L'été approche, c'est simple à deviner tant les températures dernièrement ont tendance à me rendre fou. J'ai beau ne jamais avoir apprécié l'hiver, l'été et ces températures maximales qui font de moi une éponge à sueur... c'est un peu comme l'enfer sur Terre. Une saison que j'ai jamais pu pifrer, que j'avais la force d'encaisser grâce à la piscine qu'on avait dans le jardin lorsque j'étais gosse. Une époque bien lointaine, une époque à laquelle je pense pourtant constamment... mais je pense que c'est commun à tout le monde. La nostalgie, le manque des êtres chers, c'genre de trucs.

Une averse. Ça arrive souvent après les périodes de grosses chaleurs, qu'elles soient longues ou bien très courtes. C'est censé soulager les gens, certainement une idée du bon Dieu qui veut se racheter après nous avoir tous fait souffert par cette chaleur insoutenable. C'est comme ça que s'est terminé cette longue semaine, et ce pour mon plus grand plaisir. De la pluie, une vague de pluie qui s'abat sur tout le camp, et bien au-delà de nos frontières. À l'extérieur, j'en observe se couvrir la tête avec ce qu'ils ont sur la main. Les jeunes qui lisaient dans un coin d'herbe du dispensaire sous l'ombre d'un arbre se servent de leurs bouquins comme de parapluie pour fuir en riant avec amusement, ceux qui transportent de la marchandise venant tout droit des plantations se mettent à courir pour éviter de voir leurs récoltes périr... Moi, je marche avec un sourire un peu niais sur le bout des lèvres. Parce que ça me fait rire de les voir tous s'agiter comme si de l'acide s'était mise à tomber, parce que cette averse d'eau gelée me fait un bien fou... mais aussi parce que j'ai terminé ma journée plutôt prolifique auprès de Valentine que j'essaie d'aider quand je le peux, que j'ai eu le temps d'aller m'entraîner un peu dans ce semblant de salle de sport installé pas trop loin de chez Yu... et que je suis prêt à pousser les portes du Summer's pour boire quelques verres.

Pas trop fan d'alcool, mais quand même consommateur, je pénètre dans le bar dans lequel ma colocataire sert de serveuse. Mes doigts glissent sur une faible parcelle du bar dont je m'approche pour commander un verre. Du whisky, alcool dont je déteste autant le goût que je l'affectionne sans trop pouvoir l'expliquer. Les secondes défilent, j'échange brièvement avec celle qui sert ce soir, avant de parcourir une partie de la pièce avec mon verre. Balayant chacune des tables, c'est finalement face à Cole, le weirdo du camp que je décide de m'installer.

On a pas vraiment de relations. J'le trouve ni gentil, ni méchant. J'le trouve juste sympathique. C'est un complotiste, de ces mecs qui croient que c'beau bordel qui a ravagé nos vies s'est produit de la main des Illuminatis. Ça m'fait plus rire que pleurer. Je m'en amuse parfois, me fous ouvertement de sa gueule sans qu'il ait l'air de vraiment le comprendre. Il a pas l'air agressif ou offensif. J'le préfère aux grandes gueules qui ont les idées claires mais qui passent leur temps à monter sur leurs grands chevaux, pensant qu'les années ont fait d'eux des hommes politiques exemptés de règlement.

"Tu tournes au jus d'fruits, toi ?" J'ai jamais vu de mec se rendre au bar pour boire du jus de fruits. C'est marrant. Je pose mon verre sur la table, en tapote le bord avec deux de mes doigts. Une gorgée, deux gorgées. C'est mon premier verre, mais ce sera pas le dernier. Quand je suis au bar, c'est pour y rester un peu. Faire connaissance, blablater. Faire tout c'que je n'fais pas beaucoup ces derniers temps.