This too shall pass...
Sam 22 Avr 2023 - 14:09
Il parait que ça fait un mois.
Un mois que nous avons fui cet enfer. Un mois que Colville est tombé, sous les explosions provoquées par les rebelles, les immortels revenus des souterrains et j’en passe. Un mois que cette nuit cauchemardesque a pris fin. Et pourtant, il n’y a pas une nuit où je n’en rêve pas, d’une façon ou d’une autre. Pas une journée où je ne repense pas à tout ce qui s’est passé et où je ne me demande pas si j’aurais pu faire mieux, sauver plus de monde. Aider les gens. Peut-être que j’aurais pu faire sortir une ou deux personnes de plus quand on s’est enfuis.
Peut-être que…
Ca tourne en boucle, dans ma tête. Comme tout le reste. Il parait qu’on appelle ça la culpabilité du survivant. Quelque chose du genre. J’avoue que je n’aime pas vraiment l’idée de mettre des noms sur tout ce qu’on a pu vivre, sur chacune des plaies encore à vif qui mettront bien trop de temps à cicatriser.
C’est une des raisons qui m’ont poussé à venir jusqu’à cette maison, que je fixe depuis bien dix minutes. J’ai dit à Anjali où j’allais et, malgré l’inquiétude qui a brillé dans ses yeux, elle s’est retenue de proposer de m’accompagner. C’est quelque chose que je dois faire seul, je le sais bien. Tout comme je dois affronter les rues de Walla-Walla. Ce que je n’ai pas fait depuis trois semaines. Mis à part pour aller à l’hôpital. Parce que je déteste sentir le regard des gens peser sur moi, qui me regardent l’air de rien, qui me dévisagent même, choqués par mon état qui, pourtant, s’est déjà grandement amélioré. Mes cheveux poussent, ma barbe aussi. J’ai l’air moins au bout du rouleau. En même temps, je passe mon temps à manger et à dormir, ou peu s’en faut. Je sais que j’en ai terriblement besoin et j’ai l’impression quand même que je ne serais jamais vraiment reposé.
Peu importe. Je suis en vie et je peux marcher sur ce trottoir sans avoir peur de me faire arrêter ou pire encore. Et ça, c’est précieux. Je soupire, alors que je me dis qu’il va falloir que je me décide. Enfonçant mes mains dans mes poches, je finis par traverser la rue avant de m’arrêter de nouveau devant la porte d’entrée, incapable de frapper. Parce que j’ai honte d’être là, alors qu’Emerson n’est pas revenue de Colville. Pas besoin de cogiter bien longtemps sur le pourquoi du comment.
Mais j’ai envie de voir Kendale, de lui parler, sans savoir si c’est réciproque. Il peut m’en vouloir d’être revenu, ou je ne sais pas. Ce serait légitime. A moi de l’affronter si c’est le cas. Alors, je prends une grande inspiration et je finis par toquer. La porte s’ouvre après quelques instants et je me retrouve face à celui que j’avais, à la longue, fini par considérer comme un ami. «Bonjour Kendale. » Soufflé d’une voix plus tremblante que je l’aurais cru, alors que j’ai du mal à le regarder dans les yeux. «Je… je ne sais pas si tu as vraiment envie de me voir mais… j’ai besoin de te parler. » De m’excuser. Entre autres choses.
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Re: This too shall pass...
Dim 30 Avr 2023 - 23:04
Qu’est-ce que je suis censé faire maintenant ? Cette question tourne en boucle dans mon esprit depuis des jours et des jours. La colère a fini par passer, bien que toujours présente, tel un volcan endormi ; prêt à exploser à tout moment. Pourtant c’est bien la peine et le chagrin qui ont pris le dessus sur tout le reste. Seuls quelques stigmates marquent encore le salon de mes excès de colère des premiers jours. Des trous dans les murs, plusieurs ; jusqu’à ce que la douleur laisse place aux larmes.
Dans cette maison, plus rien n’a vraiment bougé depuis que j’ai découvert cette lettre. Qui aurait cru qu’un foutu bout de papier viendrait tout bouleverser ? Hein ? Je me le demande tous les jours. Que vais-je faire à présent ? Sans elle ? Emerson était ma raison de vivre depuis plus de vingt ans. Je me souviens encore du jour de notre rencontre, de notre mariage, de la naissance de Kaycee, de celle de Sean et de Gracie. Même elle, ma petite fille, ils ont osé me la prendre. Tellement de moments heureux, de souvenirs gâchés… Et pour quoi ? Parfois les larmes coulent encore, quand je suis seul. Je me sens perdu sans elle. Je ne suis plus que l’ombre de moi-même ; complètement vide.
S’il n’y avait pas Sean, j’aurais certainement sombré depuis longtemps. Je me raccroche à lui, tentant maladroitement de faire en sorte que l’absence de sa mère ne soit pas trop pénible. Mais il n’est pas dupe, il est arrivé à un âge où il commence à comprendre les choses. Ses crises sont quotidiennes, nombreuses ; mettant à mal cette patience qui ne m’a jamais caractérisé. Pourtant, je me dois de faire un effort, puisqu’Emerson n’est plus là pour gérer.
Alors quand on frappe à la porte, ma première crainte est que mon fils se réveille, alors que j’ai bataillé pendant plus d’une heure pour qu’il fasse sa sieste. Lui aussi ne dort pas bien et cela se ressent dans son comportement, il n’est pas facile à gérer. Dans ces moments, je me sens tellement impuissant. Comment vais-je réussir à m’occuper de lui convenablement ? Alors que – soyons réalistes – je ne suis pas en état pour ça ? La fatigue me tiraille, je sombre peu à peu vers de vieux démons. Il n’y a qu’à voir la bouteille vide sur la table de la cuisine…
Heureusement, Sean dort profondément et je me dirige lentement vers la porte. A vrai dire, je n’ai pas envie de voir qui que ce soit. Pourtant, j’ouvre finalement la porte. «Mason. » Que je souffle alors qu’il me salue. A sa demande, je lui fais signe d’entrer, sans rien ajouter de plus.
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Re: This too shall pass...
Mar 2 Mai 2023 - 16:57
Il y a bien trop de sentiments contradictoires qui se bousculent. Une part de moi a juste envie de prendre ses jambes à son cou et d’aller se réfugier auprès d’Anjali et des enfants. De profiter de sa douceur, de sa force, jusqu’à ce que je me sente enfin assez courageux pour affronter le monde. Et l’autre me souffle que je ne dois compter que sur moi, pour pouvoir l’épauler elle aussi. Ce qui passe nécessairement par cette visite, même si je l’appréhende énormément.
Et pendant un instant, j’ai presque envie que la porte ne s’ouvre pas. Ce serait éviter le problème un peu trop facilement, je sais bien et surtout, au fond, ça n’arrangerait rien. Un bref soupir, alors que mon regard accroche celui de Kendale. Dire qu’il a changé est un euphémisme. Peut-être pas de façon aussi flagrante que moi, mais son regard n’est clairement plus le même. J’ai un hochement de tête quand il me fait signe d’entrer, laissant filer un silence alors que mon regard se perd à observer l’intérieur. Des trous dans les murs, bien visibles et probablement très récents. Il me suffit de baisser les yeux pour voir l’état des mains du pompier et faire des recoupements sans difficulté.
Au loin, dans l’embrasure de la porte de la cuisine, une vue directe sur le plan de travail et la bouteille vide. La culpabilité me noue un peu plus l’estomac et j’ai beaucoup de mal à ne pas juste tourner les talons. «Je ne vais pas te déranger bien longtemps. » Je me frotte nerveusement les mains avant de reprendre, à mi-voix. «Je ne te ferais pas l’affront de te demander comment tu vas Kendale. » Une inspiration, alors que je continue, toujours sur le même ton. «Je voulais te dire que je suis désolé. De ce qui arrivé à Emerson. Et à Grace. »
Là, arrive le plus délicat. Et je sens mes mâchoires qui se contractent. «Et te dire aussi que… qu’elle nous a sauvé la vie. Si… si elle ne nous avait pas dit d’aller à Spokane, je suis à peu près certain que jamais nous n’aurions réussi à nous en sortir. » Et encore moins à revenir auprès des nôtres. Mon regard se perd dans le vide alors que, sans le vouloir, je me retrouve plongé de nouveau dans cette nuit cauchemardesque. Je n’aurais probablement pas dû tenter le coup et je sens ma respiration se faire de nouveau trop rapide, mais j’essaie de me focaliser sur le présent et de me rappeler où je suis. Et surtout, quand je suis. L’exercice est toujours aussi difficile et j’en oublie presque la présence du pompier, alors que je me concentrer sur mes battements de cœur pendant un instant. Mais je finis par reprendre un semblant de contenance, avant de le fixer de nouveau. «J’aurais toujours en dette envers elle. » Et j’aurais tellement aimé qu’elle s’en sorte.
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