Mesdemoiselles, soyez certaines que des enquêtes seront menées. Pour l’heure, vous ne devez pas oublier vos devoirs auprès de notre communauté. Qui a besoin plus que jamais, de figures impeccables et exemplaires, avait déclaré une des nonnes alors qu’une bande de futures Épouses attendaient en ligne, les pieds bien  alignés, les silhouettes droites et les épaules ouvertes. Surtout vous Daisy, vous êtes la future épouse du Docteur Newman, votre présence est nécessaire auprès des patients. Soyez un soutien discret, humble et bienveillant à l’image de votre future union. Toutes portaient une tenue qui « signifiait l’unité » en ces temps sombres et troubles. Des robes de couleurs pastels, ainsi qu’un tablier noué à leur taille, qui leur permettrait de pas se salir, mais de pouvoir porter assistance et soutien auprès de la population qui avait été victime de la manifestation et aux évènements de ces derniers jours. Il était vrai que ce n’était peut-être pas les tenues les plus appropriée pour aider dans les dispensaires, mais les jeunes filles ne prodigueraient pas de soin mais plutôt : « envoyées pour rassurer les blessées et les malades, ramener les brebis douteuses au sein du troupeau. »

Daisy n’avait pas vraiment idée de l’ampleur des dégâts, mais surtout de la gravité de la situation. Elle s’en doutait à n’en point douter. Mais elle se voyait bien impuissante face à la destruction de la ville, cette ville qu’elle aimait tant. Une fois remise de ce terrible épisode de grippe, elle put se rendre dans les différents dispensaires de la ville pour y apporter son aide et son soutien. Les cheveux attachées, Daisy avait été envoyée au district 4. Il était vrai qu’elle ne portait pas un très grande attachement à celui-ci, elle n’y avait d’ailleurs jamais habité. Il n’était pas nécessaire d’en faire toute une histoire, seulement, elle devait tout de même avouer qu’elle avait l’impression d’y avoir passé beaucoup, trop, de temps et dans les pires conditions en plus de cela. Mais peut-être qu’on s’était dit qu’elle serait capable de parler plus facilement aux gens avec qui elle avait partagé ces quelques jours. Rassurer, c’était le maître mot de la journée et de ces prochaines semaines. Les femmes s’occupaient de rassurer, pendant que les hommes s’occupait de réprimer, réprimander et retrouver les coupables. La jeune métisse n’osait pas imaginer le sort qui serait réservé à ceux qui se trouveraient coupables de trahison.

Elle soupire, alors qu’elle s’engouffre dans le dispensaire. Sans grande surprise, les gens sont débordés, les docteurs enchaînent des heures impossibles et tout le monde semble sur les nerfs. Daisy est accueillie par l’une des infirmières, qui lui demande s’il est possible qu’elle aille voir une jeune femme qui selon les dires des autres intendantes étaient une nouvelle arrivante fragile qui venait d’accoucher et avait certainement besoin d’entrevoir ce que pouvait réellement être et ce que pouvait réellement apporter New Eden, surtout auprès d’un nouveau né.

Elle s’appelait Beatrice, du moins, c’était le nom qui lui avait été donné. Les circonstances de son arrivée semblaient bien difficiles. Daisy hocha la tête, avant de s’approcher sur lit de la jeune mère.

« Félicitations pour cette naissance. Daisy, enchantée. Je me permet de venir vous voir pour savoir comment vous vous sentiez, surtout avec les évènements de ces derniers jours.  » déclara Daisy en souriant, compatissante et charmante.

« Enchantée. » répondit-elle.

Daisy se tourna vers le nouveau né. Quelle joie n’est ce pas ? De voir naître une nouvelle génération dans ces temps si incertain. Pour la jeune métisse, les naissances marquait tout de même un tournant pour le meilleur, que l’on soit d’accord ou non . Ces derniers jours avaient été pour elle une source de questionnement, d’interrogation. La petite bulle de la zone blanche avait été quelque peu percées, la bulle de sa vie d’ailleurs, avait fini par devoir s’ouvrir sur une autre réalité. Pour autant essayerait-elle de s’y identifier ? Compatir, sans l’ombre d’un doute, elle ne se gargarisait pas de la souffrance de qui que ce soit, malgré tout ce que l’on pouvait dire à son sujet.

« Lui avez-vous trouvé un prénom ? » lui demanda t-elle distraite par l’enfant qui semblait dormir. Daisy ne pouvait imaginer le stress d’accoucher après tout ce qu’il s’était passé. Peut-être même que le stress avait déclenché le travail de la jeune femme.

« Vous aurez amplement le temps et certainement l’occasion de remercier les soldats qui vous sont venus en aide. N’ayez aucune inquiétude à ce sujet là. Ils font leur travail pour l’harmonie de la communauté, une nouvelle âme… deux, même, sont toujours les bienvenues. » la rassura t-elle en reportant son attention sur Béatrice. Combien de femmes avaient été ramenée à Walla-Walla ? Combien se questionnaient sur le bien fondé de cette ville, de cette communauté, de ces habitants qui vivent aveuglément, comme Daisy d’ailleurs. Béatrice, ne semblait pas à Daisy comme une personne qui chercherait à faire des vagues ou à contredire quoique ce soit. Pour l’instant du moins, mais elle avait sans doute besoin qu’on la rassure, elle et son fils.

«Je vous remercie. » fit-elle en s’asseyant, croisant les chevilles comme elle avait l’habitude de le faire. « Je sais que ces derniers jours n’ont pas été de tout repos, pour vous, comme pour norte communauté. J’espère que vous y trouverez tout de même votre place, Beatrice, vous et votre enfant. » continua t-elle en souriant doucement. « Avez-vous une idée de ce que vous souhaiteriez faire parmi nous ?  » Oh, Daisy savait parfaitement que New Eden lui trouverait bien rapidement un mari à épouser, avec un peu de chance, il serait tout à fait au goût de celle-ci, mais rien ne pressait, et d’ailleurs, elle devait mettre la priorité sur son rétablissement ainsi que sur sa nouvelle vie de mère.

« Peut-être avez vous des questions ? Des doutes que vous souhaiteriez partager. Je vous promet d’essayer d’y répondre. »

En réalité, Daisy ne savait pas bien si Beatrice aurait la possibilité de remercier des soldats. De vive voix, peut-être d’une autre manière, en rendant à la communauté le fait de l’avoir sauvée. N’était-ce pas de cette manière que les choses fonctionnaient à Walla-Walla ? Au yeux de Daisy, Beatrice lui semblait quelque peu perdue. Son rôle était-il de ramener les brebis perdues au sein du troupeau ? Faisait-elle seulement partie de ce troupeau ? A n’en pas douter. Elle expire doucement.

« Ne vous encombrez pas pour le moment de telles pensées. Vous trouverez une manière de rendre ce qui vous a été offert. Pour l’heure, vous devez vous reposer. Mettre un enfant au monde au sein de notre communauté est déjà un geste qui joue en tant… que, comme vous le dites, retour d’ascenseur. » déclara Daisy,« Si vous le souhaitez, je peux essayer de me renseigner pour trouver ceux qui vous ont amenée ici, je ne promet rien, mais je peux essayer si cela peut vous soulager. Vous souvenez vous quand vous êtes arrivée ? » Il ne coutait rien à Daisy d’essayer de demander autour d’elle. Elle n’avait que bien peu de connexion auprès du corps militaire de New Eden, mais peut-être qu’avec un peu de persévérance, elle pourrait y arriver.

Daisy était une future Épouse, elle se devait d’être un modèle, un exemple de ce qui se faisait de mieux dans leur communauté. Elle s’y attelait, du mieux qu’elle pouvait. En se plaçant ainsi dans les cliniques et les dispensaires, elle commençait aussi à jouer son rôle de représentante pour son futur époux, cette pensée ne l’avait pas quittée.
« Ne vous inquiétez pas. »reprit-elle, « Il est bien normal de se sentir perdue dans un nouvel environnement.» elle marqua une pause, « Nous sommes une communauté qui a plus de six ans maintenant. Nous basons notre quotidien autour de la religion, en effet, pour la reconduction d’un monde sain. New Eden offre avant tout une sécurité, un confort et un accès à tout ce qui faisait et fait notre civilisation : médecine, culture, agriculture, ainsi que des valeurs chrétienne de travail et de famille. » expliqua t-elle. Un discours comme on devait en entendre aux bouches émissaires. Évidemment que l’on omettait les parties du sombres, les districts, les bidonvilles.. Colville. Il y avait des choses qu’ils étaient certainement préférables de ne pas mentionner. Bien entendu, Beatrice se rendrait certainement vite compte que l’on avait un « peu » mentit sur la marchandise, seulement envoyer une future Épouse n’allait pas lui donner accès à toutes les informations capables de la laisser faire un choix, un vrai.

« Je me doute bien que tout ceci est très nouveau, et très différent de l’extérieur. Vous êtes désormais sous la protection de l’Adonaï, qui est notre leader et aussi à l’origine de tout ce que vous voyez autour de vous. » Cet Adonaï était à l’origine de bien des choses, dont le système mit en place à Walla-Walla. Six ans, six années que Daisy vivait au sein de la communauté, et elle l’avait aperçu qu’en de très rares occasions. Il allait sans dire que c’était un homme occupé mais surtout bien mystérieux.

« Nous avons beaucoup de règles qui servent au quotidien… » commence t-elle. La présentation de New Eden était un nouvel exercice, auquel Daisy espérait pouvoir exceller. « Comme se rendre à la messe le dimanche. » reprit-elle. « Ce genre de choses, vous voyez ?»

« Je me renseignerai, si jamais je trouve les soldats en question, je viendrais vous faire signe. Ou avez-vous été logée ? »

Daisy savait qu’en général, les nouveaux arrivants étaient souvent logés dans les habitations des districts 4 et 5, certains, peu, réussissaient à se loger plus près de la Zone Blanche. Ils s’agissaient bien souvent de nouveaux arrivants à la dent longue et aux capacités très désirées par New Eden. Le reste, comme Ela par exemple, finissait dans les districts plus défavorisés, dans l’attente que peut-être un jour, une ascension sociale leur permettrait peut-être d’atteindre les districts 2 ou 3. Pour ce qui était de la Zone Blanche, Daisy n’avait encore jamais entendu parlé d’un nouveau arrivant à se hisser à l’une des plus haute place de la communauté. Les femmes, étrangement, avaient peut-être un peu plus de chance d’aspirer à une réelle ascension sociale par l’union, le mérite à Walla-Walla, était une ambition à double tranchant.

« Il n’est pas seul, l’Adonaï est un leader, il supervise, délègue et organise. C’est avant tout un homme d’armée, strict et bienveillant. Seules les affaires les plus graves lui sont présentées. » explique t-elle, doucement. Ce discours, s’il n’avait pas forcément goût de réchauffer, demeurait un résumé de ces grandes phrases qui lui avaient été dictées depuis son adolescence, et pouvait-on considérer qu’elle était réellement sortie de cette fameuse adolescence. À peine sortie de celle-ci qu’elle serait déjà mariée. Ce jour, elle l’attendait, avec une ferveur sans pareil. Elle sourit doucement à Beatrice qui exprimait ses inquiétudes, surtout au sujet de la foi et de sa chrétienté.

« Connaître des prières par coeur ne fait pas de vous une meilleure croyante. Dieu ne s’encombre pas de savoir si vous pouvez réciter des psaumes. Je suis certaine que vous trouverez dans les messes, un apaisement de l’âme, une présence le dimanche demeure obligatoire afin que vous puissiez aussi tisser des liens avec le reste de la communauté qui vous accueille. » continue Daisy. Non, impossible de se dérober aux messes et aux sermons dominicales. Et pas la peine d’essayer de se cacher chez soi en espérant que son absence passe inaperçu. Les nouveaux arrivants étaient le plus souvent surveillés, attendus, et leur intégration passait le plus souvent par leur participation aux activités de groupes. Le conseil de Daisy était simple, en tant que nouvelle arrivante, ayant accouchée, il était préférable qu’elle ne cherche pas à faire de vague. Daisy n’estimai pas nécessaire de lui faire la liste de ce qui pourrait lui arriver si jamais elle ne venait pas à se plier aux règles de la ville.

« Si jamais vous vous sentez perdue, n’ayez crainte. C’est un changement radical qui peut mettre du temps, mais vous trouverez votre place, j’en suis convaincue. Vous, et votre enfant, êtes en sureté parmi nous, bien plus qu’à l’extérieur. »