La porte de sa caravane de fortune s'ouvre sur la silhouette d'un garçon qu'elle connait. Johanna ouvre un oeil d'abord avec méfiance avant de comprendre de qui il s'agit. Un bref soupir lui échappe, elle pince les lèvres et se redresse sur son lit, en sentant son ventre se creuser de douleur. Des jours à boire de l'eau à l'odeur discutable, ça n'est pas pour arranger les choses. Avec les morsures de rats, évidemment que le portrait fait peine à voir. Qu'importe, au moins est-elle maintenant dans un environnement propre, avec des vêtements chauds. Il faut le dire : Alex y a veillé comme jamais.

Je ne crois pas, mais j'ai comme un doute quand même... Elle esquisse un bref soupir, attrapant le linge frais sur son front qui sert à lui rafraichir le crâne. Sa fièvre a baissé - elle peut le dire parce qu'elle le sent. Elle a moins le vertige, moins la nausée aussi. Merci, souffle Johanna à Milow, avant de lui offrir un bref rire un peu moqueur alors qu'il lâche une injure : En fait, tu es maladroit quand il faut transporter quelque chose de liquide, relève-t-elle sur sa remarque, plus amusée qu'autre chose. Deux fois qu'il se voit, deux fois qu'il fait n'importe quoi. Et pourtant à le voir, on ne l'imagine pas malhabile.

Juste fatiguée, mais ça va déjà un peu mieux... C'est ce qu'elle peut admettre sans peine en tout cas, alors qu'elle replie ses jambes sous ses couvertures. Un coup d'oeil au sol, au moins Isha a replié son lit pour le mettre sous le sien. Où est-il maintenant ? elle ne sait pas vraiment. Il a du le lui dire, mais Johanna était endormie à ce moment là. Petit conseil d'amis : te réfugier dans les égouts est une bonne idée pour une journée, pas plus... Ensuite, ça implique cohabiter avec des rats ou les manger, j'ai passé de meilleurs moments dans ma vie... souffle-t-elle avec un air complice, avant de s'éclaircir la gorge : Mary-Abigail n'a pas essayé de... De te contacter ?

Merci, fait-elle en récupérant le bol de soupe. Chaud en effet, avec précaution, elle le pose sur ses cuisses, et relève le nez vers Milow. Un sourire plus tard, elle hoche la tête : un jour, ils seront tous les deux suffisamment en forme pour se parler, elle le souhaite en tout cas. Quand elle partira pour suivre Isha par exemple, Johanna est persuadée qu'elle ira mieux. C'est déjà le cas. Mais lui est curieux de comprendre ses quelques jours de survie, intense, compliquée, elle ne peut pas s'en cacher. Très vite, le jeune homme s'excuse, ne veut pas insister ou paraitre déplacer.

Johanna scrute le bol un long moment avant de reprendre la parole : Je squattais la planque d'une copine d'Abigail qui a disparu, elle avait quelques trucs pour survivre, mais ça n'était pas génial non plus... Et au-dessus, y'a une ouverture, alors forcément : on vit selon le levé et le coucher du soleil, explique-t-elle sobrement en retenant une toux dans le fond de sa gorge, ce qui enraille sa voix. Il y avait des rôdeurs, dans les conduits. Parfois je les entendais, mais ma porte était barricadée. Le pire, c'est qu'il y avait surtout des rats, ajoute-t-elle alors qu'un frisson d'horreur lui remonte l'échine. Dire qu'elle aurait pu s'habituer à ça.

La blonde n'est pas sûre de ne pas avoir chopper la gale avec tout ça. Voilà qui ne serait pas si déconnant quand on y pense, après tout ce temps passé à souffrir dans cet enfer. Quant à Mary-Abigail, alors qu'elle ouvre doucement un rideau proche de son lit, Johanna se rembrunit : Hope a dit qu'elle l'avait laissé se cacher, qu'en partant, Abigail était vivante, explique-t-elle. Elle se raccroche à ça. Au souvenir d'une compagne d'infortune. Je crois qu'elle a réussi à s'enfuir oui, mais n'a pas eu l'occasion de... De regagner un endroit calme, où on aurait pu se retrouver, souffle-t-elle.

Elle se sent fébrile, sans oser toucher à sa soupe. Et si sa sœur est dans un endroit pire que les égouts ? Si New Eden a réussi à la capturer finalement ? C'est bête, on était tellement bien installées qu'on n'a pas réfléchi au fait que notre abri pourrait tomber un jour ou l'autre... En fait... Un soupir lui échappe, sa gorge se serre. Je crois qu'on était persuadées qu'on pourrait y rester aussi longtemps que possible et... Et qu'ensuite, on partirait quand ça nous chanterait, pas que des gens viendraient essayer de nous tuer, murmure-t-elle. J'espère que les autres sont en vie...