Allez Nolan, rester cool, ça tu sais faire. Je crois. Enfin ça dépend des moments mais là, en théorie, tu gères dès que ça touche au médical. Et au final, j’arrive à me convaincre petit à petit que les questions que je dois poser sont légitimes, qu’il y a pas à se sentir mal à l’aise, ce genre de trucs quoi. Ca marche pas trop mal, si on en croit le sourire d’Aurora quand on discute. Elle est plutôt sympa cette fille, même si j’ai pas vraiment pris le temps de la connaitre plus que ça. Faut dire qu’il y a quand même beaucoup de mon maintenant au camp. Enfin, beaucoup de monde… c’est relatif quand on sait combien on était avant tout ça. Mais pour moi, ça fait déjà un nombre plus qu’acceptable. En tout cas, elle fait une bonne impression.

Forcément, ça rend le reste un peu plus difficile alors que j’écoute les symptômes et que j’essaie de faire des recoupements avec les infos que j’ai. Autant dire que, pour certaines, annoncer ce genre de nouvelles est plus facile que pour d’autres. Et l’espace d’une seconde, je sens une vague de panique m’envahir à l’idée que ça pourrait être Cassidy à sa place. Okay, c’est pas le moment de penser à ça, chaque problème en son temps. J’inspire longuement alors que j’attends la réponse à la question la plus gênante de la journée. Dans le genre bonne ambiance, je pense qu’on est pas mal là. Et je me dis que Lis’ aurait trouvé une pirouette pour détendre le truc. Sauf que là, perso, y a rien qui me vient.

Et les quelques secondes qu’elle met à me répondre paraissent particulièrement longues. Mais elle finit par le faire et je hoche la tête. « Très bien. Je vois. On va devoir s’en assurer alors, d’accord ? » J’ai parlé d’une voix douce, mais ça suffit pas à juguler la panique qui commence à s’emparer d’elle. « Respire Aurora. Prend de grandes inspirations et relâche tes épaules. » J’attrape ses deux mains et je les serre doucement, oubliant que je me sentais terriblement gêné il y a quelques secondes à peine. « Pour le moment, c’est une hypothèse, il faut faire quelques tests pour savoir si c’est le cas. Et… si ça l’est… » J’ai un sourire que j’espère rassurant. « Les femmes ont des enfants depuis la nuit de temps tu sais, c’est un processus naturel. Terrifiant, mais naturel. Et à la différence du moyen-âge, on a quand même récupéré un minimum de matériel. Sans compter qu’on a le savoir-faire qui va avec. Et… Il y a plus d’une femme qui a accouché dans ce camp, tu pourras leur poser des questions, je suis sûr qu’elles seront ravies de te répondre. » Je continue de serrer doucement ses mains avant d’ajouter d’un ton toujours aussi calme. « Il y a des risques, je ne vais pas te mentir. Mais… tu n’es pas toute seule. Que ce soit pour la grossesse ou pour la suite. C’est sûr que les conditions pour élever un enfant n’ont plus rien à voir avec ce qu’on connaissait avant la fin du monde mais… la vie continue. Elle ne s’est pas arrêtée il y a cinq ans, elle ne s’arrêtera pas demain. Et les enfants font partie du processus. »

Reste à savoir si le père de l’enfant est dans le camp ou pas. Mais dans l’immédiat, je ne suis pas entièrement sûr que ce soit la meilleure question à poser. Je laisse filer quelques secondes, lui laissant le temps de digérer cette hypothèse avant de reprendre, toujours sur le même ton. « Tu veux qu’on vérifie si c’est le cas alors ? » L’échographie ne montrera pas grand-chose à ce stade, sauf si où sait exactement où regarder. Heureusement que j’ai révisé ces parties-là de mes bouquins dernièrement.