The reckoning
Mar 13 Juin 2023 - 22:03
Une brise salée soulevait les cheveux sombres du grec. L’air absent, il avait jeté son regard par-delà les limites de l’étendue bleutée qui s’étendait à perte de vue devant lui. La crête des vagues étincelait sous les rayons du soleil et quelques nuages disparates serpentaient dans le ciel d’un bleu foncé - gorgé d’une chaleur déjà estivale. Après avoir sorti un mouchoir en soie de la poche de sa veste, Valérian épongea discrètement la transpiration qui perlait à l’orée de son front. Il aurait aimé se convaincre que la chaleur ambiante était la seule responsable de ces manifestations physiques tout à fait inopportunes, quand, en vérité, elles étaient également les signes extérieurs de la profonde appréhension qui le tenait.
« Est-ce qu’il serait possible d’avoir un peu d’air ? » s’impatienta-t-il brusquement en décochant un regard furibond à l’homme chargé de l'escorter. « Inutile de me coller de cette façon ! Je n’ai pas l’intention de m’infiltrer dans le camp sitôt que vous aurez le dos tourné ! » Le garde, un dénommé Nobuo, lui lança pour toute réponse un regard peu amène et, avec une raideur irritée, daigna finalement faire un pas en arrière. L’arrivée des Exilés à Telve avait suscité une certaine méfiance. Lorsqu’il avait débarqué du Horizon, Valérian avait été accueilli par des expressions unanimement soupçonneuses. Peter avait donné l’ordre qu’il ne mette plus un pied dans le camp ; aussi, l'avait-on gardé sous étroite surveillance pendant qu’on allait chercher Elena.
Tout en grommelant des imprécations, Valérian attrapa son paquet de cigarettes. Depuis que le commerce avec the Hallows avait été rétabli, il avait repris ses vieilles habitudes avec un plaisir tout particulier. Sans le moindre égard pour sa santé, et se moquant éperdument de ruiner en un claquement de doigts un sevrage pourtant difficilement acquis, Valérian avait immédiatement cherché à soulager ses humeurs par le biais de ce poison ô combien délicieux. Après avoir jeté son allumette à la mer, il porta la cigarette à ses lèvres et tira profondément dessus.
La fumée dévala à grande vitesse les conduits de son organisme jusqu’à atteindre ses poumons. Elle s’y ramassa comme une couleuvre de suie qui s’enroule sur elle-même, répandant ses vapeurs toxiques dans les tissus de l’organe. Le grec la recracha finalement lentement par ses narines. Il serra étroitement les paupières, savourant l’effet de la nicotine qui dénouait les entrelacs noueux des muscles de son dos. Lorsqu'il rouvrit les yeux, Valérian croisa le regard anxieux d’Echo qui était resté à bord du Horizon. D’un signe de tête, il rassura son ami, affichant une assurance et un flegme qu’il était en vérité loin de ressentir. Voilà des mois qu’il n’avait pas croisé le chemin d’Elena. Il ignorait quelle serait sa réaction à sa vue. Quelle était l’intensité de son aversion à son égard ? Le haïssait-elle toujours ?
Si cette perspective répandait des vagues d’appréhension dans son corps au rythme des battements rapides de son coeur, le grec était pourtant parvenu à se retrancher derrière une façade stoïque, presque nonchalante. Peu importait l’issue de cette entrevue, et la réticence qu’il éprouvait à l’idée de se confronter à la colère glaciale de la grecque, Valérian avait eu la conviction intime que cette rencontre avait été nécessaire, inévitable. Il en avait suffisamment repoussé l’échéance : il était désormais temps pour eux de jouer cartes sur table.
Des bruits de pas retentirent tout à coup dans son dos. Valérian jeta un coup d’oeil par-dessus son épaule et aperçut Elena qui avançait dans sa direction. « Elena. » la salua-t-il d’une voix qu’il s’efforça de rendre égale. « Je n’étais pas certain que tu viendrais. »
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Re: The reckoning
Ven 4 Aoû 2023 - 23:14
La grecque était assise en tailleur, sous les jets dorés qui inondaient sa chambre. Son regard était arrimé aux prunelles rieuses de Keith qui babillait dans un dialecte bien singulier. Ses petites mains potelées étaient accrochées à un hochet qu’il agitait frénétiquement, et dont le carillonnement discret provoquait chez lui un franche hilarité contagieuse. Elena l’observait avec un œil mi-amusé, mi-fasciné par cet attendrissant spectacle dont elle ne se lassait toujours pas. Il avait tellement grandi en l’espace de quelques semaines qu’elle se réjouissait de pouvoir profiter de chaque seconde avec lui. Il parvenait à présent à se rouler sur lui-même, et ses minuscules jambes cherchaient instinctivement un appui pour se hisser à quatre pattes. Ce n’était qu’une question de temps avant qu’il ne s’élance à la conquête de la maison songeait-elle.
« Lena. » La jeune femme releva le menton vers l’encadrement de sa porte laissée entrouverte. Gabriel se tenait immobile, immanquablement tendu. Sa mâchoire était anormalement serrée, ses sourcils trop froncés. « Valérian est là. Peter a autorisé leur navire à accoster, mais il refuse de le laisser entrer dans le campement. » annonça-t-il sans rien cacher de son déplaisir. L’hispanique n’avait jamais digéré les évènements du début d’année. Entre la frustration de n’avoir pas pu les aider et la rancœur qu’il cultivait à l’encontre de leurs alliés, c’était un chapitre sombre qu’il aurait voulu pouvoir oublier. Comme chacun d’entre eux à dire vrai… Elena inspira doucement, tout sourire effacé, l’engrenage de ses réflexions ravivées l’arrachant à ce précieux moment d’intimité. Elle scruta quelques secondes son fils, comme s’il pouvait lui apporter une réponse à ses centaines de questions informulées.
À côté, le sicario semblait s’impatienter. « Si tu ne veux pas le voir, je m’occupe de le chasser d’là à grands coups de plombs dans l’cul ! » Un rire muet fit vibrer la poitrine de la brune. Bien sûr, son ami n’attendait qu’un mot de sa part pour s’en donner à cœur joie. Elle poussa un long soupir en secouant la tête. « J’arrive. Laisse-moi le temps de prendre Keith. » Elle se redressa péniblement et se saisit de son écharpe de portage pour y emmitonner le bambin. « Je t’accompagne. » fit le brun. « Ce ne sera pas nécessaire Gab. » Elle croisa son air réprobateur. « Ça ira, ne t’en fais pas. » promit-elle en quittant sa chambre.
L’air à l’extérieur était plus lourd qu’il n’y paraissait, remarqua Elena en s’approchant d’un pas peu pressé vers son compatriote. Ses cheveux virevoltaient chaotiquement au gré du souffle salé, ce qui paraissait beaucoup amuser Keith qui s’entêtait à vouloir les attraper, ses infimes doigts emmêlés entre ses mèches brunes. Arrivée devant l’homme, elle passa une main pour ordonner sa crinière. L’odeur âpre de la cigarette lui chatouilla le nez. Et l’effluve singulière de Valérian par la même occasion. « Puisque tu es devant chez moi, je n’avais pas vraiment le choix. » fit-elle remarquer en haussant les sourcils. Son ton était moins froid que plusieurs semaines en arrière. Son regard était moins incisif, moins sombre, comme si la colère s’était diluée. Il ne témoignait d’aucune hostilité ou d’aucune amitié en réalité. Il brillait d’une cruelle cordialité tout au plus. Car de tous les châtiments possibles, de toutes les pénitences envisagées, la grecque savait que la croix de l’indifférence serait la plus pénible et la plus lourde à porter pour un homme tel que Valérian.
« Que puis-je pour toi… ou pour vous ? » Elle arrima l’ambre inexpressif de ses orbes sur le navire des Exilés qui se découpait à l’horizon. « Si c’est des accords commerciaux dont tu veux traiter, nous pouvons nous installer au Phare. » Elle désigna ledit bâtiment d’un mouvement du menton. Son fils se faisait lourd…
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Re: The reckoning
Ven 8 Sep 2023 - 23:29
À la vue de la grecque, Valérian se raidit imperceptiblement. Une cascade désordonnée d’émotions se déversa dans sa poitrine. Vives, incandescentes, elles lui donnèrent l’impression de coups de tison chauffé à blanc. Il rassembla pourtant sa volonté pour rester impassible à l’approche d’Elena. Ses yeux se posèrent brièvement sur le petit garçon dans l’écharpe de la jeune femme. Keith avait indéniablement grandi. La dernière fois que le grec l’avait vu, il était encore un nouveau né. Saisi d’un malaise, Valérian se détourna.
Lorsque Elena s’adressa à lui, son timbre n’exprimait ni chaleur, ni animosité ; simplement une froide indifférence. Comme s’il avait été un inconnu pour elle. Elle semblait avoir fait le deuil de leur amitié. Cette réalisation déstabilisa Valérian, plus encore que l'aurait fait la franche hostilité à laquelle il s’était préparé. Il se sentit vaciller sur ses appuis ; mais, au prix d’un effort considérable, parvint à garder contenance - les yeux suspendus à ceux de la grecque. « Tu aurais pu exiger qu’on me chasse à grands coups de pied au cul. » fit-il remarquer d’une voix traînante. « Tes amis n’attendent qu’un signe de ta part pour s’en donner à coeur joie. » Il désigna Nobuo qui lui jeta aussitôt un regard noir. « Pas très commodes, si tu veux mon avis. »
Une part de lui jubilait de voir le japonais s’empourprer de colère. Son sourire crâne disparut cependant à la question d’Elena. En prenant son temps, Valérian tira une nouvelle fois sur sa cigarette et posa sur elle un regard pensif. « Il y a des sujets dont j’aimerais m’entretenir avec toi, oui. » acquiesça-t-il en expirant la fumée. « Les accord commerciaux en font partie. Mais j’apporte également des nouvelles que vous serez sans doute intéressés d’entendre. (il marqua une brève pause et reprit) Il y a quelques jours, nous avons accueilli dans nos rangs Logan, un ancien Remnant. Tu imagines bien qu’il avait beaucoup de choses à nous apprendre concernant la nature de l’épidémie qui a frappé Fort Ward. Nous devions aller nous installer au Phare ; nous risquons d’en avoir pour un moment. Et je crains que notre ami Nobuo ne perde patience avant que je ne vienne à bout de ce récit. »
***
Après avoir gravit l’escalier étroit du Phare à la suite d’Elena, Valérian découvrit avec un certain intérêt la décoration de la pièce de vie où un canapé et deux fauteuils aux motifs écossais faisaient face à une vieille cheminée. Sans un mot, il suspendit sa veste à un portemanteau et s’installa précautionneusement dans l’un des sièges. « Tu sembles aller bien. » dit-il au bout d’un instant en feignant d’adopter une attitude détachée. S’il restait sur ses gardes, il faisait néanmoins preuve de plus de sincérité qu’auparavant. Dans l’intimité de cette pièce, le grec se défaisait en effet de l’attitude détestable qu’il avait adoptée en présence des autres Inglorious Fuckers ; un mécanisme de défense qu’il mettait inconsciemment en place chaque fois qu’il était confronté à de l’hostilité… ou qu’il se sentait vulnérable. « La décoration a changé depuis la dernière fois où je suis venu. » Il faisait évidemment allusion aux cadavres exhibés sur des croix aux abords du campement. « Intéressant. Il ne manque plus que des guirlandes de crânes humains et quelques têtes plantées au bout de piques. »
Ses yeux se posèrent une nouvelle fois sur Keith. Toute trace de moquerie déserta alors son regard. Valérian contempla quelques secondes le bambin, et, s’il chercha à contenir ses émotions, eût grand-peine à dissimuler le trouble qui l’envahit. « j’imagine que tu préfères que je m’abstienne de fumer ici ? » s'entendit-il finalement demander d'un ton guindé.
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Re: The reckoning
Mar 26 Sep 2023 - 3:33
« J’aurais pu. » confirma la brune, sans lâcher des yeux son compatriote. « Mais nous savons tous les deux que nos deux groupes ne disposent pas du luxe d’évoluer indépendamment l’un de l’autre sur le plan commercial. » rappela-t-elle, parfaitement réaliste quant à la situation actuelle. Ils appartenaient à un mécanisme encore fragile qui ne pourrait survivre à l’amputation de l’un de ses rouages. Ils avaient besoin l’un de l’autre. C’était factuel et l’unique raison apparente pour laquelle Elena s’était présentée à lui. Officiellement, l’avenir de l’alliance était sa seule motivation. La commissure de ses lèvres s’étira « Tu ne peux pas leur en tenir rigueur. Ils n’ont pas un très bon souvenir de ta dernière visite à l’improviste. » Nobuo sembla se tendre davantage qu’il ne l’était, si c’était encore possible. Si des mois s’étaient écoulés depuis les sanglants évènements de début d’année, une vie entière ne suffirait peut-être pas à en effacer les stigmates profondément enracinés dans l’esprit des Fuckers.
Valérian finit par piquer la curiosité de la brune qui le dévisagea soudain avec une lueur d’intérêt non dissimulé. Le sort de Fort Ward avait été au cœur des discussions et préoccupations au cours des derniers jours. Longtemps considéré - à raison- comme le groupe le plus puissant de la région, son sort concernait potentiellement toutes les autres communautés alentours. « Allons-y. » La grecque fit signe à Nobuo qu’il n’était pas nécessaire de la suivre, avant d’inviter le grec à lui emboiter le pas en direction du phare récemment rénové.
Isaiah à ses occupations, Elena n’eut pas de scrupules à investir les lieux. Quelques mois en arrière, l’initiative aurait sans doute été impossible avec les dégâts notables causés par l’attaque des pirates, mais à présent, l’endroit avait retrouvé son hospitalité d’antan, et plus encore. Elle s’installa en face de l’homme, son fils contre elle, relevant les sourcils à la remarque de Valérian. « J’aimerais dire que c’est réciproque. » fit-elle en scrutant plus intensément son vis-à-vis. S’il avait toujours été cet homme ténébreux et consciemment distant, il y avait quelque chose que la grecque ne lui reconnaissait pas. Elle n’aurait su déchiffrer la noirceur qui assombrissait son visage. Etait-il seulement maussade ? Contrarié par l’accueil ? Son âme était-elle encore en proie à d’insatiables fantômes qui s’amusaient à le torturer ? Impossible à dire. C’était comme si leur lien, leur connexion s’était rompue brutalement. Elle avait l’impression étranger et désagréable de ne plus être en mesure de lire à travers ses prunelles noires.
Un souffle lui chatouilla les narines. « Les guirlandes sont dans la forêt. » répliqua-t-elle avec un demi sourire. Le pire ? C’était la vérité. Ils avaient décidé de piéger la forêt et de rendre l’atmosphère si inquiétante, si terrifiante qu’ils espéraient que cela suffirait à en dissuader la plupart des simples curieux. « A ce propos, évite de t’y aventurer seul. » Il serait triste qu’il s’empale sur un pique pour une envie pressante. « Je préfère en effet. Ton filleul aura déjà bien des épreuves à affronter dans cette vie, autant ne pas l’empoisonner dès le départ. » affirma-t-elle avec un sourire avant de soupirer. « Tu disais avoir des nouvelles de Fort Ward ? » enchaîna-t-elle, comme soucieuse de ne pas s’écarter du chemin balisé. Ils étaient ici pour les affaires, rien d’autre, n’est-ce pas ?
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