Page 1 sur 3 • 1, 2, 3
Abel Underwood ~ what I would do for you
Mer 11 Mai 2016 - 22:47
53 • Américaine • Agent artistique • Evergreen Ridge
Abel est un homme de la parole. Petit déjà, il était volubile, bavard. Il avait toujours à redire, toujours à argumenter, toujours à défendre, toujours à négocier. Dans un sens comme dans l’autre. Peut-être qu’il tenait ça de son père, avocat d’une grande boîte américaine, qui ne semblait pas capable de quitter sa fonction même lorsqu’il quittait son costume. Ce trait de caractère s’est inévitablement enrichi et développé au fil des années. Il est devenu orateur, presque mystificateur dans le milieu. Il n’avait pas son meilleur pour négocier à contrat, faire rallonger un cachet, voire trouver le travail là où il n’y en avait pas encore.
Intelligent et observateur, il apprend vite, comprend vite et a excellente mémoire. Il sait reconnaître les bonnes occasions, les bons plans, les endroits où il faut mieux se trouver à un moment donné. Un vrai opportuniste. Il ne se sert pas vraiment de ce talent pour lui-même, mais le résultat est le même, c’est sans doute ce qui en fait un excellent agent artistique. Il est tout le contraire d’un flemmard, parce qu’il peut passer des heures à triturer une difficulté dans tous les sens pour la transformer en solution, mais il aime pouvoir profiter des petites faveurs du hasard. Pourquoi faire compliqué quand on peut faire simple ? C’est sa devise. Dans son travail en tout cas, il ne laisse rien au hasard et sait développer des stratégies sur le long terme.
Malheureusement, ses qualités se transforment rapidement en défaut quand il sort du monde professionnel. On lui reproche régulièrement de trop parler. Ce n’est pas de sa faute, il aime la discussion, mais parfois… il en étouffe un peu le temps de parole de ses amis. Comme quand il reprend enfin contact avec de vieilles connaissance juste pour un service ou qu’il se pointe à une soirée simplement parce qu’il a besoin de rencontrer quelqu’un : on lui fait remarquer que sa présence est également appréciée les jours où il n’a besoin de rien, juste pour le plaisir de le voir.
L’œil acéré et la critique facile, il en a vexé plus d’un avec des « suggestions » et ses opinions bien tranchées. Car bien qu’il essaye de mettre de l’eau dans son vin, ce n’est généralement qu’une astuce inconsciente pour prétendre comprendre le point de vue de l’opposant. Sur la religion, la politique, le féminisme, le terrorisme, et même l’éducation des enfants : Abel a un avis sur tout et c’est difficile de l’en faire démordre.
Enfin, s’il est assez équilibré émotionnellement, c’est en amour que réside sa plus grande faiblesse. A bas les barrières, les impératifs, les rendez-vous, la distance… il devient alors impulsif, imprévisible même. Ce qui le rend à la fois extrêmement charmant, mais aussi parfois un peu excessif.
Intelligent et observateur, il apprend vite, comprend vite et a excellente mémoire. Il sait reconnaître les bonnes occasions, les bons plans, les endroits où il faut mieux se trouver à un moment donné. Un vrai opportuniste. Il ne se sert pas vraiment de ce talent pour lui-même, mais le résultat est le même, c’est sans doute ce qui en fait un excellent agent artistique. Il est tout le contraire d’un flemmard, parce qu’il peut passer des heures à triturer une difficulté dans tous les sens pour la transformer en solution, mais il aime pouvoir profiter des petites faveurs du hasard. Pourquoi faire compliqué quand on peut faire simple ? C’est sa devise. Dans son travail en tout cas, il ne laisse rien au hasard et sait développer des stratégies sur le long terme.
Malheureusement, ses qualités se transforment rapidement en défaut quand il sort du monde professionnel. On lui reproche régulièrement de trop parler. Ce n’est pas de sa faute, il aime la discussion, mais parfois… il en étouffe un peu le temps de parole de ses amis. Comme quand il reprend enfin contact avec de vieilles connaissance juste pour un service ou qu’il se pointe à une soirée simplement parce qu’il a besoin de rencontrer quelqu’un : on lui fait remarquer que sa présence est également appréciée les jours où il n’a besoin de rien, juste pour le plaisir de le voir.
L’œil acéré et la critique facile, il en a vexé plus d’un avec des « suggestions » et ses opinions bien tranchées. Car bien qu’il essaye de mettre de l’eau dans son vin, ce n’est généralement qu’une astuce inconsciente pour prétendre comprendre le point de vue de l’opposant. Sur la religion, la politique, le féminisme, le terrorisme, et même l’éducation des enfants : Abel a un avis sur tout et c’est difficile de l’en faire démordre.
Enfin, s’il est assez équilibré émotionnellement, c’est en amour que réside sa plus grande faiblesse. A bas les barrières, les impératifs, les rendez-vous, la distance… il devient alors impulsif, imprévisible même. Ce qui le rend à la fois extrêmement charmant, mais aussi parfois un peu excessif.
Abel est un homme d’apparence sèche. Il n’est pas bien épais de base, la graisse ayant depuis longtemps renoncé à l’idée de se fixer à son corps. Grand, presque élancé, il a une musculature fine et nerveuse. Ça ne l’a jamais intéressé de s’inscrire dans une salle de sport pour s’entretenir, mais il va régulièrement courir au Discovery Park de Seattle. Sa manière à lui de nier la cinquantaine entamée de quelques années ; repousser l’âge pour avoir une chance de conquérir à nouveau. Ne pas finir seule et divorcé. Malgré cela, il ne peut empêcher ni ses cheveux ni sa barbe de blanchir. D’ailleurs, il rase régulièrement cette dernière, persuadé que de toutes les façons, le charme poivre-et-sel n’était pas pour lui. Une calvitie entamée bien jeune continue de s’installer, rognant d’année en année sur la ligne frontale de son cuir chevelu.
Ses yeux marron légèrement enfoncés dans ses orbites ont la particularité d’être sincèrement déstabilisant lorsqu’ils cessent de refléter ses émotions. Une compétence héritée de son travail peut-être : un regard qui se fixe, se ferme, devient illisible et insoutenable. Pourtant, ces mêmes pupilles rayonnent lorsqu’il sourit, lorsqu’il est heureux ou… qu’il est amoureux.
Plus le temps passe et plus Abel se rend compte de certains de ses tics comportementaux. Par exemple, quand il réfléchit intensément, il ne peut s’empêcher de caresser discrètement sa lèvre inférieure avec sa langue. De petits allers-retours interminables, surtout lorsqu’il planche sur un sujet épineux. Aussi, il a tendance à agrémenter ses discours de gestes démonstratifs quand il argumente ; un peu à la Saul Goodman ou à la Jack Sparrow. Parfois il en rajoute – ça fait partie de son personnage – parfois pas vraiment.
En termes vestimentaire, il n’a jamais aimé les costumes tirés aux 4 épingles. Il préférait généralement l’entre-deux entre tenue professionnelle et décontraction. Chemise sans cravate, libérées de quelques boutons, pantalon de toile – ou même jean pour certains jours. Pourquoi pas une veste de temps en temps ? Il en avait de différente sorte.
Depuis qu’il a compris que sa maison n’est plus sûre, il ne se soucie plus vraiment de l’esthétique. De toute façon, les morts-vivants n’ont pas l’air d’avoir un avis très prononcé pour la mode.
Ses yeux marron légèrement enfoncés dans ses orbites ont la particularité d’être sincèrement déstabilisant lorsqu’ils cessent de refléter ses émotions. Une compétence héritée de son travail peut-être : un regard qui se fixe, se ferme, devient illisible et insoutenable. Pourtant, ces mêmes pupilles rayonnent lorsqu’il sourit, lorsqu’il est heureux ou… qu’il est amoureux.
Plus le temps passe et plus Abel se rend compte de certains de ses tics comportementaux. Par exemple, quand il réfléchit intensément, il ne peut s’empêcher de caresser discrètement sa lèvre inférieure avec sa langue. De petits allers-retours interminables, surtout lorsqu’il planche sur un sujet épineux. Aussi, il a tendance à agrémenter ses discours de gestes démonstratifs quand il argumente ; un peu à la Saul Goodman ou à la Jack Sparrow. Parfois il en rajoute – ça fait partie de son personnage – parfois pas vraiment.
En termes vestimentaire, il n’a jamais aimé les costumes tirés aux 4 épingles. Il préférait généralement l’entre-deux entre tenue professionnelle et décontraction. Chemise sans cravate, libérées de quelques boutons, pantalon de toile – ou même jean pour certains jours. Pourquoi pas une veste de temps en temps ? Il en avait de différente sorte.
Depuis qu’il a compris que sa maison n’est plus sûre, il ne se soucie plus vraiment de l’esthétique. De toute façon, les morts-vivants n’ont pas l’air d’avoir un avis très prononcé pour la mode.
Abel est né un soir d’orage, le 27 novembre 1962 très exactement. Bien sûr, il ne se souvenait pas de la météo qu’il faisait ce jour là – il était bien trop occupé à traumatiser sa mère de 22 ans – mais c’était une chose qu’on lui avait beaucoup raconté. Son père était présent, c’était lui qui avait coupé le cordon ombilical. Dit comme ça, ça paraissait normal ; ce n’était qu’avec le recul qu’il avait compris comme ce fait était un petit exploit en soi.
Pourquoi ce prénom ? Simplement pour sa consonance. Il n’avait pas de frère aîné appelé Caïn voué à l’assassiner et ses parents n’avaient plus mis un pied à l’église depuis un moment. Toutefois, ils avaient un goût pour les belles choses et, épuré de son sens biblique, « Abel » avait toujours un éclat singulier. Presque sacré en fait. Quoi de mieux pour un premier enfant ?
Madison Grey, mariée Underwood, faisait des études de secrétaire quand elle rencontra David. Ils se disaient « oui » trois ans plus tard et leur fils naissait la même année. Cédant à l’envie, au besoin et à la pression social qui n’encourageait pas encore les femmes à envisager une carrière, elle choisit de rester femme au foyer quand son mari de 27 ans se faisait engager dans un cabinet d’avocat. Un petit à l’époque.
Ils vivaient dans Seattle, c’était là qu’Abel fit ses premiers pas, bredouilla ses premiers mots et se fit ses premiers bobos. Il n’avait rien d’un enfant à problème. Il était éveillé, peut-être même un peu trop. Ses parents prenaient le temps de l’emmener voir des spectacles jeune public, des petits concerts, des petits films… il y en avait peu dans les années 60, mais c’était déjà suffisant pour le démarquer des enfants qui n’avaient pas cette chance.
Il aurait du avoir une petite sœur – ou un petit frère – c’était ce qui était prévu, mais après 5 ans de travail acharné dans le même cabinet, David Underwood décida de tenter la grande aventure. Avec deux collègues et des économies, il créa UBL : « Underwood & Becker & Lann avocats associés ». Le projet qui avait déjà été repoussé de plusieurs années continua alors de distancer le couple marié. Le père passait de plus en plus de temps dans ses locaux, avec ses clients, en procès, et de moins en moins avec sa famille.
Abel ne remarqua pas vraiment la transition entre le moment où ils dînaient à trois et celui où ces instants devinrent des têtes-à-têtes. Peut-être parce qu’il parlait déjà beaucoup. Même pas 10 ans et il se perdait déjà dans ses récits, entre les jeux de cours de récré, les professeurs, les devoirs, les copains, et même les filles qu’il voyait parfois de l’autre côté du grillage, dans la partie féminine de l’établissement qui séparait les sexes. Les soirs où son père était là, le gamin le regardait faire son show : il parlait avec de grands gestes, utilisait des mots compliqués, citait des phrases incompréhensibles, mais c’était cool. Un vrai modèle. L’enfant ne voyait pas le fond de tristesse dans les yeux de sa mère, l’impression d’être abandonnée par un mari en pleine ascension sociale.
Quand Madison eut 35 ans et que son fils de 13 ans était déjà plus indépendant, elle voulut reprendre un travail – au moins à mi-temps – mais se heurta à l’incrédulité de son époux. « Pourquoi tu travaillerais alors que je gagne largement assez pour trois ? ». En effet, UBL marchait plutôt bien, voire très bien. La famille avait déménagé à Madrona l’année précédente, dans un joli pavillon de deux étages, avec une voiture d’entrée de gamme de luxe et un gros berger suisse appelé Akela. Abel se souviendrait toujours de cette soirée là, car c’était son premier plaidoyer, sa première négociation. Il avait essayé de prendre le partie de sa mère, d’expliquer ce qu’elle pouvait ressentir, mais s’était heurté à la rigueur et l’expérience d’un homme forgé dans les cours d’audience. Ce fut la main de sa génitrice posée sur la sienne qui avait retenue ses larmes, ainsi que les paroles enflammées qui naissaient une fois à court d’argument.
Absolument pas démonté pour autant, l’adolescent s’était secrètement allié à sa mère. Ça n’avait pas été difficile de lui trouver un petit boulot de gardienne d’enfants dans le voisinage, payé par quelques billets non déclarés. Elle n’avait pas besoin de plus pour renouer avec une vie sociale, rencontrer un peu de monde et recommencer à sourire.
Une bonne partie de la jeune vie d’Abel s’était passée ainsi, entre le lycée privé et les beaux quartiers de Seattle. Il avait l’impression de ne vivre qu’avec sa mère, qui était sa meilleure amie et sa confidente. C’était elle qui l’avait encouragé à proposer à sortir à une fille dont il parlait depuis des mois, c’était elle qui lui avait donné l’argent de poche pour qu’il l’emmène au cinéma, c’était elle qui l’avait consolé après ce premier chagrin d’amour.
Puis les rôles s’échangèrent… l’adolescent était devenu un jeune homme de 20 ans, il vivait dans un appartement payé par son père plus absent que jamais. Ce dernier n’avait jamais su que sa femme avait travaillé au noir pendant quelques années. Il avait consentit à ce qu’elle occupe ses journées une fois l’oisillon parti du nid, alors elle s’était – grâce aux relations de son mari – trouvé une place de secrétaire dans une petite boîte de prestataire de service. Madison avait 42 ans quand elle commença à voir un autre homme. Un publicitaire rencontré dans les transports en commun, 45 ans et divorcé, absolument pas effrayé par l'alliance qu’elle portait au doigt.
Ce petit manège dura 3 ans. Le temps qu’Abel termine ses études en communication et trouve, encore une fois grâce à son père, un poste dans une agence d’événementielle. Il était au courant, il continuait à observer M Underwood captiver toute l’attention lorsque la famille avait la chance d’être réunie, mais n’avait rien dit. Il n’admirait plus cet homme. Oh oui il avait tracé son chemin, il était devenu quelqu’un, mais il avait oublié sa femme et son fils en court de route.
20 décembre 1985, peu de temps avant Noël. Le secret était avoué, presque craché, par Madison qui n’en pouvait plus. Comme 10 ans auparavant, Abel prit la défense de sa mère, et cette fois… il gagna. Il avait cloué le bec à son père qui ne pouvait que rester muet et blafard devant sa famille qui se décousait à vue d’œil. Le triomphe du jeune homme ne fut pourtant que de courte durée : il s’attendait sans doute à ses excuses, des explications, un appel. Il était avocat, merde ! Mais non… David s’était levé et avait quitté la maison sans dire un mot et sa mère s’était mise à pleurer.
Le jeune actif ne se souvenait plus avoir revu son père suite à ça. Ce dernier continua de payer pour son appartement jusqu’à ce que son fils lui affirme par courrier pouvoir se débrouiller seul. Le divorce avait été rapidement prononcé, sans conflit, sans accrochage. Madison aurait même pu garder le pavillon à Madrona, mais elle refusa pour emménager avec son amant. Abel se tenait secrètement au courant de la situation de UBL, il passait même devant le bâtiment parfois, mais n’osait pas entrer ou reprendre contact.
Sa vie suivit un nouveau fil tranquille jusqu’à ses 30 ans. Une de ses amies de lycée, la seule qui voyait toujours de cette époque, était devenue comédienne. Maya. C’était déjà elle qui l’avait poussé à prendre la voie de la communication événementielle pour qu’il puisse exprimer son talent de la parole et du message. Malheureusement, après 7 ans dans le circuit, le trentenaire commençait à s’ennuyer et son amie galérait à trouver des contrats.
C’était bête, mais ce fut l’origine de « l’agence artistique Underwoord ». A force de rencontrer des boîtes de production, des agences et des publicitaires au sein de son travail, Abel avait un petit réseau. On lui reconnaissait son sérieux, son acharnement et son don pour convaincre. Il ne mit que quelques jours, une semaine tout au plus, à dégoter et négocier un rôle pour Maya. La lumière se fit dans son esprit et… la machine était lancée.
A 33 ans, il ouvrait sa société en solitaire. Sa ligne de conduite, c’était de trouver le meilleur pour tout le monde, afin que chaque comédien ait sa chance. Au début il ne s’autorisait que 5 acteurs, sans vraiment trier, pour tâter le terrain et plus le temps passait, plus le succès l’amena à prendre plus de gens sous sa coupe. L’expérience lui permettait aussi d’identifier en un coup d’œil les éléments prometteurs de ceux qui ne seraient pas sérieux. A 36 ans, l’entreprise roulait plutôt bien, alors il voulut embaucher une stagiaire comme assistante, pour voir comment ça se passerait.
Cette stagiaire… Lily Melman. Une jeune femme ravissante de 24 ans, des yeux noisette étincelant, des cheveux de jais, une silhouette diaphane et un sourire désarmant. Bien sûr, Abel était habitué à voir défiler de belles créatures, il n’avait jamais rien ressenti mais là… c’était différent. Les 6 mois passèrent à une vitesse alarmante. En plus d’être mignonne, Lily était efficace. Malheureusement, elle était bien plus intéressée par le théâtre et bouda l’emploi proposé à l’agence Underwood pour devenir coordinatrice d’une compagnie d’arts de rue. Néanmoins, elle accepta de le revoir et… certainement que ce fut là que tout commença.
Abel, qui n’avait eut que des relations de moins d’un an jusqu’à lors, était fou amoureux. Il la surprenait à coup de restaurants chics, séjours à la campagne, voyages en Europe, et autres soins all inclusive en thalasso. Ça créait parfois des trous dans son budget, car il n’avait pas les revenus de son père, mais qu’importe : elle en valait la peine. Il avait 40 ans quand ils se marièrent et elle 28. Madison était bien évidemment présente, ravie pour son fils, accompagné par le même homme qui l’avait fait quitté son mari, mais David ne répondit même pas à l’invitation. Silence radio.
Tout était si parfait… mais la vie ne pouvait malheureusement pas restée éternellement suspendue à un nuage. Le plus horrible, c’était justement qu’il n’y avait pas de motif. Ils s’aimaient, partageaient des choses, ne manquaient de rien… mais au bonheur suivit la lassitude. Un ennui qui rend chaque instant morose, qui fait perdre le goût des danses charnelles mille fois répétées, qui donne l’impression de s’enfermer dans une petite boîte. Du moins, c’était surtout Lily qui ressentait cela. Abel était toujours amoureux, dévoué, mais ses tentatives de sauver son couple était vaine. Sans doute parce que sa compagne lâchait prise, parce qu’il devait porter l’édifice sur ses seules épaules, et que c’était humainement impossible. Peut-être qu’au fond, la jeune femme regrettait de s’être emportée, de s’être liée à un homme tellement plus âgé… elle découvrait la vie quand il en connaissait déjà les rouages. Ce décalage la gênait, sans véritable raison.
Paradoxalement, elle ne voulait pas abandonner : elle appréciait ce mari qui faisait effort sur effort pour la surprendre, peut-être même un peu trop, car ils avaient du revendre cette peluche lapin de 3 mètres de haut à défaut de pouvoir la stocker. Et s’il y avait une solution ? Un moyen de sceller leur couple durablement ? C’était ce qu’elle pensait en arrêtant la pilule et en accueillant une petite « graine » d’Abel à 31 ans. Une petite fille qu’ils choisirent d’appeler Victoria. Parce que c’était joli, parce qu’elle devait incarner leur triomphe. Victoria…
Au début, tout se passait vraiment pour le mieux. Nouvel élan pour le jeune couple. Inconsciemment traumatisé par l’absence de son propre père, le mari de Lily était tout son contraire. Il s’occupait tellement d’elle et de sa petite qu’il en oubliait d’aller travailler. Ce n’était pas si grave, il était le maître à bord et avait désormais deux assistants qui pouvaient se passer régulièrement de lui. Et puis, qui lui reprocherait d’accorder du temps à sa famille ? 43 ans, c’était si tard pour un premier enfant, ce serait certainement le dernier.
La petite grandissait, les parents s’épanouissaient, mais… bon, ils s’étonnaient de voir que même à 6 mois, leur bébé ne produisait pas énormément de sons, mais ils songèrent simplement qu’elle était calme. Pourtant, les années filaient à toute vitesse et Victoria n’essayait toujours pas de baragouiner, elle ne réagissait pas aux bruits forts – même lorsqu’une bouteille en verre fut un jour malencontreusement jetée au bas de la table du déjeuner. Quand son père ou sa mère lui parlait, elle ne tournait jamais la tête quand ils n’étaient pas dans son champ de vision et fixait intensément leurs lèvres quand elle pouvait. La gamine avait presque 3 ans quand un médecin confirma qu’elle était sourde. Une perte neurosensorielle, très certainement génétique, mais il n’y avait aucune certitude absolument dans cet handicap de naissance.
Nouveau coup de foudre qui acheva ce couple en sursis. A 34 ans, Lily se retrouvait mariée à un homme qu’elle n’était pas certaine d’aimer « jusqu’à ce que la mort les sépare » et avait eu une fille, peut-être sa fille unique, souffrant d’une surdité incurable. C’était trop ; un fardeau trop lourd. Leur relation s’effritait et si Abel accordait toute son énergie à Victoria, il n’avait plus autant le courage de reconquérir son épouse, même si ses sentiments étaient intacts.
Deux ans après, le divorce était signé. D’un commun accord, la petite vivait principalement chez son père et passait ses weekends, ainsi que la moitié de ses vacances scolaires, chez sa mère qui avait déménagé sur la côte est. L’homme qui approchait doucement de la cinquantaine se reconstruisait lentement, entre son travail fleurissant et sa fille, qu’il s’étonnait de parvenir à éduquer avec autant de rigueur que de complicité. Elle adorait son papa et avait même avoué à ses nounours le préférer à sa génitrice, qui était « beaucoup moins rigolote ».
Madison Underwoord mourut d’un cancer fulgurant du cerveau en 2012. Le cortège était restreint, ramené à la famille proche, et son ex-mari, David, surprit tout le monde en se présentant aux funérailles. A l’approche des 80 ans, il avait déjà pris sa retraite mais continuait de prodiguer ses conseils à la relève de UBL. Il avait un peu grossi mais n’avait pas perdu de son charisme naturel. Cette fois pourtant, pas de mots superflus, pas de joute, mais une étreinte intense entre un père et son fils qui ne s’étaient pas vu depuis des années.
Depuis, Abel revoit occasionnellement son géniteur. Il était trop tard pour rattraper le temps perdu, mais ainsi, Victoria avait la chance de connaître son deuxième grand-père. Cette dernière d’ailleurs était immanquablement muette, puisqu’elle n’entendait toujours pas. Elle avait appris le langage des signes avec ses deux parents, c’est ainsi qu’elle communiquait avec eux. Depuis qu’elle savait écrire, elle avait également toujours un petit carnet dans son sac avec un crayon, pour pouvoir discuter avec les gens qui ne savaient pas signer.
A l’approche de l’automne 2015, Abel avait 52 ans et Victoria 10. Aucun des deux, plus inséparables que jamais, ne se doutait de ce qui les attendait…
Pourquoi ce prénom ? Simplement pour sa consonance. Il n’avait pas de frère aîné appelé Caïn voué à l’assassiner et ses parents n’avaient plus mis un pied à l’église depuis un moment. Toutefois, ils avaient un goût pour les belles choses et, épuré de son sens biblique, « Abel » avait toujours un éclat singulier. Presque sacré en fait. Quoi de mieux pour un premier enfant ?
Madison Grey, mariée Underwood, faisait des études de secrétaire quand elle rencontra David. Ils se disaient « oui » trois ans plus tard et leur fils naissait la même année. Cédant à l’envie, au besoin et à la pression social qui n’encourageait pas encore les femmes à envisager une carrière, elle choisit de rester femme au foyer quand son mari de 27 ans se faisait engager dans un cabinet d’avocat. Un petit à l’époque.
Ils vivaient dans Seattle, c’était là qu’Abel fit ses premiers pas, bredouilla ses premiers mots et se fit ses premiers bobos. Il n’avait rien d’un enfant à problème. Il était éveillé, peut-être même un peu trop. Ses parents prenaient le temps de l’emmener voir des spectacles jeune public, des petits concerts, des petits films… il y en avait peu dans les années 60, mais c’était déjà suffisant pour le démarquer des enfants qui n’avaient pas cette chance.
Il aurait du avoir une petite sœur – ou un petit frère – c’était ce qui était prévu, mais après 5 ans de travail acharné dans le même cabinet, David Underwood décida de tenter la grande aventure. Avec deux collègues et des économies, il créa UBL : « Underwood & Becker & Lann avocats associés ». Le projet qui avait déjà été repoussé de plusieurs années continua alors de distancer le couple marié. Le père passait de plus en plus de temps dans ses locaux, avec ses clients, en procès, et de moins en moins avec sa famille.
Abel ne remarqua pas vraiment la transition entre le moment où ils dînaient à trois et celui où ces instants devinrent des têtes-à-têtes. Peut-être parce qu’il parlait déjà beaucoup. Même pas 10 ans et il se perdait déjà dans ses récits, entre les jeux de cours de récré, les professeurs, les devoirs, les copains, et même les filles qu’il voyait parfois de l’autre côté du grillage, dans la partie féminine de l’établissement qui séparait les sexes. Les soirs où son père était là, le gamin le regardait faire son show : il parlait avec de grands gestes, utilisait des mots compliqués, citait des phrases incompréhensibles, mais c’était cool. Un vrai modèle. L’enfant ne voyait pas le fond de tristesse dans les yeux de sa mère, l’impression d’être abandonnée par un mari en pleine ascension sociale.
Quand Madison eut 35 ans et que son fils de 13 ans était déjà plus indépendant, elle voulut reprendre un travail – au moins à mi-temps – mais se heurta à l’incrédulité de son époux. « Pourquoi tu travaillerais alors que je gagne largement assez pour trois ? ». En effet, UBL marchait plutôt bien, voire très bien. La famille avait déménagé à Madrona l’année précédente, dans un joli pavillon de deux étages, avec une voiture d’entrée de gamme de luxe et un gros berger suisse appelé Akela. Abel se souviendrait toujours de cette soirée là, car c’était son premier plaidoyer, sa première négociation. Il avait essayé de prendre le partie de sa mère, d’expliquer ce qu’elle pouvait ressentir, mais s’était heurté à la rigueur et l’expérience d’un homme forgé dans les cours d’audience. Ce fut la main de sa génitrice posée sur la sienne qui avait retenue ses larmes, ainsi que les paroles enflammées qui naissaient une fois à court d’argument.
Absolument pas démonté pour autant, l’adolescent s’était secrètement allié à sa mère. Ça n’avait pas été difficile de lui trouver un petit boulot de gardienne d’enfants dans le voisinage, payé par quelques billets non déclarés. Elle n’avait pas besoin de plus pour renouer avec une vie sociale, rencontrer un peu de monde et recommencer à sourire.
Une bonne partie de la jeune vie d’Abel s’était passée ainsi, entre le lycée privé et les beaux quartiers de Seattle. Il avait l’impression de ne vivre qu’avec sa mère, qui était sa meilleure amie et sa confidente. C’était elle qui l’avait encouragé à proposer à sortir à une fille dont il parlait depuis des mois, c’était elle qui lui avait donné l’argent de poche pour qu’il l’emmène au cinéma, c’était elle qui l’avait consolé après ce premier chagrin d’amour.
Puis les rôles s’échangèrent… l’adolescent était devenu un jeune homme de 20 ans, il vivait dans un appartement payé par son père plus absent que jamais. Ce dernier n’avait jamais su que sa femme avait travaillé au noir pendant quelques années. Il avait consentit à ce qu’elle occupe ses journées une fois l’oisillon parti du nid, alors elle s’était – grâce aux relations de son mari – trouvé une place de secrétaire dans une petite boîte de prestataire de service. Madison avait 42 ans quand elle commença à voir un autre homme. Un publicitaire rencontré dans les transports en commun, 45 ans et divorcé, absolument pas effrayé par l'alliance qu’elle portait au doigt.
Ce petit manège dura 3 ans. Le temps qu’Abel termine ses études en communication et trouve, encore une fois grâce à son père, un poste dans une agence d’événementielle. Il était au courant, il continuait à observer M Underwood captiver toute l’attention lorsque la famille avait la chance d’être réunie, mais n’avait rien dit. Il n’admirait plus cet homme. Oh oui il avait tracé son chemin, il était devenu quelqu’un, mais il avait oublié sa femme et son fils en court de route.
20 décembre 1985, peu de temps avant Noël. Le secret était avoué, presque craché, par Madison qui n’en pouvait plus. Comme 10 ans auparavant, Abel prit la défense de sa mère, et cette fois… il gagna. Il avait cloué le bec à son père qui ne pouvait que rester muet et blafard devant sa famille qui se décousait à vue d’œil. Le triomphe du jeune homme ne fut pourtant que de courte durée : il s’attendait sans doute à ses excuses, des explications, un appel. Il était avocat, merde ! Mais non… David s’était levé et avait quitté la maison sans dire un mot et sa mère s’était mise à pleurer.
Le jeune actif ne se souvenait plus avoir revu son père suite à ça. Ce dernier continua de payer pour son appartement jusqu’à ce que son fils lui affirme par courrier pouvoir se débrouiller seul. Le divorce avait été rapidement prononcé, sans conflit, sans accrochage. Madison aurait même pu garder le pavillon à Madrona, mais elle refusa pour emménager avec son amant. Abel se tenait secrètement au courant de la situation de UBL, il passait même devant le bâtiment parfois, mais n’osait pas entrer ou reprendre contact.
Sa vie suivit un nouveau fil tranquille jusqu’à ses 30 ans. Une de ses amies de lycée, la seule qui voyait toujours de cette époque, était devenue comédienne. Maya. C’était déjà elle qui l’avait poussé à prendre la voie de la communication événementielle pour qu’il puisse exprimer son talent de la parole et du message. Malheureusement, après 7 ans dans le circuit, le trentenaire commençait à s’ennuyer et son amie galérait à trouver des contrats.
C’était bête, mais ce fut l’origine de « l’agence artistique Underwoord ». A force de rencontrer des boîtes de production, des agences et des publicitaires au sein de son travail, Abel avait un petit réseau. On lui reconnaissait son sérieux, son acharnement et son don pour convaincre. Il ne mit que quelques jours, une semaine tout au plus, à dégoter et négocier un rôle pour Maya. La lumière se fit dans son esprit et… la machine était lancée.
A 33 ans, il ouvrait sa société en solitaire. Sa ligne de conduite, c’était de trouver le meilleur pour tout le monde, afin que chaque comédien ait sa chance. Au début il ne s’autorisait que 5 acteurs, sans vraiment trier, pour tâter le terrain et plus le temps passait, plus le succès l’amena à prendre plus de gens sous sa coupe. L’expérience lui permettait aussi d’identifier en un coup d’œil les éléments prometteurs de ceux qui ne seraient pas sérieux. A 36 ans, l’entreprise roulait plutôt bien, alors il voulut embaucher une stagiaire comme assistante, pour voir comment ça se passerait.
Cette stagiaire… Lily Melman. Une jeune femme ravissante de 24 ans, des yeux noisette étincelant, des cheveux de jais, une silhouette diaphane et un sourire désarmant. Bien sûr, Abel était habitué à voir défiler de belles créatures, il n’avait jamais rien ressenti mais là… c’était différent. Les 6 mois passèrent à une vitesse alarmante. En plus d’être mignonne, Lily était efficace. Malheureusement, elle était bien plus intéressée par le théâtre et bouda l’emploi proposé à l’agence Underwood pour devenir coordinatrice d’une compagnie d’arts de rue. Néanmoins, elle accepta de le revoir et… certainement que ce fut là que tout commença.
Abel, qui n’avait eut que des relations de moins d’un an jusqu’à lors, était fou amoureux. Il la surprenait à coup de restaurants chics, séjours à la campagne, voyages en Europe, et autres soins all inclusive en thalasso. Ça créait parfois des trous dans son budget, car il n’avait pas les revenus de son père, mais qu’importe : elle en valait la peine. Il avait 40 ans quand ils se marièrent et elle 28. Madison était bien évidemment présente, ravie pour son fils, accompagné par le même homme qui l’avait fait quitté son mari, mais David ne répondit même pas à l’invitation. Silence radio.
Tout était si parfait… mais la vie ne pouvait malheureusement pas restée éternellement suspendue à un nuage. Le plus horrible, c’était justement qu’il n’y avait pas de motif. Ils s’aimaient, partageaient des choses, ne manquaient de rien… mais au bonheur suivit la lassitude. Un ennui qui rend chaque instant morose, qui fait perdre le goût des danses charnelles mille fois répétées, qui donne l’impression de s’enfermer dans une petite boîte. Du moins, c’était surtout Lily qui ressentait cela. Abel était toujours amoureux, dévoué, mais ses tentatives de sauver son couple était vaine. Sans doute parce que sa compagne lâchait prise, parce qu’il devait porter l’édifice sur ses seules épaules, et que c’était humainement impossible. Peut-être qu’au fond, la jeune femme regrettait de s’être emportée, de s’être liée à un homme tellement plus âgé… elle découvrait la vie quand il en connaissait déjà les rouages. Ce décalage la gênait, sans véritable raison.
Paradoxalement, elle ne voulait pas abandonner : elle appréciait ce mari qui faisait effort sur effort pour la surprendre, peut-être même un peu trop, car ils avaient du revendre cette peluche lapin de 3 mètres de haut à défaut de pouvoir la stocker. Et s’il y avait une solution ? Un moyen de sceller leur couple durablement ? C’était ce qu’elle pensait en arrêtant la pilule et en accueillant une petite « graine » d’Abel à 31 ans. Une petite fille qu’ils choisirent d’appeler Victoria. Parce que c’était joli, parce qu’elle devait incarner leur triomphe. Victoria…
Au début, tout se passait vraiment pour le mieux. Nouvel élan pour le jeune couple. Inconsciemment traumatisé par l’absence de son propre père, le mari de Lily était tout son contraire. Il s’occupait tellement d’elle et de sa petite qu’il en oubliait d’aller travailler. Ce n’était pas si grave, il était le maître à bord et avait désormais deux assistants qui pouvaient se passer régulièrement de lui. Et puis, qui lui reprocherait d’accorder du temps à sa famille ? 43 ans, c’était si tard pour un premier enfant, ce serait certainement le dernier.
La petite grandissait, les parents s’épanouissaient, mais… bon, ils s’étonnaient de voir que même à 6 mois, leur bébé ne produisait pas énormément de sons, mais ils songèrent simplement qu’elle était calme. Pourtant, les années filaient à toute vitesse et Victoria n’essayait toujours pas de baragouiner, elle ne réagissait pas aux bruits forts – même lorsqu’une bouteille en verre fut un jour malencontreusement jetée au bas de la table du déjeuner. Quand son père ou sa mère lui parlait, elle ne tournait jamais la tête quand ils n’étaient pas dans son champ de vision et fixait intensément leurs lèvres quand elle pouvait. La gamine avait presque 3 ans quand un médecin confirma qu’elle était sourde. Une perte neurosensorielle, très certainement génétique, mais il n’y avait aucune certitude absolument dans cet handicap de naissance.
Nouveau coup de foudre qui acheva ce couple en sursis. A 34 ans, Lily se retrouvait mariée à un homme qu’elle n’était pas certaine d’aimer « jusqu’à ce que la mort les sépare » et avait eu une fille, peut-être sa fille unique, souffrant d’une surdité incurable. C’était trop ; un fardeau trop lourd. Leur relation s’effritait et si Abel accordait toute son énergie à Victoria, il n’avait plus autant le courage de reconquérir son épouse, même si ses sentiments étaient intacts.
Deux ans après, le divorce était signé. D’un commun accord, la petite vivait principalement chez son père et passait ses weekends, ainsi que la moitié de ses vacances scolaires, chez sa mère qui avait déménagé sur la côte est. L’homme qui approchait doucement de la cinquantaine se reconstruisait lentement, entre son travail fleurissant et sa fille, qu’il s’étonnait de parvenir à éduquer avec autant de rigueur que de complicité. Elle adorait son papa et avait même avoué à ses nounours le préférer à sa génitrice, qui était « beaucoup moins rigolote ».
Madison Underwoord mourut d’un cancer fulgurant du cerveau en 2012. Le cortège était restreint, ramené à la famille proche, et son ex-mari, David, surprit tout le monde en se présentant aux funérailles. A l’approche des 80 ans, il avait déjà pris sa retraite mais continuait de prodiguer ses conseils à la relève de UBL. Il avait un peu grossi mais n’avait pas perdu de son charisme naturel. Cette fois pourtant, pas de mots superflus, pas de joute, mais une étreinte intense entre un père et son fils qui ne s’étaient pas vu depuis des années.
Depuis, Abel revoit occasionnellement son géniteur. Il était trop tard pour rattraper le temps perdu, mais ainsi, Victoria avait la chance de connaître son deuxième grand-père. Cette dernière d’ailleurs était immanquablement muette, puisqu’elle n’entendait toujours pas. Elle avait appris le langage des signes avec ses deux parents, c’est ainsi qu’elle communiquait avec eux. Depuis qu’elle savait écrire, elle avait également toujours un petit carnet dans son sac avec un crayon, pour pouvoir discuter avec les gens qui ne savaient pas signer.
A l’approche de l’automne 2015, Abel avait 52 ans et Victoria 10. Aucun des deux, plus inséparables que jamais, ne se doutait de ce qui les attendait…
Septembre 2015. Pour être honnête, Abel était à mille lieux des histoires sordides – et isolés – qui éclataient dans le pays. Il planchait sur une occasion qui pourrait être un excellent coup de pouce pour son agence : depuis l’été, il était en contact avec le responsable casting de Marvel Cinematic Universe. Il cherchait une jeune femme qui pourrait décrocher un rôle dans le troisième volet des Avengers. Lui-même, le cinquantenaire n’était pas un grand amateur des adaptations de comics sur le grand écran, mais il connaissait suffisamment son milieu pour savoir que pour lui – comme pour la Leïla qu'il représentait – c’était la possibilité d’un contrat tremplin.
Il faut attendre le 12 octobre, lorsque les premières informations fuitent sur internet, pour qu’Abel sorte la tête de ses projets et se focalise sur l’actualité. On était lundi, Victoria était rentrée la veille de chez sa mère, il avait à peine eu le temps de la voir avant de l’amener à l’école. Dès qu’il apprend pour l’adolescent qui avait agressé le personnel médical de son lycée, l’agent court sans réfléchir récupérer sa fille qui déjeunait tranquillement à la cantine. Il se fichait bien du vent de panique qu’il avait emmené avec lui, seule la sécurité de la chair de sa chair l’intéressait.
Dès le 14 octobre, quand les patrouilles commencaient leurs rondes dans les rues, Abel prit la décision d’aller tenir compagnie à son père. Il avait dû puiser dans toutes ses réserves d’argument pour convaincre le vieil avocat de ne plus sortir prendre des nouvelles de sa compagnie. Le cinquantenaire eut l’idée éclair de faire les plus grosses courses de toute sa vie avant de verrouiller solidement les portes du pavillon de Madrona le 16 du mois. Les choses semblaient s’accélérer de façon exponentielle. Une semaine après que le président ait assuré que tout était sous contrôle, le chaos s’était généralisé dans Seattle. Les médias ne diffusaient plus que des annonces rémanentes, le quartier avait été déserté et parfois, la nuit, la petite famille entendait des grognements, des cris, des bruits de casse…
Impossible de communiquer aussi. Abel mourrait d’envie de savoir comment allait son ex-femme, si le monde s’effondrait aussi de son côté du pays. A défaut, il redoubla de protection pour Victoria. Il refusait qu’elle sorte, restait rarement dans une pièce différente que la sienne et insistait pour qu’ils dorment tous les trois dans la même chambre. Sans télé, sans internet et sans sortie, le silence enveloppa peu à peu la maison. Le père et la fille échangeaient de longues discussions sans mot, blotti dans des couvertures dans le salon.
Novembre s’installa, prit ses aises, et le cinquantenaire comprit véritablement que ce qui devait être temporaire était définitivement hors de contrôle. Quand il jetait un œil par la fenêtre, il voyait de nombreuses silhouettes errer comme si elles n’avaient plus d’âme. Un jour, n’y tenant plus, il était sorti, pour savoir s’il pouvait tenir quelque chose de ses gens. Ce qu’il avait vu ? Il ne l’oublierait jamais. Des yeux blancs, une peau cadavérique, des vêtements ruinés, la bouche et le menton couvert de sang. Deux infectés s’étaient brusquement jetés sur lui. Abel eut la présence d’esprit de retourner s’enfermer chez lui mais depuis, ils tambourinaient inlassablement à la porte.
Un jour. Deux jours. Au troisième, il y avait quatre rôdeurs devant leur maison. Parfois ils se faisaient oublier, mais ils recommençaient à manifester leur présence au moindre bruit. Victoria était terrifiée, David était épuisé. Depuis une semaine, ils étaient obligés de se rationner, car les courses gargantuesques de son fils n’étaient pas éternelles. Le vieil âge avait raison de lui. Est-ce que le temps qu’Abel avait passé à dévisager l’arme acheté par son père des années plus tôt se comptait en minutes ou en heures ? Il ne savait pas. Il se souvenait juste avoir fait un choix. Protéger sa famille – protéger sa fille.
Il savait vaguement comment s’en servir. Retirer la protection, ne pas poser le doigt sur la gâchette avant d’avoir l’intention de tirer, tout ça. Il avait dit des mots de sommation devant la porte qui lui semblaient bêtes avec le recul. Quelque chose comme « c’est une propriété privée, vous faites peur à ma fille. Je vous demande de partir, sinon je tire ». Un mauvais film. Tout ça, c’était un mauvais film, et il n’avait voulu être acteur. De l’autre côté du panneau, rien ne changeait. Les forcenés meurtrissaient toujours le bois, comme s’ils ne comprenaient rien.
Abel était alors allé voir Victoria. Il lui avait demandé de se cacher dans un placard et d’attendre qu’il revienne la chercher. Elle voulait savoir pourquoi, les mains lui répondirent « Je t’aime ». D’un regard, il demanda à David de veiller sur la petite et il redescendit. Le cinquantenaire pris plusieurs grandes inspirations avant d’ouvrir la porte et de reculer de plusieurs pas. Les malades étaient là, défigurés par la mort, uniquement capables de râler et de grogner. Il ne tremblait pas quand il dressa le canon, ni quand il vida le chargeur sur les quatre silhouettes. 17 balles, touchés au ventre et à la poitrine, mais ils marchaient toujours vers lui. En reculant, Abel avait trébuché sur le sac de golf de son père qui traînait dans l’entrée depuis qu’ils s’étaient amusés avec une après-midi pour tuer le temps.
En désespoir de cause, porté par la volonté de protéger les siens, il attrapa un club et frappa violemment le rôdeur le plus proche. En plein visage. Ce dernier tituba, l’agent recommença. Encore. Encore. Quand sa victime tomba sur le sol, il repoussa rudement ses deux complices les plus proches pour se défouler sur son crâne. Un moment, les os se fendirent, le choc suivant eut l’air fatal. Abel était essoufflé, il haletait, et trois autres adversaires le chargeaient avidement. Il était perdu. Pourtant, il était prêt à vendre chèrement sa peau, ces… choses ne toucheraient pas à sa fille. Il expulsa ce qu’il restait de sa peur en hurlant, asséna un premier coup dans le tas, un autre, et…
Le monde passait en mode ralenti. Il vit la femme décharnée qui allait le mordre, ses dents se rapprochaient de son bras, puis elle s’immobilisa. Son père. C’était David qui était descendu, alerté par les coups de feu, les bruits d’affrontement et les cris. L’agent lui ordonna de partir, mais c’était trop tard. Le vieil homme se faisait déjà agripper et dévorer vivant, vision d’horreur qui fit perdre à son fils le sens des réalités. Il se souvenait vaguement avoir vainement essayé d’éloigner les silhouettes, en avoir attrapé une au hasard pour l’écarter et la tabasser à mort. Puis… des voisins. C’était ça, des voisins.
Un couple d’agents immobiliers, autrefois, alertés eux aussi par les coups de feu. Visiblement, ils avaient déjà compris que la tête était un point faible, parce qu’ils plantèrent chacun une lame dans les crânes des deux zombies restant et ils cessèrent immédiatement de se nourrir de feu M Underwood. Abel était sous le choc, il disait oui à tout. Est-ce qu’il allait bien ? Oui. Il y avait quelqu’un d’autre dans la maison ? Oui. Est-ce qu’ils voulaient venir à l’abri ? Oui.
On lui parlait de stade, les voisins en avaient entendu parler sans vouloir s’y rendre, mais revenaient sur leur décision aujourd’hui. Le cinquantenaire ne se rappelait même pas de leurs noms, traumatisé par l’horreur de cette journée. Il était allé voir Victoria, lui avait dit de rassembler quelques affaires, de fermer les yeux en passant dans le salon, et ils étaient partis…
A Century Field, Abel se fit extrêmement discret. Pour se faire accepter, il avait montré patte planche, donné ses armes, supplié même dans le doute, pour qu’on ne laisse pas son enfant dehors. Renfermé sur lui-même, il était profondément marqué et ne vivait que pour surveiller sa fille. La prunelle de ses yeux, la seule personne qui lui restait de sa famille, son seul souvenir de Lily… il aidait au camp à des tâches qui lui permettaient de la garder à l’œil, dormait avec elle, ne la quittait simplement pas d’une semelle. La petite n’était pas dupe, elle n’y avait pas cru quand son père lui avait dit que David les rejoindrait plus tard, mais elle comprenait sa détresse sans qu’ils en parlent. Elle aussi était discrète. Sourde-muette, rares étaient ceux qui pouvaient communiquer avec elle. Certes, elle avait emporté son carnet et un stylo, mais n’avait pas le cœur à le sortir.
Le 10 janvier, jour apocalyptique de la chute du stade, les horreurs l’avaient rattrapé alors qu’il commençait enfin à se sentir à l’abri. Cette fois, ce n’était pas quatre mais des dizaines – des centaines – d’infectés qui envahirent le terrain où se terraient familles et amis en attendant que les choses changent. Est-ce que sa maigre expérience l’avait sauvé ? Oui peut-être… la tête, il se souvenait de ça. Frapper la tête. Au travers le chaos, Abel avait demandé à Victoria de fermer les yeux, mais l’avait-elle écouté ? Pour elle, la fin du monde était silencieuse. Elle ne comprenait pas, elle voulait les images.
Puisqu’il n’avait pas d’arme, le cinquantenaire se servit de ses poings pour briser des crânes et protéger sa progéniture. Combien ? Il avait oublié. Il s’était cassé les doigts par contre, ça il s’en souvenait. Ça ne l’avait pas empêché de soulever sa fille dans ses bras et de se frayer un chemin jusqu’au petit groupe qui réussit à quitter cette endroit vivant. Une petite centaine de survivants – ou de chanceux – qui fuyaient le stade tombé aux mains des rôdeurs. Nouveau cauchemar.
Puis vint Evergreen Ridge, dans les montagnes, ils n'étaient plus que cinquante. Abel était presque étonné de respirer encore, éprouvé par la peur, l’épuisement, la douleur et le froid. Cette fois, il n’était pas seul à se laisser renfermer : Victoria aussi était devenue l’ombre d’elle-même. Elle passait ses journées silencieuse, sans signer, aidanit mollement là où elle pouvait et disparaissait aussitôt. Quant aux nuits, elle se réveillait régulièrement en sursaut, poussant des cris maladroits et s’agrippant à son père. Un père qu’elle avait vu massacrer des gens à mains nues pour la sauver. Ça ne lui faisait pas peur, non, mais ça lui faisait comprendre que sa vie n’était plus la même parce que le papa qu’elle avait connu n’aurait jamais fait ça.
La première chose que la gamine avait signé depuis l’arrivée à Evergreen, c’était pour demander « tu crois que maman va bien ? » et Abel avait fondu en larmes. Elle ne l'avait jamais vu pleurer. C’était impressionnant, c’était… ça faisait mal. Il n’avait pas répondu mais l’avait serré fort dans ses bras.
Il avait fallu plusieurs mois pour que les Underwoord s’ouvrent un peu. Quand ils ne s’impliquaient pas dans les tâches communes, ils pansaient leurs plaies dans leur coin, physiquement et psychologiquement. Au début, Abel n’osait pas se joindre à ceux qui sortaient. Il était tout simplement terrifié à l’idée de laisser sa fille seule. Si jamais le chalet était attaqué comme l’avait été Century ? Il ne se pardonnerait pas de ne pas avoir été là pour elle…
Les mois s’étaient libérés de l’hiver pour se livrer à un printemps frais. Avril, puis mai… le cinquantenaire se dit qu’il était temps. Puisque le monde était bien décidé à partir en vrille, il devrait bien mettre sa main à la pâte pour tenter d’inverser la tendance. Ça n’était pas seulement dans son intérêt, mais plutôt dans ce qu’il voulait léguer à Victoria. On parlait beaucoup de l’amour maternel, mais on oubliait alors de quoi les pères étaient capables…
Il faut attendre le 12 octobre, lorsque les premières informations fuitent sur internet, pour qu’Abel sorte la tête de ses projets et se focalise sur l’actualité. On était lundi, Victoria était rentrée la veille de chez sa mère, il avait à peine eu le temps de la voir avant de l’amener à l’école. Dès qu’il apprend pour l’adolescent qui avait agressé le personnel médical de son lycée, l’agent court sans réfléchir récupérer sa fille qui déjeunait tranquillement à la cantine. Il se fichait bien du vent de panique qu’il avait emmené avec lui, seule la sécurité de la chair de sa chair l’intéressait.
Dès le 14 octobre, quand les patrouilles commencaient leurs rondes dans les rues, Abel prit la décision d’aller tenir compagnie à son père. Il avait dû puiser dans toutes ses réserves d’argument pour convaincre le vieil avocat de ne plus sortir prendre des nouvelles de sa compagnie. Le cinquantenaire eut l’idée éclair de faire les plus grosses courses de toute sa vie avant de verrouiller solidement les portes du pavillon de Madrona le 16 du mois. Les choses semblaient s’accélérer de façon exponentielle. Une semaine après que le président ait assuré que tout était sous contrôle, le chaos s’était généralisé dans Seattle. Les médias ne diffusaient plus que des annonces rémanentes, le quartier avait été déserté et parfois, la nuit, la petite famille entendait des grognements, des cris, des bruits de casse…
Impossible de communiquer aussi. Abel mourrait d’envie de savoir comment allait son ex-femme, si le monde s’effondrait aussi de son côté du pays. A défaut, il redoubla de protection pour Victoria. Il refusait qu’elle sorte, restait rarement dans une pièce différente que la sienne et insistait pour qu’ils dorment tous les trois dans la même chambre. Sans télé, sans internet et sans sortie, le silence enveloppa peu à peu la maison. Le père et la fille échangeaient de longues discussions sans mot, blotti dans des couvertures dans le salon.
Novembre s’installa, prit ses aises, et le cinquantenaire comprit véritablement que ce qui devait être temporaire était définitivement hors de contrôle. Quand il jetait un œil par la fenêtre, il voyait de nombreuses silhouettes errer comme si elles n’avaient plus d’âme. Un jour, n’y tenant plus, il était sorti, pour savoir s’il pouvait tenir quelque chose de ses gens. Ce qu’il avait vu ? Il ne l’oublierait jamais. Des yeux blancs, une peau cadavérique, des vêtements ruinés, la bouche et le menton couvert de sang. Deux infectés s’étaient brusquement jetés sur lui. Abel eut la présence d’esprit de retourner s’enfermer chez lui mais depuis, ils tambourinaient inlassablement à la porte.
Un jour. Deux jours. Au troisième, il y avait quatre rôdeurs devant leur maison. Parfois ils se faisaient oublier, mais ils recommençaient à manifester leur présence au moindre bruit. Victoria était terrifiée, David était épuisé. Depuis une semaine, ils étaient obligés de se rationner, car les courses gargantuesques de son fils n’étaient pas éternelles. Le vieil âge avait raison de lui. Est-ce que le temps qu’Abel avait passé à dévisager l’arme acheté par son père des années plus tôt se comptait en minutes ou en heures ? Il ne savait pas. Il se souvenait juste avoir fait un choix. Protéger sa famille – protéger sa fille.
Il savait vaguement comment s’en servir. Retirer la protection, ne pas poser le doigt sur la gâchette avant d’avoir l’intention de tirer, tout ça. Il avait dit des mots de sommation devant la porte qui lui semblaient bêtes avec le recul. Quelque chose comme « c’est une propriété privée, vous faites peur à ma fille. Je vous demande de partir, sinon je tire ». Un mauvais film. Tout ça, c’était un mauvais film, et il n’avait voulu être acteur. De l’autre côté du panneau, rien ne changeait. Les forcenés meurtrissaient toujours le bois, comme s’ils ne comprenaient rien.
Abel était alors allé voir Victoria. Il lui avait demandé de se cacher dans un placard et d’attendre qu’il revienne la chercher. Elle voulait savoir pourquoi, les mains lui répondirent « Je t’aime ». D’un regard, il demanda à David de veiller sur la petite et il redescendit. Le cinquantenaire pris plusieurs grandes inspirations avant d’ouvrir la porte et de reculer de plusieurs pas. Les malades étaient là, défigurés par la mort, uniquement capables de râler et de grogner. Il ne tremblait pas quand il dressa le canon, ni quand il vida le chargeur sur les quatre silhouettes. 17 balles, touchés au ventre et à la poitrine, mais ils marchaient toujours vers lui. En reculant, Abel avait trébuché sur le sac de golf de son père qui traînait dans l’entrée depuis qu’ils s’étaient amusés avec une après-midi pour tuer le temps.
En désespoir de cause, porté par la volonté de protéger les siens, il attrapa un club et frappa violemment le rôdeur le plus proche. En plein visage. Ce dernier tituba, l’agent recommença. Encore. Encore. Quand sa victime tomba sur le sol, il repoussa rudement ses deux complices les plus proches pour se défouler sur son crâne. Un moment, les os se fendirent, le choc suivant eut l’air fatal. Abel était essoufflé, il haletait, et trois autres adversaires le chargeaient avidement. Il était perdu. Pourtant, il était prêt à vendre chèrement sa peau, ces… choses ne toucheraient pas à sa fille. Il expulsa ce qu’il restait de sa peur en hurlant, asséna un premier coup dans le tas, un autre, et…
Le monde passait en mode ralenti. Il vit la femme décharnée qui allait le mordre, ses dents se rapprochaient de son bras, puis elle s’immobilisa. Son père. C’était David qui était descendu, alerté par les coups de feu, les bruits d’affrontement et les cris. L’agent lui ordonna de partir, mais c’était trop tard. Le vieil homme se faisait déjà agripper et dévorer vivant, vision d’horreur qui fit perdre à son fils le sens des réalités. Il se souvenait vaguement avoir vainement essayé d’éloigner les silhouettes, en avoir attrapé une au hasard pour l’écarter et la tabasser à mort. Puis… des voisins. C’était ça, des voisins.
Un couple d’agents immobiliers, autrefois, alertés eux aussi par les coups de feu. Visiblement, ils avaient déjà compris que la tête était un point faible, parce qu’ils plantèrent chacun une lame dans les crânes des deux zombies restant et ils cessèrent immédiatement de se nourrir de feu M Underwood. Abel était sous le choc, il disait oui à tout. Est-ce qu’il allait bien ? Oui. Il y avait quelqu’un d’autre dans la maison ? Oui. Est-ce qu’ils voulaient venir à l’abri ? Oui.
On lui parlait de stade, les voisins en avaient entendu parler sans vouloir s’y rendre, mais revenaient sur leur décision aujourd’hui. Le cinquantenaire ne se rappelait même pas de leurs noms, traumatisé par l’horreur de cette journée. Il était allé voir Victoria, lui avait dit de rassembler quelques affaires, de fermer les yeux en passant dans le salon, et ils étaient partis…
A Century Field, Abel se fit extrêmement discret. Pour se faire accepter, il avait montré patte planche, donné ses armes, supplié même dans le doute, pour qu’on ne laisse pas son enfant dehors. Renfermé sur lui-même, il était profondément marqué et ne vivait que pour surveiller sa fille. La prunelle de ses yeux, la seule personne qui lui restait de sa famille, son seul souvenir de Lily… il aidait au camp à des tâches qui lui permettaient de la garder à l’œil, dormait avec elle, ne la quittait simplement pas d’une semelle. La petite n’était pas dupe, elle n’y avait pas cru quand son père lui avait dit que David les rejoindrait plus tard, mais elle comprenait sa détresse sans qu’ils en parlent. Elle aussi était discrète. Sourde-muette, rares étaient ceux qui pouvaient communiquer avec elle. Certes, elle avait emporté son carnet et un stylo, mais n’avait pas le cœur à le sortir.
Le 10 janvier, jour apocalyptique de la chute du stade, les horreurs l’avaient rattrapé alors qu’il commençait enfin à se sentir à l’abri. Cette fois, ce n’était pas quatre mais des dizaines – des centaines – d’infectés qui envahirent le terrain où se terraient familles et amis en attendant que les choses changent. Est-ce que sa maigre expérience l’avait sauvé ? Oui peut-être… la tête, il se souvenait de ça. Frapper la tête. Au travers le chaos, Abel avait demandé à Victoria de fermer les yeux, mais l’avait-elle écouté ? Pour elle, la fin du monde était silencieuse. Elle ne comprenait pas, elle voulait les images.
Puisqu’il n’avait pas d’arme, le cinquantenaire se servit de ses poings pour briser des crânes et protéger sa progéniture. Combien ? Il avait oublié. Il s’était cassé les doigts par contre, ça il s’en souvenait. Ça ne l’avait pas empêché de soulever sa fille dans ses bras et de se frayer un chemin jusqu’au petit groupe qui réussit à quitter cette endroit vivant. Une petite centaine de survivants – ou de chanceux – qui fuyaient le stade tombé aux mains des rôdeurs. Nouveau cauchemar.
Puis vint Evergreen Ridge, dans les montagnes, ils n'étaient plus que cinquante. Abel était presque étonné de respirer encore, éprouvé par la peur, l’épuisement, la douleur et le froid. Cette fois, il n’était pas seul à se laisser renfermer : Victoria aussi était devenue l’ombre d’elle-même. Elle passait ses journées silencieuse, sans signer, aidanit mollement là où elle pouvait et disparaissait aussitôt. Quant aux nuits, elle se réveillait régulièrement en sursaut, poussant des cris maladroits et s’agrippant à son père. Un père qu’elle avait vu massacrer des gens à mains nues pour la sauver. Ça ne lui faisait pas peur, non, mais ça lui faisait comprendre que sa vie n’était plus la même parce que le papa qu’elle avait connu n’aurait jamais fait ça.
La première chose que la gamine avait signé depuis l’arrivée à Evergreen, c’était pour demander « tu crois que maman va bien ? » et Abel avait fondu en larmes. Elle ne l'avait jamais vu pleurer. C’était impressionnant, c’était… ça faisait mal. Il n’avait pas répondu mais l’avait serré fort dans ses bras.
Il avait fallu plusieurs mois pour que les Underwoord s’ouvrent un peu. Quand ils ne s’impliquaient pas dans les tâches communes, ils pansaient leurs plaies dans leur coin, physiquement et psychologiquement. Au début, Abel n’osait pas se joindre à ceux qui sortaient. Il était tout simplement terrifié à l’idée de laisser sa fille seule. Si jamais le chalet était attaqué comme l’avait été Century ? Il ne se pardonnerait pas de ne pas avoir été là pour elle…
Les mois s’étaient libérés de l’hiver pour se livrer à un printemps frais. Avril, puis mai… le cinquantenaire se dit qu’il était temps. Puisque le monde était bien décidé à partir en vrille, il devrait bien mettre sa main à la pâte pour tenter d’inverser la tendance. Ça n’était pas seulement dans son intérêt, mais plutôt dans ce qu’il voulait léguer à Victoria. On parlait beaucoup de l’amour maternel, mais on oubliait alors de quoi les pères étaient capables…
passeport :♦ recensement de l'avatar. - Code:
Robert Kneeper ♦ <bott>Abel Underwood</bott>
♦ recensement du prénom. (prénom utilisé uniquement)- Code:
♦ Abel
♦ recensement du nom. (nom utilisé uniquement)- Code:
♦ Underwoord
♦ recensement du métier. - Code:
♦ Agent artistique
- Invité
- Invité
- Casier judiciaire
- Feuille de personnage
Re: Abel Underwood ~ what I would do for you
Mer 11 Mai 2016 - 22:51
Oooh ! Intéressant ce perso' !
Ca me fait plaisir de te voir à Evergreen
Ca me fait plaisir de te voir à Evergreen
- Invité
- Invité
- Casier judiciaire
- Feuille de personnage
Re: Abel Underwood ~ what I would do for you
Mer 11 Mai 2016 - 22:53
Déjà tout ça de fiche oO
TU ES UNE MACHINE !
TU ES UNE MACHINE !
- Invité
- Invité
- Casier judiciaire
- Feuille de personnage
Re: Abel Underwood ~ what I would do for you
Mer 11 Mai 2016 - 22:53
Oh mer** Cet acteur me fout les chocottes!!! Voir même plus en fait!
A chaque fois que je le vois c'est ... hi... Ha... eurk... *gros frisson*
Mais en tout cas bien venu chez les Verts avec ton second compte miss!!
A chaque fois que je le vois c'est ... hi... Ha... eurk... *gros frisson*
Mais en tout cas bien venu chez les Verts avec ton second compte miss!!
- Invité
- Invité
- Casier judiciaire
- Feuille de personnage
Re: Abel Underwood ~ what I would do for you
Mer 11 Mai 2016 - 22:55
Alan S. Karlson a écrit:Oooh ! Intéressant ce perso' !
Ca me fait plaisir de te voir à Evergreen
Attends, je sais pas encore comment je vais piloter mon post-apo pour qu'ils y arrivent... si ça se trouve je vais me dégonfler et partir en Travelers
Désolé pour le pavé de l'histoire sinonce D: 53 ans à raconter quoi...
Sinon Zoey, oui, en fait je suis à moitié cyborg, mais je t'avais dit que j'ai été (malheureusement) trop discret les premiers mois. Je rattrape mon retard
Et j'arrive pour te faire peur Bruce ! ahahah
- Invité
- Invité
- Casier judiciaire
- Feuille de personnage
Re: Abel Underwood ~ what I would do for you
Mer 11 Mai 2016 - 23:08
ALORS JE DIS OUI!
J'aime beaucoup l'acteur et tu as une superbe plume Selene. Alors je te préviens d'avance je veux un lien avec Tam (chelou tant qu'à faire) et plein de rp voila o/
J'aime beaucoup l'acteur et tu as une superbe plume Selene. Alors je te préviens d'avance je veux un lien avec Tam (chelou tant qu'à faire) et plein de rp voila o/
- Invité
- Invité
- Casier judiciaire
- Feuille de personnage
Re: Abel Underwood ~ what I would do for you
Mer 11 Mai 2016 - 23:19
Dwight A. Momsen a écrit:ALORS JE DIS OUI!
J'aime beaucoup l'acteur et tu as une superbe plume Selene. Alors je te préviens d'avance je veux un lien avec Tam (chelou tant qu'à faire) et plein de rp voila o/
ALORS JE DIS OUI (moi aussi) !!
J'adore Tam, je l'espionne en secret. La nuit. Quand tu dors. Euh...
- Invité
- Invité
- Casier judiciaire
- Feuille de personnage
- Contenu sponsorisé
- Casier judiciaire
- Feuille de personnage
Page 1 sur 3 • 1, 2, 3
Page 1 sur 3
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum