C'est des conneries. Assène à nouveau le brun à l'attention de Ramirez, buvant une rasade généreuse de café pour espérer oublier son mal de crâne de la veille. Nick et ses grandes idées de soirée au bar... Il allait sérieusement falloir baisser le rythme à terme. C'est l'seul truc qui te perturbe sur tout ce que je viens d'expliquer ? s'amuse le mexicain alors qu'il lève les yeux au ciel. Se contentant d'un bref grognement en guise de réponse, avant de se laisser tomber sur l'une des chaises à disposition. Tu veux pas plutôt me dire qui m'a ramené hier ? Ces nouvelles inquiétantes ne sont pas pour l'effrayer, dans l'immédiat. Pas pour deux photos floues et une vidéo amateur que Ramirez agite comme un dément. Et s'il espérait un peu de silence pour ce début de service, ou au moins de croiser Nick aux abonnés absents, c'est finalement le grésillement de la radio qui lui fait relever la tête de sa tasse, fronçant les sourcils. On parie qu'c'est ta copine ? Se moque finalement l'hispanique en venant pianoter sur son portable, l'air de dire qu'il ne comptait pas lever son cul. Roulant des yeux avant de se relever prestement, réceptionnant le talkie.

Ici Waleriuj, de la 119. Vous pouvez répétez ? Fusillant en silence son collègue du coin de l'oeil, attendant le retour.

« Caserne 119, vous me recevez? » Pas de réponse, même après la deuxième demande. Je fronce les sourcils, devant mon écran. Je ne sais pas si je suis en train de devenir folle, si je m'inquiète pour rien, mais tout semble dégénérer un peu partout, depuis quelques jours. Et quand il question de la caserne 119, évidemment, c'est assez pour m'énerver encore plus. Je me force à vérifier quelques paramètres, pour la forme - mais quand j'active mon micro pour parler à nouveau, c'est sa voix qui grésille dans mes oreilles.

Si j'ai envie de déconner, de lui faire savoir que je note à quel point son ton semble le trahir complètement, j'ai pourtant plus urgent à lui transmettre.

« Whiskey-2322, j'ai un 240 en cours, possiblement un 241 et un 11-71 pour lequel vous êtes requis sur le champ. » Je prends le temps de respirer, avant de continuer.

« Procédez en code 3 à l'intersection de St-Anderson et de la sixième, les victimes sont à l'extérieur d'un véhicule tout terrain qui serait possiblement accidenté. » Le bordel, quoi. D'où le sérieux dans mes mots. Surtout que je suis encore en communication avec le type qui me rapporte le tout, au téléphone. Il panique, et pas qu'un peu. J'imagine sans mal le chaos qui règne là-bas, surtout que les forces de l'ordre sont déjà impliquées.  

Je le rassure, lui demande de s'éloigner du feu et de me donner plus d'informations - mais il ne parle que de monstres, et je peux entendre des hurlements avant le silence complet. La ligne se coupe. Je tente de recomposer, sans succès. Un soupir s'échappe de mes lèvres, frustrée, avant de retourner sur la fréquence de mes équipes d'urgence.

« Notez que je viens de perdre le fil de communication. » Un élément vital pour leur apporter plus de détails. Une belle journée de merde qui commence, finalement.

Spoiler:

Santa Madre, elle est pas d'humeur ta femme.
Mais tu vas fermer ta gueule ? Peste le brun alors que Ramirez s'étrangle et qu'il essaie d'entendre les termes de sa collègue sous le grésillement de la radio. Les communications sont mauvaises, le résumé catastrophique et surtout ... Le plus gros de la 119 déjà en extérieur. Reçu Alpha1018. Vous tenez l'coup ? qu'il s'enquit néanmoins auprès de son interlocutrice, alors qu'il se saisit de sa veste avant de s'engouffrer dans le camion à la suite de Ramirez qui prends déjà le volant. Si tôt le matin et déjà un carnage en devenir... Et la sirène à beau hurler sur la route, les véhicules semblent se refuser à se dégager pour leur permettre de passer. Pestant à cette attente alors qu'il vient reprendre le talkie.

Alpha1018, sommes en route mais la circulation est bloquée à l'entrée de St Anderson. Et impossible de savoir à cause de quoi, d'ici... Etouffant un juron dans sa langue paternelle alors que son collègue en vient à leur hurler de dégager le passage sans grand résultats, alors qu'il reprends à l'attention de sa coéquipière.

Un retour de communication des victimes ? Une pause, avant de réceptionner la sacoche à l'arrière. J'y vais à pied. Ramirez vous fera un sit rep.

Je filtre tout un tas d'appels, mes collègues aussi. Le monde entier semble se préoccuper de ce qui se passe à cette putain d'intersection, au point où personne n'est capable de traiter convenablement l'information. Les lignes sont mauvaises, en plus - comme pour ajouter à la galère. « 10-4, bien reçu. C'est l'enfer, ici, je tente de vous obtenir plus de renseignements. » Je viens ensuite m'éclaircir la gorge, à sa question. « Tenir le coup, c'est le boulot. » que j'ajoute avec peut-être trop de sérieux, avant de retourner à ce qui se passe à la centrale.

Bientôt, la 119 résonne à nouveau dans mes tympans.

« Comment ça, bloquée? » Évidemment, il faut aussi que la route devienne hors d'accès. Je constate que quelque chose cloche bel et bien, parce que les temps de Ramirez et Waleriuj sont normalement dans les meilleurs. Ce n'est pas habituel, pour eux, de se retrouver face à une telle situation - d'être incapable de trouver une solution, lorsqu'ils font face à un imprévu. Je fronce les sourcils, avant d'enclencher à nouveau. « Je vous trouve un itinéraire alternatif, un instant. » Mais je réalise peu à peu que ce sera impossible, avant de parler à nouveau.

« Négatif, Whiskey-2322. » J'aimerais tellement pouvoir lui répondre autre chose, pourtant. Lui dire que j'ai finalement plus de détails. Sauf que je n'arrive à rejoindre personne, et les appels sont étrangement en train de mourir, à présent.

Je me lève de ma chaise, le pire, quand il annonce qu'il part à pied.

« Whiskey-2322, dois-je vous rappeler que c'est contre le protocole - » Il n'est plus là. Je grogne, tentant de ne pas perdre mon sang froid. J'ai vraiment une impression de merde, comme une alarme qui s'active dans chacune de mes veines. Je ne capte rien à rien. Je me concentre sur mon écran, venant faire apparaître la caméra de circulation qui couvre l'endroit. Je plisse les yeux, horrifiée.

« À toutes les unités, notez qu'un suspect armé est sur scène, 240 en cours. Besoin de renforts immédiatement. »

Au diable le protocole. avait-il manqué de répliquer à son interlocutrice, quoi qu'il se soit retenu. La tension dans sa voix en disait long sur la situation catastrophique dans laquelle ils se trouvaient tous, bien plus encore sitôt qu'il remonte vers la destination et que les premiers cris se font entendre. Et les civils fuyant dans le sens opposé au sien lui assure dans un murmure glaçant que la situation est sans doute bien pire que de raison.

Il y avait eu les coups de feux, d'abord. L'incitant à s'accroupir derrière un véhicule renversé, alors que l'odeur de l'incendie le prenait à la gorge. Evoluant tant bien que mal, avant de comprendre qu'un forcené s'acharnait à tirer sur d'autres mais ... Le bruit mat des balles s'enfonçant dans la chaire n'arrache pas un cri. Pas un gémissement de douleur autre qu'un râle qui à le don de lui glacer le sang, alors qu'il ose se relever pour se rapprocher un peu plus. Et la scène sous ses yeux lui paraît irréelle. Mélange étrange de corps en flamme qui ne semblent pas craindre la douleur, là ou une moitié de corps se traîne au sol en direction du dernier homme encore debout. Par ici! Il ne cherche pas à discuter, sitôt que la panique se lit dans le regard du type. Devinant un uniforme de police sous le sang qui macule ses vêtements, l'aidant à sauter par dessus la voiture la plus proche pour le rejoindre. Mais alors qu'il amorce un mouvement pour rejoindre l'homme séparé de ses jambes, c'est l'apocalypse. Mélange horrifique de pleurs et de supplications de la part de son blessé, alors qu'il n'est pas sûr de tout suivre. Je vous ramène en sécurité, d'accord ? Et à cette promesse, l'homme ne se fait pas prier alors qu'ils rejoignent tant bien que mal Ramirez qui blémi à leur retour. Alpha-1018. Les mots lui manquent, se refusant à voir ce qu'il à vu. Hésitant, avant de reprendre. Un agent de police en état de choc, l'endroit est impraticable. Apparemment le seul survivant. Apparemment.

« À l'écoute. » que je lâche avec presse, en entendant mon matricule grésiller dans la radio. « À l'écoute - » que je répète nerveusement, quand le silence est ma seule réponse. Mais les informations qui parviennent finalement jusqu'à mes oreilles ne peuvent que me faire frissonner d'horreur. Je tente de garder mon sang froid, comme je le fais toujours normalement. Mais quelque chose me perturbe, un sentiment étrange qui hurle en moi. J'ai l'impression que quelque chose cloche, quelque chose que je peine à comprendre.

« Êtes-vous en mesure de le transporter en centre hospitalier? La route est-elle complètement bloquée des deux côtés? » Mais avant que je ne puisse continuer, je peux entendre le murmure de mes collègues, la panique dans leur voix. Tous semblent demander des renforts, de l'aide d'un superviseur, des informations supplémentaires. Je regarde autour de moi, réalisant que la merde est réellement à nos portes. Et quand les ordres de nos supérieurs tombent, je ne tarde pas à contacter mon équipe, sur les ondes. Je n'ai pas tous les détails - ils ne veulent pas m'en donner - mais j'ai assez de jugement pour capter que les choses sont sérieuses.

« Vous avez ordre d'évacuer, Whiskey-2322. Ils envoient l'hélicoptère. Rentrez à la base, votre capitaine aura des informations cruciales à vous transmettre. » Ma voix est grave, nerveuse - et c'est bien le signe que rien ne va.