J'ai encore du mal à croire qu'il lui arrive de dormir paisiblement, et ce, à mes côtés. Elle est comme un ange qui dort, un ange qui peut vit se transformer en petite démone, mais un ange quand même. Mes yeux l'explorent et j'ose pas la sortir de son sommeil, surtout lorsque mon regard s'pose sur la morsure que j'lui ai infligée. Elle aura cette trace toute sa vie... La cicatrice du moment qui briserait à tout jamais la confiance qu'elle pourrait avoir en moi, malgré tous mes efforts. Elle l'avouera sûrement pas, mais j'suis sûr qu'il lui arrive d'y penser, qu'il lui arrive d'avoir peur de s'que j'pourrais lui faire, dans un moment d'perte de contrôle. J'me penche, et j'dépose mes lèvres sur la vieille plaie, puis j'l'embrasse au coin des lèvres. C'est c'que j'suis maintenant, un homme prêt à marier, j'imagine... Manque plus que j'pose un genou par terre... Mais j'en suis pas là.

Elle se réveille sous mes assauts d'amour, et j'lui souris pour que ce soit la première chose qu'elle voit. "Il est déjà presque midi, tu comptes passer de Cendrillon à la Belle aux bois dormants?" Que j'lui lance à la blague, me penchant à nouveau pour venir chercher ses lèvres sans lui laisser l'temps d'répondre. On s'croirait dans une comédie romantique tellement c'est mignon, mais j'm'en fou un peu de c'que pensent les gens, cette fille j'l'ai dans la peau.

J'me couche à côté d'elle pour glisser mon bras autour de son corps que j'attire contre le mien sans lui demander la permission. Ça fait longtemps qu'on en est plus là. "Ou peut-être que j'devrais te donner une bonne raison de t'réveiller?" Ma main s'glisse sur sa peau du bout des doigts, s'qu'elle a laissé exposé avant d'aller dormir. J'commence à savoir s'qui lui plaît et comment la toucher. C'est étrange d'avoir une relation stable. Avec des femmes différentes, c'est toujours une nouvelle mélodie, c'est jamais parfait et les notes résonnent un peu au hasard. Parfois, la musique sonne complétement fausse, et parfois, c'est une pièce digne des plus grands concerts. Toutefois, quand on s'retrouve à partager son corps avec la même personne sur une base régulière, c'est comme si on connaissait pratiquement déjà toutes les notes d'avances. Ça ne tue pas la magie, bien au contraire, mais ça permet de la perfectionner à chaque fois.

Mes doigts se baladent sur sa peau jusqu'à ses jambes, alors que j'soutiens son regard qu'elle a maintenant ouvert sur moi. Peut-être qu'elle a enfin abandonné l'idée de rester dans l'monde des rêves et qu'elle va sortir du lit? Ou peut-être pas... Après tout, avec la pluie, dehors, c'est une journée à rester au lit. Surtout que j'pars demain pour quelques jours, ça serait agréable de maximiser notre temps ensemble.

Elle avait eu besoin de temps. Beaucoup de temps, oui, afin de parvenir à ne pas se raidir à chacun de ses mouvements, à chacune des fois où Adam posait les mains sur elle. Encore aujourd'hui, c'était difficile. La petite n'avait jamais été une excellente menteuse, il le savait, mais elle faisait de son mieux pour cacher cette peur qui la rongeait quand il approchait son cou. Enfin, May se réveillait à peine, maintenant. Elle était un peu dans la brume, sentant les lèvres du rouquin sur sa vieille plaie.

Et même si ses yeux étaient toujours fermés, elle était tout de suite devenue plus vigilante, prête à répondre à cette alarme silencieuse qui lui vrillait sans cesse la cervelle. Elle réprima toute réaction, pourtant. Il n'avait pas besoin de s'en rendre compte. Réalisant donc qu'elle était face à la version d'Adam qui ne voulait pas lui arracher la chair de sur les os, la princesse avait enfin été capable de se détendre - et de sourire. Comment ne pas sourire face à son sourire à lui, de toute façon.

Dans tous les cas, il ne lui laissa même pas le temps de placer un mot qu'il lui cassait déjà les couilles avec l'heure qu'il était. Et avant qu'elle ne puisse se plaindre, il avait fait en sorte qu'elle se taise avec un nouveau baiser - rien de moins. Elle l'attira vers lui pour profiter du moment, riant un peu de sa blague de merde avant de le laisser l'entraîner contre lui. Liv posa la tête sur sa poitrine, le serrant au passage pour profiter de la chaleur de sa peau sur la sienne. « J'suis restée tard au dispensaire, okay? C'pas ma faute. » se justifia-t-elle aussitôt. Et il ne rendait pas les choses faciles en l'incitant à rester au lit avec lui, le pire. « C'est toi le grand-père qui va dormir trop tôt.  » lâcha-t-elle ensuite, en riant de plus belle. Il l'avait cherché.

Sauf qu'il parlait dorénavant de trouver une bonne raison de se réveiller. Elle haussa les sourcils sans qu'il ne puisse le remarquer, avant de se décoller un peu - juste assez pour pouvoir lever la tête et planter son regard dans le sien. C'était comme ça qu'il voulait démarrer la matinée, alors? L'idée était vachement intéressante. La blonde se couvrait de frissons tandis que les doigts du prof parcouraient ses jambes, et elle ne tarda pas à venir chercher ses lèvres pour l'embrasser de plus belle.

Elle passa une main à sa nuque, faisant toujours danser sa langue avec la sienne - lentement, comme si elle voulait à tout prix savourer cet instant. Sans même s'en rendre compte, May grimpa sur lui, l'obligeant du même coup à se redresser un peu puisque Cendrillon l'empêchait de garder le dos collé au matelas. « T'as qu'à rester ici au lieu d'te barrer j'sais plus trop où. » murmura-t-elle à son oreille, libérant enfin ses lèvres des siennes.  

S'arrêtant pour l'observer pendant de longues secondes, son pouce passait à répétition sur les lèvres du chasseur à mesure que les pensées se bousculaient dans son esprit. Elle détestait l'idée de le voir partir même si ce n'était que pour quelques jours. Soyons honnêtes, elle se détestait surtout elle-même de ressentir autant de choses par rapport à lui. « T'es vraiment obligé d'y aller? »  

"L'avenir appartient à ceux qui s'lève tôt. T'as jamais entendu cette expression auparavant?" Grand-père? J'roule des yeux même si j'sais qu'elle dit ça juste pour s'moquer d'moi. Après tout, c'est elle qui passe ses plus belles années avec un ancêtre, j'vais pas m'en plaindre. Et puis j'suis comme du bœuf moi, j'suis meilleur vieillit à c'qui parait. Ça doit être vrai, parce qu'elle s'empresse de répondre à mes caresses par un baiser fougueux auquel j'réponds d'un coup d'langue sur la sienne. J'ai l'impression qu'il est bien cochon s'frenchkiss et j'suis à peu près certain qu'ça s'terminera pas avec une partie d'cartes.

Elle me grimpe dessus, et m'empêche de prendre mes aises, retenant légèrement de sa main mon visage contre le sien pour que nos lèvres passent l'éternité côte à côté. J'suis vieux, alors j'ai forcément un peu mal dans le bas du dos, mais j'prends appuie avec ma main gauche sur le matelas, et mon autre main, elle s'gêne pas pour être tactile dans le bas du dos d'la blonde. Le pire, c'est qu'elle choisit c'moment là pour m'faire sentir coupable des jours à suivre. C'est presque d'la triche, mais j'suis pas si aisément manipulable.

Mes lèvres libres, j'me laisse retomber dans les couvertures, glissant mes deux mains sur les cuisses qui sont confortablement installées de chaque côté d'mon corps. Ainsi, elle me surplombe et j'ai presque l'impression que son regard est à la fois suppliant et inquisiteur. Elle insiste, en me demandant pour la millième fois si j'dois y aller, comme toutes les autres parties chasses précédentes. J'lui souris tendrement, parce qu'elle est sacrément mignonne de s'en faire autant pour moi, et de s'languir à la simple idée d'être séparé d'moi pendant quelques jours. Après, j'dois avouer qu'elle me manque aussi. C'est bizarre d'accorder autant d'importance à quelqu'un.

"Tu sais très bien qu'si on veut manger autre chose qu'des légumes tous les jours, faut qu'j'y aille. Elle le sait, j'le sais, tout Fort Ward le sait. Tant qu'on pourra pas s'permettre d'avoir du bétail, la chasse restera notre source principale de protéine... Les peaux sont non-négligeables aussi faut dire. Inutile d'essayer d'la convaincre, elle le sait déjà, et elle me pose la question probablement juste pour me montrer à quel point elle tient à moi.

D'un coup, j'la bouscule pour la faire tomber sur le côté, puis sur le dos, m'plaçant à mon tour au-dessus d'elle, prenant maintenant un peu plus le dessus en l'embrassant avec autant, si ce n'est plus, de passion qu'auparavant. Tout en venant embrasser sa nuque, c'est mon tour de lui glisser un mot à l'oreille. "T'as qu'à venir toi... Nous deux, dans un chalet, sans personne pour nous déranger." J'lui fais des haussements de sourcils séducteurs qui doivent déjà lui expliquer tout c'que j'ai en tête. Quoi que, j'suis pas sûr que j'ramènerais beaucoup gibier si on était seul 24h sur 24 dans le bois. "M'dis pas que ça t'donnes pas des idées?"

« Je sais. » lâcha-t-elle comme une enfant qu'on grondait, les yeux rivés sur les mains d'Adam à ses cuisses. « Mais c'est tout le temps toi qui doit partir. » ajouta-t-elle en se disant qu'il ne devait pas être le seul putain d'habitant de l'île qui savait tuer le bétail, à la fin. Est-ce qu'elle se comportait comme une gamine? Peut-être un brin. C'était pas ce qu'on lui disait tout le temps de faire, pourtant? Parler? S'ouvrir un peu plus? Et qu'est-ce qu'elle en retirait? Rien du tout - si ce n'est peut-être qu'elle avait l'air d'une idiote qui était incapable de se passer d'un homme, alors que c'était tout le contraire. Enfin, elle ne voulait pas être cette idiote là.

Elle n'avait pas eu le temps d'y réfléchir plus longtemps, de toute façon, puisqu'il la renversait pour la forcer à poser le dos contre le matelas. Il l'embrassait avec tellement de fougue qu'elle questionnait le genre d'idiote qu'elle voulait être, finalement, répondant à son baiser sans se priver. La princesse avait tout de suite attrapé Adam par le cou, l'attirant contre elle comme si le fait d'agir de la sorte allait l'empêcher de partir. Le prof soufflait quelques mots à son oreille, maintenant, et elle se sentait fondre comme neige au soleil à chaque seconde qui passait - rien de vraiment nouveau, en fait, quand elle était avec lui. « Quel vil manipulateur. » lâcha-t-elle en se mordant la lèvre, ses yeux clairs posés sur lui.

L'idée était intéressante, le pire. Pour des raisons évidentes. Mais Liv avait la nette impression que cette expédition ne ressemblait en rien à des vacances, malheureusement pour eux. « Bien sûr que ça m'donne des idées. » Avait-elle besoin de lui expliquer lesquelles? Son sourire devait parler pour elle. Et si jamais ce n'était pas assez, elle se glissa un peu plus bas dans le lit pour aller doucement embrasser sa clavicule, puis son thorax, tandis que ses doigts se baladaient dans son dos, tentant de rejoindre ses fesses.  

« T'es sûr que c'est une bonne idée? Qu'est-ce qui te fait croire que j'te laisserais sortir dehors si je t'ai pour moi toute seule, hein? » Sans lui laisser le temps de répondre, elle avait à nouveau capturé ses lèvres, les doigts dans sa barbe rousse, cette fois. Elle se détacha doucement, sans pour autant se décoller de lui, avant de parler. « T'imagines si tu ramènes rien? Killer Queen serait furax. On serait accusé illico de vouloir créer une révolution en laissant volontairement Bainbridge crever de faim. Et elle irait voir sa petite Valentine pour lui demander de sauver le monde avec ses abeilles. » Merde, elle se faisait rire toute seule. Déconner était encore son mécanisme de défense préféré, après tout. C'était littéralement imprimé dans ses gênes.

Enfin, elle avait retrouvé son sérieux pour la suite. « J'voudrais bien venir avec toi, mais on doit partir en mission d'ici quelques jours, je sais pas quand exactement. » Elle l'entendait déjà lui dire qu'il en avait rien à foutre, qu'elle n'avait, en un sens, aucune obligation. « Il y aura des risques, et je serai la seule médic dans l'équipe. » justifia-t-elle avant même qu'il ne puisse commenter. Et avec New Eden, valait mieux se préparer à toute éventualité. Cendrillon marqua ensuite une pause, laissant le silence envahir la pièce un instant - comme pour mieux graver le moment dans sa mémoire. « C'est la première fois que tu m'demandes de t'accompagner. »