avait pas revue.

L'infirmière, étant occupée avec un patient, elle attendit un moment en regardant passer les gens qui allaient ou venaient en ce lieu toujours aussi fréquenté puis papota avec la jeune femme enfin libérée, la remerciant d'avoir aussi bien recousu sa plaie par balle à la jambe gauche.

Sans s'en rendre vraiment compte elle était restée longtemps dehors aussi décida t-elle de s'en retourner de crainte que Nina s'inquiète mais arrivée non loin de la taverne elle vit sa silhouette de dos s'éloigner probablement vers son camping-car puis une autre, tout aussi connue, sur le pas de la porte; Joey !

Les souvenirs lui revinrent instantanément. Son accueil glacial la première fois qu'elle avait mis les pieds dans l'établissement saccagé, la mission puis son entrevue sous la tente.
Mallowe n'avait pas cessé de penser à sa fureur contre elle alors qu'elle l'aimait encore de toutes ses forces puis à la réconciliation expresse due à son état de santé.

C'était le matin.
Elle s'était réveillée péniblement, reconnaissant enfin le visage de Vaughn mais ne se souvenant toujours pas de ce qu'elle avait bien pu faire pour se retrouver dans un état pareil;
Elle n'était plus que douleurs.
Pour faire passer le temps elle avait fouillé dans son cerveau frappé d'amnésie partielle pour tenter de raccrocher les wagons et s'était souvenue qu'Allïa et Joséphine l'avaient transportée dans un véhicule jusqu'ici; pourquoi ? Mystère.
Puis, la toile s'était écarté pour laisser passer l'ex-pompier et son cœur s'était mis à battre la chamade. Elle se rappelait vaguement avoir demandé à sa sœur de cœur de l'informer d'un désir de réconciliation mais était-ce réel ou l'avait-elle rêvé ?

Elle aurait aimé sourire quand la jeune femme était entrée mais cela avait été impossible; non seulement sa tête et son nez étaient bandés telle une momie mais en plus elle avait trop mal.
Elle avait levé péniblement les paupières puis les avait refermées presque aussitôt tant la migraine lui vrillait les tempes.
Elle se souvint lui avoir murmurer dans une phrase difficilement articulée qu'elle l'aimait toujours autant, qu'elle était son amie et qu'elle s'excusait pour son comportement avant de gémir de douleur.
Joséphine, certainement sous l'impulsion d'une infirmière avait dû quitter la tente rapidement et elles ne s'étaient plus revues.

Aujourd'hui elle était là !
afin d'être certaine de la pas la manquer une deuxième fois, elle cria son prénom en faisant un grand signe de la main avant de presser le pas vers elle puis, arrivée à sa hauteur, elle la prit dans ses bras, geste rarissime venant de l'ex-tribun, tant elle était heureuse de la retrouver enfin.
L'émotion était telle qu'elle resta ainsi quelques instants avant de déclarer:
je suis contente de te revoir, comment vas-tu ? Comment va Gemma ?
Elle avait une foule de questions à lui poser, de choses à raconter mais elles ne pouvaient pas rester ainsi dehors aussi demanda-elle si elle voulait rentrer à l'intérieur, monter dans son petit studio ou aller ailleurs.