Joshua était en train terminer une série d’équations sur un de ses nombreux, trop nombreux carnets, afin d’estimer le pouvoir calorifique du carburant d’algue qu’ils étaient en train de créer avec Bonnie et Friedrich. Ce projet prenait une grande partie du temps de Joshua et il accaparait littéralement presque toutes les ressources qu’on pouvait lui accorder. Mais alors qu’il était en passe de finir ses calculs, des coups secs se firent entendre à la porte de son domicile.

Désireux de les ignorer, il ne répondit pas immédiatement, ce n’est qu’à la deuxième ou troisième série de coup sur la porte qu’il daigna aller jusqu’à la fenêtre pour voir de qu’il s’agissait. Il vit une forme relativement petite qui se tenait là devant la porte. Le profil lui rappelait vaguement celui de Zelda, bien qu’il ne vit pas son visage. Il soupira avant d’aller ouvrir, elle venait certainement encore réclamer son aide pour un quelconque délire alcoolisé ou pour fabriquer de la drogue encore. Elle semblait être une femme pour le moins têtue et obtue : « Zelda… Je ne suis pas un… » La porte à moitié ouverte, il réalisa alors qu’il s’était trompé. C’était bien une jeune femme devant lui, mais ce n’était pas l’australienne : « Tu n’es pas Zelda toi, mais qui est-tu alors ? »

Une de ses amies ? Une nouvelle ? En tout cas, le scientifique ne se souvenait pas d’avoir déjà croisé la jeune femme… Il resta interdit quelques secondes avant de finalement reprendre :

« Que veux-tu alors ? Tu veux venir travailler au laboratoire, avoir une formation en chimie ? » Mais allaient-ils réellement parler de quelque chose comme ça alors même qu’ils étaient sur le pas de la porte et que le froid était beaucoup trop saisissant pour que Joshua ne puisse se concentrer sur le long terme, alors il s’effaça pour inviter la jeune femme à rentrer dans son impeccable domicile : «Tu sais quoi. Entre et on en discute. » Peu importe ce qu’elle voulait, ça serait toujours mieux que de se les geler sur le perron.

Des putain d'insectes dans les légumes des plantations. Une honte, une tentative d'empoisonnement qui a déjà peut-être tué du monde. En secret. Si ça se trouve, tout ça n'est qu'un sombre plan de Valentine et de June pour permettre au camp de mieux passer l'hiver en éliminant des bouches à nourrir ! Ou peut-être que Valentine... ne sait juste pas s'occuper de ses cultures. Bridget a posté l'article il y a un peu plus d'une semaine mais ne voit pas vraiment de changements dans les habitudes alimentaires des autres Fort Wardiens. Des moutons, une belle brochette d'abrutis, des débiles mentaux... Ils n'auront pas volé leur empoisonnement !

La plupart des scientifiques que Bridget a contacté n'ont même pas daigné lui répondre lorsqu'elle a tiré la cloche. Soit trop occupés, soit décidés à ne pas s'intéresser aux aventures d'une môme de quinze ans qui fait pourtant des découvertes hallucinantes en voulant ouvrir les yeux de tout le monde ! Un jour, le travail et les efforts de Bridget seront vraiment reconnus... et elle deviendra grande reporter récompensée et félicitée par June en personne ! Non, ce n'est pas un rêve : c'est une suite logique des évènements actuels. Elle a à peine le temps de taper à la porte que...

- Zelda fait à peu près une tête de plus que moi, on a pas les mêmes cheveux, ni la même gueule... alors faudrait franchement éviter d'arrêter d'nous confondre parce qu'en plus de passer pour un con, vous risquez de vite être taxés d'alcooliques ! Des mots prononcés un peu trop vite, surtout sous le coup de l'énervement... Merde : elle qui voulait agir comme une vraie reporter en parlant sérieusement, en utilisant de grands mots et en sortant sa carte de presse crée sur Paint. Pas grave. Puis Zelda est carrément plus abimée qu'moi, en plus...

- Bridget. Ma propre personne, élue gamine la plus innovante de Fort Ward en fin d'année dernière ! Ça vous dit un truc ? Impossible qu'il soit passé à côté de la gazette, c'est un véritable best-seller (qui ne se vend pas... mais qu'est beaucoup lu, paraitrait-il) . Parce que moi, j'vous connais. On m'a dit qu'vous étiez scientifique, et j'ai besoin de vous puisque tous vos collègues font la gueule ou veulent pas m'aider à rendre la vie de tout le monde meilleure !

Travailler au laboratoire ? Être formée en chimie ? Elle a déjà du mal avec les maths... Elle plisse un peu les sourcils, secouant péniblement la tête. Il a à peine le temps de la lui proposer d'entrer qu'elle se glisse à l'intérieur en empruntant ce petit passage entre lui et le cadre de la porte et en lui attribuant (sans faire exprès) un coup de sac à dos. J'ai prévenu mon amie qu'j'suis là, donc si jamais vous êtes un pédologue ou qu'vous voulez me faire la peau pour un truc : on saura qu'c'est vous... lui laisse-t-elle savoir d'un air totalement décontracté en écrivant elle-même son chemin vers le salon, où elle se crashe dans un fauteuil. Son sac fait le chemin jusqu'à ses genoux, elle l'ouvre et en sort un bout de papier à journal très épais. J'veux savoir ce que c'est. Et parait qu'vous êtes calés en truc scientifiques, ou qu'vous avez des grosses loupes pour voir les trucs en haute définition... La vie du camp en dépend, m'sieur Friesen.

Elle laisse glisser le bout de papier épais sur la table. Si ça n'a l'air de rien au premier coup d'oeil : il s'agit ni plus ni moins d'un bout de carotte à l'intérieur. Un légume avec un, deux insectes tout bizarres qui s'amusent à y faire des trous. Ça fait une semaine que je garde ça dans notre garage, donc... peut-être que ça a changé ou qu'ils se sont reproduits depuis la dernière fois, j'ai pas osé regarder mais j'veux savoir ce que c'est !