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Re: Pourquoi ne serais-tu pas l'appât ?

Dim 31 Jan 2016 - 12:47

Je balance mes jambes dans le vide et dodeline de tête. Les derniers mots d'Axel y tourbillonnent. « Elle est surement mieux là où elle est maintenant. » Là où elle est... Morte ? Ou seule ? Ou en train de batailler contre quelques tarés violents peut-être. Je tente de faire appel à mon optimiste habituel mais j'ai comme l'impression qu'il tape une bonne grosse sieste actuellement.
Et quand bien même elle serait à l'abri, quand est-il de mon père ? De son côté, ça a été silence radio depuis plus le tout début. Au moins, j'ai un petit espoir qu'il ait pu être ailleurs quand tout est parti en vrille. Dans un autre pays, là où la situation serait moins catastrophique.
Et puis il y a toutes ces autres personnes que j'ai connu. C'est facile d'oublier tout ça quand on vagabonde ou qu'on se prend pour un pirate, mais là... Là je suis seule. Stew n'est là ni pour me protéger, ni pour me rappeler que les lamentations, c'est bon pour ceux qu'on menace, pas pour moi.  
D'ailleurs Stew, est-ce qu'il va disparaître lui aussi ? Est-ce que c'est en pensant à lui que je me rongerai les sangs, posée sur un comptoir la prochaine fois que je me retrouverai coincée par les rôdeurs ? L'idée me donne presque un haut le cœur ; parce que c'est mon ami et que je tiens à lui, mais aussi parce qu'à cet instant, je me mange la réalité en pleine face : sans lui je ne suis absolument rien. C'est lui qui a assuré notre survie jusqu'ici. Moi je n'ai fait que suivre et obéir. Sans lui, je me donne une petite semaine, pas plus.

Et puis en fait, une semaine, c'est carrément présomptueux. Il suffit que je regarde autour de moi pour m'en rendre compte. Plus ou moins une heure qu'on est séparé, et je me retrouve bloquée dans moins de 10m² en compagnie d'un type qui pourrait me trouer la peau d'un moment à l'autre si l'envie lui prenait.
J'ai de la chance d'être tombé sur quelqu'un d'à peu près équilibré. À première vue tout du moins.
Mais enfin, si je dois trouver un point positif dans toute cette histoire, c'est qu'à défaut d'être rassurante, la vue du canon me remet un peu les idées en place.
C'est pas le moment de pleurnicher sur son sort et celui de papa maman là, Axel a baissé son fusil, mais c'est pas pour autant qu'il l'a laissé tomber. La situation reste critique et ma seule arme, c'est un minimum de jugeote.
Alors on reste concentrée, on évite de se louper et par dessus tout de le mettre en colère.

À la place, j'écoute sagement ce qu'il raconte, en partie parasité par les grognards qui s'agitent toujours dehors, jusqu'à ce qu'il m'interpelle.

« Bah... Je sais pas trop. Je commence avec un haussement d'épaule, gagnant un peu de temps pour réfléchir à ce que je pourrais bien inventer pour la suite. Je crois que j’espérais retrouver ma mère. Ou au moins Franz... Et puis, je vais surement passer pour une froussarde mais je suis pas vraiment rassurée à l'idée de faire la route jusqu'à Northgate toute seule. Tu vois entre les charognards et certains hommes. » Sans y faire très attention, je me frotte la nuque en grimaçant. Je trouve ça assez ironique de prétendre fuir certaines personne quand je suis en fait exactement ce que je dis redouter.

« Tiens j'y pense ! T'as parlé de café librairie, c'était vers où exactement ? C'était bien le genre d'endroits dans lesquels j'avais l'habitude de traîner avant. Je lisais beaucoup alors... » Alors j'essaie de rebondir sur tout ce qui pourrait nous rapprocher. On ne va pas se faire d'illusion, il est hautement improbable qu'on finisse par sortir de là bras dessus bras dessous. Mais si je peux nous trouver quoique ce soit qui ressemble à un lien, j'aurais peut-être une chance supplémentaire de sortir tout court. Et ce sera déjà un bon début.
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Re: Pourquoi ne serais-tu pas l'appât ?

Mar 2 Fév 2016 - 18:36


    Elle prenait son temps pour réfléchir. En fait je sais pas si elle méditait sur ce que je lui disais, ou si elle était simplement entrain de chercher le moyen le plus adéquat pour ne pas dire le fond des choses, ou pas la réalité en tous cas. C'était étrange d'avoir sans cesse à peser ses mots comme ça, sacré capacité de l'être humain que de réfléchir trente-six fois avant d'aligner une phrase, comme si quelqu'un pouvait en avoir quelque chose à foutre. Enfin, évidemment que si elle me disait que ses dizaines de bonhommes attendaient son retour et la cherchaient j'en aurai quelque chose à foutre, mais savoir la raison du pourquoi elle était là à se balader seule ça me passait complètement au dessus de la tête. Mais je n'étais pas ce genre de personne mal élevé à envoyer bouler quiconque ouvrait la bouche, et de toute façon nous n'avions d'autres choix pour le moment que de rester là à attendre, alors je me contentais de garder mon air blasé par cette situation. Cette conversation me faisait presque penser à celles qu'avaient les gens dans la salle d'attente d'un médecin ; quand tu es au bord de l'agonie et que t’arrive à peine à parler, et qu'il y a toujours cette personne qui est étrangement loquace et se met à te déblatérer ses problèmes de santé. Quoi de plus horripilant ? Je pris donc son silence comme un instant de calme mérité ; elle pouvait réfléchir autant qu'elle voulait, de toute façon une fois sortis d'ici nous reprendre chacun notre route et ses mots n'auront plus aucun sens.

    La brune me parle alors de la raison pour laquelle elle traîne encore ici et je reste impassible en enregistrant ses mots. Peur de faire le trajet toute seule ? Est-ce que c'était vraiment mieux de rester ici toute seule à attendre que les choses s'arrangent ? Elle risque de rester ici seule pour toujours à ce train là mais ça elle a pas bien l'air de s'en rendre contre. Et si elle était partie, je me serais jamais retrouvé coincé dans ce pétrin. Tapotant des doigts sur le meuble où je suis assis, mon oreille s'habitue presque aux cognements à la porte.

« Tu trouveras bien quelqu'un un jour ou l'autre, au pire t'auras qu'à rejoindre un camp de réfugiés, y en a un paquet. »

    J'étais pas allé vérifié moi-même et en réalité j'étais même pas sûr que ces camps soient encore debout, mais qu'est-ce que ça foutait ? Si elle se décidait à y aller elle verrai bien par elle même. Je pouvais néanmoins comprendre ses craintes quand au fait de tomber sur ''certains hommes'' ; la situation avait fait ressortir le côté le plus vil des êtres humains et en tant que femme elle risquait bien plus de choses de moi. Je ne pu m'empêcher de penser à Carmen et Ana, j'espérais sincèrement qu'elles ne soient pas elle aussi seules là dehors. Secouant la tête pour m'ôter ces pensées, je posais mes yeux sur le sol d'un air un peu absent.

    Et Isla se remit à parler. Elle s'arrête donc jamais ? Et là faut croire qu'elle s'intéresse à ce que je faisait avant, comme si ça pouvait impacter sur quoi que ce soit. J'ai presque envie de lui répondre une connerie du genre ''content que tu sois pas illettrée'' mais je me dis que ça serait complètement sans queue ni tête ; bien que j'ai presque envie de pouffer en y pensant. Elle voulait savoir où s'était, soit, de toute façon c'est pas comme si un grand secret était caché là-bas ni quoi que ce soit d'autre. Haussant les épaules, je me décide à lui répondre.

« Il est dans le centre, vers Capitol Hill, ça s'appelle Café romancé. »

    Peut-être qu'elle connaissait, ou peut-être pas. Le café était assez connu dans le quartier et de nombreuses personnes y passaient ainsi que des habitués ; qui sait maintenant ce qu'ils sont tous devenus ? Peut-être qu'ils y passent encore de temps en temps, en traînant les pieds et communiquant avec des râles ridicules. En y pensant, cet endroit me manque quand même, tous ces livres ; dire que je n'ai pu en emporter qu'un seul. Reportant mon attention sur la demoiselle en face, je lui demande en haussant le sourcil, un sourire amusé sur les lèvres.

« T'avais le temps de lire entre tes cours et ton boulot ? Et tu lisais quoi hein ? »

    Pas que ma vie dépende de la réponse, mais ça ne me concernait pas directement et c'était une question des plus banales, alors pourquoi ne pas lui demander hein ? Un peu de légèreté ça ferait pas de mal, même si je ne pouvais m'empêcher d'avoir les muscles nerveux à rester cloîtré ici de force.
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