Leur décision avait été prise quelques jours auparavant. Isaac et Raina avaient déjà pris le temps de discuter de leur départ avec les différents membres du Conseil. Cela faisait un moment qu’ils aspiraient à autre chose. Et si quitter le Conseil, quelques mois plus tôt, avait été une première étape pour le vieux Greene ; la dernière transhumance avait fini par le pousser à faire ce choix. Cette fois, c’était lui qui faisait le choix de quitter les siens, pour quelques temps. En compagnie de Raina, ils allaient suivre les troupeaux de chevaux sauvages, veiller sur eux et s’installer à l’écart de Nisqually, pour un moment.

Accrochant les dernières affaires à la selle de Picasso, le cavalier détacha finalement le jeune cheval. Rênes en main, il jeta un œil vers Raina avant de la rejoindre. Puis, ils prirent la direction de l’entrée du campement, où les attendaient plusieurs de leurs vieux camarades. C’est avec un léger pincement au cœur que l’ancien éleveur salua les siens « Nous sommes prêts à partir. Quoi qu’il arrive nous resterons en contact dans les mois à venir… » Ce n’était qu’un « au revoir », ils se retrouveraient d’ici quelques temps… Pour l’heure, le couple devait partir, une longue route les attendait.

Elle attendait comme les autres, le départ d'Isaac et Raina était annoncé depuis un moment maintenant, et Andrea devait également composé avec. C'était un énième coup de massue pour elle, mais l'afro-américaine tâcha de ne rien en montrer. Aussi effrayant et désolant que cela pouvait être, il était nécessaire de maintenir le cap de toute façon. Soyez prudents tous les deux, demanda-t-elle à son vieil ami, à qui elle devait tellement. Pour sa patience, son calme, sa douceur.

Mais également pour ses conseils d'une sagesse infinie qui l'avait tant aidé durant tout ce temps. Si vous voyez ou notez quelque chose, vous n'hésitez pas à nous contacter, ajouta-t-elle alors fermement, venant prendre l'homme dans ses bras. Et offrir à la suite une main tendre sur l'épaule de Raina, de qui elle était moins proche, mais qu'elle avait accueilli chez elle sans sourciller.

Leur paquetage était prêt, les chevaux aussi. Tout cela sonnait comme un nouveau départ et ça l’était. Cela avait été une décision bien compliquée à prendre et pourtant, ils l’avaient pris en âme et conscience. Quelque part, cette nouvelle aventure lui mettait du baume au cœur mais de l’autre… Malgré ses réticences, elle avait construit toute une vie, toute une famille parmi eux. C’était effectivement une deuxième famille qu’elle quittait alors. « Rafaël connaît bien les coordonnées du Ranch, il saura vous diriger au besoin… » Dit-elle, alors que les au-revoir commençaient - avec beaucoup d’émotion pour Isaac et ses proches, évidemment.

La main d’Andrea sur son épaule lui fait esquisser un sourire et un regard franc. « Tout ira bien pour nous, nous saurons veiller l’un sur l’autre. » Elle lui en faisait la promesse. Elle avise ensuite Duncan en lui présentant sa main, fermant fermement ses doigts sur l’avant-bras du viking avec qui elle avait maintes fois eu plaisir à combattre à ses côtés. « Qui sait, on finira bien par trouver une monture pour ton gabarit d’ici quelques mois » Dit-elle, avec un sourire. Le colosse n’était pas facile à associer, mais ils auraient le loisir à présent de s’occuper - et uniquement - de cet avant-poste dans ces plaines. « Merci… A vous tous. »

Isaac ne pouvait s'empêcher de ressentir un sentiment étrange. Nisqually avait été son foyer durant plusieurs années et partir avait quelque chose d'effrayant. Repartir sur les routes, après tout ce temps et surtout à son âge, c'était sûrement un peu fou. Mais la présence de Raina à ses côtés lui confirmait qu'il faisait le bon choix. Le couple avait besoin de se retrouver et certainement que Raina aspirait à plus de libertés après tout ce temps passé aux côtés du plus vieux. C'était leur décision, à tous les deux.

Mais les « aux-revoir » n'étaient jamais simples. Les accolades chaleureuses de ses amis lui serrèrent le coeur et ses yeux brillèrent un peu alors que les autres - sa famille - lui donnaient les derniers conseils avant son départ. « Compte sur nous. » Répondit-il à Andrea, lui promettant de rester en contact aussi souvent que possible. « Vous nous manquerez aussi, beaucoup. » Un sourire franc étira ses lèvres, accentuant par la même occasion ses traits marqués par l'âge. Le cavalier flatta l'encolure de Picasso avant de donner ses dernières recommandations « Je passe la main à Joachim, il se chargera des chevaux. Je lui ai écrit une lettre, vous pourrez lui la donner ? » Il la tendit à la métisse avant de reprendre « Je vous le confie. » Partir sans pouvoir voir son fils était compliqué mais père et fils se reverraient, il en avait la certitude.

Mettant enfin pied à l'étrier, Isaac se mit en selle. « Vous nous accompagnez jusqu'à la porte ? » Demanda-t-il alors, souriant. Quelques minutes plus tard, le duo de cavalier se retournait une dernière fois vers le Fort, saluant d'un signe de la main ceux et celles qui avaient tenu à leur dire au-revoir. Un dernier regard, un dernier sourire, avant leurs nouvelles aventures...