|La journée commençait pas si mal, la cantine avait demandée de la rigueur et de l'efficacité, les gens semblent apprécier la cuisine quand les ingrédients demandés arrivent à temps, mais je ne peux pas en vouloir aux personnes qui gèrent les récoltes ou les fouilles en ville.. je ne connais que trop bien ce qu'il y en abondance là-bas.

J'étais à une table dehors, seule, réhaussant le rembourrage de mon chapeau fétiche. dans une concentration sérieuse, je prenais l'aiguille et le fil pour faire des coutures intérieures et discrètes pour solidifier les contours et faire tenir l'intérieur du chapeau country typique américain.

Il ne faisait pas trop froid, alors je m'étais permise d'ouvrir ma veste pour plus de souplesse dans ma tâche. Mes yeux ne regardaient nulle part ailleurs que sur la tâche actuelle, les gens passèrent à côté de moi sans que je ne remarque leurs regards ou même leurs salutations, et c'est mieux ainsi je pense.|

Anna-Maria avait déjà accompli beaucoup en réussissant à s'intégrer et à gérer des postes et porter des responsabilités. Sous les conseils des gens d'ici, elle essaye également de parler au mieux, essayant encore une fois de s'intégrer et oublier les habitudes qu'elle a pu prendre dehors.

Sa fatigue physique avait diminué drastiquement, elle était en bonne santé et semblait normale à vu d'œil, seulement un physique amaigri. Pour le reste, elle n'était pas sale ou autre, elle portait de beaux vêtements pratiques, qui lui ont été donnés récemment et son hygiène de vie semble tout à fait correct et en adéquation avec les moyens du camp.

Durant la pause qu'elle s'accorde, après avoir travaillé, elle se permet également de fumer une de ses précieuses cigarettes qu'elle semble troquer contre ce qu'elle peut gagner ici, en échange de service ou d'objets. Pas à pas, son chapeau semble prendre une meilleure forme et cela fit apparaître un bref sourire sur son visage, qui semble s'illuminer; c'est pllutôt rare de la part de la jeune Polonaise.

Alors qu'elle s'attelait à une tâche dont elle était nullement experte rien qu'à la façon dont elle tient l'aguille, elle entrecoupait ses gestes où elle abandonnait l'aguille pour une bouffée de sa cigarette. quand elle vit une femme approcher, jeune, d'une blondeur qu'elle ne pouvait comparer à la sienne, comme une couleur de cheveux qu'elle n'avait jamais pu encore réellement relever jusqu'ici.

Visuellement proche de son âge, Anna-Maria pensait que ça ne pouvait pas être une mauvaise idée de faire connaissance puisque l'inconnue semble déjà avoir sauté le pas tandis que la polonaise elle, avait gardé pendant quelques secondes le silence.

- "Bonjour."

Répliqua t-elle d'une manière presque froide, pourtant, aucune agressivité ou mise à distance étaient présentes dans l'accent des mots qu'elle venait de prononcer.

|Je ne sais pas si je voulais mettre le pied à l'étrier concernant les relations humaines mêmes les plus basiques, mais je suis ici avec cette aiguille, cette fumée et ma solitude; pourquoi pas juste poser mes sales habitudes et apprendre à connaître cette jeune femme. Je n'avais pas l'air d'être la plus agréable des femmes du camp, mais j'étais pas pour autant une sale peau, je la laissa s'asseoir et j'hochai de la tête concernant les instructions qu'elle voulait me donner sur la couture, mais elle n'était pas allée plus loin par hésitation je suppose.

Voyant qu'elle n'était pas des plus à l'aise, je me disais que j'y étais évidemment pour quelque chose, alors j'éteignis ma cigarette avec ma botte et je tendis ma main poliment de manière sympathique, le tout en me présentant en y mettant un minimum les formes.|

- "Je m'appelle Anna-Maria, et toi ?"

Anna-Maria avait un regard qui en disait long sur elle, une personne abondamment humaine qui avait souffert, voilà un peu l'histoire de la Polonaise de manière vague, pourtant, c'est tout ce qu'on pouvait en résumer. Elle sourit brièvement et semble maintenant plus agréable qu'à l'approche de celle-ci, semblant maintenant plus ouverte qu'au début.

Ses cheveux pendaient à ses épaules et ils étaient d'une blondeur sans pareille, cela revenait surtout à cause de l'éclat qu'ils renvoyaient. Pour ce qui est de son visage, elle n'avait pas à rougir, elle est d'apparence très jolie bien que la fatigue et le monde actuel ont eu un impact certain sur les choses qui peuvent apparaître ou ne plus apparaître, comme plus de cernes mais bien moins de sourires sur son visage.

Pour ce qui est de ses affaires, elle était vêtue d'une veste marron clair mi-saison pour homme, lui taillant un petit peu grand sur les épaules et les manches, mais cela était confortable et ça lui allait bien. Elle portait également un pull basique beige avec un t-shirt, un jean et des bottes types Timberland légèrement usées par le temps et la marche.

|J'appréciais les conseils donnés par Ahwa dont je viens fraîchement apprendre son prénom. Bien qu'il met pas facile à prononcer, cette femme semble peu anodine, de part ses expressions, son malaise social ou simplement l'impression qu'elle me donne.

Je pose le chapeau à côté de moi après avoir correctement effectué ce que pouvait m'avoir dit la blonde. J'avais décidé de finir cela plus tard car la couture n'était pas un passe temps que je chérissais plus que ça, pire je n'étais pas douée à entretenir cette activité. Bien que l'ambiance est étrange, j'essaie d'instaurer une certaine sympathie en insistant pas et en répondant à ses interrogations.|

- "Merci pour les conseils, ce sera beaucoup mieux ainsi."

Un sourire sincère se dessine sur son visage, on pouvait voir rien qu'à ses traits qu'Anna-Maria était une personne qui s'occupait des autres avant tout ça, dans sa façon d'être prudente et de renvoyer l'ascenseur sur le moment, même si elle pense qu'elle a perdu cette facette d'elle même depuis longtemps déjà.

Tentant de se remémorer précisément sa venue ici, elle vient prendre un air plus discret en ne regardant pas directement dans les yeux son interlocutrice.

- "Oui c'était étrange et ça l'est aujourd'hui. Quelque fois je me réveille et je pense que je suis de l'autre côté du mur, loin du confort, de la sécurité et des vivres tous les jours. Il y a des gens bien ici et je suis reconnaissante de ce qu'on m'apporte ici, je suis contente d'aider les gens également."

Après ce petit monologue, un court silence s'installe tandis qu'elle semble fixer dans le vide au niveau de ses pieds, pourtant, aussi rare que ça l'est, elle vient reprendre la parole pour poser une question à son tour.

- "Tu es d'ici de base ? Je parle avant tout ça, ou comme moi tu es de plus loin ? Car j'ai vu quelques personnes qui m'ont parlé et pour la plupart ils sont là depuis un moment et originaire de Seattle ou de pas trop loin d'ici.

Dans sa voix, on pouvait ressentir un manque certain à sa ville qui l'a vu naître, à ses grands-parents polonais et ce qu'elle a appris dans le nord des États-Unis d'Amérique. Bien qu'ici c'est là où elle vit maintenant, ce mal du pays ne l'a jamais vraiment quitté

Je m’étais faite à l’idée de cette conversation et ce malaise qui s’était instauré au début semble doucement s’envoler; alors que tout semblait s’installer, mon regard semblait plus calme et ma garde était tombée, ayant observé la nature calme et simple de la jeune femme en face de moi.

Alors qu’elle semble doucement répondre à ma question, en apprenant même plus sur elle, je viens sourire sur son origine ici aux États-Unis et même qu’elle soit née en Ukraine, en Europe de l’est comme mes origines à moi, que je chéris tant.

La laissant finir ce qu’elle avançait, je me tenais sur mes coudes, le dos un peu plus rond car la fatigue se faisait ressentir aujourd’hui malgré qu’il ne soit pas si tard dans la journée; une bonne nuit de sommeil me ferait du bien, c’est certain je pensais très brièvement alors que je baillais discrètement pour ne pas paraître impolie.

Alors que j’allais prendre la parole après un silence assez bref pour moi mais pas pour mon interlocutrice apparemment, car elle décide d’aussitôt rebondir sur le fait que je n’avais pas terminé la couture de mon chapeau par ses conseils astucieux.

Ne m’attendant pas à la blague que je finis par capter quelques secondes après, je ne peux que sourire, ne trouvant pas un réel entrain à rire; déjà que c’est un son qui ait longtemps resté muet chez-moi, encore aujourd’hui.

- “Non ne t’en fais pas, il n’y a rien d’urgent, mais si le look de ce chapeau te fait si peur, je ne t’empêche pas à t’occuper tes mains avec mon fil et l’aiguille sur la table.”

Je souris avec une certaine aise maintenant, puis je reviens sur ce qu’elle avait avancé plus tôt.

- ”Tu as dit que tu étais d’Ukraine, tes parents ont emménagés à Los-Angeles ensuite ou ce n’était juste pas prévu ? Je suis désolée si je suis trop indiscrète, dis le moi si c’est le cas.”

Dès qu’elle finit à faire passer sa blague et les échos de son rire étrangement rassurant, Ahwa vient me poser une dernière question, celle que je redoutais un peu. Venir secouer le cocotier qu’est ma tête pour en laisser sortir que de mauvais cauchemar et souvenirs douloureux, je retrouve pendant trois secondes mon mutisme si dur à me débrasser pour enfin perdre de nouveau ce visage si fermé et triste. La gorge nouée, je viens prendre la parole en toussant rapidement d’abord pour correctement faire sonner ma voix.

- "Oui.. hum.. j’étais professeure pour les enfants à Los-Angeles, tu vois on aurait pu se croiser certainement. J’aimais ce travail, ils étaient incroyables ces enfants. Je leur apprenais toutes sortes de choses comme le Polonais et les sciences, c’était ce que je préférais leur apprendre par dessus tout car je réussissais à m’approcher encore plus d’eux. Mais c’est du passé maintenant.. je ne peux juste pas m’empêcher de penser..”

Remontant mon regard alors que celui-ci s’engouffrait dans le vide alors que je me perdais dans mes mots, je me coupe vite avant de faire mine de rien et de dire:

- ”Rien, oublie.. les choses ont changé et faut savoir enterrer ses souvenirs, il me faut encore du temps de mon côté.”

Cette phrase sincère que je viens de sortir, me rappelle enfin encore sur quoi je dois travailler; alors que je fixais la mystérieuse boîte de la blonde aux airs singuliers.