Un mouvement de pied ragé contre une caisse la faisant presque voler et qui pourtant ne bougeait à peine pas de quelques centimètres. Les cent pas dans la tente, profitant de ce moment seul pour essayer de compartimenter les émotions qui était en elle. Cela n’était pas la première fois qu’elle perdait une amie en mission, un sœur de combat, elle avait su gérer, elle avait su mettre de côté cette colère qu’elle avait ressentis, surement car la plus part du temps elle était en mission et n’avait jamais eu le temps de prendre correctement l’information, peut être parce que mettre cette douleur de côté était surement plus simple. Et même si, elle était toujours militaire au fond elle, cette mort… cette mort, elle n’avait aucune envie de compartimenter et là encore elle cherchait le pourquoi. Pourquoi cette mort semblait la toucher plus qu’un autre

Quoi qu’il en soit, elle s’était assise sur sa couchette, avait pris ses mains dans l’une et l’autre serrant les dents essayant de reprendre son calme inspirant doucement, puis expirant. Le regard dans le vide, elle venait poser son front sur ses mains, fermant les yeux, essayant de comprendre comment cela avait pu arriver. Leo n’était pas une bleue, elle était même sous plusieurs aspect meilleur militaire qu’elle, c’est ce qu’avait toujours pensé Ash, du moins au sol, car dans les air ça personne ne pouvait la battre. Alors pourquoi, alors que le groupe était revenu, ils avaient dû annoncer que son amie, celle qu’elle considère même comme étant une de ses meilleures amies n’était-elle pas revenue, encore une de plus qu’elle perdait… Les larmes lui venaient aux yeux, provoquant un léger rire de la part de l’ancien pilote se disant que cela était nouveau, un rire nerveux venant ensuite se faire entendre, le temps de laisser passer ce moment, même si elle faisait tout pour qu’elle cesse.

Une main venant chasser le liquide à ses paupières, elle se relevait, remettait en place la caisse qui avait subi le courroux de sa colère, sortant ensuite de sa tente, se disant qu’elle devrait faire comme à son habitude durant ces périodes, aller s’entraîner. Alors elle était partie courir un peu restant en vue du camp, tournant même autour de celui-ci pour éviter tout problème. Elle courant doucement, puis faisait monter son cardio petit à petit. Et alors que son esprit se concentrait sur son rythme cardiaque, sur son souffle jusqu’à le perdre. Puis elle s’arrêtait, quelques instant, tournant sur elle-même, voyant Levi qui s’était rapproché. « Ça m’aide à ne pas y penser. » Parole prononcée dans un essoufflement, les mains posées sur ses hanches. « Ca n’affectera pas mon job. » Non, ça, elle en faisait un point d’honneur. Elle avait juste besoin d’évacuer, c’est tout « Promis, m’entraîner m’aide juste à évacuer un peu tout» Cela était son exutoire. « Et toi ça va ? » Question sûrement des plus inutiles car elle ne sait même pas si co-Leader était proche ou non de Leo

La nouvelle est tombée trop vite, trop tôt. Quand on gère une équipe - ce que Levi a honnêtement en horreur - faut avoir à faire à ce genre de découverte. Des morts dans les rangs, des accidents qui arrivent au mauvais moment. Quoi qu'il n'y a probablement jamais de bon moment pour mourir, mais ça, c'est un autre débat. Lui en est rendu à ne pas vraiment savoir quoi dire. Il n'y est pas sensible, et c'est tout son problème. C'est Maddie qui a pris en charge la chose, en comprenant qu'il n'en serait pas capable.

Certains diront qu'il a besoin de progresser là-dessus, mais lui n'a jamais été du genre à croire que simuler des émotions ou de l'empathie soit vraiment la bonne chose à faire. Sans doute qu'il ressent des choses. La frustration, la colère, l'agacement. Et puis, le respect. C'est sur ça qu'il se concentre lorsqu'il pense à Leokadia. Au fait qu'il la respectait avant sa mort, qu'il a compté sur sa présence sur le terrain, plusieurs fois. Mais outre ça, les gens qui lui manquent vraiment, il ne les compte que sur les doigts d'une main. Ses enfants.

La cigarette au bec, l'homme scrute les allées et venues d'Ashley, qui se dépense, sans doute trop, pour effacer la douleur. Quand elle ralentit enfin, à bout de souffle, les mains sur les cuisses, c'est lui qui lui fait face : Redresse-toi, exige-t-il fermement de sa part. En est-elle capable ? Il en doute, parce qu'elle se flingue pour oublier, et que s'il comprend pourquoi, il trouve ça absurde aussi. Elle s'explique, sans bredouiller, elle se répète quand même. Elle a besoin de se justifier.

Le regard de Levi est froid, comme souvent. Il ne répond pas par la compréhension là-dessus : Ca n'affectera pas ton job ? Si demain y'a un problème et que t'arrives à te faire mal pour "évacuer un peu tout", on fait quoi ? Demande-t-il, trop sèchement pour ne pas souffrir le reproche : Leokadia n'était pas mon amie, pas une proche non plus, alors t'en fais pas pour moi, rétorque-t-il. C'est triste, mais c'est malheureusement commun, on finit par se blinder, a-t-il jamais trouvé ça triste ? Non. La mort est ce qui fait depuis toujours partie de son quotidien. T'as encore besoin d'évacuer ?

Un soupir sortait d’entre ses lèvres à la réflexion de Levi, un peu trop dramatique sur cette séance d’entraînement. Et en même temps, ne savait pas si cela était juste de l’inquiétude où alors juste son côté froid et distant qui parlait sans prendre de gant. C’est donc sur un ton décontracté qu’elle répondait au leader du groupe, un peu sur un ton désinvolte qui montrant qu’il ne fallait pas autant exagérer « Relaxe Levi, c’est juste un peu de cours à pied je ne vais pas crever pour si peu. » Ce n’était nullement une petite course à pied qui allait la tuer, elle avait juste besoin d’évacuer la frustration qu’elle avait ressentis face à la mort de son amie, se vider l’esprit comme elle l’avait toujours fait. Alors, oui, pour Ash, Levi exagérait dans ses propos, d’ailleurs, c’était un peu exaspérer qu’elle avait commencé à marcher tranquillement récupérant de sa course à pied, prenant les inspirations doucement écoutant ce que l’ancien agent du Mossad lui disait.

Et une chose dont elle ne pouvait qu’être d’accord avec lui, c’est que les morts faisaient partie de leur vie, pour eux depuis plus longtemps que la plupart des personnes réunies dans ce camp « Tu n’as pas tort. » Mais même s’ils sont habitué depuis des années à la disparition des gens qui l’entouraient, des leurs frères d’armes, Ash ne pouvait s’empêcher d’avoir de ce sentiment de perte qui venait de s’insinuer en elle. Alors, même si les deux jeunes femmes ne s’étaient pas connue pendant longtemps, Ash avait pu compter sur Leo, comme elle avait apporté le sien à la cheffe militaire de ce nouveau groupe. Elles s’étaient toute deux lié d’amitié, une de ces amitiés qui lui avait semblé solide et voilà qu’elle n’était désormais plus là. « Mais ça ne nous empêche pas de nous attacher aux personnes que l’on côtoie. À force de vivre certaines choses des liens se créer et Leo était devenue une amie.» C’était donc un coup dur pour Ash qui avait l’impression d’avoir retrouvé un peu de ce qu’elle avait perdu avec Beth et à qui on avait arraché encore une fois une personne qui comptait pour elle. Puis ces personne au fil du temps était ce qui ressemblait le plus à une famille. « Non c’est bon. J’avais finis. » Son souffle revenait à la normale, ainsi que son rythme cardiaque qui avait ralenti.

Elle tournait la tête vers Levi, curieuse de la raison de sa venue auprès d’elle, car avec son attitude, cela lui semblait peu probable qu’il soit inquiet pour l’ancienne capitaine de la US army. Elle ne disait pas un mot pendant quelques instants puis, enfin demandait à celui qui l’avait rejoint et sermonner pourquoi il était venu là voir.« Tu voulais me voir pour quelque chose en particulier ? Car je suppose que si tu es là ce n’est pas juste pour faire la causette.» Et a dire vrai, avec Levi, Ash avait toujours du mal à savoir sur quels pieds danser, ne sachant pas comment prendre le jeune homme, ni ce qu’il pense, ou encore si cet air froid n’était qu’une façade pour cacher ses vraies émotions afin de se protéger en quelques sort. Levi était un mystère pour la jeune femme qui le connaissait que trop peu. Mais cela n’avait pas vraiment d’importance, elle apprendrait à le connaître petit à petit, sûrement.

Ce n'est tellement pas un problème que c'est le premier truc que tu viens me préciser, relève Levi d'un ton sec en fronçant les sourcils. Elle l'a sans doute pris pour un lapin de trois semaines, qui vient tout juste de naitre et qui ne connait rien au monde. Sans s'attarder sur le reste, le ton rassurant lui fait tout l'effet inverse le concernant, et puis, ça l'agace : il n'a pas besoin d'être rassuré à dire vrai, ça n'est pas ce qu'il attend d'elle de toute façon. Mais puisqu'il ne l'exprime pas, impossible pour les autres de le deviner de toute façon. J'ai aucun problème avec ça, c'est toi qui es pleine de contradiction, relève-t-il en fronçant les sourcils.

Un peu de sérieux. Il fait l'impasse sur ses confessions autour de Leokadia. Il ne veut pas faire mine de quoi que ce soit. Ni que ça l'intéresse, ni que ça l'ennuie. Il n'est pas vraiment intéressé pour des épanchements de circonstances, en trop grand pragmatique qu'il est. De toute évidence, on attend de lui qu'il soit apte à se confier et à écouter, mais c'est bien là tout ce que Levi ne sait pas faire. Etrange par ailleurs qu'il ait réussi à se mettre en couple avec une femme bien plus psychologue que lui. Bien qu'elle tente parfois de le psychanalyser sans vraiment faire mouche.

Oui, fait-il lorsqu'elle lui demande, après un silence, s'il veut quelque chose d'elle. Tu vas reprendre le poste de Leokadia, annonce-t-il fermement en fronçant les sourcils. Tu es la mieux placée pour savoir quoi faire à sa place, et je n'ai pas le luxe de laisser ça vacant en attendant que le deuil de tout le monde soit fait, ajoute-t-il. Il n'a pas très envie d'épiloguer, en fait, il n'attend qu'un oui de la part d'Ashley. Mais pour les autres, sans doute que le changement et la décision sont un brin violente : C'est soudain, mais il vaut mieux t'y préparer maintenant, certifie-t-il.