Je sais que je suis loin d'être prêt. Que j'ai encore beaucoup de progrès à faire avant de pouvoir espérer ne pas être un boulet à l'extérieur. Et je n'ai aucune envie d'être un poids pour Clayton, si un jour nous obtenons l'autorisation de partir à la recherche de Kassandra. Je sais que ça lui pèse que sa fille ne soit plus là, et j'avoue que... moi aussi. Sûrement pour des raisons très différentes, mais le résultat reste identique. C'est la raison pour laquelle j'ai décidé de reprendre activement l'entraînement. De faire en sorte de devenir meilleur, pour enfin essayer d'être à la hauteur. Parce que bon, on va pas se mentir, actuellement à part être la réserve d'immunité à la Peste Rouge... J'ai pas trop d'autre intérêt. C'est pas très agréable.

Alors j'ai demandé autour de moi et Ashley a accepté de me venir en aide. J'espère sincèrement ne pas lui faire perdre de temps, mais je crois que d'un autre côté ça doit quand même faire « plaisir » de voir que je ne me contente pas de me reposer sur les autres sous prétexte qu'ils ont besoin de moi contre la maladie. Au moins, ça prouve que je suis pas un connard. Enfin, je crois. Et je dis pas que ça fait des gens qui arrivent pas à se défendre des connards ! Pas du tout ! C'est juste que... Oh et puis zut.

Heureusement, je suis sorti de mes pensées par les bruits de pas de quelqu'un s'approchant de moi. J'ai de l'avance, comme toujours, au point de rendez-vous donné par la femme. Et dès que je la vois arriver, immédiatement le stress monte. Parce que j'ai vraiment peur d'être trop nul et qu'elle perde patience. Déglutissant presque difficilement, je me redresse comme si je tentais de me mettre au garde à vous et la regarde. Encore merci d'avoir accepté de consacrer de votre temps pour mon entraînement. Je vous promets de faire mon maximum pour ne pas vous décevoir ! En soit, je ne suis pas si nul que ça avec une arme à feu entre les mains, mais comme l'a dit Clayton, un fusil à pompe ça fait pas tout. Alors il faut impérativement que j'apprenne à me diversifier.

C'est marrant, parce que c'est pas la première fois que quelqu'un me répond quelque chose du style quand je présente mes remerciements. « C'est normal ». En réalité, cette normalité dépend du point de vue de chacun. Et ce qui semble parfaitement banal pour bon nombre de personnes dans ce groupe ne le serait pas pour la plupart des gens qui se trouvent en dehors de celui-ci. Mais au lieu de me lancer dans un argumentaire sur pourquoi je trouve que ça reste très gentil de sa part, je me contente de hocher la tête. Parce que, clairement, je ne suis vraiment pas assez à l'aise dans les conversations pour faire une chose pareille. Et puis de toute manière, ça ne changerait pas grand chose à la finalité.

Prenant une grande inspiration, j'écoute les questions que me pose Ashley avant de me racler la gorge et de lui répondre. J'ai plus l'habitude d'utiliser mon fusil à pompe. Mon frère, enfin l'un d'eux, était militaire avant. Alors il m'a appris à me servir d'armes à feu. Pas longtemps, malheureusement... Ou en tout cas pas assez pour que je sois vraiment à l'aise. C'est sur le tas que j'ai appris à me servir d'un fusil à pompe. Alors je suis moins à l'aise avec les simples armes de poing. Je connais les bases, mais ça s'arrête là...

J'ai forcément un pincement au cœur en repensant à mon frère, mort moins d'un an après le début de l'épidémie, et je baisse le regard un instant. Il me manque. Ils me manquent tous. Et je suis certain que personne n'aurait imaginé que je sois le dernier de la famille à être encore en vie. Alors que finalement, j'étais certainement celui qui était le plus prédestiné à y laisser ma peau en premier.

Je me redresse malgré tout, tentant d'appliquer les conseils de Clayton et de me tenir droit en toute circonstance, relevant le regard vers la femme qui a bien voulu consacrer de son temps pour moi. Autant ne pas lui en faire perdre davantage avec mes états d'âme, j'imagine. Du coup, les armes de poing. C'est avec ça que je suis le moins à l'aise. Enfin, si ça vous va. De toute manière, je suivrai à la lettre ce que vous me direz ! Au moins on ne peut pas douter de ma motivation, c'est déjà ça.