Depuis l’arrivée du petit Otis chez eux, la vie au camping semblait un peu plus organisée étrangement. Un si petit homme tout frêle était finalement capable de faire preuve de beaucoup de bon sens, et dans ce désordre notoire qui était le leur, ça n’était pas du tout dispensable. Certes, Otis était un garçon discret qui ne voulait pas mal faire, et encore moins des ennemis mais pour autant, il était d’une compagnie somme toute très agréable. Difficile de lui faire prendre confiance en lui, de l’apaiser quand parfois il faisait des crises d’angoisse. Mais il avait du potentiel, et Connor appréciait véritablement sa présence :

Bruce est dans la cage, confia-t-il à Alan en se penchant vers lui.

L’ancien footballeur s’amusait grandement dans cette dernière, et commençait doucement à devenir un très bon compétiteur. Ça changeait probablement de sa pratique du sport d’ordinaire, et c’était souvent difficile de trouver des adversaires à sa mesure, mais les anecdotes qu’il ramenait systématiquement et le tout avec bienveillance avaient au moins le mérite de les tenir occupés lorsqu’ils mangeaient tous ensemble. De fait, eux qui étaient venus le chercher pour rentrer après un passage express au No Man’s Land, devraient patienter encore un peu avant de pouvoir rentrer.

Connor se passa la main dans les cheveux et scruta autour de lui un bref instant. Dans cette foule, les visages étaient vraiment différents, les expressions aussi. Il y avait ceux qui grimaçaient à chaque coup, d’autres qui s’enthousiasmaient d’entendre des os craquer. Au final, Connor ne faisait partie d’aucun des groupes, il termina simplement son tour de piste avant que son regard se rive sur un gars à quelques mètres d’eux. Difficile de savoir pourquoi, mais son visage lui disait quelque chose, et ne pas le remettre dans l’immédiat l’agaça légèrement.

Il claqua la langue avant de se baisser à nouveau vers Alan :

Le petit gars là-bas, il te dit pas un truc ? Demanda-t-il dans la foulée, désignant d’un index la silhouette de ce dernier : Il était dehors au banquet, Bruce nous a parlé de lui…

En des termes très élogieux, de mémoire. Mais là encore, impossible de remettre un nom dessus :

Cyril ? Ou… Cillian ? Suggéra-t-il. Mais ça n’était pas ça. Allons-le voir, fit-il à son voisin en se détournant déjà pour se rapprocher.

Sirius ! Oui, évidemment. Maintenant qu’Alan le disait, ça lui semblait parfaitement évident. Il hocha la tête et tous deux se rapprochèrent finalement du jeune homme qui avisa dans leur direction l’instant d’après. Les salutations de rigueur furent évidemment hésitantes, il fallait bien l’admettre. Et en même temps, Connor pouvait le comprendre. Se faire alpaguer par deux grands gaillards à la barbe de plusieurs jours, aussi aimables d’un premier abord que deux portes de prison, ça ne mettait pas dans l’ambiance :

Salut, souffla Connor en essayant de se détendre, tendant une main ferme vers le blond pour l’inviter à la serrer. Sirius c’est ça ? Demanda-t-il pour confirmation. Moi c’est Connor, et voici Alan, précisa-t-il ensuite.

Il détailla un instant le visage du plus jeune, tentant de discerner sur ses expressions ce qu’il pensait. Peut-être pas grand-chose, allez savoir. Dans tous les cas, le sportif tâcha de se détendre pour sa part et d’afficher un sourire pour donner l’impression d’être plus ouvert et moins agressif qu’il pouvait en donner l’air jusque-là :

Désolé, on veut pas donner l’impression de… Enfin… il haussa les épaules. L’impression de vouloir le matraquer dans un coin sombre dès que l’occasion se présenterait. Alan et lui n’étaient vraiment pas des mafieux, et il n’entendait pas le devenir dans la foulée. Boys Club, certes ! Mais pas des monstres. Bruce nous a parlé de toi y’a pas longtemps, apparemment tu étais à la réunion qui s’est pas forcément bien passé, expliqua-t-il.

C’était les raisons de sa présence à côté du garçon, raison suffisante pour se déplacer. Il n’y avait aucun signe de reproche dans sa voix, rien qui pourrait signifier qu’il lui en voulait, bien au contraire ! Connor aimait les gens volontaires et bienveillants, qui s’investissaient pour les autres et aidaient leurs prochains. La survie de Sirius dépendait ce jour-là d’une coexistence avec les autres groupes. Il savait faire les bons choix, ça expliquait sa survie :

Il nous a dit que tu avais été d’une grande aide, ajouta-t-il doucement. Merci d’avoir aidé mes amis, conclut Connor avec un hochement de la tête entendu.