Alors que j’étais en train de paisiblement prendre un café au bord de la maison, contemplant la piste bientôt entièrement restaurée, mes yeux se portent vers le P-47 de May, les capots ouverts, en train d’être vérifié par Cronwfield,  mais mes yeux se porte sur une inscription injurieuse qui couvre quasiment la longueur du fuselage. Je pose ma tasse sur une table et je me précipite jusqu’à l’avion, la peinture est encore fraiche et je lance un : « C’est quoi ce bordel ? » Le mécanicien sort la tête du capot et me regarde avec un œil amusé, il est amusé par ce qu’il a lu… Plus préoccupé par la mécanique, il n’a pas jugé bon de venir me prévenir.

Je décide alors d’aller vérifier les autres avions. Celui de William n’a rien, mon spitfire est maculé de plusieurs inscriptions franco-phobes et quand j’arrive à celui de Zack, Horizon mon ancien chasseur, j’ai la… surprise de voir Zelda en train de dessiner sur les ailes et le nez de l’appareil : « J’aurai dû m’en douter. » Je ne vais pas aller jusqu’à elle, mais simplement la rappeler à l’ordre :

« J’espère que tu es consciente qu’au-delà de me manquer de respect, but avoué de ton œuvre, tu manques de respect à l’héritage de Roza. C’était elle qui avait peint mon appareil. » je trouve ça décevant, j’arrive à sentir une pointe de déception devant le comportement de Zelda, je me doutais bien qu’elle chercherait à prendre sa revanche pour la leçon que je lui ai donné. Mais de là à saccager l’œuvre d’une disparue, ça en dit long sur son comportement et sur ce qu’elle est prête à faire pour simplement passer ses nerfs.

« Belle preuve de ta loyauté envers tes amis. » Je regrette amèrement de ne pas avoir de fusil sous la main, ça aurait été amusant de voir qui entre Zelda et une cartouche de 30-06 springfield allait le plus vite. Pour ma part, je ne donnerai pas beaucoup pour la victoire de l’adolescente : « As-tu seulement d’autres compétences que d’être une effroyable emmerdeuse ?" La réponse est très certainement oui, mais elle semble décidé à gâcher son énergie pour rien.

- C'est moi, l'héritage de Roza !

Et certainement pas quelques coups de pinceaux sur un avion à la con. Zelda ne prend pas vraiment la peine de se retourner bien qu'elle ait interrompu son geste. Elle reconnaît très bien la voix qui s'est adressée à elle. Et forcément, il fallait que la française rôde dans les parages lors de sa petite opération. Et elle reviendra ! assure-t-elle. Le doute est présent mais c'est l'un des rares cas où l'australienne a décidé de s'abandonner à l'espoir de revoir la russe. Elle revient toujours... Non, il ne faut pas s'inquiéter. La borgne est probablement en train de foutre la misère à ceux qui ont eu la bêtise de la capturer, ou de la traquer.

L'adolescente termine son coup de pinceau et achève de dessiner sa cible sur le flanc de l'appareil. Elle suppose qu'il faudrait vraiment être bigleux pour ne pas la voir. Ou même pour la manquer. Tu aimes ? demande-t-elle. Après tout c'est son appareil, non ? Et quelque part elle a besoin d'un avis. Même si ce dernier sera sans doute biaisé. L'art et Adel, ça fait clairement deux. Peut-être même plus, tiens.

Qu'est-ce que tu connais au sujet des amis, hein ? Le ton mêle une forme d'indifférence à une habituelle dose de véhémence. Un petit sourire s'installe sur ses lèvres avant qu'elle daigne enfin se tourner vers la française. Si t'en avais tu serais pas obligée d'te confier à une putain d'hélice... Va-t-elle vraiment tenter de lui faire le leçon ? Ou même de la prendre par les sentiments ? N'a-t-elle pas encore compris que c'est une perte de temps ?

Et puis ne s'est-elle toujours pas rendue compte que ces compétences que son aînée s'acharne à lui nier existent bels et biens ? T'as pas envie que j'te montre c'que j'sais faire, crois-moi ! Même si elle en a eu un tout petit avant-goût sur ce terrain d'entraînement, quelques mois plus tôt. Ce jour où elle lui a fait promettre de veiller sur  Kassandra. Mission dont la française ne s'est pas pleinement acquittée, d'ailleurs. Et pourtant Zelda croyait qu'elle pouvait au moins lui faire confiance pour ça, pour préserver un peu la plus jeune de ses pilotes. Elle a été bien conne sur ce coup-là.

Mais quoi qu'il en soit, l'australienne n'est pas venue se venger. Pas seulement. Les messages qu'j'ai laissés sur l'autre avion sont aussi pour New Eden et nos ennemis ! N'te donne pas trop d'importance, tu veux ? Même si elle reste, bien sûr, la principale visée. Elle ne sait même pas s'il y a des français chez les bigots, après tout, Zelda. Mais elle est en revanche certaine qu'il y en a au moins deux, dans ce camp. Et pas les meilleures membres du groupe puisque l'une vampirise June et l'autre, les ressources en carburant pour casser les couilles de tout le Fort avec ses loopings à la con... J'avais un doute, d'ailleurs : y'a pas un C quelque part dans l'mot Fuk ? Bon, au pire, l'essentiel c'est que ce soit compréhensible. Et puis il y a toujours moyen d'intercaler une lettre, si vraiment.

Voilà ! Zelda vient d'arriver au moment où elle se rend compte qu'elle n'a pas vraiment envie d'échanger avec la femme qui la privera sans doute, un jour ou l'autre, de l'amour de sa vie... Pourquoi t'es encore là ? demande l'adolescente à la pilote, Sur ce ton qui prouve qu'elle ne requiert pas spécialement sa compagnie. Normalement t'aurais déjà dû partir en courant pour tout balancer aux allemands, non ? La française fait néanmoins preuve d'une certaine prudence, c'est évident. L'australienne a bien remarqué qu'elle n'ose pas s'approcher.  Tu t'ramollis... note-t-elle en guise de conclusion. Avant de tremper à nouveau son pinceau dans la peinture blanche pour se lancer dans la réalisation d'un doigt d'honneur sur l'empennage de l'appareil.

Je devrai me sentir blessé de sa remarque, c’était le but j’imagine, mais c’est vrai, je n’ai pas réellement d’amis, j’ai mieux que ça. J’ai des ailiers. J’ai William, Zack, Locklan, May, Ashley. J’ai une élève, une apprentie. Cela vaut tous les amis du monde : « Je me demande si tu te rends chez Eve-Madeleine pour lui dire la même chose, après tout, elle parle à deux morceaux de bois croisés, quelle différence ? » En croix, en hélice, devant un mur, chacun fait ce qu’il veut quand il parle à quelque chose qui n’existe pas.

Et pendant que j’observe Zelda continuer son œuvre, à peine capable d’écrire dans sa propre langue : « C’est amusant néanmoins, nous avons convenu avec June d’une identité visuelle unie sur tous nos appareils, d’un logotype également. Donc de toute manière, il aurait été question de décapé la peinture et de procéder à une nouvelle livrée. » Et je crois que j’ai trouvé quelqu’un pour nous aider à enlever toute cette peinture :

« Il m’a été conseillé de rapporter tes écarts de comportement à Yuan, donc je ne dirais pas que je vais le dire aux allemands, mais aux Chinois plutôt. » Puis si elle avait un minimum de mémoire, elle se souviendrait que les De Castel avaient combattus les allemands, je lui avais déjà dit. Qu’importe : « Et évidement, quand May et Zack demanderont ce qu’il s’est passé… » Qui sont censés être ses amis d’ailleurs, je suis prête à parier qu’ils n’apprécieront pas réellement cette œuvre d’art :

« Dis Zelda, pendant que tu travailles, tu peux répondre à trois questions pour moi ? » Je m’assieds sur un des établis et je la regarde faire, j’aurai ma revanche d’une façon ou d’une autre, je dois apprendre à faire confiance à Yuan, ça ne sert plus à rien de tenter quelque chose physiquement contre elle, je peux simplement piquer sa fierté et vérifier qu’elle ne sabote ou ne casse rien :

« Combien de fois m’as-tu sauvé la vie ? Combien de fois ais-je sauvé la tienne et aussi… combien de New Eden as-tu tué ? » Elle oublie vite où est sa place la jeune, à vouloir me prouver ses capacités, mais en mission… Ce n’est guère brillant.

- J't'assure qu'Eve-Mad' en a bouffé pas mal, des remarques, elle aussi !

Elle ne l'a pas toujours épargnée, la nonne. Zelda ne comprendra sans doute jamais comment on peut croire à la bienveillance d'un Dieu qui de toute évidence a abandonné le monde. Sa foi, c'est en elle que l'australienne la place. Pas dans les courants d'air... Mais elle, contrairement à toi, elle est pas toujours sur mon dos ! Et c'est pour ça, sans doute, que les rapports sont nettement plus plaisants avec la bigote qu'avec la française. Sérieusement... Comment tu fais pour apparaître à chaque fois que j'laisse parler mon génie créatif, hein ? C'est à se demander si elle est constamment tapie dans l'ombre de l'aérodrome, à attendre qu'elle se pointe pour lui fondre dessus. Elle la stalke ou quoi ?

Un regard méfiant supplémentaire plus tard, l'australienne poursuit son oeuvre avec indifférence. Jusqu'à ce qu'elle apprenne que June a décidé de peindre une livrée homogène sur les appareils. C'est l'moment... Il faut de l'uniformité, Zelda est bien d'accord. Et puis quelque part ça la conforte de savoir que son oeuvre ne sera qu'éphémère et que les preuves disparaîtront avec elle. On passera déjà un peu moins pour des clochards, comme ça ! Parce que la dissonance visuelle des différentes livrées faisaient plus penser à un patchwork au rabais qu'à une escadrille digne de ce nom. Et puis c'est plutôt cool, non ? Tu penseras à moi en décapant tout c'foutoir ! L'idée lui plaît bien, à Zelda. Elle imagine la française ronchonner dans sa langue gutturale. Un peu comme une orc. Ouais, une orc ! C'est grave ça !

Quoi qu'il en soit l'australienne perd son sourire en apprenant que c'est plutôt aux chinois qu'Adrienne compte aller rapporter ses écarts. Parce qu'on a recommandé à la pilote d'aller tout balancer à Yu', visiblement. Et j'peux savoir qui t'a conseillé ça ? Zi, sûrement ? Ou peut-être l'une des cent vingt-cinq personnes qui lui veulent du mal ? Bah vas-y, fais-le ! Mais faudra attendre qu'il revienne par contre... Parce que son tuteur a décidé de mettre les voiles une fois de plus. Pour l'éviter, suppose-t-elle. C'est... décevant. Et elle est davantage préoccupée par son retour que par ce que la française pour lui dire, ça c'est clair !

Attends... C'est pas ton avion, ça ? Bon c'est sûr que pour elle, un truc qui vole ressemble à un autre truc qui vole. Mais pourquoi Adel parle de Zack et May, hein ? Ah ouais... C'est chiant, ça ! grogne-t-elle. Elle n'a pas envie d'emmerder Goldie et Sbire numéro un, elle. Mais ils vont lui pardonner, non, si elle a pêché par ignorance ? Et puis de toute façon ces foutus appareils vont être repeints alors bon... C'est pas si catastrophique que ça. Elle l'espère, en tout cas. Parce que les pilotes semblent avoir la fâcheuse tendance de s'attacher à leurs poubelles volantes. J'suis sûre qu'ils prendront les choses avec philosophie ! Et sinon et bien elle improvisera. Après tout elle a appris à s'excuser, maintenant. À peu près.

Et voici que la française lui demande la permission de lui poser trois questions pendant qu'elle s'adonne à son art. Bah... Ouais, vas-y ? L'australienne succombe bien volontiers à la curiosité. Et lâche un petit ricanement lorsque Adel termine son petit interrogatoire. Elle voit très bien où elle veut en venir mais d'accord, elles peuvent jouer à ce petit jeu...  Combien de fois elle a sauvé la vie de la pilote, donc ? Trop de fois ! Mais elle n'a pas vraiment fait exprès, pour sa défense. Toutefois elle se plaît à croire que les diverses opérations auxquelles elle a participées ont contribué à sauver le cul de son interlocutrice à plusieurs reprises. Même si ce n'était pas le but. Ce qui est sûr, en revanche, c'est qu'elle n'a pas souvenir qu'Adel lui ait sauvé la vie... Elle se démerdait très bien toute seule ! Jamais ! claque-t-elle donc pour sa deuxième réponse. Quant au nombre de New Eden qu'elle a déjà tués... Pas assez ! Et elle devra attendre que sa punition soit levée pour améliorer un peu son score, en plus ! Vie de merde !

L'australienne conclue par un petit haussement d'épaules et un sourire narquois : T'es encore plus en manque d'reconnaissance que moi, c'est ouf ! Elle le note avec une forme d'amusement. Mais elle retrouve lentement un air plus sérieux avant de tremper une nouvelle fois son pinceau dans le pot de peinture pour poursuivre son oeuvre. T'sais, Adel... Si tu veux jouer à ce p'tit jeu à la con alors j'me sens obligée d'te rappeler que si tu peux faire la zgeg dans les nuages, c'est aussi parce que des gens ont donné leur vie pour ça ! J'étais à Everett, j'ai vu Mallow crever pour qu'tu puisses débarquer devant moi, aujourd'hui, avec ton p'tit air arrogant et tes grosses dents ! Zelda a contribué à la fondation de cette escadrille, quoi qu'Adel puisse en penser. Alors non, elle ne s'estime aucunement en position de faiblesse face à la pilote. Cette dernière croit qu'elle lui doit quelque chose  mais ce n'est qu'un juste retour des choses.

T'inquiètes pas, hein, j'm'en suis remise ! Fais pas l'erreur de croire que j'me plains ! Elle laisse ce genre de trucs aux victimes de la vie, celles qui préfèrent regarder par-dessus leurs épaules que devant elle. Mais la prochaine fois qu'tu t'sens obligée d'me rappeler c'que t'as fait, oublie pas non plus c'que tu m'dois ! À elle, et à ceux qui sont allés sur le terrain pour qu'elle puisse se la péter comme une demeurée, aujourd'hui. Et puis comme ça, eh, ça m'évitera d'avoir à t'péter l'nez ! J'suis sûre qu't'aimes pas ça, en plus ! À moins qu'elle ne soit vraiment aussi folle qu'elle le pense. Et ça, clairement, ça reste encore une possibilité ouverte. D'autres questions ? Après tout elle a tout son temps...

Je roule des yeux en voyant l’air buté de Zelda, rien ne la changera, le seul moyen de lui mettre un peu de plomb dans le crâne serait certainement de le faire à l’aide d’une balle full métal jacket tiré par un springfield 1903, très certainement maniée pour une tireuse compétente. Je pourrai le faire, à part quelques larmes de la part de Kassandra, ça n’aurait que du bon à long terme. J’en suis persuadée.

Là à cet instant, elle m’amuse plus qu’autre chose, à se gonfler de son importance et de ses 17 ans. « Ce que tu me dois » Je dois de nombreuses choses à de nombreuses personnes, ceux qui sont venus avec moi entre autre, lors des diverses expéditions que nous avons menés. Expéditions où j’étais sur le terrain moi aussi : « Ce n’est pas comme si j’étais moi aussi allé ramper dans la boue pour « pouvoir me la péter » mais je gage que tu préfères croire que je ne me salis pas les mains. » Assez sachant que j’ai participé à littéralement toutes les expéditions, justement à l’exception de celle d’Evrett :

« Je ne te dois rien Zelda, à part te comporter comme une… fouteuse de merde qui devrai crever la gueule ouverte , tu ne m’as rien apporté. » Pas folle, je ne vais pas l’insulter en anglais. Preuve de ma supériorité, je sais parler deux langues et elle non.

Et puisqu’elle parle de ce que je lui dois, si elle fait référence au fiasco de l’expédition d’Evrett, sa seule contribution jusqu’à présent à nos expéditions, celle-ci ne nous a rien apporté, pas même une seule indication sur les possessions de New Eden : « et Je ne suis pas responsable de la mort de Mallow, Zelda, si j’ai bien compris, elle a décidé de se cacher dans un rôdeur de son propre fait. » Je ne vais pas dire à haute voix ma pensée mais… c’était une décision au mieux stupide, au pire suicidaire.

Qu’importe, je n’aurai pas vraiment le dernier avec elle de toute manière :

« Mais fait, dessine, amuse toi, sois puérile. J’ose croire que tu auras le bon sens de ne pas abîmer nos machines cependant. Nous partons en mission dans quelques jours, tu ne voudrais pas que l’hélicoptère de Kassandra, l’avion de May ou de Will s’écrase car tu auras été assez stupide pour abimer une surface de contrôle ou les mitrailleuses.» La prochaine fois je placerai une roquette armée, en espérant qu’elle soit assez idiote pour la manipuler et se faire exploser avec.

- J'suis à peu près sûre que c'était du français, ça !

Les intonations y ressemblent en tout cas. Elle a déjà entendu quelques phrases par-ci par-là et puis elle sait aussi que la pilote est originaire de l'hexagone. Pas besoin de chercher de midi à quatorze heures, donc, comme on dit. Et aussi, qu'ce n''était pas très très flatteur... Et pourtant Zelda hausse les épaules avec indifférence. Les mots d'Adel ne sont finalement... que des mots. Et probablement l'aveux d'une forme d'impuissance.

Alors l'adolescente continue son travail semi-artistique et la conversation, toujours tumultueuse, s'oriente vers le destinée de Mallowe. La pilote rappelle qu'elle n'y est pour rien et la manière dont elle présente les choses arrache un léger ricanement désabusé à l'australienne. Ouais... C'était pas très malin ! De se glisser à l'intérieur d'un cadavre avec, en prime, des plaies ouvertes. Néanmoins le stress et l'urgence font faire des trucs stupides, parfois. Son sourire s'estompe et laisse place à un petit hochement de tête empli de regrets. Mais ça t'donne pas pour autant l'droit d'l'ouvrir à son sujet... Surtout de cette manière-là, en rappelant les circonstances de la mort de la jeune femme.

Pourtant Zelda n'a plus réellement envie de batailler avec la française. Elles savent toutes les deux comment leurs échanges se terminent. Pourquoi batailler dans le vide, hein ? Adel est sans doute parvenue à la même conclusion puisqu'elle l'encourage ironiquement à continuer . Tout en lui rappelant, bien sûr, que ses actes pourraient avoir des conséquences sur la survie de ses camarades. Tu vois ?! L'australienne agite d'un mouvement rageur son pinceau, envoyant de la peinture valdinguer en traînée sur le sol. C'est ça que j'déteste chez toi ! Cette façon d'être, de percevoir la vie. Ce caractère si différent du sien.

L'australienne hésite un instant. Puis balance son outil dans le pot de peinture et fait quelques pas en direction de la pilote. Pas pour la menacer mais simplement parce que les avions ont soudain bien peu d'intérêt à ses yeux. Surtout à côté des mots qui lui brûlent désormais les lèvres : Tu débarques toujours avec tes beaux principes et tes grands airs, t'en appelles au bon sens comme si t'était une espèce d'avatar d'la maturité et en plus, bordel, tu t'crois assez maline pour me manipuler ! La française croit vraiment qu'elle va gober son histoire de peinture qui endommagerait les avions ?! Alors tu peux m'balancer tes états d'service à la gueule comme si ça validait ton courage mais la vérité, tu vois, c'est qu't'es une putain d'blague ! C'est pour ça qu'tu t'retrouves obligée d'te réfugier derrière la survie d'mes amis et qu'moi j'suis toujours là, libre de dégueulasser ces appareils sans craindre qu'tu t'mettes à lever le p'tit doigt !  L'australienne la défie du regard comme pour l'inciter à lui donner tort et à lui prouver qu'elle se trompe. Peut-être que la française commencerait à obtenir un peu du respect qu'elle réclame avec tant d'insistance et qu'elle considère comme indus.

Et puis l'adolescente se modère, et ravale les autres mots qui lui brûlent les lèvres. Parce qu'elle n'oublie pas non plus qu'Adel est peut-être la meilleure chance de survie de Ka' dans les airs. Et parce que la plupart des phrases qu'elles pourraient encore échanger ne changeraient rien à la situation, ou à leur relation. Garde juste tes phrases à la con pour ceux sur qui elles ont de l'effet, okay ? demande-t-elle, radoucie. Y'a personne à impressionner ici... Zelda tourne ensuite le dos à son interlocutrice et retourne vers la peinture, qu'elle continue pourtant à délaisser. Tu t'souviens de l'accord qu'on a conclu ? Par rapport à Ka' ? Sa crainte ? Qu'Adel puisse avoir la mémoire sélective et abandonne sa petite amie dans le seul but de la faire souffrir. Ce serait un sacré coup de pute mais après tout Adel aime bien frapper dans le dos, et laisser à d'autres le soin de faire le sale boulot.  Il est toujours valable, j'espère ? Zelda pose un regard inquisiteur sur la française. C'est sûr qu'avec cette opération qui approche, elle est encore moins sereine que d'ordinaire....

« Tu as raisons sur un point, je ne peux pas t’arrêter, pas physiquement. » Je dois recourir à certains stratagèmes pour faire valoir un point de vue, je le concède : « Par  contre, tu ne manques pas d’audace d’oser réclamer que je tiennes mes engagements alors que tu as décidé de passer ta vie à m’emmerder. » Si je tiens à Kassandra, il va venir un moment où l’avoir risque d’être un handicap. Surtout si Zelda fait… sa Zelda. Donc il faut mettre les choses au clair : « Je remets à jour notre… accord. Tu ne t’approches plus de l’aérodrome. Définitivement. » Le mot est lancé, il est là, il est important, j’espère qu’elle aura assez de neurones pour comprendre la portée de ce que je suis en train de lui raconter :

« Si je ne vois plus ta tête ici, je maintiendrai notre accords, mais si tu persiste. Je l’annule et je laisserai la sécurité de Kassandra à Ashley. Il me semble que tu l’apprécies, Ashley. » C’est quelque peu bas d’utiliser Kassandra comme fusible, mais je n’ai jamais caché à ma jeune élève mon dédain pour Zelda et je ne manquerai pas de mettre au clair quelques choses avec elle ce soir : « J’informerai aussi Kassandra que si tu ne respectes pas ta paroles, elle en sera tenue pour responsable. J’en ai assez de toi, alors si tu n’es pas capable de te tenir, d’autres paieront tes errements. Je pourrai ajouter quelque chose, allez, si elle me reproche de toujours me cacher derrière les autres, il y a une menace que je peux mettre en application sans aucun problème :


« si tu me pousses trop à bout, je ferai ce qui doit être fait pour éliminer la nuisance que tu représentes. Tu as vu ce que mes canons ont fait, tu étais là, je ne pense pas que tu aurais de meilleurs chances de survie. » Ce serait une pure vision de bonheur que de la voir ramper, hurlant de peur et de douleur alors que ses intestins ont été pulvérisés par un obus incendiaire. Son corps réduit en charpie à cause d’un problème électrique et d’une mise à feu intempestive lors d’un exercice.[/color]