Swann Widmore
Lun 2 Aoû 2021 - 19:16
Joviale Généreuse Débrouillarde Perfectionniste Altruiste Naïve Têtue Susceptible Dépendante Hypocrite | Swann possède un Sig Sauer P320, pistolet semi-automatique légué par son cadet, militaire de carrière ainsi qu’un couteau KA-BAR USMC 1217, récupéré dans la maison familiale dans laquelle elle a survécu la majeure partie de ces cinq dernières années. Élevée dans une famille de militaires, elle possède de bonnes aptitudes au tir, même si sa psychologie la pousse à voir ces armes davantage comme dissuasives qu’offensives. Si elle s’est déjà confrontée aux morts, elle n’a encore jamais tiré sur des vivants. Le mètre-soixante-trois pour cinquante kilos, cinq années de survie et quelques hivers rudes ont marqué sa physiologie et ses traits. Une longue crinière brune indomptable a fini par se transformer en des tresses et des dreads beaucoup plus pratiques, rendant un physique plutôt banal un brin excentrique. Myope depuis son plus jeune âge, les grandes lunettes noires qu’elle ne peut quitter ajoute à son look décalé une petite touche un peu nerd qui lui colle plutôt bien à la peau. Bien loin des tenues excentriques et colorées qu’elle avait l’habitude de porter, elle a retrouvé dans la maison familiale des vêtements sombres et des treillis qui constituent la majorité de sa garde robe actuelle. Le seul vêtement qui dénote un peu de cet univers carré est un t-shirt des Clash appartenant à sa sœur jumelle et duquel elle refuse de se séparer malgré son usure. Elle possède plusieurs tatouages. Celui sur l’omoplate droite est un poème inscrit dans un parchemin où il est écrit And I’d choose you in a hundred lifetimes, and i’d choose you in a hundred worlds, in any version of reality, I’d find you and i’d choose you. Déclaration pour sa jumelle qu’elle refuse de penser morte même après cinq ans. Celui sur l’avant bras gauche est une forme géométrique répondant aux lois mathématiques du nombre d’or, et enfin, sur les côtes, juste en-dessous du coeur, une suite de lettres énigmatiques : TCUFP (dans une typographie machine à écrire) dont la symbolique n’est connue seulement que de Sarah, la seule qui sait déchiffrer leur code, instauré durant leur adolescence pour se soustraire à la surveillance de leurs parents et s’envoyer des messages secrets. Dans sa paume gauche, une longue et épaisse cicatrice dont l’origine est le résultat d’une erreur de jeunesse. Ses parents s’en souviennent encore. Particularité, Swann est née avec une anomalie génétique, un situs inversus du cœur, (dextrocardie). Si le reste de ses organes est correctement placé, son cœur, lui, est légèrement à droite. |
Une gentillesse qui frôle la naïveté. On ne compte plus le nombre de fois où la jeune femme s’est faite avoir, que ce soit dans le cadre de l’amitié, et plus particulièrement de l’amour. Dépendante dans l’affectif, elle s’accroche trop vite, tombe amoureuse trop tôt et le scénario tourne invariablement en sa défaveur. Cœur d’artichaut, ses nombreux échecs sentimentaux n’ont pourtant pas écorné son besoin des autres et son envie d’aller à leur contact. Elle ne supporte pas la solitude et c’est sans doute ce qui lui fait le plus peur dans ce nouveau monde. Et si l’apocalypse l’a rendu plus méfiante, Swann est toujours adepte de la rubrique “chiens écrasés” et ne pourra empêcher son altruisme légendaire de la pousser vers quelqu’un qui a besoin d’aide. Si on l’a souvent qualifié d’hypocrite, c’est surtout la volonté de ne pas blesser qui la pousse à mentir et arrondir les angles, manquant parfois de franchise dans certaines situations conflictuelles ou délicates.
Son insouciance trouve néanmoins ses limites dès qu’il s’agit de la sphère professionnelle, des études ou de n’importe quel domaine qui suscite la compétition. Élevée dans un milieu où l’échec n’avait pas sa place, ses parents lui ont toujours laissé le choix de son parcours et de ses activités tant qu’elle se donnait à fond. Perfectionniste, elle va toujours au fond des choses et pour elle, chaque problème est soluble. Têtue, elle n’abandonne jamais avant de trouver la solution. Trait de caractère plus délicat à assumer dans la sphère privée, la jeune femme sait écouter et entendre les arguments d’autrui mais revient rarement sur ses convictions et ses idéaux. Si elle est naïve, elle est loin d’être manipulable dans ses opinions. Et si son caractère est plutôt souple, sa susceptiblité est peut-être la source majeure des rares conflits auxquels elle a participé.
L’apocalypse n’a d’ailleurs fait qu’accentuer certains de ses défauts. Du genre impulsive quand une idée la travaille dans la tête et pas ailleurs, elle devient vite bornée, à raison, et plus souvent à tort. Mais elle sait toujours rebondir, aller de l’avant, voir la lumière au bout du tunnel. C’est une débrouillarde qui se contente de peu pour être heureuse et surtout qui sait user de ses compétences pour bidouiller et améliorer son confort. Tout ce qui touche à l’électronique n’a pas de secret pour elle, et si Swann est loin d’être la parfaite survivante, si seule, elle se sait perdue, ses compétences peuvent être un atout certain en ces temps sombres.
1992, Lakewood, WA.
Le lieu porte avec lui une odeur étrange qui fait grimacer Swann. Ses lunettes tombent sur le bout de son nez et d’un geste mécanique elle les remonte, une main tenant celle de son père qui se tient droit et le menton haut. Sarah dans l’autre main, elles se jettent régulièrement des regards enthousiastes, impatientes de rencontrer leur petit frère. Alec se tient en arrière, déjà trop grand pour ne pas marcher un bon mètre derrière son géniteur.
La porte de la chambre poussée, les deux filles avancent prudemment tandis que sur le lit, leur mère tient dans ses bras une petite forme étrange qui intrigue la gamine de six ans. N’osant pas bouger dans un premier temps, l’invitation de leur mère à approcher incite Swann à avancer jusqu’au lit où elle grimpe laborieusement. Face à elle, un espèce de ver de terre sans cheveux qui lui soutire une nouvelle grimace. Se penchant un peu plus, elle jette un regard dubitatif à sa jumelle, qui ne semble pas charmer plus que ça non plus. “Mais il est tout...”
1996, Lakewood, WA.
Planquées au fond du jardin de la demeure familiale, elles ont pris place, assises en tailleur, l’une en face de l’autre. Sarah, une paire de ciseaux chirurgicaux dans une main, d’un calme olympien, Swann, qui gigote d’une fesse sur l’autre, incapable de rester en place. “T’es sûre? Parce qu’une fois qu’on aura commencé, faudra aller jusqu’au bout” précise la plus jeune, juste pour rappeler toutes les conditions de ce pacte qui les liera à vie.
Dans une inspiration exagérée, Sarah approche la lame de sa paume et s’entaille celle-ci d’un coup sec, non sans grimacer et retenir un gémissement de douleur. Passant les ciseaux à sa jumelle, cette dernière n’attend pas, de peur de se dégonfler. C’est juste un petit picotement, ensuite, elles seront liées à vie, comme dans le film. La lame tranche sa paume et elle ne peut retenir un petit cri. Ses yeux fermés s’ouvrent en grand pour tomber sur le regard de sa sœur, et sa main, en sang.
2002, Lakewood, WA.
VRLHH FKHC MRUGCQ VCPHGL 6 GH FH PRLV.
COLDL VRLHH SBMCPC FKHC CDDB.
Le code est parfait et seule Sarah en connaît la clé de chiffrement. Un moyen idéal pour se soustraire à la surveillance parentale. Malgré leurs absences répétées, malgré les nombreuses nourrices qui ont défilé et dont Swann se sentait parfois plus proches, ses parents ont toujours eu un regard acéré sur leurs résultats scolaires, les compétitions sportives ou autres, leurs fréquentations et leurs sorties. Alec n’ayant pas été le meilleur exemple, ils ont serré la vis avec les filles. Même âgées de seize ans, les soirées leur sont encore interdites exceptées celles chez des amies filles et avec présence d’un adulte.
Pourtant cette fois, elles sont bien décidées à braver les interdits et à profiter de leur adolescence comme tous les autres.
Une soirée pyjama entre filles chez Abby, une de leurs amies communes, voilà la version donnée à leurs parents une semaine auparavant. Après l’accord de ces derniers, c’est donc samedi en tout début de soirée que les jumelles descendent, sac sur le dos. À l’intérieur, des vêtements de rechange et loin du style pyjama.
Leurs parents sont dans la cuisine et ne font un arrêt dans la pièce que dans l’optique de leur adresser un simple signe de la main avant de déguerpir au plus vite. Pourtant, au moment où elles font demi tour, la voix de leur mère résonne, calme, doucereuse.
Si leur père reste muet mais le regard dur qui ne leur dit rien qui vaille, leur mère s’approche d’elles, agitant le morceau de papier codé sous leur nez.
Sans un mot, sans une protestation, les jumelles grimpent quatre à quatre les escaliers et claquent la porte de leur chambre. Pourtant, même honteuse et surtout vexée de s’être ainsi faite prendre, Swann ne pense déjà plus qu’à une chose, mettre au point un code plus complexe que même ses parents ne parviendront pas à déchiffrer. Code César, échec. Mais aucun problème n’était insoluble. Jamais.
2004, Lakewood, WA.
Des mois qu’elle travaille sur ce projet enfin finalisé. Des heures de travail passées à la cave aménagée en atelier, à trancher dans sa vie sociale pourtant remplie. Si ses parents lui laissent le choix de ses activités et de la direction à prendre pour son futur, ils ont toujours été intransigeants sur le fait de se donner à fond et surtout les moyens de réussir. Pression accrue sur les jumelles dont les résultats scolaires ont toujours été excellents. Et pour Swann, ce sont surtout les sciences qui lui parlent, l’informatique, et en particulier la robotique. Première place à de nombreux concours, l’argent n’a jamais été une option ici. L’or, quoi qu’il advienne.
Et le robot qui se tient devant elle ne fera que lui assurer une mention spéciale sur son bulletin, et, plus tard, une place de choix dans l’université qu’elle vise.
Pourtant, malgré le sérieux de l’entreprise, c’est bien un sourire radieux qui étire ses lèvres tandis qu’elle entend sa jumelle descendre la rejoindre en compagnie de Jarod. Des mois que l’endroit lui est interdit et qu’il se demande ce que son aînée fabrique ici. Bien que la fratrie soit unie, les jumelles se sont toujours senties plus proches d’Alec, le plus chanceux de tous, qui, ouvrant la voie pour les autres, a eu le luxe de se soustraire à la pression parentale. Élève moyen, plutôt manuel, c’est vers un apprentissage que ce dernier s’est dirigé. Résultat, davantage de pression sur le dos des autres, y compris Jarod. Seule ombre au tableau, malgré ses efforts, le petit dernier ne parvient pas à égaler ses sœurs et une compétition insidieuse s’est installée entre eux. Loin d’être malsaine, elle stimule encore plus Swann, encore trop jeune pour se rendre compte que la situation peut être difficile à vivre pour son cadet.
“C’est ça ton truc?” Demande-t-il avec mauvaise foi, évidemment curieux, en se rapprochant du robot, qui, effectivement, ne paie pas de mine d’extérieur. Réalisé avec des matériaux de récupération, c’est surtout la programmation qui a pris du temps à Swann. Si pour le concours elle s’est donnée les moyens, aujourd’hui, ce n’est pourtant pas pour ses compétences que Alfie1.0 est de sortie.
D’un bond, Jarod se redresse, adresse un regard noir aux jumelles qui ne peuvent contenir leur éclat de rire tandis que leur cadet grimpe les escaliers quatre à quatre sous une panoplie de loser.
Le fou rire perdure, et les sœurs frappent leur main, celle porteuse d’une cicatrice, l’une contre l’autre.
Ce qu’elle fera, évidemment.
2009, Lakewood, WA.
“Je vais voter pour Obama.”
Le silence se fait, pesant, lourd. Les couverts se posent ou restent à mi-chemin entre les bouches et l’assiette et les regards se tournent tous vers elle tandis qu’elle sent le rouge lui monter aux joues. D’accord, elle se rend bien compte qu’elle vient de plomber le repas dominical où toute la famille s’est réunie. Qu’elle vient de souffler les bonnes nouvelles qui ont été fêtées au début du déjeuner. L’obtention de son diplôme d’ingénieur, la réussite de Sarah dans la voie militaire qu’elle est encore en train de suivre, la décision de Jarod de viser un parcours similaire et… bon il n’y a trop rien pour Alec mais il n’est pas du genre à se sentir honteux pour si peu.
Ce qu’elle n’avait pas anticipé, c’est le pamphlet oral de son père, protestant et surtout très républicain sur la politique étrangère de la possible future ère Obama, sur le budget de l’armée, sur les conséquences mondiales, pour les pays concernés et surtout le leur, sur les failles de son programme et sur l’incompétence historique des Démocrates, qui y passent presque tous. Swann a beau tenter de défendre ses opinions, les intérêts sociaux, la symbolique engagée, l’absence de bagages que l’homme politique traîne, rien n’y fait. Plus les minutes passent et plus elle se sent petite, insignifiante, stupide. Vexée qu’on réduise son avis et son choix à une erreur de jugement, un caprice de jeune fille idéaliste, elle prend la mouche mais n’ose contrer son père. Sa mère tente de tempérer, même si cent pour cent de l’avis de son époux et la jeune femme finit par fixer la nappe, les mâchoires serrées. “Je crois que je vais voter pour lui aussi. Il a l’air cool.” À nouveau, le silence, avant que l’attention dérive sur Alec, en train de siroter tranquillement son verre de vin. Leur père repart dans un débat sans fin, assurant qu’on ne choisit pas un président parce qu’il est cool et tandis que Swann ose un regard vers l’aîné de la fratrie, ce dernier lui adresse discrètement un clin d'œil.
Alec. Son protecteur. Parfois le mouton noir, celui qui n’a suivi aucun code familial. Il a réussi, à sa façon, mais ne rentre pas vraiment dans le moule. Alec, qui lui a fait fumer son premier joint. Alec, le désinvolte, dont les arguments glissent comme si tout ceci ne le concernait pas.
2013, Seattle, WA.
BNHC U B NDWOVG
Installée devant sa télé, sous un plaid, un joint déjà allumé au coin des lèvres, elle repose son portable, les yeux rougis. Aspirant une longue bouffée de weed, elle renifle bruyamment. Les minutes passent et, accaparée par l'épisode, elle ne décroche de l’écran que pour mieux reprendre le second. Un message de Sarah. “J’arrive. ASAP”. Elle ne s’est pas ennuyée avec leur code, mais elle l’a compris. Reposant l’appareil, elle trouve pour le moment du réconfort dans l’herbe, soufflant face à une scène qu’elle juge particulièrement stupide, secouant la tête de gauche à droite. “Vous craignez les Stark!” souffle-t-elle face à leur stratégie chevaleresque qui leur a déjà coûté une tête en saison une.
Sarah arrive, prenant place à ses côtés sur le canapé non sans avoir récupéré la bouteille de whisky dans un placard. Un seul verre, elle sait que sa jumelle ne consomme que des alcools très colorés et très girly suivant ses propres termes. Swann, c’est la weed, elle laisse volontiers l’alcool aux autres.
Les noms d’oiseaux volent. Sarah ne fait jamais dans la dentelle, encore moins quand on blesse sa jumelle. Pendant de longues minutes, le temps que l’alcool et la drogue fassent leur effet, elle démonte point par point sa relation et insiste sur tous les aspects positifs de cette liberté retrouvée. Swann s’apaise, autant par jubilation du portrait taillé en pièces que grâce aux effets du joint. C’est une optimiste. Coeur d’artichaut mais qui s’évertue à toujours voir le meilleur dans chaque situation. “J’avais réservé une table pour deux. Je viens d’être embauchée dans l’entreprise que je convoite depuis un an. Très bon salaire, mutuelle au top et fournisseur de l’armée.”Elle lève un verre imaginaire pour trinquer avec sa sœur, levant le petit doigt dans sa direction pour que Sarah le croise avec le sien.
C’est encore une façon de se lier. Toujours plus. Sarah, c’est sa moitié, sa meilleure amie, sa confidente, son miroir. Ce lien, jamais personne ne pourra le briser. Elles sont deux personnes distinctes, avec chacune une personnalité, et un tout complémentaire à la fois. Alors Swann se focalise sur le positif, sur ce nouveau travail, sur tous les projets auxquels elle participera, et sur cette soirée, avant que son âme sœur reparte à l’autre bout du monde. “Au fait, je t’ai acheté un carton de vaisselle.” Un sourire finit par étirer ses traits. Swann, c’était la weed et les séries Netflix. Sarah, péter des assiettes. À chacune sa méthode.
Célibataire, à nouveau. Jusqu’au prochain coup de cœur, jusqu’à la prochaine déception. Mais elle a des projets, elle rebondira, comme toujours.
Qu’est-ce qui pourrait arriver de pire de toute façon?
Octobre 2015.
Lakewood, WA.
Vide.
La maison est vide.
Ses pas se font prudents, attentive au moindre signe de vie, d’une présence familière, d’un membre de sa famille. Rien. Ni personne. Pourtant, il lui a fallu du temps pour rejoindre le Sud. La présence militaire, les grands axes barrés l’ont obligé à prendre des routes secondaires voire des sentiers de campagne. La pénurie d’essence ne l’a pas aidé. Sa voiture l’a lâché trente kilomètres avant d’atteindre Lakewood.
Et à la violence de Seattle, aux émeutes et aux pillages des grands magasins, aux zones de quarantaine militarisées et aux nombreux cas d’infection à ce virus mortel, ne reste que le silence oppressant des lieux.
Les communications ont été coupées. Ses derniers messages ne sont jamais parvenus à leurs destinataires. Aux dernières nouvelles, Sarah était bloquée au Canada, Alec quelque part dans l’Est de l'État, son père dans une zone de quarantaine au Nord de Seattle, Jarod avec son unité et sa mère… Elle est la première à ne plus avoir donné signe de vie. Alors Swann ne peut qu’espérer. Que chacun a compris ce qu’il devait faire, où se retrouver. Des semaines pourtant. C’était il y a des semaines. Et personne ici. Elle est seule. Et parmi toutes les informations télévisées plus effrayantes les unes que les autres, entre l’allocution du Président pour tenter de les rassurer avant que seuls les messages d’urgence persistent sur les ondes radio, la violence et la peur qui semblent guider la plupart des gens, c’est bien la solitude qui lui fait le plus peur.
[...]
Un bruit, au rez-de-chaussée. Elle a récupéré une des armes de son père, gardées jusqu’ici sous clé dans la cave. Discrète, autant que possible, c’est les mains tremblantes qu’elle quitte son ancienne chambre à l’étage pour se rapprocher du haut des escaliers. Elle sait tirer. Élevée dans une famille de militaires et ensuite poussée par Sarah, inquiète de la savoir seule dans la métropole. Mais s’entraîner pour le loisir sur un stand et pointer une arme sur un être humain… Elle n’est pas certaine d’y arriver. Alors elle prie le grand patron pour que ce soit un membre de sa famille. La gorge sèche, elle raffermit sa prise, atteint l’angle du mur, jette un coup d'œil prudent. Rien. Personne.
Lentement, son pied descend la première marche, puis la deuxième, balayant l’espace du regard l’entrée qui se profile dans son champ de vision. À la troisième, le bois craque et elle s’arrête, fermant les yeux. Pourtant elle le sait. Combien de fois l’a-t-elle évité en pleine nuit pour ne pas se faire repérer.
La jeune femme n’a pas le temps de regretter. Deux secondes plus tard, le canon d’une arme est pointé sur elle. Des rangers, un treillis, son cœur manque quelques battements avant qu’un long soupir de soulagement ne lui échappe. Jarod.
Dévalant les escaliers, elle se rue dans ses bras. Un. Plus que quatre.
Novembre 2015 - Février 2016.
Ils ne sont toujours que deux. Du moins deux membres de la famille. La maison familiale n’a plus grand chose à voir avec ce qu’elle était. En quelques mois, Jarod a pris les choses en main. Tous les stocks de nourriture ont été rangés à la cave et aucun d’eux ne critiquera plus jamais la parano survivaliste de leur père…
Ils ont rassemblé tout ce qu’ils pouvaient, récupérant ce qui n’avait pas été pillé dans les magasins de la ville. Le quartier a été presque déserté pour fuir ils ne savent où mais son cadet a fait le tour des maisons, invitant les autres à se regrouper. Il affirme qu’on est plus fort ensemble, qu’il faut rester souder le temps que les choses se tassent. Pourtant, les semaines défilent et rien ne semble revenir à la normale. Sur les ondes, le même message en boucle. Plus de nouvelles informations, plus de directives gouvernementales, plus rien.
Ce qui était autrefois le salon a été reconverti en dortoir de fortune, la cuisine est devenue collective et Swann a cédé son ancienne chambre à un couple avec un enfant. Elle a investi la cave et un simple lit de camp lui suffit pour les quelques heures de sommeil qu’elle parvient à s’offrir.
L’eau courante et l’électricité ne sont plus alors, à défaut d’avoir un pouvoir sur le premier problème, elle passe ses journées à régler le second. Dans l’ancien atelier qui lui sert d’espace personnel et de stock de nourriture, elle travaille sur la remise en état d’un groupe électrogène. Jarod a été clair. Ce sera seulement quelques heures par jour, pas plus.
Ils sont dix. Certains les ont connus adolescents, certains sont des étrangers, mais tous semblent avoir le même objectif. Rester soudés en attendant le retour à la normale. Mais malgré son optimisme légendaire, l’ingénieure commence très sincèrement à douter. Des mois maintenant, et toujours aucun signe de leurs parents, de leur frère, et surtout de Sarah. Et si son sourire éclaire ses traits en journée, si la jeune femme s’évertue à conserver sa bonne humeur communicative, ce sont les larmes qui prennent le relais la nuit, la pulpe de son pouce ne pouvant s’empêcher de passer et repasser sur la cicatrice de sa paume gauche.
Printemps - Été 2016.
Les mois se suivent et se ressemblent. L’hiver a été rude et il faut maintenant aller de plus en plus loin pour approvisionner les stocks de nourriture. Les volontaires pour ce type d’expéditions s’absentent plus longtemps, souvent des hommes. Le sexisme dans toute sa splendeur…
Swann préfère la sécurité de la demeure. Partir signifie manquer la possible arrivée de sa famille et si Jarod commence à se faire une raison et ne plus compter sur leur retour, la jeune femme ne peut tout simplement pas abandonner. Perdre cet espoir, cet optimisme, c’est sombrer. Son sourire, son rire, sa bonne humeur, c’est sa carapace, un besoin pour ne pas flancher. Voir la lumière au bout du tunnel, même quand il semble interminable.
Ça lui laisse le temps de cogiter. De se refaire le film. Plus d’informations, internet réduit en poussière, elle est obsédée par le message d’urgence qui se répétait en boucle sur les ondes, avant de finalement disparaître. Ils sont dix, ils se débrouillent, se supportent, s’entraident. Mais sur le long terme, ils auront besoin de plus. Alors l’idée a commencé à germer. Une radio, pour tenter de capter quelque chose, quelqu’un, n’importe quoi.
L’atelier est équipé mais il lui manque du matériel. Sa présence requise, ils ont donc investi un magasin d’électronique. Ce n’est pas ce qui a été le plus pillé, heureusement.
C’est également sa première réelle rencontre avec l’une de ces choses. Elle en a croisé quelques-unes, sur la route, il y a quelques mois. Mais toujours loin, toujours dans le doute que le virus pouvait vraiment faire se relever les morts. Les autres l’ont convaincu par la suite, Swann n’a pas eu besoin de voir pour croire. Pourtant, face à ce qui a été un jour une femme, comme elle, l’ingénieure est restée statique, muette, incapable de bouger, le couteau à la main. C’est une chose de connaître la théorie, c’en est une autre d’enfoncer une lame dans la boîte crânienne de quelqu’un. Ils ont beau prétendre qu’ils n’ont plus de conscience, où est la certitude là-dedans?
C’est finalement Jarod qui l’a achevé, avant de se tourner vers elle pour l’engueuler. Et Swann a beau savoir que c’est par inquiétude, par besoin de la savoir capable de se défendre, elle a pris la mouche, évidemment. Elle ne parvient pas à le voir autrement que le petit frère jaloux et compétiteur qui n’a jamais réussi à égaler ses aînées. Il est encore jeune d’ailleurs, même si c’est lui qui prend les choses en main depuis le début.
Ils ont cependant récupéré suffisamment de matériel pour qu’elle se lance dans ce nouveau projet, réintégrant son bien aimé sous-sol.
Automne 2016 - Hiver 2017.
Deux ne sont pas revenus. Partis plus loin à l’ouest dans l’espoir de trouver des vivres, ils n’ont jamais trouvé le chemin du retour. Vivants ou morts, personne ne le sait mais le groupe en a pris un coup au moral. Swann fait ce qu’elle sait faire de mieux, rester positive, changer les idées à ses camarades, s’occuper de leur bien être. Ce n’est pas facile, surtout quand son moral à elle aussi flanche. Mais c’est sa façon de conserver un cap, de ne pas dériver, de se raccrocher à chaque branche qui lui permet de garder la tête hors de l’eau. Si elle refuse toujours de croire que le reste de sa famille est morte, elle sait qu’il y a peu de chances qu’ils reviennent ici. Trop loin, seuls ou dans un groupe, avec ou sans espoir, elle ne croit plus qu’en Sarah. Elle ignore où se trouve sa jumelle actuellement mais la militaire sait où chercher.
Elle a achevé sa radio mais rien. Le silence absolu sur les ondes. La portée n’est pas assez importante. Lakewood devient un désert humain. Parfois, il voit certains morts migrer vers le Nord, comme s’ils suivaient tous le même itinéraire, ce qui n’a pas de sens. Les idées s’embrouillent, les hypothèses s'enchaînent, sans réelle cohérence. Mais quand on n’a que ça pour nous porter? Alors Swann divague et sur les cartes routières, son regard se perd de plus en plus régulièrement sur Seattle. Le Nord.
Jarod n’est évidemment pas d'accord. Il pense que c’est trop dangereux, qu’ils s’en sortiront mieux en petit comité, surtout avec les rations qui diminuent plus rapidement qu’elles sont remplacées. Mais la perte de deux membres de l’équipe et un autre hiver beaucoup plus rude que le premier a vu la majorité l’emporter.
S’il n’y a pas de réponse aux alentours de Lakewood, alors il faut viser plus loin. Objectif: un premier répéteur de signal. En hauteur. Il doublera la portée. Pour son frère, c’est jeter un hameçon dans la mer en espérant pêcher une baleine. Il n’a jamais été très optimiste. Ce n’est pas grave, Swann sait l’être pour deux, voire huit, comme maintenant.
Printemps - Été 2017.
Les expéditions sont de plus en plus longues, de plus en plus périlleuses. Aux morts s’ajoute la menace des vivants. Certains s’absentent parfois plusieurs semaines. Une rivalité entre deux groupes, plus au Nord, et deux femmes récupérées. Deux sœurs. Une ancienne flic et une fleuriste. Le gros lot après un hiver difficile. La première prend activement part à la défense et la surveillance des environs tandis que la seconde propose la mise en place d’un potager dans l’ancien jardin de la maison. En presque deux ans, même les conserves se font rares, et l’arrivée des deux femmes redynamise le groupe. Récupérateurs d’eau de pluie, barricades dans un périmètre restreint. Le paysage se transforme au fil des mois et si Swann jalouse secrètement leur complicité fraternelle, elle ne peut nier qu’elles sont une bouffée d’oxygène.
Sa crinière devenue indomptable avec le manque de produits d’hygiène est revisitée. Afro-américaines, les deux nouvelles arrivées la relookent dans un style bien particulier que l’ingénieure adopte pourtant aussitôt. Le fou rire de Jarod n’y change rien, de même que ses commentaires désobligeants.
Les différents projets accaparent tout le monde et demandent la participation de chacun. Pendant toute cette période, Swann se voit obligée de remettre à plus tard ses propres ambitions personnelles.
Dans le même temps, des groupes plus importants de rôdeurs sont repérés dans les alentours et le groupe décide de jouer les morts. Les sorties sont interdites, l’utilisation du groupe électrogène également. Les rideaux sont tirés nuit et jour afin de ne pas se faire repérer. Tous semblent venir du Nord, possiblement de la métropole.
Automne 2017 - Hiver 2018.
Le potager donne enfin et le plus gros du travail consiste à la conservation des denrées alimentaires. Le rationnement est toujours de mise mais ça permet au groupe d’envisager un hiver plus serein, au moins sur ce point. Préservés des vivants, la zone étant peu visitée, même pour des gens de passage, ils ont enfin l’impression de pouvoir souffler.
Jusqu’à un incident qui blesse grièvement un membre du groupe. Un outil agricole, une erreur d'inattention, et sa jambe finit broyée. Les blessures sont multiples, et graves. Sans médics, avec peu de matériel, ils font ce qu’ils peuvent mais les os sont brisés, les plaies trop profondes, les chairs trop abîmées.
Les semaines qui suivent sont une torture. Pourtant pétris de bonnes intentions, les gémissements nocturnes du blessé qui empêchent tout le monde de dormir changent peu à peu l’atmosphère. L’agacement succède à la compassion, l’énervement à l’empathie et chacun se regarde en coin. Le moindre mot de travers alimente les tensions. Swann se propose aux soins, fait de son mieux pour tempérer les choses, mais même son altruisme en prend un sérieux coup. Outre la difficulté de voir une autre personne souffrir depuis tout ce temps en connaissant l’issue, l’odeur de mort qui emplit la pièce, l’infection de la jambe maintenant violacée et purulente, le manque de sommeil, l’abattement du groupe la plongent dans un état dépressif qui ne lui ressemble pas. Elle aussi est à bout, et personne ne semble vouloir faire quelque chose.
Alors une nuit, celle de trop, elle se glisse dans la chambre du blessé, à l’écart des autres. Caressant doucement son front trempé de sueur à cause de la fièvre, tentant de calmer les tremblements de l’homme qu’elle connaît depuis ses quinze ans, elle soulève lentement sa tête et retire l’oreille sur lequel il s’agite. Les larmes aux yeux, le coussin dans les mains, elle tente de se convaincre que c’est la meilleure solution, un geste noble pour le délivrer de ses souffrances. L’oreiller s’abaisse, en et encore. C’est pour lui qu’elle fait ça, pour le groupe. Pas pour elle.
Mais c’est Swann. Et c’est un être humain. Elle ne peut pas. À quelques centimètres de son visage, elle laisse finalement tomber l’oreiller au sol et s’éclipse jusqu’au sous-sol, se recroquevillant sur son lit de camp, les mains plaquées sur les oreilles, se concentrant sur le visage de sa jumelle.
Au petit matin pourtant, les gémissements ont cessé. L’homme est mort dans la nuit. Par sécurité, il a déjà été déplacé. Apparemment, il n’y a pas que les morsures qui transforment les humains. La mort, peu importe ses circonstances, les conduira inévitablement à devenir l’un d’eux.
Personne n’en parle, personne ne dit mot. La vie reprend, mais l’ingénieure n’est pas stupide. Le comportement de Jarod change, il se renferme, devient irritable. Et elle comprend. Qu’il a fait ce qu’il fallait pour le groupe, en dépit de la morale. Il n’est plus ce petit frère qu’elle aimait taquiner. Il est mort, en même temps que leur ancien monde.
Automne 2018.
“Ils sont morts putain!!!!” Une gifle cinglante atteint la joue de son cadet et elle porte sur lui un regard haineux. Comme toujours, le même sujet de discorde. l’obsession de Swann de capter un signal d’un autre groupe, d’une communauté, de n’importe qui d’autre qui prouverait qu’ils ne sont pas seuls. “Je t’interdis de dire ça!” vocifère cette dernière, les yeux déjà embués de larmes. “Qu’est-ce que tu cherches hein? Me fais pas croire que tu fais ça pour quelqu’un d’autre que toi, pour quelqu’un d’autre qu’elle!” Il s’est rapproché, la dominant de sa hauteur. Lui aussi est sur les nerfs, à bout. Il a la charge du groupe et le poids qui pèse sur ses épaules est trop lourd pour lui. Mais il vise juste. Si son projet peut bénéficier à tout le monde, c’est une raison plus que personnelle qui la pousse à continuer, à s’obstiner sur cette voie. “Je suis ton putain de frère aussi nom de Dieu!!!” Et la voilà qui surgit, cette jalousie enfantine. Les larmes coulent sur les joues de son aînée tandis qu’elle relève un regard désolé sur lui. “Me demande pas de choisir entre toi et elle. Parce que ce sera toujours Sarah. Entre elle et n’importe qui sur cette planète, ce sera Sarah. Toujours.” Les mots sont durs, elle en a conscience et tandis qu’il serre les mâchoires, blessé, et qu’il acquiesce, désabusé par ce qu’elle vient de lui balancer en pleine tête, il la plante ici, claquant la porte derrière lui.
Malgré les regrets, la jeune femme n’en fait qu’à sa tête. Un deuxième répéteur est placé encore plus au Nord, sur un vieux pylône électrique.
Été 2019.
Des crépitements. Un son qu’elle ne pensait jamais entendre tout en continuant d’espérer. Swann se rue sur la radio et tente de choper la bonne fréquence. Les grésillements l’empêchent de comprendre. Les mots sont hachurés, elle n’en capte que certains. Roza, Markus.... Le reste est incompréhensible, ou sujet à trop d’interprétations différentes. Mais elle entend. Là, quelque part au Nord d’ici, trop loin pour que le dernier répéteur placé dans l’année puisse capter clairement le signal, il y a quelqu’un. Un homme.
Sur la carte, elle pointe l’emplacement du répéteur le plus au Nord et remonte, encore, jusqu’aux limites de la portée de celui-ci. Seattle.
Trois ans et demi. Presque quatre. Ça lui a pris presque quatre années, mais elle a réussi. Malgré les doutes, les coups durs, les pertes, les disputes. Elle n’a jamais perdu espoir.
Merci Markus.
Hiver 2019 - 2020.
Sa toux a empiré.
Pendant de longs mois la jeune femme a tenté de convaincre Jarod d’aller vérifier en direction de Seattle si d’autres survivants s’étaient établis là-bas. En vain. Trop dangereux, pas assez de certitudes. Le groupe a suivi. Ils suivent toujours. Douze heures de marche, accompagnée de seulement deux personnes, c’est tout ce qu’elle demandait. Et quand enfin, à bout d’arguments, les deux sœurs ont bien voulu aller dans son sens et céder à sa requête, la maladie s’en est mêlée.
Les températures glaciales, le travail en extérieur, le rationnement avec un potager qui a peu donné cette année… Swann se retrouve clouée au lit, fiévreuse, une toux grasse qui refuse de la quitter et des maux de tête insupportables.
Les médicaments périmés ont un effet limité et seul le repos semble une option envisageable. Alitée, sachant qu’elle devra de nouveau argumenter pour obtenir ce qu’elle veut une fois rétablie, elle tente de retrouver la lumière au bout du tunnel, difficilement cette fois-ci.
Été 2020.
Affaiblie depuis la fièvre, il lui a fallu de longues semaines pour se remettre et encore davantage pour retrouver sa bonne humeur et son sourire contagieux. Si elle reste silencieuse, ses objectifs demeurent inchangés, quitte à prendre le large seul. Les armes à feu ayant été distribuées à ceux qui partent le plus souvent en expédition, il ne lui reste que l’un des couteaux militaires entreposés ici à son arrivée. Consciente des dangers, de l’absurdité que peut avoir sa décision, elle conserve sa ligne de conduite. Têtue au possible, un trait de personnalité très Widmorien.
Jour après jour, elle commence à se faire des réserves, cachées dans le sous-sol dans la cloison près de son lit de camp. Rien qui ne manquera cruellement à ses compagnons. Assez pour tenir. Assez pour qu’ils lui en veulent.
Ses projets se trouvent néanmoins reportés quand une horde d’une cinquantaine de morts est repérée par l’un des membres du groupe au nord-ouest de leur position. Pendant deux longues semaines, la majorité du groupe se calfeutre à l’intérieur de la maison tandis que Jarod et deux autres membres surveillent au loin la progression des rôdeurs, qui, heureusement, contournent Lakewood pour le sud.
Automne 2020.
Alors qu’ils pensaient être tirés d'affaires, une nouvelle horde - hypothétiquement la même que quelques mois auparavant - est vue au Sud de leur position. C’est en nage que l’un des membres du groupe a déboulé dans la maison. Dans vingt-quatre heures, peut-être moins, si les rôdeurs ne dérivent pas de leur axe, ils seront plusieurs centaines à se diriger directement sur Lakewood. Le nombre a quadruplé depuis la dernière fois et cette fois-ci, ils n’ont pas le choix. Sans trouver de schéma logique à ce demi-tour ni comment leur nombre s'est multiplié en l'espace de quelques mois, ils prennent une décision radicale.
Le départ est précipité. Chacun charge au maximum son sac de vivres, des munitions restantes, s’équipe en arme, la plupart des couteaux, en eau. Tout est regroupé le plus rapidement possible et divisé équitablement en cas de séparation.
La horde arrivant par le Sud, ils se dirigeront vers le Nord, resteront quelques jours sur les routes, et, dès que possible, reviendront sur leur pas si la menace a disparu. La majorité du groupe continuera d’avancer tandis que trois resteront en arrière pour suivre l’avancée des morts.
Malgré la peur, malgré le déchirement pour certains de quitter les lieux sans la certitude de les retrouver, Swann ne pouvait espérer mieux.
Dans le salon transformé en dortoir, elle punaise un mot sur le mur :
Novembre 2020.
QCUYM QQXW AFCWYTF. GQ AQF. LCWWE CXXAJ.
Tacoma, hiver 2020/2021.
Décembre :
Les semaines durent et les conditions de survie deviennent de plus en plus difficiles. Le froid et surtout les chutes de neige ralentissent leur progression et les éclaireurs ne reviennent jamais avec de bonnes nouvelles. La horde est toujours sur Lakewood et ne se sépare pas. Il leur est impossible de faire marche arrière et ils doivent trouver un refuge de fortune.
S’ils ont déjà connu le rationnement, ce n’est rien à côté de ce qui les attend au cours de cet hiver. Les réserves diminuent trop rapidement et la chasse, en cette période, ne donne absolument rien.
Swann prend conscience du privilège de ces dernières années, malgré les circonstances. Elle a toujours évité les longues sorties et si elle a aidé aux projets de la maison, elle n’a jamais eu à affronter l’extérieur aussi directement, aussi… frontalement. Ici, elle est obligée d’aller contre sa volonté, contre ses idéaux. Le premier mort qu’elle parvient à tuer, de justesse, est une épreuve pour elle, bien plus qu’elle ne l’avoue. Tout comme le second, et le troisième. Si c’est devenu, au fil des années, une habitude pour certains, chaque mort définitive l’atteint profondément.
La promiscuité et le manque de nourriture alimentent à nouveau les tensions et le groupe commence à se fissurer insidieusement. Il y a ceux décidés à suivre coûte que coûte le plan de Jarod, attendre pour mieux retrouver la sécurité dont ils ont eu la chance de jouir durant ces dernières années malgré les difficultés du quotidien. Il y a ceux désireux de partir à la conquête d’un groupe plus conséquent, si tenté qu’il en existe, et d’arrêter de survivre au jour le jour. Et puis il y a Swann, dont l’objectif diffère de tous.
Janvier :
Elle a couché avec Cameron. C’était stupide. Impulsif.
Ils ont dû se réfugier dans un immeuble abandonné pour plus de sécurité. Ici, les vivants peuvent être aussi dangereux que les morts. Une fois le rez-de-chaussée nettoyé et les accès bloqués, ils ont pris possession d’un appartement. Une épreuve pour l'ingénieur, dont chaque mort la marque un peu plus. Alors elle s’est laissée séduire. Pas si difficile pour un cœur d’artichaut en manque d’affection depuis autant de temps. Pour la première fois cependant, elle parvient à se raisonner, à ne pas s’imaginer des choses qui n’arriveront jamais. Les conditions précaires dans lesquelles ils vivent tous facilitent grandement le choix de la raison.
Février :
Quatre sont partis durant la nuit. Avec leur provision. Au moins n’ont ils pas pris plus que ce qui leur revenait. Sur neuf, ils ne sont plus que cinq et l’inquiétude commence à les gagner. Ils ne sont plus assez nombreux pour se permettre de se séparer et donc impossible de connaître à présent la progression de la horde.
Des coups de feu, au loin, au petit matin. Réveillés en sursaut, ils se sont tous regardés, les yeux ronds, priant pour que ce ne soit pas leurs anciens compagnons.
Mars :
Les ventres sont creux, les visages tirés.
Les températures remontent, le printemps perce tout juste et Jarod parvient à ramener de la viande, souvent des lièvres. Ces derniers mois ont laissé de profonds stigmates. Si le départ de la moitié du groupe a apaisé les tensions, le moral est au plus bas et tous craignent ce que leur réservera le lendemain.
Printemps 2021.
“Tu ne comptes pas repartir avec nous hein?” Marchant aux côtés de son cadet, la jeune femme se contente de mouvoir sa tête de gauche à droite. Le groupe, du moins ce qu’il en reste, a décidé de retenter sa chance à Lakewood. Le militaire s’arrête, attrape sa main pour qu’elle soit face à lui. D’un geste, il retire l’étui à sa hanche et lui tend son arme à feu. Il la connaît, sait qu’elle ne changera pas d’opinion. Cette idée la hante depuis trop longtemps. “N’hésite jamais. Je sais que ce n’est pas ce que tu es mais n’hésite jamais tu m’entends? Économise tes balles. Si tu es confrontée à des morts, privilégie ton couteau.” Sa main vient se poser sur la joue de sa sœur. “Tu étais en sécurité à la maison. Je ne t’ai jamais raconté mais j’ai vu des choses que tu ne peux pas imaginer à chacune de nos expéditions. Crois-moi Swann, les vivants sont bien plus dangereux que les morts. Ne les sous-estime jamais. Et tire.” Les yeux de la jeune femme s’embuent. Oui, elle a été préservée, elle n’avait seulement pas conscience à quel point. Tous les sacrifices pour la protéger… “Tu sais où me trouver au besoin. J’espère que tu trouveras ce que tu cherches. Que tu la trouveras.” À de nombreuses reprises Swann lui avait répété que si Sarah était morte, elle l’aurait senti, en vain. Pour la première fois depuis leur survie, Jarod admet la possibilité que leur sœur est vivante et une larme coule le long de sa joue tandis qu’elle le serre dans ses bras. “Je suis fière de l’homme que tu es devenu. Peu importe ce que tu as du faire pour me protéger, je suis fière de toi. Je t’aime, n’en doute jamais.”
Une dernière étreinte, un dernier regard, et, le cœur lourd, ils se séparent. Consciente de ce qu’elle perd, sans certitude de ce qu’elle trouvera, la seule lumière au bout de ce tunnel sans fin est Sarah.
Ce sera Seattle, peu importe les conséquences.
Swann a longtemps été préservée dans la sécurité de son groupe, dans l’ancienne maison familiale. Protégée par son frère, militaire de carrière, elle a longtemps tout ignoré de la menace des vivants et de tous les sacrifices faits par ce dernier. Active dans les différents projets de défense, de sécurité, de culture de la terre, elle a suivi le mouvement, rarement décisionnaire.
Seule son obsession quant à la recherche d’autres survivants a parfois suscité quelques heurts, passant des journées entières à bidouiller ses radios ou ses répéteurs de signal. Projet somme toute égoïste, c’est pourtant ce qui lui a permis de continuer à espérer et à ne pas sombrer totalement.
Si Swann n’est pas la parfaite survivaliste, si elle ne tue que pour se défendre, ses aptitudes en électronique sont un atout certain pour quiconque y trouve un intérêt dans ses projets.
[Arrivée à Seattle en jeu, donc survie non spécifiée pour le moment, sauf si vous souhaitez que je développe.)
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Re: Swann Widmore
Lun 2 Aoû 2021 - 20:20
R'bienvenue ici !!
& trop contente que tu aies choisi les GB !!!!
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Re: Swann Widmore
Lun 2 Aoû 2021 - 21:46
Re bienvenue a toi!
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