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tant que le café est encore chaud

Mer 5 Avr 2023 - 22:52

Valentine regardait, de sa place, sur le canapé, l’une des tasse qui était restée sur la table basse. Il y en avait trois en tout, l’une sur le bord de l’évier de la cuisine, une autre sur la table basse du salon, et la dernière, sur la table d’appoint de la chambre dans laquelle elle n’était pas rentrée. L’horticultrice savait simplement qu’elle était là, elle était toujours là. Le salon tait devenu sa chambre, quelque chose l’empêcha simplement de mettre un pied dans la chambre qu’elle partageait avec June. La colère ? Le refus catégorique de troubler un moment en suspend, bloqué dans le temps, elle était à peu près certaine que les draps étaient encore froissés. Valentine oscillait entre la pure colère, le chagrin et la frustration. Pour palier à ses émotions qui allaient à l’opposé de sa nonchalance habituelle, elle avait opté pour la médecine douce.

L’avantage de son travail fut qu’elle savait parfaitement comment et ou se fournir, elle en avait dans son potager, dans la serre qui lui servait à tout. Il y avait au moins ça, qui ne sentait pas l’abandon. Elle pouvait toujours y passer des heures, continuer à remplir les placards, regarder ses étagères qui ne se videraient plus à la même allure. La réalité de la mort de June se faisait par des constats du quotidien. Valentine aurait, plus de thé, plus de sauce tomate, plus de pommes de terre, plus de café.

La française pré-roulait ses joints pour le soir, elle y prenait un certain plaisir à ce qu’il soit parfaitement exécuté, avant de les allumer et de regarder les volutes de fumée s’élever vers le plafond. Elle s’apprêtait à répéter la même routine, quand on toque à la porte. Valentine fronce un sourcil, oubliant qu’elle avait dit à May de passer, si elle le souhaitait, elle fut donc rappelé de son oubli en voyant la blonde dans l’embrasure de la porte au moment de son ouverture. Valentine la regarde, un instant, avant d’hocher la tête, se souvenant de ce qu’elle lui avait dit dans l’après-midi.

Entre, fit-elle, avant de retrouver sa place dans le canapé. Le plaid sur les genoux, elle prend un briquet et allume le joint coincée entre ses lèvres. Valentine tire longuement, avant de laisser échapper un soupir de soulagement.

Je pensais que tu ne viendrais pas, fit-elle, peu habituée au fait que l’on puisse répondre à ses invitations, qui étaient particulièrement rare, elle pouvait l’admettre.
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Re: tant que le café est encore chaud

Ven 14 Avr 2023 - 9:33

L'air est lourd, à Fort Ward. L'absence de June est partout. Rien ni personne n'avait pu prévoir sa mort - et surtout pas May. Le deuil est un concept étrange, en vrai. Il est partout et nul part à la fois. Comme des paillettes qu'on tente de faire disparaître sans jamais vraiment s'en débarrasser. Comme si une personne décédée ne brillait que plus fort de par son absence. Tout autour n'est plus qu'un accessoire dérisoire, sans elle; la chaise où elle prenait place, le bureau où elle prenait des notes, la cuisine où elle buvait son café. Oh, Liv n'a jamais éprouvé la moindre émotion pour Phelbs, mais elle est humaine. Trop, même - selon certains. Elle peut donc certainement comprendre que le monde de son amie puisse être en train de chavirer. Elle l'a déjà vécu trop souvent, de toute façon.

Ainsi, quand Valentine lui lance ce semblant d'invitation, elle n'hésite pas. Elle ne la fait pas répéter, de peur qu'elle change d'avis. Parce que la brune ne devrait pas être toute seule, et que Cendrillon s'inquiète de son état. Elle sait bien que James n'est pas du genre à demander de l'aide. Et c'est bien pour cette raison qu'elle va la surveiller de près. Elle grimpe les escaliers sans trop de mal, jusqu'à cogner à sa porte. Sauf que sa copine la regarde comme si elle n'attendait absolument personne. Les deux idiotes se fixent dans le blanc des yeux, un moment - jusqu'à ce qu'une petite lumière s'allume enfin dans le cerveau de la remueuse de terre. Liv pourrait presque en rire, si la situation était différente.

Elle l'invite donc à entrer, du coup. La blonde retire son manteau et pose son sac, observant Valentine qui tire déjà sur sa tige d'herbe, bien installée sur le canapé. À croire qu'elle ne quitte son petit nid que pour le boulot, et qu'elle retrouve la protection de sa couverture, comme un drogué retrouve sa came, une fois la nuit tombée. Peut-être que c'est ce réconfort artificiel qui l'empêche de vriller. Peut-être était-ce même l'endroit préféré de June, qu'est-ce qu'elle en sait. C'est la première fois qu'elle pose les pieds ici.

« Je pensais que tu irais te cacher pour éviter de venir ouvrir. » réplique la petite en imitant un peu son amie, la moitié d'un sourire aux lèvres. Elle soupire, laissant le silence remplir un peu la pièce sans pour autant ressentir le moindre malaise. « Je ne te demanderai pas comment tu tiens le coup. » Parce qu'elle ne tient pas le coup du tout, visiblement. Or, si elle veut parler, elle sait qu'elle peut le faire. Mais Goldie ne va certainement pas la forcer. Elle lui vole plutôt le joint, avant de tirer dessus et de reculer le dos sur le canapé, pour fixer le plafond - et la fumée.

« Qu'est-ce qui va se passer, maintenant? » May n'arrête jamais de réfléchir, visiblement. Avec un peu de chance, le bâton qui se trouve entre ses doigts pourra remédier à la situation. Elle tire à nouveau, d'ailleurs, avant de rendre le joint à sa propriétaire. « J'ai de la bouffe pour toi, dans mon sac. T'inquiète pas, c'est la cuisine de Nathan - pas la mienne. »


From this mountain I can see so far, rivers running like deep deep scars, carrying the lifeblood through my veins. Is it crazy that I’m grateful for all the pain
May L. Goldenberg
May L. Goldenberg
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