Son corps commençait doucement mais sûrement à se remettre de cette foutue maladie au nom bien trop compliqué pour lui. Aamir n’avait pas vraiment cherché à comprendre le pourquoi du comment, il s’était contenté d’ingérer les médicaments qu’on lui avait donné ; attendant que le temps ne fasse son œuvre. Il était conscient que dans son malheur, il avait finalement eu de la chance. Contrairement à Katherine. Seule la fatigue et des violentes migraines persistaient ci et là. Rien d’insurmontable, d’autant plus que les symptômes tendaient à s’espacer de plus en plus. Il n’était plus obligé de rester dans sa chambre. En réalité, Aamir était même forcé de la quitter le plus souvent possible. Parce que cette épidémie n’avait été que la partie émergée de l’iceberg. Si les rats pullulaient suite à la tempête qui s’était abattue sur Seattle ; les intempéries avaient emmenées avec elles bien d’autres problèmes. Des problèmes qui pouvaient s’avérer bien plus dévastateurs qu’une simple toux ou migraine. Les dégâts collatéraux sanitaires de cette épidémie n’étaient finalement pas grand-chose face aux dégâts matériels que cette crise avait soulevés.  

L’empire que Bill s’efforçait de bâtir menaçait de s’effriter. Tout ce qui pouvait faire de lui sa renommée était à l’arrêt. Et il allait de l’intérêt –commun ou personnel- de tous les Bastards de travailler d’arrache-pied pour empêcher le navire de sombrer dans les abysses. Il fallait remettre la Cage en état et s’adonner à la chasse aux rats de l’ORB.  Du sale boulot auquel Aamir ne pouvait échapper. Après tout, c’était dans ses fonctions de faire les jobs ingrats. Il ne rechignait pas à la tâche, espérant que tout ça serait bientôt qu’un mauvais souvenir. Qu’une anecdote de plus à raconter.

Et alors que l’après-midi touchait à sa fin, Bill était venu le trouver. L’extravagant leader voulait qu’Aamir se rende à la taverne, ce soir. L’indien, d’abord surpris par cette requête, compris rapidement qu’il s’agissait d’une mission de repérage. Ou, pour utiliser des grands mots, d’infiltration. Le dandy anglais voulait savoir où en était la concurrence. Si eux aussi étaient à l’arrêt. Si son propre Empire était le seul à risquer de s’effondrer. Aamir était l’un des seuls à ne jamais avoir fréquenté la taverne, à ne pas connaitre la propriétaire et surtout, à avoir un visage qu’elle non plus n’avait jamais vu. L’ancien chauffeur ne se fît pas prier. Déjà, parce qu’on ne refusait rien à Bill. Et surtout parce que l’idée de pouvoir arrêter de courir après ces satanés rats ne serait-ce que quelques heures, ça ne se refusait pas non plus.

La nuit commençait délicatement à envahir la ville alors qu’Aamir s’approchait de la taverne. Devant ce même bâtiment, il pouvait facilement distinguer qu’une femme était assise sur le porche, un berger allemand  à ses côtés. Aamir s’avançait lentement, pour ne pas paraitre trop pressé ou trop agressif. Il n’eut pas le temps de dire quoique ce soit que la brune déclara que la taverne était fermée mais qu’elle pouvait seulement lui proposer un verre, dehors. Aamir hocha la tête, comme pour accepter cette proposition avant de ne lui rendre son sourire, sans doute tout aussi fatigué que le sien.  

- Va pour le verre sur l’porche, lâcha-t-il les lèvres toujours retroussées.

Il resta debout devant cette femme un long moment, ne sachant pas trop s’il devait se servir lui-même ni ou étaient ces fameux verres.

- Qu’est-ce qui s’est passé ici ? s’enquit-il d’un air faussement innocent On m’a beaucoup parlé de cette taverne, c’est dommage qu’elle soit fermée pour ma première !

Aamir se décida finalement à s’assoir à côté de celle qu’il pensait être la propriétaire.

- On m’a parlé aussi d’une Nina, qui vient de devenir la boss ici. Tu la connais à tout hasard ?

Au jeu du gars au courant de rien, qui débarquait de nulle part, Aamir excellait.