Winston se baissa, se cachant derrière ce comptoir depuis si longtemps délabré, en espérant que les hommes lancés à sa poursuite ne le remarqueraient pas. Quelle idée il avait eu de les insulter aussi ? Parfois l’ancien militant se rappelait trop tardivement que ses idées doivent parfois passer en second plan par rapport à la survie et faire ce qu’il avait fait, à savoir les attaquer sur leur couleur blanche, ça n’avait pas été une très bonne idée, il le reconnaissait maintenant. Quoi qu’il en soit, l’afro-américain attendit plusieurs secondes, qu’il n’y avait pas d’autres bruits avant de se relever.

Les bruits de course s’étaient effacées, il était seul maintenant, Winston s’autorisa enfin à souffler un peu, espérant que les deux hommes ne reviendraient pas l’emmerder. Il était fort mais pas vraiment en état d’affronter deux personnes armées et en colère. Ce n’était que dans les films que ça marchait pour de vrai. Le noir repris sa marche discrètement et aussi furtivement que possible, longeant les murs. Puis il entendit ce qui ressemblait à des bruits de lutte, les grognements d’un mort-vivant et ceux bien plus humain d’une femme.

D’un seul élan, Winston se dirigea vers l’origine des bruits et observa la scène. Une grande, très grande femme à la peau d’ébène, les cheveux courts, un corps athlétique qui était au prise avec un rôdeur. Le mort semblait encore très frais, mais elle parvint à le vaincre avant que Winston ne puisse intervenir. Il était à mi-chemin, le couteau à la main quand elle croisa son regard : « Tout va bien ma sœur ? » La question lui vint spontanément, le couteau vint retrouver son étui et Winston se présenta : « Je m’appelle Winston Newman, et toi ? »

Il allait ajouter quelques chose quand un coup de feu lui coupa la parole : « Tu devrais faire attention, un groupe d’hommes racistes trainent dans le coin, ils me cherchent à cause de ma couleur, il ne faudrait pas qu’ils te tombent dessus. » Pour Winston, il n’y avait rien de plus que l’avertissement d’un frère à une sœur noire, il était parfaitement premier degrés et sincère, se fichant bien de toute autre considération.

Fouiller cette voiture, c’était une idée de merde. C’est ce que je me dis lorsque je sens une main décharnée agripper mon épaule. Je sursaute avant d’envoyer un violent coup de pied à la créature qui manque de me mordre de peu. Je me retourne finalement, le regard sombre. Mais déjà le monstre s’avance vers moi pour saisir mon bras. Je la repousse violemment mais elle ne me lâche pas. Elle s’accroche et j’ai du mal à m’en défaire. Je lâche un grognement sourd, utilisant toute ma force pour me dégager de son emprise. Attrapant finalement mon épée dans mon dos, je laisse à nouveau le rôdeur d’approcher avant de le frapper avec ma lame. L’arme fends son crâne en deux et le corps ne tarde pas à s’écrouler au sol, sans vie. Je n’y prête pas attention, m’avançant à nouveau vers la voiture pour en sortir une veste en cuir ; elle plaira à Amalia, j’en suis sûre. Je n’ai jamais été du genre à faire des cadeaux, à qui que ce soit d’ailleurs. Pourtant, en voyant cette veste dans la voiture, je n’ai pas pu m’empêcher de penser à elle. Il me la fallait et je n’ai pas vraiment réfléchi.

C’est là qu’une voix m’interpelle. Une fois encore, je sursaute. A croire que tout le monde s’est passé le mot pour venir me faire chier aujourd’hui. Putain, qu’est-ce qu’il me veut ? Je toise l’inconnu, laissant mon regard aller du haut de son crâne à ses pieds sans tenter de le cacher. Il n’a pas l’air de vouloir me faire du mal mais je me méfie. Les gars sont tous pareils... On ne peut pas leur faire confiance… Alors d’entrée, je ne me montre pas agréable pour qu’il comprenne que je peux me passer de sa présence… « Qu’est-ce que ça peut t’faire ?! » Et je ne suis pas sa sœur, putain ! Je soupire avant de reprendre, lui coupant la parole. « J’en ai rien à foutre de ton nom. » Je suis prête à partir, je lui tourne même le dos mais il continue. Je lève les yeux au ciel avant de me tourner vers lui, une mine blasée sur le visage. « J’sais me débrouiller, t’en fais pas pour moi. »