La journée avait bien commencé. Réveil auprès de Rosaleen qu'il embrassa sur le front pour lui souhaiter le bonjour suite à quoi il était allé prendre sa douche, puis son café matinal avec Ian pour enfin revenir voir sa belle et lui annoncer qu'il partait en expédition avec deux autres volontaires. Rien de bien dangereux. Le trio avait juste pour mission de faire un tour dans les environs pour trouver encore quelques denrées ou éventuellement du matériel, voir même simplement des habits. En discutant ensemble, les trois survivants décidèrent qu'ils feraient le tour du lycée de manière circulaire, gravitant ainsi autour de leur lieu de vie. Bonne manière de raisonner puisqu'ils pourraient rentrer rapidement en cas de besoin et en plus de ça, ils connaissaient bien le quartier alors c'était tout bénef si jamais ils devaient rester bloqués quelques heures. Délicat, dans le secret de la rousse, le français lui avait volé un baiser avant de s'éclipser, rejoignant ses compagnons à l'entrée du lycée.

Les premières fouilles ne furent pas vraiment concluantes, en même temps ce n'était pas bien étonnant puisqu'il fallait avouer que le groupe avait tendance à s'assurer de ne rien rater lors des expéditions. Au bout d'une heure de recherches en groupe, il fut décidé qu'ils se sépareraient pour couvrir plus de surface. Chacun prendrait son propre lieu de recherche, s'en occuperait et préviendrait les autres à la fin pour qu'il n'y ait pas de mauvaises surprises. Ayden, lui, tomba sur un bar. En constatant cela, il ne pu que se retenir de grimacer, à moitié amusé. Ils auraient du venir ici avec Alex quand ils avaient décidé de se démonter la gueule après le retour de Rosaleen alors qu'elle s'était enfermée dans un mutisme profond. Ca leur avait fait du bien mais qui sait, ils auraient pu être bien plus proches du camp et ne pas galérer à rentrer, du moins pas trop. Mais bon, peu importait désormais.

L'illustrateur observa ses coéquipiers du jour s'engouffrer dans les différents repaires et tendit l'oreille. Pas d'alerte. Alors il poussa sa propre porte, méfiant. Il posa un pied a l'intérieur, puis le second, couteau de combat en main, prêt à achever toute menace. Il pénétrait à pas lents dans les lieux, sa respiration se faisant de plus en plus lente et profonde, chaque sens aux aguets. Son but ? Faire un état des lieux avant de rechercher les objets utiles. En s'aventurant plus loin, l'homme fut stopper dans ses recherches, d'abord par une arme puis par une voix. Une voix responsable de l'explosion de souvenirs sous le crâne du français. Sans plus attendre, l'homme laissa tomber sa dague et se mit à observer d'un air incrédule le visage féminin. Ce visage...

Elle parlait. Il entendait de nouveau sa voix. Était-ce possible ? Après un an à espérer... Elle reparaissait dans sa vie. Il l'avait cru... Après tant de temps il s'était imaginé de ne jamais le revoir... Désorienté, le muet vint enlacer la demoiselle, la serrant contre lui, contre son cœur alors que les larmes lui montaient aux yeux, coulant lentement sur ses joues sans qu'il puisse les retenir.

Fawn... Elle vivait... Respirait... Fawn... Son dernier amour... Celle qu'il aurait voulu chérir toute sa vie avant que la fin du monde débarque...

Cela faisait a peine un an que l'apocalypse s'était écrasée sur Terre et cela faisait plus d'un an qu'Ayden était amoureux de Fawn. Et même si leur histoire n'était qu'au commencement, il avait longuement espérer la revoir pour reprendre là où ils s'étaient arrêtés. Quelques rencontres, un rendez-vous et un baiser avaient suffit pour faire battre le cœur meurtrit du muet. Elle avait su lui redonner envie de sourire, de respirer, de vivre tout simplement, d'oublier ses craintes vis à vis de ce sentiment qu'était l'Amour. Elle avait su le conquérir en très peu de temps, usant sans même le vouloir de sa douceur, de sa gentillesse. Elle avait su voir l'homme qu'il était malgré la barrière qu'il avait placé autour de lui. Leur relation, pourtant, n'avait pu vraiment voir le jour. Il était constamment en train de bosser, ailleurs, dans le Maryland, loin de Seattle et s'il ne travaillait pas, il était en tournée avec Donovan. Donovan d'ailleurs... Qu'était-il devenu ? Pourtant, ça n'avait pas empêché à l'homme d'écrire quelques lettres et envoyer quelques sms à la jeune femme pour prendre de ses nouvelles car elle lui manquait. En revenant sur Seattle, quelques temps avant d'être évacué vers le lycée, il avait cherché à contacter la pâtissière. Malheureusement, le pays était en perdition, les lignes téléphoniques saturées et il n'avait pu envoyer ses textos ou même recevoir des nouvelles.

Il avait donc passé cette première année de fin du monde à attendre un miracle, une réponse divine ou quelque chose qui l'aiderait à savoir s'il pouvait la revoir, la reprendre un jour dans ses bras. Il avait vécu chaque étape de survit en gardant la jeune femme en mémoire, se demandant si ses actions le transformerait et si elle le reconnaîtrait. Et puis, l'idée de ne jamais la revoir s'était mise, petit à petit, à germer dans son esprit. S'il se refusait de penser qu'elle n'était plus de ce monde, la crainte de ne pas pouvoir recroiser sa route l'avait longuement rendu morose. Pourtant elle avait été d'un grand secours. Quand il avait dû se battre contre les soldats de Moore, quand il se laisser aller à la dépression, même quand il avait fallu soutirer à Rosaleen les infos qu'elle s'évertuait à cacher... En repensant à la rousse, le français serra les dents quelques secondes pour l'effacer rapidement de sa mémoire. Fawn était vivante, elle était là. Actuellement, c'était elle qui comptait plus que tout dans ce bas monde. Alors le monde s'effaçait autour d'eux. La brunette posait ses questions, discutait sans se rendre compte que sa main sur la joue de l'illustrateur était une nouvelle touche d'espoir. Comment ne pas retomber amoureux de ce petit bout de femme ?

Tranquillement, le dessinateur posa sa main sur la sienne, caressant délicatement, du bout des doigts, sa peau comme pour en retrouver la douceur si lointaine, collant plus fortement la joue contre sa paume chaude. Bon sang, ce que c'était un bonheur de retrouver ça... Et puis, le brun se rendit compte qu'il fallait répondre. La pâtissière n'était pas de ceux qui comprenaient les signes et que par conséquent, il lui fallait écrire. Cherchant des sièges de son regard azuré, l'homme vint se défaire de sa compagne pour la tirer jusqu'à une petite table crasseuse du lieu miteux. Elle lui faisait face et Ayden ne parvenait pas à détacher ses yeux de ce visage qui avait si longtemps envahit ses songes. D'une main experte, l'homme récupéra dans sa sacoche son kit de communication, soit un calepin et un stylo, comme d'habitude.

- Je n'ai besoin de rien. Mais je n'arrive pas à croire que tu es là. Tu es réelle pourtant et ça me fait... Étrange de te retrouver. J'ai cru qu'on ne pourrait jamais se revoir...

Et s'il l'avait revu autrement que purement vivante... Il serait probablement devenu fou... Vivante ? Oui, si elle était vivante, c'est qu'elle s'était battue pour le rester alors...

- Es-tu seule ? Toi, as-tu besoin de quelque chose ? De soin ? Viens avec moi. Je connais un endroit où tu ne manquerais de rien.

La ramener au lycée, la garder avec elle ou si elle refusait, partir loin de tout ça. Il était armé, il avait des rations en plus de ce qu'il avait trouvé depuis qu'il était sortit ce matin, alors ils pouvaient se tirer sans plus de questions. Rien de plus n'existait si ce n'était eux, après tout, rare étaient ceux qui annonçaient qu'ils avaient retrouvé une personne chère à leur cœur. Parlant de coeur... Le palpitant du dessinateur battait à tout rompre, prêt à quitter sa poitrine à tout moment, prêt à se faire la malle tant l'émotion était à son comble. N'était-ce vraiment pas un rêve ? Comme pour s'en assurer, le français vint doucement poser ses doigts sur la joue de sa belle, ressentant le même picotement que la première fois qu'il lui avait prit le menton avant de l'embrasser. Ce souvenir vint enflammer les poumons du brun. Un souvenir heureux qu'il avait bien longtemps scellé pour ne pas craquer et tomber dans une semi-dépression comme il savait bien les faire.

Mais non. Le monde renaissait. La joie aussi. Le bonheur se reconstruisait et là, face à lui, celle qu'il associait à son ancienne vie faisait revivre les sentiments qu'il avait mis sous clés.