Je ne sais pas vraiment quand on rentrera, mais si tu peux veiller sur elle pendant ce temps, ça serait vraiment super, demanda Andrea à son neveu avec un sourire. Lisandro était occupé à l'infirmerie, pour la journée en tout cas, et mieux valait qu'il n'ait pas un bambin à gérer pour assurer du bon travail.
T'inquiète pas, je gère, ajouta Ruben fermement en hochant la tête. Soyez prudents, là-bas.

Ils allaient l'être. Cora avait supervisé une partie du procédé, sans doute que ça irait. Ils avaient essayé en tout cas de baliser avec leurs moyens un maximum, mais il y aurait forcément un pan chaotique impossible à prévoir. Sur place, la situation avait sans doute évolué, et ils la découvriraient en arrivant seulement. Pour peu que certains soient déjà passés pour piller - ce qui serait vraiment malheureux pour eux, vu que le déplacement leur coutait déjà des ressources - ils feraient tout ça pour rien. Mais Andrea avait bon espoir, notamment parce que Saseum semblait confiant.

Un autre point qui lui semblait important, en tant que mère, était de pouvoir ramener à Soo quelques informations sur son passé. L'endroit avait appartenu à son père pendant des années, et le dernier endroit où ils pourraient trouver quelque chose à propos d'eux. Elle qui avait grandi quasiment en grande partie en pleine apocalypse n'avait que très peu de souvenirs de sa vie d'avant, quasiment plus aucune mémoire de qui avaient été ses parents biologiques. Andrea prenait à cœur le fait d'être la mère adoptive de Soo, mais sa fille aurait peut-être besoin un jour de savoir ces choses-là, et elle le comprenait, sans jalousie, sans possessivité. Cette enfant, adolescente même, n'était pas sa poupée. Elle était un être humain avec des besoins, des doutes et des questions.

Leur avant-poste n'est apparemment pas dans le coin, avec un peu de chance ils n'auront pas à venir ici. Même si à terme, je suis sûre que les ressources sur place pourraient les intéresser, c'est toujours mieux qu'il n'y ait pas accès. Si d'une manière ou d'une autre, en partant, nous pouvons en condamner l'exploitation, ça serait clairement pour le mieux, glissa Andrea à l'égard du coréen.

Oh, ils n'étaient pas officiellement en guerre contre les New Eden. Mais l'afro-américaine n'avait aucunement l'intention de leur facilité la vie sous prétexte d'un traité signé pour les apparences.

Si Rafaël avait dû ralentir sur l’entraînement sur les conseils de Ludwig, il n’avait repris que quelques jours auparavant d’ailleurs, à peine plus d’une semaine, il avait tout de même pris son bâton. Et, surtout, il avait donc soigneusement préparé son sac, et s’était équipé pour faire face à tous types d’attaques.

Il avait été vacciné suite à leur alliance avec les Remnants, mais il tenait à être paré, quoi qu’il en soit. On était jamais trop prudents. Et si le vaccin ne fonctionnait pas… Bref, il envisageait toute éventualité, et refusait surtout de se faire mordre. Il aurait préféré avoir, en plus de cela, des masques à gaz, mais ça n’avait pas encore été possible. Prochainement, peut-être… En attendant, il avait découpé un vieux t-shirt usé, qui lui servirait de foulard. Des fois que ça soit un minimum efficace. Peut-être aurait-il dû demander une sorte de masque en cuir à Tesa ? Secouant la tête, il finit par sortir de sa caravane – il était trop tard, de toute façon.

Il salua tout le monde d’un bref signe de la tête avant d’aller apporter son aide à Saseum pour porter la batterie qui lui semblait bien lourde – à raison. Grimaçant sous le poids de l’objet, qu’il ne pensait pas si élevé, il aida le Coréen à la déposer délicatement à l’arrière du camion, avant de se rapprocher des autres. Il plissa les yeux, à la suggestion de condamner l’accès. Ça se tenait mais… « C’est aussi nous priver, nous-même, de ce qui se trouverait à l’intérieur. Nous n’allons pas pouvoir tout prendre, si ça n’a pas déjà été pillé. Et, à en croire leurs dires, ou ce qui lui avait été rapporté de la réunion avec eux, ils ont énormément de moyens. Viendraient-ils ici le chercher ? » C’était un risque évident, et un coup de chance, de compter que New Eden ne pille pas l’aciérie. Mais ne valait-il pas le coup, s’ils souhaitaient revenir eux-même ?

Il fronça toutefois les sourcils, à la mention des règles de Cora. Il ne les entendait pas pour la première fois, et se garderait bien de les contester, mais croyait-elle vraiment qu’ils allaient engager l’attaque ? Surtout alors qu’une adolescente et Juliet se trouvaient avec eux ? S’ils étaient tous en mesure de se protéger, ce n’était pas forcément le cas de Soo, et quant à Juliet… Elle était précieuse, parce qu’elle pouvait les soigner. Et ils ne pouvaient perdre un de leurs médecins. Pas plus qu’ils ne pouvaient perdre Saseum et son savoir-faire ou Ryan, évidemment. Quant à Andrea… Elle était probablement plus forte que chacun d’entre eux.

Il hésitait à prendre son beretta, parmi les armes disponibles – il aimait moins l’arme à feu, qu’il maniait moins bien, et – surtout – qui était beaucoup plus bruyante. Alerter tous les morts et tous les vivants du coin n’était pas particulièrement à son goût, même s’il reconnaissait que le flingue avait une certaine utilité, parfois.

Bouclant son sac, Juliet balaie l’infirmerie du regard, récapitulant mentalement tout ce qu’elle doit emporter. Bandages, désinfectant, ciseaux, kit de suture, couverture de survie, antibiotiques… Avec un peu de chance, elle n’aura pas besoin de tout cela. Avec un peu de chance, tout se passera bien. Baissant les yeux sur ses mains, la jeune femme réalise que celles-ci tremblent. Couvrant l’une avec l’autre, elle presse ses doigts pour contenir les soubresauts qui les agitent. Elle ne s’explique pas sa nervosité. Ce n’est pas la première fois qu’elle quitte l’enceinte du camp depuis mars, pourtant. Elle s’est rendue à Olympia durant l’été, et est même retourné au dispensaire au début du mois. Alors pourquoi… Peut-être parce que cette fois, ce n’est pas un environnement familier, contrôlé, ou éloigné de Seattle. Cette fois, ils seront en terrain découvert, loin de cet espace neutre qu’est le dispensaire. Et s’ils tombent sur un groupe de New Eden… elle sera à nouveau sans défense.

Après de profondes inspirations, Juliet se calme. Attrapant la sangle de son sac, elle passe celui-ci sur son dos et quitte l’infirmerie, en direction du camion. A vue de nez, elle est pratiquement la dernière arrivée, mais elle est encore assez à l’heure pour entendre les recommandations de Cora. Ce n’est évidemment pas pour la rassurer, mais elle serre les dents, lançant tout de même un regard en direction de Corray. Comme elle, il n’a pas pu oublier les traumatismes du printemps, et doit appréhender l’expédition qui se prépare. Mais l’un comme l’autre doivent apprendre à passer outre, à oublier – ou tout du moins, à enfouir suffisamment profondément pour continuer leur vie et aider où ils le peuvent.

Se tournant vers les armes mises à leur disposition, Juliet choisit, comme toujours, de se tourner vers les lames. Au contraire des armes à feu, elle est un peu plus à l’aise avec elles, et sait où frapper pour tuer. Glissant deux couteaux de chasse dans les étuis attachés autour de ses cuisses, elle soupire. Comme toujours, c’est une bien faible protection contre ce qui peut se trouver dehors. Mais elle se repose aussi sur les autres pour la défendre. C’est peut-être égoïste, mais eux comptent bien sur elle pour les ramener en vie en cas de problèmes, alors… c’est de bonne guerre.

Spoiler:

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