Qu’est-ce que c’était que ce bordel ? Comment diable je me retrouvais avec une tête inconnu sur mes seins ? C’était nouveau ce fétichisme ou quoi ?

J’étais entrée dans ce hangar pourri pour y récupérer des affaires que j’avais caché et du bois sec, je savais qu’il y avait ici des restes d’une ancienne scierie, zone de stockage déjà délaissée à l’époque et en mauvais état et s’était d’autan dégradé depuis l’apocalypse.
La plupart des objets intéressants avaient été pillés depuis longtemps, mais j’avais pris l’habitude d’y planquer des buches pour l’hiver à l’étage. Même abîmer, l’endroit avait été pensé pour que les buches restent relativement sèches et à l’abri de la l'humidité, il fallait simplement faire attention ou l’on mettait les pieds.
La poutre qui s’est décrochée du toit, je l’avais plus entendue que vu. J’avais le nez collé sur les lattes grinçantes du plancher mangé par la rouille et la vermine, elles m’avaient plus inquiété que le toit…grossière erreur.

Je ne l’avais pas prise de plein fouet, mes réflexes m’avaient certainement sauvé la mise, ça aurait été con quand même, de survivre jusque là pour se faire écraser par un plafond qui s’effondre…malgré tout, les débris étaient trop nombreux et l’un d’eux m’avait heurté la tête avec un bruit sourd et écœurant. J’avais perdu connaissance. Ce sont ces mains timides qui m’avaient fait émerger de ma léthargie, faut dire que le froid n’aidait pas à retrouver ses esprits rapidement, il rendait gourd et paresseux, quelle plaie, vraiment.

Le gamin avait pas l’air trop dangereux, mais savait-on jamais. Je l’observe, stoïque, prête à lui déboiter l’épaule au moindre mouvement suspect. Il se rend compte que je n’étais plus tout à fait dans les vapes, sursaute comme un lapin effrayé… Je soupirs.
« Je peux savoir ce que tu étais en train de faire ? » J’ai conscience que ma voix est trop dure pour le mettre à l’aise, mais après tout, il avait fourré sa tête dans ma poitrine. « C’est une bonne chose alors. »
Qu’il ait peur, cela le rendra moins enclin à faire des conneries. Mais ça ne justifiait toujours pas ce qu’il faisait. J’avise les poutres grinçantes, sent mon crane qui pulse et soupirs à nouveau. « Descendons avant de continuer cette conversation, tu n’as pas intérêt à te faire la malle sans que j’ai une explication. ».

Je réunis mes affaires, vérifie que rien ne manque, mon couteau n’était plus tout à fait à sa place la chute avait dû le dégainer, j’étais couverte de sciure... de la poussière plein le nez.
Mon humeur s’assombrissait de minute en minute. Je récupère au passage quelques buchettes que je fourre dans mon sac et commence à prendre l’escalier en gardant le petit à l’œil. De retour sur le plancher des vaches, j’attrape le petit par le col, pour l’amener en face de moi, sans douceur. Il est léger, trop. Je pince les lèvres, les gosses d’ici n’étaient pas assez nourris et s’il vagabondait seul, il ne tiendrait pas longtemps. Ce n’était pas mon problème, mais j’avais promis, dans une autre vie, de protéger les gosses comme ça. Putain de sentimentalisme.

« Maintenant tu m’expliques ce que tu faisais ici et pourquoi tu avais le nez entre mes seins. » Même si j’avais bien une idée de la chose.

Il se débat et feule le chaton, ça serait presque mignon si tous ici n’étaient pas, potentiellement, un meurtrier sadique et psychopathe. Oui, même un gosse, mais il est attendrissant à sa façon. Ce n’est pas parce qu’il est jeune que je dois baisser ma garde, d’autant que je ne suis pas certaine qu’il n’est pas seul, même si c'était  un ado, une cohorte de petit greemlin pépiant et maladroit pouvait faire de sacrés dégâts. Il se débat et je le relâche vite, il avait de l’énergie malgré sa maigreur. Et même si je faisais la maline, je sentais mon crane pulser douloureusement et le monde tourner tout au tour de moi à chaque mouvement.

Malade ? Moi ? Hm, peut-être, mais la remarque m’arrache un sourire, après tout qui ne l’était pas devenu ?  Je ne faisais que m’adapter et me fondre dans la masse, encore devait-il s’estimer heureux que je ne décide pas de le dépouiller et de le ligoter pour l’emmener dans un de ces marchés noirs où les ventes d’humains avaient cours. « Tu n’as rien fait pour être remercié. » il ne m’avait aidé en rien, en voulant s’assurer que je n’irais pas lui arracher la carotide si j’avais passé l’arme à gauche.
Des films dégueu comme il disait je m’en faisais des centaines chaque jour qui passait depuis l’apocalypse et pas dans le sens qu’il devait imaginer, il était un chouilla plus sanglant. Il n’avait pas à le savoir cela dit, ma paranoïa latente n’avait pas à altérer mon jugement, même si elle exacerbait mon agressivité.
J’aurais presque pu commencer à culpabiliser de me montrer si rude avec un enfant, mais soyons honnête, les plus innocents pouvaient se révéler les pires. « Haha, hé bien je te remercie du compliment. » Je ne m’étais jamais considérée comme étant jolie, à vrai dire je ne m’en foutais, j’avais toujours eu d’autres chats à fouetter. Alors, recevoir ce genre de remarques était le cadet de mes soucis, d’autant qu’actuellement être jolie n’était pas exactement un atout et je n’étais pas assez intelligente pour savoir m’en servir sans y perdre des plumes. La beauté attirait l’attention des salauds aussi surement que le miel les abeilles. Si je devais me soucier de ça en moins, c’était plutôt une bonne chose, cela dit, vous savez ce qu’on dit, un trou est un trou, etcetera…
« En attendant si tu veux vérifier si quelqu’un est mort ou non. Prends son pouls ça sera plus rapide »  et moins risqué, pour peu qu’il me dise la vérité.

« Pas encore, je pense surtout que tu n’en as pas eu le temps. » je ne peux m’empêcher de sourire, de ceux qui font froid dans le dos. Ce genre de remarque n’était jamais anodine, en même temps je doutais qu’il sache se débrouiller en totale autonomie, le vol était désormais un métier comme un autre, lucratif pour qui avait la main heureuse et un bon moyen de survivre en évitant de se faire contaminer par un rodeur. Cela dit, tout dépendait de la personne qu’on tentait de voler, s’il tombait sur la mauvaise, je ne donnais pas cher de sa peau.  « Est-ce que tu es seul ? »