Avant l'apocalypse, c'était comment? C'était plutôt… normal? Je crois. C'était quoi normal au juste? Merde, j'sais pas, j'avais 5 ans! Quoi? Ho, ça va mon langage, tout le monde dit des gros mots, merde c'pas vraiment un gros mot!

Une petite maison à la campagne, non loin de Lewiston dans l'Idaho, avec des animaux, une ferme peut-être? J'étais déjà dégourdie pour mon âge, je ne dirais pas surdouée non plus, à moins que si? Bref, je commençais à apprendre quelques trucs pour ma future entrée à l'école et aussi pour aider à la maison.
Je passais mon temps à faire des dessins, inventer des histoires à mes animaux en peluche, je savais écrire les lettres de mon prénom et compter. Je m'intéressais, essayer de comprendre un peu tout. Je passais beaucoup de temps dehors à aider mes parents à entretenir le terrain et s'occuper des animaux. J'suis quasi certaine qu'il y avait des poules et des vaches.
Par contre les lacets! Non mais sérieux! Invention du diable ça! C'est quoi cette histoire du lapin qui tourne autour de l'arbre avant de rentrer dans son terrier? Je vois pas le rapport avec mes chaussures! Par contre faire un nœud coulissant, j'ai vite compris… mmm, ça veut dire quelque chose vous croyez?
Famille riche ou pauvre? Je sais pas trop, mais j'ai pas souvenir que je manquais de quoi que ce soit. Mais de quoi on peut manquer à 5 ans? Hein? J'avais à manger, des vêtements, des jouets et de l'amour, que demander de plus?

Bon, l'amour, ce n'était pas ça tous les jours, mon père avait eu une autre femme avant ma mère et un autre enfant aussi. Une grande sœur qui ne m'a jamais vraiment considéré comme une petite sœur. Je crois qu'elle était fâchée contre moi, que j'officialise l'amour entre son père et la femme qui avait pris la place de sa mère dans sa vie. Je crois que mon père aurait voulus qu'on soit plus solidaire. Pas faute d'avoir essayé, de lui avoir proposé mes jouets pour qu'on s'amuse ensemble. Mais je crois qu'elle était déjà trop vieille pour jouer avec mes peluches. C'est dommage, j'aimais bien l'idée d'avoir une grande sœur pour m'apprendre des trucs de grands.

Si j'avais été assez grande pour comprendre les cases dans lesquelles les adultes aiment bien s'enfermer, j'aurais pu dire que je venais d'une famille de redneck survivaliste. Ce genre de cliché qu'on ce fait des Américains de la campagne. Est-ce que c'est mal? Je dirais que non. Savoir cultiver sa propre nourriture et se servir d'arme pour sa sécurité et la chasse, c'est plutôt une bonne chose, non?
Il n'y a pas grand-chose à dire, pour 5 petites années de vie. Ma vie, ce n'était pas avant, mais après ce qui s'est passé, ce fameux jour où tout a basculé.

• Octobre 2015 - Lewiston, Idaho:
"Pu**in de b***el à c*l de b***el de m**de." Ho… je n'avais jamais entendu autant de gros mots dans une seule phrase de ma vie, c'est que ça doit être grave. Mes parents s'agitent, ils ont l'air terrifiés. Ça me fait peur aussi, mais je ne comprend pas ce qui se passe, je ne les avais jamais vus comme ça. Les larmes me montent aux yeux, pourquoi toute cette agitation? Pourquoi cette peur? Ma mère tente de me rassurer, elle me dit que tout va bien se passer, qu'on va jouer à un jeu. On doit faire un genre de cache-cache géant. Je ne comprends pas tout, encore une fois, mais son regard plein d'amour et ses bras autour de moi me rassure. Mon père me dit que je dois être courageuse, qu'il m'aime fort. Il embrasse ma mère avant de nous laisser. Ma mère me dit de rassembler toutes mes affaires, on va descendre au sous-sol pour un moment. Elle ne veut pas me faire plus peur que ça, elle tente de choisir ses mots, mais c'est compliqué. Je comprends que nos terres risque d'être en danger et que pour se protéger il va falloir ce caché en bas assez longtemps.
Une famille de redneck survivaliste, en voilà l'intérêt. L'intérêt, c'est que c'est le genre de famille américaine qui construit un bunker sous sa maison pour survivre en cas de catastrophe. Sérieusement, avec mes yeux d'enfant j'étais sûr qu'il y avait de quoi vivre des années là-dessous.

• Janvier 2016 - Lewiston:
Le temps est si long dans un bunker. On a encore de quoi manger et boire, mais l'ennuie est bien là. Ne voir que les mêmes visages tout le temps, ne plus rien avoir de nouveau à se raconter, jouer toujours aux mêmes jeux pour s'occuper. C'est siiii long!
Mon père est déjà sorti néanmoins, il a une autre fille là dehors et il veut la retrouver. Elle habite plus loin, mais tant pis, il est prêt à prendre le risque. Je reste alors seule avec ma mère pendant de long jour, je la vois qui s'inquiète de plus en plus dès qu'un jour passe. J'essaie de la rassurer, mais je ne suis qu'une enfant et je n'imagine pas l'enfer qu'on peut vivre là dehors.
Mon père revient au bout de quasiment une semaine dehors. Il veut me préserver, fait conne figure devant moi, mais le soir je l'entends sangloter en parlant à ma mère. Il a besoin de parler, besoin de dire ce qu'il a vu dehors. Ce que j'entends me glace le sang dans les veines, ça semble horrible, tiré d'un film d'horreur interdit aux enfants de mon âge.

• Mi-Mars 2016 - Lewiston:
Une énième sortie de mon père. J'ai du mal à percevoir le temps, mais en voyant ma mère je me dis qu'il y a peu de chance de le voir revenir un jour. Elle commence à péter un plomb, à tourner en rond, chaque jour qui passe je vois son regard changer.
Et puis viens ce jour où un bruit ce fait entendre. Quelqu'un reviens? C'est lui? Non, c'est elle, cette fille qu'il voulait retrouver, elle est arrivée jusqu'ici, mais seule. Pourquoi? Ma mère lui en veut, je crois. Les deux sortes pendant beaucoup trop longtemps. En revenant, ce n'est plus de la colère que je vois dans les yeux de ma mère, mais de la peur, de la tristesse. Elle est blessée et dès ses premières paroles je crois que je comprends que c'est grave, trop grave.
J'ai enfin le droit à des explications sur ce qui se passe dehors. Ma mère m'avoue qu'elle va devoir s'absenter, mais que je n'ai pas à m'en faire, ma grande sœur est là maintenant, elle sera là pour s'occuper de moi. Mais quoi? Je ne veux pas, je veux ma maman et mon papa. Je m'en fous de cette demi-sœur qui m'a toujours snobé. Je n'ai pas le choix, je vais devoir faire avec.
Après un au revoir déchirant, les deux s'en vont un temps, avant que seule cette sœur ne revienne. Je n'y crois pas, mes parents n'ont pas pu me laisser seule, c'est impossible. À mon tour de la détester cette sœur. Son retour à signer le départ de mes parents, je lui en veux tellement.
Ce n'est qu'un peu plus tard, qu'elle m'expliquera sans trop de filtre que ma mère avait été blessée par une de ses créatures et quand on est blessé, on devient un monstre à son tour. Je n'y ai pas cru, pour moi, c'était impossible que ma mère puisse devenir un monstre capable de me faire du mal. Et puis, pour moi, tout n'était qu'une histoire.

• Fin Mars 2016 - Lewiston:
6 mois que je vivais loin de la réalité de l'extérieur. Mais cette réalité m'a rattrapé. Elle m'a pris mes parents silencieusement et puis j'ai dû y faire face. Si mes parents ont toujours voulu me préserver du mal au-dessus de nos têtes, ma sœur récemment retrouver n'était pas du même avis. Pour survivre à l'apocalypse, il ne faut pas s'en cacher, il faut l'affronter. Alors, elle m'a montré et j'ai vu ces créatures.
6 mois que le monde a changé et je vois enfin à quoi ressemble un monde plongé en pleine apocalypse. Ma réaction? J'vais juste envie de me mettre en boule dans un coin et pleurer. Pleurer pour que tout redeviennent comme avant, pour retrouver mes parents et ma petite vie insouciante. Mais non, ma sœur était bien décidée à m'ouvrir les yeux sur la survie. Pendant mes six mois en sécurité, elle, elle affrontait ce monde. Je suis une enfant, mais je dois être une grande maintenant, pas question qu'elle se promène un boulet!
Quoi? Oui la douceur n'a jamais été son truc…

• 2017 - Entre Colton, Washington et Moscow, Idaho:  
Je crois que je commence à m'adapter à cette nouvelle vie, il faut dire que ma grande sœur aussi a su s'y faire et elle ne prend pas de pincettes pour me faire évoluer à la dure. Elle ne me préserve pas, me montre la réalité et les difficultés en face pour me montrer comment m'en sortir. Ce que je dois savoir observer pour survivre.
Si se méfier des morts est une évidence, ma sœur m'a appris à me méfier aussi des vivants. S'en méfier oui, mais ne pas tous les éviter. C'est difficile de ne vivre qu'à deux. Rien ne vaut la force d'un groupe, alors on a rejoint des petits clans. Des groupes tentant de créer des forteresses ici et là. Des forteresses qui tomberont souvent à cause des morts et souvent des autres vivants. Si la solidarité de certains s'est vu renforcer, c'est bien l'égoïsme qui prime dans ce nouveau monde.
Je n'ai aucune honte à dire qu'on a souvent vécue tels des parasites. Repérer un hôte potentiel, l'infecter et vivre à son crochet jusqu'à ce qu'il périsse et hop au suivant.
Le plus important, c'était nous, survivre toutes les deux. Les autres, on ne les a jamais considérés comme une nouvelle famille où je sais pas trop quoi du genre. C'était juste des aides en plus, pour nous faire avancer, pour trouver un endroit plus serein.
Je n'ai pas eu cette réflexion tout de suite. J'étais triste moi, de perdre de nouveaux amis. Mais ma sœur à tout fait pour que je comprenne qu'être triste ne servais à rien. Dans ce monde, la perte des autres est un événement comme un autre, il ne faut pas se laisser abattre et continuer, toujours. Ce ne sont pas des amis, rien que des… serviteurs? Ouais, disons ça. J'ai pas d'autre terme pour expliquer la chose.

• 2018 - État de Washington, Comté de Lincoln:
Je ne fais presque plus de cauchemars, enfin. C'est comme si je commençais à me faire à la vision des rôdeurs. Enfin certain… pour les plus décharnés, c'est difficile de les regarder je trouve. Ça fait une bonne heure, je crois que je suis assise devant cette racine d'arbre qui a fendu le sol. Une créature, la moitié du corps moins à comme fusionnée avec cet arbre. Comme si, incapable de bouger, elle était restée là et la nature a continué à grandir en surpassant cet obstacle. La créature est si lente, ses mouvements sont à peine perceptibles, plus aucun son ne sort de ce qu'il reste de sa mâchoire quand elle l'ouvre et la claque avec une lenteur extrême. Y'a t-il encore ne serait-ce qu'une trace d'humanité là-dedans? Serait-ce mon humanité qui me pousse à penser qu'il est triste d'en être arrivé là?
Ma sœur m'engueule, il faut qu'on parte d'ici. Je me redresse, le cœur serré. Je lui demande s'il ne faudrait pas l'achever? Faire quelque chose pour lui. Il a l'air triste… dit grande sœur, tu crois qu'il est triste?
Je me prends une légère tape derrière la tête. Je ne dois pas être si sentimental, surtout pas pour ces monstres. Les lames ça s'use, on ne va pas l'abimer davantage pour une créature qui ne risque de faire de mal à personne. Je baisse les yeux, essuie une larme. Je suis désolé… Désolé, c'est bien le mot qui sort de ma bouche alors que je regarde cette créature coincée là depuis trop d'année et pour encore une vie trop longue. Elle n'a plus rien d'humain, ce n'est plus qu'un squelette, mais... pfiou! C'dure!
Je sais, c'est des monstres, mais je crois que ce jour-là je me suis mise à sa place une seconde. Si j'avais eu moins de chance, ça aurait pu être moi, coincé là. Et si jamais il ne reste même qu'une infime par de conscience à ces créatures… je me sens mal rien que d'y penser. Pour la première fois, je me mets vraiment à la place d'un de ses monstres et je me demande, est-ce vraiment eux les monstres?


• 2019 - État de Washington, Comté de Chelan:
Pas besoin de la télé ou d'internet pour entendre les échos des grosses communautés qui se sont mises en place. Beaucoup de gens, c'est synonyme de protection, mais aussi de danger. On préfère se concentrer sur les petits groupes, le genre qu'on peut fuir plus facilement en cas de problème. Le genre qu'on peut laisser derrière nous sans trembler en cas de conflit avec d'autres survivants.

• Automne 2021 - État de Washington, ouest du Comté de Snohomish.
Comment ça ce passe la vie pendant l'apocalypse? Jamais comme prévu. On était bien pourtant, dans un petit groupe, installé dans un endroit plutôt calme. Et puis il y a eu cette sortie ravitaillement. J'y serais bien aller aussi, mais je crois que j'ai jamais aussi malade de ma vie qu'à ce moment-là. J'ai toujours évité les maladies, mais là je ne sais pas si c'était une bonne grosse grippe ou je sais, mais… j'étais vraiment pas en forme. Pas de sortie pour moi. C'est cette fois-là pourtant ou tout est partie en couille. Moi qui avais peur que ce soit elle, qui se fasse attaquer, qui ne rentre pas comme mon père des années avant… non, c'est le camp qui s'est fait attaquer par des pillards. Il a fallu fuir, sans elle. Le coeur gros, j'ai suivi le mouvement, assez forte pour suivre le mouvement, mais trop faible pour résister une seconde. On les retrouvera, ils nous retrouveront. L'homme qui me porte pour fuir me le promet, je reverrai bientôt ma soeur.
La fuite n'a pas été un franc succès. Les pillards nous ont rattrapés, je crois qu'ils les ont tués ou… non, j'veux pas trop y penser, mais moi, j'ai réussi à rassembler des forces de nulle part pour me cacher. Je n'ai aucune idée de combien de temps je suis restée prostrée dans ma cachette, les yeux fermés, les mains sur les oreilles pour ne pas entendre la violence qui s'abattait non loin de moi.
Quand tout est redevenue calme, j'ai encore attendu, enfin pour tout dire, je crois que j'ai perdu connaissance un petit moment. La peur, la maladie, la fatigue, mon corps a décidé de faire un petit court-circuit pour redescendre en pression.
Quand j'ai repris mes esprits, il n'y avait plus personne, simplement les vestiges de la violence passée. Ma sœur, est-elle revenue? Ou pas encore? Impossible de rester sur place, des zombies témoins auditifs de l'altercation étant un peu trop présent sur la zone, j'ai préféré partir, me cacher plus loin pour attendre un possible retour de l'équipe partie en expédition. J'ai attendu… j'ai attendu… mais rien. N'arrivant pas à imaginer le pire, je me suis simplement dit une chose… elle m'a abandonné ce jour-là. Après tout, est-ce vraiment étonnant. Après des années à me traiter de microbe, à me balancer tout un tas de réflexion et à me dire que mes sentiments nous ralentissaient, elle a peut-être profité de tout ça pour partir de son côté, avec des gens plus apte à survivre. Je sais pas… je crois que le fait de me sentir abandonné pour cette raison était plus simple à digérer que d'imaginer autre chose. C'est étrange? Bête? Peut-être… mais on ne contrôle pas toujours ce qu'on ressent.
Paradoxalement, je vais mieux, je sais pas ce que j'avais attrapé, mais c'est passé. Tant mieux, car me voilà seule…

• Hiver 2021 - État de Washington, ouest du Comté de Snohomish.
Je suis enfermé dans une boite. Sérieusement? Oui… je voulais juste voler un peu de nourriture, comme je l'ai souvent fait. Mais cette fois, je me suis faite chopper. Dommage. Je les entends parler, la moitié pense que je ne suis pas une menace, qu'un coup de pied aux fesses devraient suffire pour me faire déguerpir d'ici. Les autres pensent que de nos jours, il n'y a plus d'innocence, je les ai volés et je dois en payer le prix! Mais, les autres rétorque que c'est horrible, que je ne suis qu'une gamine. Oui enfin une gamine qui leur à voler plusieurs jours de nourriture, ce qui risque de les conduire à leur perte.
Et moi pendant ce temps, j'essaie de pousser les parois de cette boite. Enfin… je crois que c'est un genre de petit frigo, entouré d'une chaine avec un cadenas. J'arrive à ouvrir un peu la porte pour voir dehors, pour reprendre un peu d'air frais, mais j'arrive à rien, je suis bloquée! Si seulement elle était là, elle aurait pu me sortir de cette merde.
Mais alors qu'ils débattent toujours sur mon sort, je me mets à crier, qu'ils me sortent de là. Je fais du bruit, trop de bruit, j'vais attirer des zombies, des gens, je m'en fous, pourvue que ça me sorte de là. D'accord, si c'est des zombies, j'suis dans la merde c'est vrai. Mais sur le coup, j'ai pas trop réfléchi j'avoue.
Mais ma technique paie, ils en ont marre de m'entendre brailler. Ils veulent que je la ferme, alors ils ouvrent le cadenas, enlèvent la chaine pour ouvrir et me faire taire. Et moi, j'en profite. Comment? Des années d'expérience apocalyptique à passer entre les pattes de n'importe qui. Dès que je vois cette ouverture s'agrandir, je me jette en dehors de ma cage, je tape tout ce qui m'approche, je repousse, je mords et je cours!
Ces gars-là ne m'ont fait aucun mal, à part celui de m'enfermer, mais je n'avais pas envie de rester là pour savoir si c'est ceux qui voulaient me tuer qui allait remporter le débat ou les autres, qui avait pitié de la pauvre enfant voleuse de nourriture. J'ai réussi à m'enfuir, c'est tout ce qui compte. Je crois que quelques-uns ont essayé de me courir après. Mais je me suis faufilé sous des planches, j'ai grimpé à un arbre pour sauter par-dessus une balustrade. En y repensant, je suis fière de moi, j'ai peut-être aucune compétence en attaque, mais la fuite ça me connait, je suis un véritable petit rat. Qui se faufile partout autant pour venir grignoter la nourriture des autres que pour fuir quand on le repère.

• Récemment - Nord de Seattle:
Je n'ai jamais été seule si longtemps. Je me sens si… je ne sais pas quoi faire. J'ai des compétences pourtant, mais… c'est comme si je n'osais rien faire. Il faut que je la retrouve, il faut que je trouve de l'aide, mais tous ces gens me font peur. J'ai l'impression que mon jugement est faussé, je vois le mal partout. Merdouille, j'ai 12 ans et je suis en pleine dépression. Dépréssion? Sérieux, je sais même pas ce que ça veut dire.
J'arrive à survivre. Je suis totalement seule depuis des mois, j'ai perdu le compte pour tout vous dire, mais j'y arrive, tant bien que mal. J'ai peur d'interagir seule avec les vivants que je vois au loin, je préfère me cacher de peur qu'ils me fassent du mal. Je n'ai pourtant pas peur, de me faufiler tard le soir quand je vois un camp de voyageurs se former non loin de ma planque. Je m'en approche, juste pour leur subtiliser discrètement certaines choses ou pour voir ce qu'ils ont laissé sur place une fois qu'ils ne sont plus là. Je pourrais tenter ma chance, utiliser ce petit air de gamine angélique pour qu'ils m'aident. Mais… je crois que non. C'est le risque de partir d'ici et si jamais elle revenait par ici pour me retrouver hein?
Et puis voilà, ma planque a été découverte. Des voyageurs y on fait escales. J'ai tenté de me cacher, de fuir, mais… la peur m'a fait partir bien trop vite, oubliant le plus important, quelques maigres affaires que je ne pouvais pas me résoudre à laisser derrière moi. J'aurais pu les récupérer après leur départ mais… non, trop risqué.
Ils m'ont vu, ils m'ont pris pour un danger. Moi? Un danger? La paranoïa envahie beaucoup trop de monde je crois. Heureusement, le plus jeune d'entre eux a compris que je n'étais qu'une gamine apeurée.
Un signe du destin peut-être? Que ces gens se soient retrouvés ici. Je crois que je n'aurais pas pu vivre seule bien plus longtemps. Trop peu de nourriture, trop peu de repos. J'ai pris le temps de les observer, de les jaugés, comme ma sœur me l'avait appris, comme j'aurais pu faire pendant tous ces mois si je n'avais pas eu si peur inutilement. L'endroit commence à devenir trop dangereux pour que je reste ici seule. Je crois que je peux me servir d'eux pour survivre un peu plus longtemps.
Alors j'accepte, rester avec eux, les suivre jusque dans leur camp. Une véritable aubaine, une véritable opportunité que je ne peux pas refuser.
Me voilà donc chez les Remnants. J'ai encore beaucoup à apprendre sur la façon de fonctionner de ce groupe, mais je crois que je peux me faire adopter par la majorité. En même temps, qui peut résister à cette petite bouille? *tousse*

Mon intégration au camp des Remnants ne remonte pas à bien longtemps et pourtant, je crois que j'y suis déjà pas trop mal accepté.
Pourtant, la gentillesse et le calme, ce n'est surement pas les mots qui viennent à l'esprit quand on parle de moi. Je me méfie beaucoup des inconnus, alors malgré moi je les teste en permanence. Je teste les limites pour être sûr que leur gentillesse ne soit pas qu'une façade. Pour être sûr qu'ici je sois en sécurité et que je ne serve pas de sacrifice à la première difficulté rencontrer. Je teste chaque personne pour savoir en qui avoir confiance et de qui je dois me méfier encore plus.
Je sais, c'est pas super cool d'être un petit monstre avec tout le monde, mais c'est ma façon à moi de voir si les gens restent quand même. C'pas très mature je sais mais... j'ai 12 ans.
Mais malgré ça, je suis pleine de bonne volonté. Je veux profiter du savoir des autres alors je m'intéresse à tout ce qui se fait dans ce camp. J'ai beau me méfier du plus grand nombre, je m'intéresse tout de même aux gens, essaie de repérer ceux qui ont des compétences utiles et qui pourrait m'en apprendre davantage sur tout et n'importe quoi.
Je suis curieuse, je suis débrouillarde, j'apprends vite. Je suis prête à donner un coup de main pour presque tout et je m'applique un maximum pour ne pas être mise de côté. Tâches ménagères, bricolage, survie, expédition, je n'ai aucun thème de prédilection, je mets mon nez partout. Parfois même peut-être où il ne devrait pas être… ho… oups?