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l'enfer noircit ma chair (luther)

Ven 5 Nov 2021 - 18:42


LUTHER BYRON HAWKSLEYtell me more about you

prénom(s) : Luther, indirectement hérité du célèbre théologien. Byron, hommage au poète anglais, admiré de son père.
nom : Hawksley, dont il a fait la renommée à force de travail acharné.
date de naissance : Lui et son jumeau, Elijah, ont vu le jour le 22 janvier 1970.
âge : 51 ans, pour quelques mois encore.

ville de naissance : Bellevue, dans la banlieue Est de Seattle.
métier : Après des années d'études, il est devenu gynécologue-obstétricien, se spécialisant rapidement dans la médecine reproductive.
groupe : New Eden, depuis les débuts.

avatar : Mads Mikkelsen

what i am

qualites
humble
compétent
soigné
patient
méthodique
defaults
torturé
conformiste
exigeant
secret
guindé
Equipement :
Arrivé au stade avec pour seuls bagages un sac de vêtements et sa sacoche de médecin, Luther conserve précieusement ces reliques de son ancienne vie. Les rares photos de famille qu'il a pu emporter ornent désormais son bureau, soigneusement cachées de ses patients et surtout, de ses collègues. Quant à ses livres de médecine, il a été contraint et forcé de les abandonner derrière lui. Une vie entière de travaux, d'études, réduite à néant en quelques instants. S'il a pu se reconstituer une bibliothèque digne de ce nom au fil du temps, cela ne remplacera jamais les quelques éditions originales qu'il conservait comme des trésors.

Les armes à feu ne sont pas son domaine de prédilection, loin de là. S'il a appris à tirer, il ne le fait qu'avec répugnance, conscient de tenir entre ses mains un instrument de mort - alors qu'il est habitué à donner la vie. D'une manière générale, Luther rechigne à la violence. On peut le qualifier de lâche, de faible, si on veut. Cela ne changera rien à ses convictions.
     
Details physiques :
Grand, élancé, Luther refuse de laisser les ans l'avilir et laisser leur marque sur lui. Ce n'est pas de la coquetterie, au contraire. En tant que médecin, il sait mieux que quiconque que le mouvement, l'entretien, est la clé d'une existence dénuée de douleurs. Alors il s'astreint quotidiennement au sport, une habitude adoptée durant son internat, vingt-cinq ans auparavant. Pour l'instant, on peut dire que cela lui réussit.

Néanmoins, il ne peut empêcher le temps de s'exprimer. Forcément, la peau perd de son élasticité, et peu à peu, des rides se forment. C'est subtil, tant son visage paraît tranchant, affûté. On s'attend à voir les os transpercer l'épiderme, mais rien ne se passe. Ses traits restent toujours immobiles, immuables. Froids, à son image. Une expression sans cesse figée, comme paralysée.

Cela, ce n'est que la partie émergée de l'iceberg. Sous les vêtements tirés à quatre épingles, le corps de Luther est marqué, strié de cicatrices. Son dos porte les traces des coups de fouet qu'il s'est infligé tout au long de sa vie, alors qu'une épaisse bande de chair boursoufflée entoure ses deux cuisses, vestige du cilice qu'il a longtemps porté. Ces cicatrices, personne ne les a jamais vues, ni ne connaît leur existence. Elles sont sa honte, son secret.

Psychologie

Depuis l'enfance, Luther fait partie de ces enfants qui ne font pas de vagues, toujours poli, toujours respectueux et courtois. Un comportement qu'on a parfois trouvé un peu en décalage avec son âge, sans jamais s'en formaliser réellement. Au contraire, on encensait ses parents pour la bonne éducation qu'ils avaient su inculquer à leur fils, sans jamais élever la voix ou le punir. De toute évidence, Luther était ce qu'on appelle communément un enfant facile, et cela n'a pas changé en grandissant. Calme, composé, tout paraît glisser sur lui sans l'atteindre. Imperturbable, il est rare de voir Luther s'énerver, même face à des patients en colère ou des collègues incompétents. Finalement, il est tout simplement devenu un adolescent, puis un homme, à l'image du gamin qu'il était : discret, renfermé - parfois trop. Car depuis près de trente-cinq ans maintenant, Luther cache un secret qu'il juge infâmant, ignominieux. La vérité, c'est que l'homme est tout simplement trop exigeant. Pas seulement avec les autres - ses collègues, son entourage - mais surtout avec lui-même. Il attend le meilleur, et refuse l'échec.

Pour autant, Luther est loin de se tenir en haute estime. Jamais assez bien au regard de ses standards inatteignables, il n'hésite pas à minimiser l'impact qu'il peut avoir sur la vie des gens. Il est rare qu'il accueille favorablement les compliments ou les remerciements, et déteste par-dessus tout qu'on braque les projecteurs sur lui. S'il n'était pas un médecin reconnu dans son domaine, il se contenterait volontiers d'un travail de l'ombre, de petite souris. Son métier, Luther l'exerce pourtant avec passion. Il l'a d'abord choisi pour de mauvaises raisons, avant de réaliser que cette spécialité lui correspondait plus que tout autre. De fait, Luther est un médecin efficace, attentif au bien-être de ses patientes et soucieux de combler leurs attentes. Cela lui a valu, outre la reconnaissance de ses pairs, une réputation et une respectabilité qu'il ne croit pourtant pas mériter.

Bien sûr, cela ne va pas sans quelques conditions, et il est régulièrement contraint de se rendre aux galas et événements organisés en faveur de l'hôpital, ou tout autre oeuvre caritative. La tenue correcte est exigée, ce qui ne le change pas vraiment de son quotidien. Luther aime savoir que tout, dans son apparence, est sous contrôle, et reflète ce qu'il est : un homme respecté, méticuleux et soigné. Il est du genre à se laver trois fois les mains par acquis de conscience, et à se raser matin et soir. Control freak, maniaque, peut-être un peu. Cependant, derrière cette façade impeccable se cache un esprit tourmenté, sans cesse en ébullition.

Ses questionnements sont d'ordre religieux, et tournent autour d'un seul point, qui cristallise toute sa personnalité : son homosexualité. Luther a pris soin, depuis l'adolescence, de refouler au plus profond de lui-même ce pan de son existence. Il se considère comme une abomination, une erreur de la nature, un péché vivant. Et pour cela, il n'hésite pas à se punir, par tous les moyens possibles. Expier sa faute est son seul objectif, le fil rouge qui guide ses pas. Ce que d'autres acceptent, embrassent, Luther le hait, viscéralement. S'il n'a pas encore mis fin à ses jours, c'est parce que le suicide est un péché encore plus grand, qui lui interdirait toute rédemption.




Story of survival

Pre-apocalypse

Janvier 1970, Bellevue, Washington
Lydia est déjà là, lorsque naissent les jumeaux Elijah et Luther. Leur arrivée est presque christique, messianique, pour ces parents qui n’espéraient plus qu’un fils pour combler leurs attentes. Ensemble, les trois enfants composent un tableau idéal, parfait. La grande maison, le couple heureux, les enfants soignés et sages. Ne manquerait presque que la barrière blanche, et le chien. Un ensemble cohérent, à la partition harmonieuse, dans lequel Luther s’efforce, très vite, de rentrer. Si leurs parents ne sont pas réellement colériques ou violents, l’enfant voit avec quelle sévérité ils éduquent leur progéniture. Ils sont exigeants, pour eux-mêmes comme pour Lydia, Elijah et lui. Ils attendent le meilleur de chacun, et rien d’autre. Désireux de plaire, de faire plaisir, Luther s’applique. Un peu lèche-bottes, peut-être, comparé à son aînée et à son jumeau. Lui n’a pas de difficultés à se plier aux attentes de ses géniteurs. Pire, il les anticipe même. Comme une éponge, il absorbe les recommandations, les conseils, les leçons. Il retient tout, engrange tout, pour faire sien les préceptes inculqués par ses parents.

Peut-être les prend-t-il un peu trop au pied de la lettre, d’ailleurs. En grandissant, Luther se passionne pour les Ecritures. Plus qu’une lecture de surface, il en étudie les origines, les mécanismes. Il aime comprendre, pour mieux apprendre. Une prédisposition qui fait espérer à George que, comme son frère, Luther suivra des études de droit. Pour l’heure, le jeune garçon a d’autres préoccupations à l’esprit. D’enfant, il est devenu adolescent, et très vite, il réalise qu’il n’est pas tout à fait comme les autres. Solitaire, taiseux, il a toutefois réussi à se faire quelques amis. Une petite bande de garçons, purs produits de leur époque. Et, alors qu’ils commencent à collectionner les filles, jonglant parfois entre deux – ou plusieurs – relations, Luther, lui, reste loin de tout cela. Jamais ses yeux clairs n’effleurent un corps féminin, et ses pensées ne s’attardent guère sur leur goût de leurs lèvres. Ses amis le remarquent, évidemment, et le moquent pour cette timidité. Un soir, à l’occasion d’une fête, tous le pressent d’adresser la parole à Karen. Ils ont bien vu que celle-ci fait les yeux doux au jeune homme depuis des semaines, sans parvenir à attirer son attention.

L’alcool aidant, ce qui devait arriver, arriva. Cela ne lui plaît pas, mais il met cela sur le compte de la nouveauté, de l’inexpérience. Comme l’alcool, il faut goûter plusieurs fois au sexe avant d’en apprécier toutes les subtilités. Alors Luther réitère l’expérience, encore et encore. Pourtant, cela ne lui plaît toujours pas. Forcément, il ne le dit à personne, se fondant dans la masse, recevant les blagues et les compliments de ses amis comme autant de preuves qu’il fait ce qu’il faut. Un jour, peut-être, il finira par aimer cela. Cette pensée le fait tenir, alors même qu’il ne ressent rien lorsqu’il serre Karen contre lui.

Septembre 1988, Boston, Massachusetts
La fin du lycée arrivant, Luther est précipité dans le monde des adultes. Devenu étudiant à Harvard, il entame la lente et fastidieuse ascension pour devenir médecin. Compte tenu de son intérêt dévorant pour les textes sacrés, ses parents s'attendaient à le voir emprunter une toute autre voie, mais le jeune homme est sûr de lui. Les mécanismes du corps humain le fascinent tout autant, sinon plus, que ceux qui régissent les Cieux. Partir à l'autre bout du pays n'est pas facile, encore plus alors qu'Elijah s'envole pour la Californie. C'est la première fois que les jumeaux sont séparés, et Luther le vit mal.

Les premiers mois à Boston sont critiques, autant à cause de la séparation soudaine avec sa famille, son environnement, qu'à cause de la charge de travail qu'on attend de lui. Pour décompresser, le jeune homme fréquente les cinémas indépendants de la ville, trouvant bientôt ses habitudes dans l'un d'entre eux. La séance du dimanche matin est l'une des moins fréquentées, et souvent, il se trouve seul face à l'écran blanc. Parfois, le machiniste le rejoint et ensemble, ils partagent un seau de pop-corn. Peu à peu, le rendez-vous devient hebdomadaire, et une amitié sincère se créée entre eux. Chaque semaine, Luther n'attend qu'une chose : retrouver Matthew. Progressivement, l'intérêt de la discussion surpasse celui du film, et ils finissent par se voir en dehors du cinéma.

Les mois s'écoulent, partagés entre les cours, et les moments volés en compagnie de son ami. Matthew est l'une des rares personnes que Luther fréquente en dehors des bancs de l'université. Insouciant, léger, le jeune homme est une véritable bouffée d'air frais pour l'étudiant obsédé par sa réussite. La trahison est d'autant plus douloureuse, et lorsqu'un soir, son ami se penche vers lui pour l'embrasser, Luther est tétanisé. Horrifié. Dégoûté. Son poing s'écrase sur le visage de Matthew, et, avant de pouvoir fournir une explication, il s'enfuit en courant.

Dans les semaines qui suivent, Luther ignore les appels répétés de Matthew, ainsi que les coups contre la porte de sa chambre d'étudiant. Penché sur sa Bible, Luther prie compulsivement. Les mots pleuvent de ses lèvres comme une litanie ininterrompue, et se confondent bientôt. Mais ce n'est pas assez pour le faire expier, pour l'absoudre. Rien n'est jamais assez pour effacer la terrible vérité. Pour oublier qu'il a aimé ça.

Enfouissant profondément ce secret, Luther en vient peu à peu à haïr cette part de lui. S'il fait bonne figure aux yeux de la société, il n'en demeure pas moins que l'étudiant se déteste, viscéralement. Tous les moyens sont bons pour racheter sa faute, et se purger du péché. Même les plus ignobles. Lorsque la prière et le jeûne ne suffisent plus à apaiser sa conscience, Luther se tourne vers d'autres pratiques, plus rigoristes. Peu à peu, les marques de sa pénitence s'inscrivent durablement dans sa chair. Il prend soin de les cacher, et surtout, de se soigner.

Plus solitaire que jamais, évitant la compagnie des hommes comme des femmes, il a du mal à se faire des amis, préférant se consacrer à ses études. Cliché de l'élève studieux, il lève à peine le nez de ses livres pour manger et dormir. Ses efforts payent puisqu'après quatre ans de premed, il décroche haut la main une place à la medical school de la prestigieuse université. Sa joie est néanmoins obscurcie lorsqu'il apprend qu'Elijah n'a pas pu accéder à l'école de droit de UCLA.

Néanmoins, l'entrée à Quantico de son jumeau les rapprochent considérablement - géographiquement parlant, du moins. Car Elijah, comme Luther, n'a guère de temps à consacrer à sa vie sociale. Tous deux travaillent d'arrache-pied pour atteindre leurs objectifs. Son frère est rapidement délivré cependant, et est transféré à Washington, où il commence à travailler au sein du FBI. Luther, lui, ne termine son cursus qu'en 1996, enfin titulaire de son diplôme de médecine. Mais il a encore du chemin à parcourir, puisqu'il intègre ensuite l'hôpital général du Massachusetts, pour y réaliser son internat. A la grande surprise de son entourage, il choisit la gynécologie-obstétrique comme spécialité.

Juin 1996, Boston, Massachusetts
Les premiers mois sont particulièrement éreintants. Il a connu la fatigue au cours des huit dernières années, mais c'était avant tout une fatigue intellectuelle, causée par les longues heures penché sur ses livres. Interne au sein du Massachusetts General Hospital, Luther peut parfois passer plusieurs jours sans rentrer chez lui. La formation est exigeante, mais il sait qu'il poursuit un parcours d'excellence. A l'issue de la première année, quelques étudiants préfèrent revoir leurs ambitions à la baisse et se tournent vers des spécialités moins astreignantes. Luther, lui, s'accroche. S'acharne, presque. Ce qu'il ne maîtrise pas rapidement, il passe des heures, des jours, des semaines, pour l'apprendre. Plus qu'aucun autre métier, être médecin signifie être le meilleur, et s'entraîner, inlassablement. Ils ont la vie des gens entre leurs mains, et cette responsabilité doit peser dans chaque décisions qu'ils prennent.

De temps à autre, ils perdent des patientes. Des femmes dont les cas sont complexes, parfois au-delà de toute aide possible. La médecine d'alors n'est tout simplement pas assez avancée pour leur sauver la vie. Peu à peu, Luther se blinde. Il n'est pas insensible, évidemment, et il prie chaque soir pour ces malheureuses. Mais il apprend, un cas après l'autre, à ne plus pleurer dans les cages d'escaliers. Ce n'est que lorsque sa première patiente meurt, lors de sa dernière année, qu'il perd pied.

Madeline est à peine plus jeune que lui, et elle attend son premier enfant. Le stress est intense pour la jeune mère, mais son mari, Scott, l'entoure de toutes les attentions. Luther la suit depuis le début, et tout se passe au mieux. Pourtant, sans qu'ils comprennent pourquoi, l'état de la jeune femme se détériore brusquement. Amenée en urgence à l'hôpital, elle présente tous les signes d'une infection grave. Après une série de tests, cependant, rien ne transparaît, alors même que sa température grimpe en flèche. Ce n'est que trop tard qu'ils comprennent qu'elle souffre d'une méningite provoquée par la listériose.

Malheureusement, l'infection se généralise et déclenche un travail prématuré. Emmenée en bloc en urgence absolue, Madeline succombe quelques heures plus tard à une hémorragie massive. Son bébé, à peine viable, est immédiatement placé en soins intensifs néonataux. Pour Scott, la perte est énorme, indicible. Pour Luther, l'échec est cuisant ; la culpabilité, insupportable.

Ses collègues et supérieurs l'épaulent du mieux qu'ils peuvent, mais tous doivent avancer. Il y a d'autres femmes, d'autres bébés, qui ont besoin d'eux. Luther, lui, traverse les derniers mois de son internat dans un brouillard. Il ne laisse rien paraître, égal à lui-même aux yeux de tous. Mais Madeline le marque à vie.

Juillet 2000, Baltimore, Maryland
Après Boston, Baltimore. A peine une heure de voiture de Washington - d'Elijah. Ils n'ont plus été aussi proches l'un de l'autre depuis des années. Et cela tombe bien, car son frère vient justement de rencontrer une infirmière nommée Alison, que Luther apprécie d'emblée. De son côté, le médecin entame la dernière étape de son parcours : sa spécialisation en endocrinologie reproductive et fertilité au sein de l'université John Hopkins.

Comme toujours, le niveau est élevé, et les professeurs, exigeants. Mais tous savent qu'ils œuvrent vers un but commun : permettre au plus grand nombre d'accéder à la parentalité. Comme à l'accoutumée, Luther ne rechigne pas à la tâche. Malgré la proximité de son frère, ils ne se voient que rarement, car il consacre tout son temps à ses études. C'est la dernière ligne droite, le dernier effort avant de parvenir à son but. Et lorsqu'il se retourne pour contempler le chemin parcouru, Luther ne peut s'empêcher de ressentir une certaine fierté.

Certes, à trente ans, il n'a rien construit : aucune relation de couple, aucune famille. Mais ses accomplissements sont ailleurs. Evidemment, ses parents s'interrogent, et ne se privent pas pour le questionner dès qu'ils en ont l'occasion. A chaque fois, il leur oppose les mêmes excuses : son travail est trop chronophage, cela ne l'intéresse pas... Lorsqu'Elijah annonce la grossesse d'Alison et leur mariage prochain, l'attention parentale est détournée, mais pour un temps seulement.

La naissance approchant à grands pas, Luther parvient à dégager quelques jours dans son emploi du temps pour se rendre au chevet de sa belle-soeur. Elijah est absent, car on vient d'attaquer les Etats-Unis d'Amérique. L'émotion est palpable, dans l'hôpital où vient de naître son neveu, James, mais aussi dans les rues de la ville. Profondément secoué par ces événements du 11 septembre 2001, Luther retrouve rapidement ses esprits. Son frère compte sur lui pour seconder son épouse, pour l'aider avec leur nouveau-né. La joie de cette naissance est largement occultée par le choc qui secoue l'Amérique en ces jours funestes.

Après ce court interlude, Luther retourne au travail. A Baltimore, ils ne sont pas autant impactés qu'à New-York ou Washington, même si le stress et le deuil déclenchent de nombreux accouchements prématurés. Comme les autres, il est sur le pont, prêt à prêter ses mains à qui en aura besoin. Lorsque la vague se calme, après quelques semaines, il peut finalement se concentrer à nouveau sur son objectif. La ligne d'arrivée est juste devant lui. Encore deux ans, et il pourra toucher au but.

2003, Seattle, Washington
Quinze ans. C'est le temps que cela lui aura pris pour devenir un médecin, puis un chirurgien. Mais Luther ne regarde plus le chemin parcouru. Non, il regarde droit devant lui, la route toute tracée qui s'ouvre enfin, et qu'il emprunte avec bonheur. Après l'obtention de sa spécialisation, il a postulé dans de nombreux hôpitaux à travers le pays, voyageant à la rencontre de certains recruteurs, tâchant de se vendre au mieux. Ses résultats parlent pour lui, mais il doit encore faire ses preuves.

A sa grande surprise, c'est finalement l'hôpital universitaire de Seattle qui lui propose un poste. Ce retour aux sources a un drôle de goût, mais Luther ne peut nier que sa ville natale lui manque. Après quelques jours de réflexion, il signe le contrat qui le ramène chez lui.

La ville a changé, bien sûr. Elle s'est modernisée, quartier par quartier. Mais il retrouve rapidement ses marques. Les premières semaines, il est hébergé par ses parents, le temps pour lui de trouver un logement. L'occasion pour Luther de constater combien ils ont vieilli, et lui aussi. Il n'est plus l'adolescent bancal, mal formé, qui a quitté la maison à la fin des années 80. Il est devenu un homme, tout aussi bancal, certes, mais plus assuré.

Rapidement, il s'installe dans le centre de Seattle, non loin de l'hôpital. Étiqueté petit nouveau, il lui faut quelques mois pour trouver sa place dans l'équipe des titulaires. Assez rapidement, les questions personnelles arrivent. On l'interroge sur sa vie de famille, on s'étonne parfois de ne pas voir d'alliance à son doigt, ni même pendue à une chaîne. Avec un sourire affable, Luther écoute les conseils, accompagne les collègues célibataires dans les bars. On lui organise quelques rendez-vous, qu'il honore poliment, mais auxquels il ne donne pas de suite.

Ses parents, eux, n'ont pas changé de disque. Les questions sont les mêmes depuis des années, mais quand leur parvient la nouvelle, brutale, de la mort d'Alison, le flux se tarit. En urgence, les choses s'organisent : James et Mia, le bébé nouveau-né d'Elijah, sont rapatriés à Seattle. Dans l'ombre, Luther s'arrange pour obtenir le dossier médical de la défunte. Le cas de Madeline le hante encore, cinq ans après, et il veut s'assurer qu'aucune erreur n'a été commise. Avec soulagement, il constate que ce n'est pas le cas. Ce sont simplement des choses qui arrivent, aussi douloureuses soient elles...

Peu à peu, les choses se tassent. Elijah fini par rejoindre ses enfants, et toute la famille l'aide largement. Il faut un village pour élever un enfant, comme on dit. Lydia et Luther se partagent les gardes, accueillant régulièrement leur neveu et leur nièce chez eux. Mia est un enchantement, et le médecin découvre un semblant de paternité. Il sait bien que le bébé n'est pas le sien, évidemment, mais la ramener à son père est chaque fois un peu plus dur. Avec le temps, il s'y habitue. Mais sa solitude commence à lui peser.

2013, Seattle, Washington
Voilà dix ans qu'il est revenu. Dix ans qu'il est devenu l'un des médecins de Montlake, contribuant chaque jour à la renommée du service de gynécologie obstétrique. Avec le temps, on vient chercher son expérience, son expertise, même. On attend de lui qu'il enseigne à la jeune génération, qu'il forme les chirurgiens de demain. Luther se glisse avec plaisir dans ce nouveau rôle, partageant ses connaissances, comme on l'a fait avec lui des années auparavant. Il se consacre aussi à la recherche, mettant au point de nouvelles méthodes, de nouveaux traitements. Les essais cliniques sont longs, laborieux, coûteux - en argent comme en énergie. Mais ils finissent par porter leurs fruits.

A quarante-trois ans, Luther se voit offrir le poste de chef du service. Un titre qu'il accepte bien volontiers, car il sait qu'il aura enfin les mains libres pour faire les choses à sa manière. Pour autant, il est loin de se montrer arrogant, et continue de placer les intérêts des patients avant son propre avancement. Le poste s'accompagne de contraintes, évidemment, et il doit multiplier les sorties mondaines, pour son plus grand déplaisir. Celles-ci le tiennent occupé durant les rares soirées de tranquillité dont il dispose, et surtout, l'éloignent de sa famille.

Ses parents viennent de quitter Seattle pour la Californie, et Elijah occupe désormais leur maison, avec ses enfants. De leur côté, Lydia et son mari, Vincent, sont eux aussi accaparés par leur travail respectif, ainsi que par la crise d'adolescence de leur fils, Alexander. Chacun dispose de peu de temps, et il est rare qu'ils se retrouvent tous ensemble autour d'un dîner dans la maison familiale. Néanmoins, lorsque ces moments arrivent, Luther profite de chaque instant, avant de retourner à sa solitude.

Depuis Matthew, Luther s'est renfermé. Il tient éloigné toute tentation, et, chaque fois que son cœur cède, se punit sévèrement. Il n'a que peu d'amis en dehors de ses collègues, sort rarement, et toujours seul. Il mène une existence de reclus, dans un appartement trop grand pour lui, à la décoration austère. Son quotidien est chronométré, millimétré, et dans sa quête de contrôle, il a fini par en devenir maniaque, obsessionnel. Vue de l'extérieur, pour qui ignore les craquelures dans le tableau, la vie de Luther semble parfaite.

Pourtant, il n'est pas heureux.

Chronologie simplifiée:

Post-apocalypse

Octobre 2015, UW Medical Center - Montlake, Seattle
Cela fait plusieurs jours, maintenant, que la situation est tendue. Un peu plus que cela, même. Son service n'est pas directement concerné, évidemment, mais l'afflux massif de ces blessés mobilise toutes les forces vives de Montlake. Peu à peu, on commence à reprogrammer les chirurgies les moins urgentes, et à renvoyer chez elles les patientes qui peuvent être hospitalisées à domicile. Le service autour au ralenti, mais cela n'empêche pas Luther de courir partout. Il est avant tout médecin, bien sûr, et ne reste pas les bras croisés sous prétexte que les blessés ne dépendent pas de sa spécialité.

Bien sûr, il écoute les informations et connaît les rumeurs qui circulent à travers la ville. Un orthopédiste a une cousine infirmière, dont le petit ami travaille à la morgue d'un autre hôpital de Seattle. Or, ce petit ami a eu l'immense surprise de voir les morts se relever. Plutôt inhabituel, dans sa branche. L'un d'eux l'a même mordu, précise l'orthopédiste avec un air horrifié. Ils n'ont plus de nouvelles depuis quelques jours maintenant, et cela n'a rien de rassurant.

Dehors, les camions militaires défilent, se déploient sur l'ensemble de la ville. Forcément, les hôpitaux sont des points sensibles, où chaque mourant est susceptible de devenir une menace. De nombreux médecins désertent leur poste, soucieux de s'enfuir et de se mettre à l'abri avec leur famille. Autant que possible, Luther reste en contact avec Elijah et Lydia. Mais les services téléphoniques tombent bientôt en rade, et Luther se retrouve seul. Comme toujours.

***

Manœuvrant le brancard avec autant de douceur que possible, Luther garde un œil sur le moniteur posé entre les jambes de sa patiente. Monica a choisi le pire moment pour accoucher, mais c'est comme ça, ils n'y peuvent rien. Tout va bien se passer, ne vous en faites pas, dit-il, pour la rassurer. En vérité, lui-même n'en sait rien, et il ne fait qu'espérer. De l'autre côté du brancard, son interne, Jodie, lui lance un drôle de regard. Le cas de Monica est particulier, et même sans cette épidémie, le médecin n'était déjà pas certain de pouvoir sauver ses jumeaux. Aujourd'hui, leurs chances sont d'autant plus compromises. Trottinant derrière eux, Jonathan, le futur père, ne cesse de les abreuver de questions auxquels ils ne prennent pas la peine de répondre. Ils n'en ont tout simplement pas le temps.

Parvenus face à l'ambulance, Luther et Jodie laissent les ambulanciers placer le brancard dans le véhicule, faisant grimacer la future mère. Avec un hochement de tête, Jodie monte à l'avant, tandis que Jonathan et le médecin s'installent à l'arrière, ce dernier surveillant le moniteur, faisant la conversation à Monica. Comme toujours, il fait ce qu'il peut pour apaiser ses patientes, même dans les pires moments. Evidemment, c'est insuffisant pour stopper le travail et il sait déjà que les chaos de la route ne vont rien arranger. Mais ils n'ont pas d'autre choix. Depuis plusieurs jours déjà, on prépare l'évacuation vers les hôpitaux de campagne disséminés dans la ville. Eux ont été affectés au CenturyLink Field, vers lequel l'ambulance se dirige désormais.

Malheureusement, une marée de véhicules semble s'être abattue sur Seattle, et même toutes sirènes hurlantes, l'ambulance peine à se frayer un passage. Le trajet, qui ne prend qu'une quinzaine de minutes en temps normal, s'éternise au-delà du raisonnable. Tâchant de conserver une attitude composée, Luther lance cependant un regard à Jonathan, l'avertissant silencieusement de se préparer au pire. Une mise en garde confirmée quelques minutes après, lorsque Monica perd subitement conscience, une tâche rouge s'élargissant à vue d'œil entre ses cuisses. Elle saigne, s'étrangle Jonathan, tétanisé.

Se concentrant entièrement sur Monica, Luther ignore son époux, et s'empresse d'écarter le moniteur, avant de relever les jambes de sa patiente, remontant le drap qui la recouvre au passage. Comme escompté, elle est en train de faire une hémorragie, mais pour l'instant, impossible d'en connaître la source et de l'arrêter. Si seulement ils n'étaient pas coincés dans cette ambulance, incapables d'avancer jusqu'au stade...

Lorsque, finalement, le cœur de Monica cesse de battre, Luther sait qu'il n'a que quelques minutes avant de perdre les jumeaux à leur tour. Mais il sait aussi qu'à ce stade de la grossesse, sans le soutien de l'unité de soins intensifs néonatalogie, ils ne seront pas viables. D'un regard, il fait comprendre à Jonathan qu'il n'y a rien à faire, et qu'ils ont déjà perdu la partie. Attrapant un scalpel, le médecin pratique tout de même une césarienne, sortant un à un les bébés. Comme il s'y attendait, ils ne tardent pas à expirer dans les bras de leur père, profondément ébranlé.

S'essuyant le front d'un revers de manche, Luther est abattu, lui aussi. Mais ils ne peuvent pas rester là, avec trois sur les bras. Tapant du poing contre la cabine, il attire l'attention de Jodie, qui ouvre la petite fenêtre entre eux. Dis à Michael de se garer à l'écart. Il faut qu'on abandonne le véhicule. Un rapide coup d'œil dans l'ambulance permet à l'interne de comprendre la situation, et elle obéit sans sourciller.  

Rapidement, l'ambulancier conduit le véhicule dans une ruelle et tous descendent - Jonathan, soutenu par Luther. Il faut condamner les portières, déclare Michael, sourcils froncés. Et prévenir de ne pas ouvrir... Un avertissement probablement inutile, mais qu'il formule tout de même. Très vite, l'ambulance est prête à être abandonnée, ils ont récupéré tout le matériel médical transportable, et il leur faut décider quoi faire. Je me rends au stade, annonce Jodie, suivie par Michael et Jonathan. Je vous rejoins dès que possible, dit-il. Ils ne sont pas très loin de chez lui, et Luther compte bien y passer pour récupérer quelques affaires.

Lorsque, quelques heures après, il rejoint le stade, chargé d'un sac de vêtements et de sa sacoche de médecin, il n'imagine pas encore le chaos dans lequel il vient de s'engouffrer.

Juillet-Août 2016, Walla Walla
Luther ne participe pas à l'expédition mené par David Richardson, mais l'annonce de sa morsure fait rapidement le tour du camp, et très vite, l'abattement se propage à travers les survivants. Malgré tout, les médecins s'affairent auprès du blessé, surveillant sa température, son état général, tout. Outre l'inquiétude de le voir disparaître, c'est l'intérêt qui prime pour certains. Les sujets d'études sont bien trop rares pour ne pas passer à côté de cette occasion, aussi déplacé cela soit-il.

Pourtant, le temps passe, et justement... rien ne se passe. La fièvre finit par retomber et Richardson reprend des forces, retrouve son appétit. Tout semble indiquer qu'il est tiré d'affaire, sans que personne ne puisse se l'expliquer. Chez certains médecins, on parle à voix basse d'immunité, tandis que d'autres hurlent au miracle. Luther, lui, est partagé. Evidemment, il est croyant, et enclin à croire qu'il s'agit d'un signe divin. Mais il est aussi un homme de science, et il sait que, si tout ne s'explique pas forcément, cette guérison au moins n'est pas imputable à Dieu.

Néanmoins, il reste silencieux, surtout après l'exécution d'un couple condamné pour avoir tenté d'assassiner le colonel. Cette pendaison l'impressionne et le fait réfléchir pendant des jours. Pourquoi essayer de supprimer Richardson, si ce n'est par peur de ce qu'il représente, de ce qu'il incarne ? Peu à peu, Luther finit par admettre la véracité du discours officiel. Après tout, il ne voit pas d'autre explication rationnelle, la folie mise à part.

Rapidement, le médecin se coule avec aisance dans le moule façonné pour eux par Richardson, entouré d'une aura nouvelle, et de ses collaborateurs les plus proches. Ensemble, ils forgent un monde flambant neuf, où des valeurs depuis longtemps oubliées ressurgissent progressivement. Comme d'autres, Luther se met à croire que l'épidémie qui ravage le pays depuis un peu moins d'un an est un signe de la colère divine, du mécontentement de Dieu envers les Hommes. De la même façon qu'il a envoyé le Déluge, il a envoyé cette épidémie pour les punir, les ramener dans le droit chemin. Ce n'est donc que son devoir de chrétien qu'il accompli en se pliant humblement aux règles qui, peu à peu, régissent leur existence à tous.

Octobre 2017, Walla Walla
Contemplant le questionnaire qui accompagne le dossier qu'il tient à la main, Luther fronce les sourcils. 26 ans, aucun antécédent d'avortement, plus de contraception depuis... octobre 2015, oui, logiquement. Parcourant encore quelques feuilles d'examen, il relève finalement les yeux sur la jeune femme qui lui fait face, de l'autre côté du bureau. Elle a glissé ses mains entre ses cuisses, les épaules voûtées, les genoux rentrés. Tout chez elle traduit le malaise, et l'envie de fuir. Elle préférerait cent fois être ailleurs, et ce simple fait se lit aisément. Refermant le dossier et le reposant sur le bureau, Luther soupire. Il en voit défiler des dizaines, des comme elles. Des femmes qui ont exprimé leur refus de ne pas porter les enfants de demain. La prochaine génération, celle qui rachètera leurs péchés à tous.

Ecoutez, Amber... je comprends tout à fait que vous ne souhaitiez pas avoir d'enfants. C'est une réalité, certains d'entre nous ne se sentent pas parents, et ce, même très tôt dans leur vie. Ces quelques mots suffisent à faire se redresser la jeune femme qui le fixe, surprise. De toute évidence, elle ne s'attendait pas à ce discours, mais reste méfiante. Moi-même, je n'en ai jamais eu, et je me suis satisfait de mes neveux et nièces, dit-il en plaquant une main sur son torse. Et, je peux vous l'assurer, la grossesse n'est pas une épreuve anodine pour le corps, surtout depuis le début de l'épidémie. Il ne ment pas, n'enjolive pas la situation. Ne tente pas de lui vendre une sacro-sainte gestation, auréolée de gloire et de béatitude.

Je ne comprends pas, je pensais que vous deviez nous encourager à pondre toujours plus, pas nous en dissuader, répond t-elle, usant volontairement de ce terme injurieux. Il voit bien, dans son regard, qu'elle cherche avant tout à le déstabiliser, à le faire sortir de ses gonds. A lui faire cracher le morceau, quitte à la contraindre par la force à accepter s'il le faut. Mais Luther rechigne à la violence, et ne compte pas l'employer contre les femmes qu'on lui demande de rencontrer. C'est l'idée, oui, admet tout de même le médecin. Inutile de mentir, quand elle a déjà parfaitement saisi l'enjeu de ce rendez-vous. Mais je cherche avant tout à comprendre les raisons de votre réticence. S'il y en a une, s'entend. Sans le préciser, Luther ne cache pas non plus qu'avec - ou non - une bonne raison, Amber et les autres n'auront de toute façon pas le choix. C'est leur salut à tous qui est en jeu, et ni Richardson, ni lui, ne les laisseront risquer cela.

C'est pourtant pas compliqué à comprendre, putain... Je ne veux pas prendre part à votre système pourri, lâche-t-elle d'une voix soudain durcie, qui contraste furieusement avec son attitude. Je ne veux pas être douce, polie, obéir à mon mari, élever une dizaine de gosses, et tout ça, avec le sourire. Allez vous faire foutre. A ces mots, le visage de Luther se crispe, autant face à l'insulte qu'à la position d'Amber. Puis ses traits s'affaissent, visiblement attristés. C'est dommage, souffle-t-il tout en reprenant le dossier, et en griffonnant quelques mots en bas du compte-rendu de la rencontre. Fixant pendant une seconde l'espace blanc, en attente de sa signature, Luther se résout finalement à l'y apposer, avant de reposer le dossier. Bien. Nous en avons fini pour aujourd'hui, vous avez été... parfaitement claire sur votre opinion, et je vous en remercie. Je ne vais pas vous retenir plus longtemps, ajoute t-il en se relevant et en indiquant la porte à la jeune femme.

L'été suivant, Amber franchit à nouveau sa porte, affichant un ventre déjà un peu arrondi, qui ne laisse aucun doute sur la raison de sa visite. Croisant les doigts sur son bureau, Luther affiche un sourire affable. Je suis heureux de voir que vous avez changé d'avis, dit-il, se penchant déjà sur les derniers examens prénataux de la future mère.

Septembre 2018, Walla Walla
Amber est loin d'être la seule qui ait été convaincue du bien-fondé de leur mission. De nombreuses femmes affluent, déjà enceintes ou désireuses de l'être. Désireuses d'apporter leur pierre à l'édifice, de contribuer à la renaissance de l'humanité et de la société telle qu'ils l'ont connue. Renouer le contact avec Dieu, également. Se faire pardonner les fautes passées, et apprendre de ses erreurs, pour avancer vers un monde meilleur. C'est vers ce but commun que toute la communauté de Walla Walla oeuvre, pour le plus grand plaisir de Luther.

Evidemment, le grand nombre des naissances implique une surcharge de travail. Le retour de l'électricité, au printemps dernier, signifie qu'ils peuvent espérer retrouver, du moins en partie, toute la technologie médical dont ils disposaient avant. Cela signifie aussi que Luther peut renouer avec sa spécialité, et être une véritable aide pour les couples en mal d'enfants. Rapidement, il obtient des résultats probants, qui ravivent de vieux souvenirs - réminiscences d'un passé qu'il pensait éteint pour toujours. Ses supérieurs s'intéressent un peu plus à lui, à son parcours.

Soudain, il n'est plus tout à fait l'un des nombreux médecins qui parcourent les couloirs des hôpitaux de Walla Walla. Il sort de l'anonymat, redevient le Dr. Hawksley. Ce coup de projecteur brutal ne lui plaît pas, mais il n'a pas véritablement le choix. Sans qu'il puisse refuser, on lui présente de plus en plus de femmes considérées comme infertiles. Bien sûr, Luther est loin d'être infaillible et surtout, il n'est pas Dieu. Les miracles ne sont pas de son ressort, et il ne parvient pas toujours à traiter l'infertilité de ses patientes. Mais ses réussites pèsent plus lourd que ses échecs et peu à peu, il devient un médecin recherché. Subtilement, ses supérieurs l'orientent vers les patientes les plus aisées, et très vite, il n'a plus de place dans son agenda.

Pourtant, Luther n'oublie pas toutes les autres femmes. Celles qui n'ont pas les moyens de se payer ses services et qui, malgré tout, en ont besoin, comme les autres. Alors il demande à ce qu'on dégage pour lui la journée du jeudi. Un unique jour dans la semaine, consacré à ces patientes qui, elles, peinent parfois à joindre les deux bouts sans pouvoir se permettre de rajouter des frais médicaux. Des femmes aux besoins parfois complexes, qui font souvent tout pour obéir et donner satisfaction à leur époux, sans y parvenir. Quelques fois, les problèmes sont physiologiques, traitables. A sa portée. D'autres fois, il ne peut rien pour elle, et sait qu'elles risquent la répudiation, pour ne pas avoir pu donner d'enfants à leur mari. A la communauté.

Ces femmes, Luther ne les oublient pas dans ses prières. Il leur accorde même plus d'importance qu'à ces épouses qui vivent dans l'opulence, sans avoir à travailler pour subvenir à leurs besoins. Celles-là ne souffrent pas, celles-là n'expient pas. A elles seules, ces pécheresses mettent en péril l'oeuvre construite par Richardson. Luther n'a que peu de compassion pour ces femmes là, qui consomment leurs ressources sans rien donner en échange. Bien sûr, elles enfantent. Mais ce n'est, après tout, que leur devoir.

Mai 2019, Walla-Walla
Essoufflé, Luther rejoint en courant le pavillon indiqué par le garde. C'est ici qu'on accueille les nouveaux arrivants, qu'on leur permet de se débarrasser de la crasse de l'extérieur, qu'on leur sert leur premier repas chaud, qu'on les examine, et, le cas échéant, qu'on les interroge. Mais Luther n'a pas été appelé en sa qualité de médecin, non. On l'a informé qu'un homme prétendant s'appeler Hawksley, accompagné d'une adolescente, a été ramené par une expédition. Le coeur battant, les poumons prêts à exploser, Luther perd, pour un temps, sa façade impeccable.

Les portes s'ouvrent devant lui, et soudain, il se retrouve face à son propre visage. Elijah. Seigneur... Vacillant, Luther recule d'un pas, s'appuie au chambranle de la porte. Il l'a cru mort... Toutes ces années, il a cru être le seul survivant de leur famille. Et non, ce n'est que moi, souffle son jumeau avec le sourire qui le caractérise. Il n'a pas le temps d'en dire plus, qu'une furie fonce sur Luther et l'enlace. Par réflexe, les bras du médecin se referment sur l'adolescente, qui relève la tête vers lui. Mia. Les larmes aux yeux, elle paraît visiblement amaigrie, ayant définitivement quitté l'enfance pour le monde des adultes.

Lui-même sent son regard s'embuer, et un coup d'œil à Elijah suffit pour se rendre compte que son jumeau est dans le même état. Et, ce qu'il n'avait pas remarqué en arrivant lui saute désormais aux yeux. Ton œil, souffle-t-il, la gorge serrée. Je t'expliquerais, répond Elijah, un peu assombri. Il y a tant à dire, tant à raconter, et ils sont si fatigués... Comment êtes vous arrivés ici ? Où est James ? Il est blessé ? A l'évocation de son aîné, Mia resserre sa prise, et Luther comprend. Je t'expliquerais, répète Elijah, d'une voix plus basse encore.

Abattu, Luther pose une main tremblante sur la tête de Mia, caressant ses cheveux châtains comme il avait l'habitude de le faire lorsqu'elle était enfant. Il y a si longtemps... Tant de choses ont changé depuis, et ils ne sont plus les mêmes. Avec un noeud dans la gorge, Luther retient ses larmes. Des larmes de joie autant que de chagrin, qui le déchirent entre deux émotions contradictoires. Passant une main sur ses yeux, le médecin hoche la tête. Venez, on va vous sortir de là.

Septembre 2021, Walla-Walla
Depuis quelques temps déjà, les regards s'attardent sur son annulaire gauche, désespérément vide. Son célibat commence à interroger, à déranger, même. Au début, cela ne posait pas de problème. Tous étaient trop occupés à reconstruire la société telle qu'ils l'avaient connue pour s'arrêter à ce détail. Mais, le temps passant, les lois se mettant peu à peu en place... Qu'un homme comme lui honore seul les invitations à dîner commence à faire jazzer.

En plus de cela, Luther a un côté "gendre idéal" qui fait rêver plus d'une mère ayant une fille en âge de se marier. La différence importe peu pour elles, tant que le prétendant est susceptible de mettre leur progéniture à l'abri du besoin. Son apparence toujours impeccable et sa courtoisie froide jouent parfois en sa défaveur, et on le juge coincé, inaccessible. Ce n'est pas assez, cependant, pour détourner totalement l'attention des plus acharnées.

Mais c'est finalement une femme discrète, presque timide, qui capte son regard. Ela fait partie de ces petites mains qui œuvrent en silence dans les couloirs de l'hôpital, travaillant du matin au soir sans faire de vagues. Ce n'est pas tellement son apparence physique qui l'intéresse - bien qu'il doive l'admettre, son visage est harmonieux - mais plutôt sa pudeur, sa façon humble de baisser le regard lorsqu'elle le salue. Ela n'est pas fière, Ela ne réclame rien. Elle prend ce qu'on lui donne avec reconnaissance, et en cela, Luther se reconnaît.

Alors il ose. Il ose lui proposer un pari fou, un arrangement qui, il l'espère, leur conviendra à tous les deux, et les mettra, pour un temps, à l'abri des regards inquisiteurs. Car il sait que, pour elle aussi, le temps est compté. Nouvellement arrivée à Walla Walla, on attend d'elle qu'elle s'intègre. Et cela passe par trouver un époux, fonder une famille. Or, Luther devine, à la retenue dont elle fait preuve, au raidissement de son corps, qu'elle n'est pas prête à être touchée. Cela tombe bien, car lui n'entend pas être un amant...

Les voilà désormais fiancés, pour le meilleur, comme pour le pire.


Survie

L'existence de Luther au sein de New Eden a des allures de normalité presque effrayante. Depuis plusieurs années maintenant, il a été en mesure de reprendre la routine qu'il avait adoptée avant l'épidémie. Chaque journée commence à cinq heures, suffisamment tôt pour lui permettre de partir nager à quelques blocks de son appartement. Après une heure d'exercice, le médecin avale un petit déjeuner rapide avant de partir travailler.

Chaque journée à la clinique commence par l'habituel tour des patientes hospitalisées dans l'attente de leur accouchement, suivi en cela par ses internes. Les consultations s'enchaînent ensuite, en un ballet ininterrompu de ventres plus ou moins gonflés, de mères plus ou moins inquiètes, de pères plus ou moins absents. Lorsque, parfois, on frappe à sa porte pour annoncer un accouchement imminent, Luther est alors contraint d'écourter le rendez-vous en cours et de se précipiter en salle de naissance.

Après toutes ces années, le miracle de la vie ne l'émerveille plus autant qu'avant, mais cela ne l'empêche pas de continuer à exercer son métier avec passion. Aider les couples en mal d'enfants - qu'ils en veuillent vraiment, ou non - lui donne parfois le sentiment de jouer à Dieu, mais il se repent chaque fois de cette pensée. Il n'y a qu'un seul Dieu, et une chose est sûre, c'est qu'il n'est pas ici.

Après sa journée de travail, Luther rentre chez lui. Il est souvent tard, car il ne compte pas ses heures et fait toujours, seul, un dernier tour de ses patientes. Il rassure certaines, plaisante avec d'autres, avant de quitter l'hôpital. Parfois, il passe la soirée en compagnie d'Elijah et de Mia, ou se rend, de temps en temps, au théâtre. Une existence somme toute assez similaire à celle qu'il menait auparavant. Quelques invitations mondaines, honorées avec réticence, l'amènent quelques fois à se rendre dans les cercles les plus fermés de la ville. Quand, enfin, Luther peut s'effondrer sur son lit, il s'endort en sachant déjà de quoi demain sera fait.

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• Code du règlement allez, cette fois j'ose : ZELDA EN STRING A PAILLETTES  :smile6:

fiche (c) langouste.
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Re: l'enfer noircit ma chair (luther)

Ven 5 Nov 2021 - 18:47

Bienvenue bro’ 🥰
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Re: l'enfer noircit ma chair (luther)

Ven 5 Nov 2021 - 18:57

OUIIIIIIIIIII drama
Enfin drama

l'enfer noircit ma chair (luther) 1342238320


My mother's child is a savage, she looks for her omens in the colors of stones, in the faces of cats, in the falling of feathers, in the dancing of fire, in the curve of old bones
❝I am my mother's savage daughter❞

Nata Atoka
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Re: l'enfer noircit ma chair (luther)

Ven 5 Nov 2021 - 19:08

hellmo
Mr. Pipe à Jus !

Re-bienvenue !


- - you're such a bitch sometimes. Well.. i mean yeah. more like all the time.
Daisy L. Trevi-Donaldson
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Re: l'enfer noircit ma chair (luther)

Ven 5 Nov 2021 - 19:14

Je me disais bien que je voyais double. Tout s'explique. re bienvenue a toi.
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Re: l'enfer noircit ma chair (luther)

Ven 5 Nov 2021 - 19:20

LUTHERRRRRRRRRR :smile6: :smile6: :smile6:

Rebienvenue très cher ! Faudra qu'on parle lien toi et moi :smile2: :smile2:

Amuse toi bien ! :smile24: :smile24:




(c) semper eadem


Evan Jensen
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Re: l'enfer noircit ma chair (luther)

Ven 5 Nov 2021 - 19:24

Merci à touuuuus drama :Jaden:
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Re: l'enfer noircit ma chair (luther)

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