La remarque de Norman le fit tout de même sourire, oui, il passerait sans rien dire de plus, en espérant une fois de plus ne pas être le premier à le faire.

- Passez, ce n’est pas le problème, c’est la réception de l’autre côté qui me fait peur…

Mais bon, il ne pouvait pas passer plus de trois heures à discuter de ce qui était important ou non et de la façon dont Ian atterrirait de l’autre côté. Il souriait doucement, il essayait surtout de masquer son stress et ce n’était sans doute pas vraiment facile. Finalement, comme la fenêtre semblait le seul moyen viable pour passer de l’autre côté, il devait bien se rendre à l’évidence qu’il devait y passer lui aussi.

Il attacha sa batte de baseball à son sac avant de l’envoyer de l’autre côté de la fenêtre. Il n’avait rien de vraiment fragile et ce dernier n’avait pas fait une chute de trois mètres non plus. C’est donc en faisant le plus attention possible qu’il passait par la fenêtre que Finn avait trouvée. Il y avait encore quelques morceaux de verre même si le plus gros avait été retiré, il s’en fichait de se faire mal à une jambe ou un pied tant que ses mains étaient intactes, c’était la partie la plus importante de son corps, celle qui lui conférait un semblant d’utilité, parce qu’il ne brillait sans doute pas ni par son courage ni son intelligence.

Finalement, il arriva à bon port et se sentait presque fier d’être en un seul morceau de l’autre côté. Il reprit rapidement sa batte de baseball et son sac. Il était prêt à passer à la suite. Il regardait autour de lui, visiblement, l’endroit n’avait pas été épargné, il était clair qu’il y avait eu un carnage dans le coin. Il aurait pu avoir l’estomac retourné par tout ce sang, mais dans le fond, c’était devenu monnaie courante désormais. Il attendait de voir la réaction des autres, mais il était persuadé que personne ne ferait la moindre remarque. Il attendait l’arrivée du groupe au complet avant de s’éloigner de la fenêtre qui servait de point d’entrée pour les autres., il était hors de question de chercher tout seul. La pièce était relativement sûre pour le moment, il n’allait pas s’en plaindre.

La réception de l'autre côté lui faisait peur ? Norman fit un légé rire et passa après Ian, mais glissa sur le verre cassé et s'étala comme une pauvre merde sur le sol. Décidément ce n'était pas sa journée, mais alors, vraiment pas ! Le brun resta un instant par terre en voyant l'horreur de la pièce où il se trouvait. Il resta sans un mot et s'empressa de se redresser en voyant l'état du sol qui était teint en rouge.

Secouant un peu ses fringues à l'aide de ses mains, il remit son fusil à pompe à l'arrière de son dos et se tourna vers les autres qui n'avaient pas encore passé la fenêtre. "Attendez, j'enlève le verre" Norman balaya de son pied droit les morceaux qui étaient juste devant l'entrée et fit signe à ses partenaires qu'ils pouvaient venir.

Norman laissa passer Finn, puis tendit la main à Lex pour l'aider à entrer et fit de même pour Norma. Oui c'était un gentleman. Puis il prit soin de regarder le bord de la fenêtre avant de se pencher pour attraper le chien et le faire rentrer avec eux.

Soupirant, il observa les lieux et eut un petit air de déjà-vu. Tout ce sang, les impacts de balle, ceci lui fit étrangement pensé à la révolte à laquelle ils avaient participé en février 2016. Norman n'arrivait pas à imaginer le carnage qu'il y avait pu avoir sur ce bateau, des enfants, des familles dissoutes, décomposées. Cette image lui glaça le sang, enfermé en plein milieu de l'océan, ne pouvant pas échapper aux rôdeurs ou aux tyrans. Combien de personnes avaient décidés de sauter par dessus bord et s'étaient noyés ?

"Restez sur vos gardes, vu la scène que nous avons devant nous, je me demande bien où peuvent bien être les rôdeurs..."

Ian avait peur de tout ça ne lui plaisait pas vraiment, en même temps, il n'y avait qu'un fou dangereux pour aimer une telle situation, du moins c'était ce qu'il se disait. Il regardait autour de lui avec cet air tout aussi apeurer, il savait que des malades allaient débouler, la question étant de savoir quand et où… C’est avec beaucoup trop d’amertume dans sa voix qu’il prit la parole comme pour répondre à la question de Finn qui aurait tout aussi bien pu rester sans réponse au final.

- Ils vont nous tomber dessus comme toujours…

Tout le monde le savait, c’était toujours au moment où on s’y attendait le moins que les choses finissaient par arriver. Ian avait suffisamment expérimenté pour le savoir. Il avait fait attention à se cacher au centre du groupe, il ne voulait pas être devant pour affronter le danger et pas non plus être derrière pour être pris à revers s’il se passait quelques choses et visiblement, il avait eu raison puisqu’un groupe était en train de dévaler en leurs directions. Combien il y en avait il n’en savait rien, plus d’une dizaine c’était certain, il avait trop peur pour pouvoir compter correctement, heureusement, ils étaient dans un couloir ce qui limiterait sans doute les mouvements de chacun.

- On va tous mourir…

L’homme toujours aussi positif ne put s’empêcher de siffler ces mots entre ses dents. Il se doutait bien que quelqu’un allait l’entendre, mais il s’enfichait bien d’être jugé puisque cela ne changerait pas grand-chose à ce qui se passerait dans le futur. Soit il avait tort et tant mieux, soit il avait raison et dans ce cas et bien, il pourrait dire adieu à sa vie… Pendant un instant, il regrettait même de ne pas être resté dans la sécurité relative de son infirmerie. Il ne pouvait pas frapper sur les malades de la où il était, mais ce n’était pas plus mal, étant donné que si la survie des autres dépendait de lui, il aurait été certain qu’ils seraient tous morts depuis longtemps.

Plus ils avançaient, plus Norman avait froid dans le dos. L'odeur était de plus en plus forte et de plus en plus insupportable. Il s'y était fait à sentir ce genre de parfum mais là, avec l'humidité, le renfermé et les rôdeurs c'était limite, la prochaine fois, il tenterait de trouver un masque à gaz pour ce genre de ravitaillement, au moins, il pourrait respirer par le nez et non par la bouche depuis qu'il était entré à l'intérieur.

"Je t'avouerais ne jamais avoir sentit une morgue en panne de courant mais, je plussois, ça fouette à mort"

Norman était placé en dernier, juste derrière Lex, devant elle il y avait Ian, Norma puis Finn qui avait pris les commandes du convoi. Le brun évitait les valises et tout débris qu'il y avait sur le sol, puis se pencha pour récupérer un billet de 200€. "Tu parles d'un voyage, venir jusqu'ici pour mourir dans un bateau." L'électricien glissa le billet dans sa poche, il n'avait plus aucune valeur, mais le morceau de papier était sympa. Puis ça lui ferait sans doute un sujet de discussion, sur les cultures étrangères.

Le brun soupira à la phrase d'Ian, il était vraiment péjoratif comme gars, s'il n'avait pas été séparé par Lex, il lui aurait sans doute mis un petit coup de poing dans le dos. Non mais sérieux, il voulait porter malchance ? Norman n'eut pas le temps de répondre à l'urgentiste, qu'une dizaine de rôdeur sortirent de nulle part.

Sursautant par leurs apparitions, Norman se positionna au côté de Finn qui ne semblait pas au très haut de sa forme, il comprit alors pourquoi, en voyant trois enfants dans le lot, bousculé par les adultes en soif de chair et de sang. C'était sur, il ne laisserait pas Lex, Ian ou bien Norma s'occuper de mettre fin à leur jour. Il s'en occuperait, il n'était pas sans coeur mais vu la situation et le contexte, il préférait le faire.

Ramassant une valise sur le sol, il la passa à Finn puis en prit une deuxième et la tendit face à lui. "T'es prêt ? Dans l'état qu'ils sont, on pousse un bon coup pour les faire tomber, le temps qu'ils se relèvent on aura largement le temps de s'en occuper." Norman marqua un très court instant "Préparez vous !" Il lança un regard vers Finn "Maintenant !"

Le brun poussa le premier rôdeur qui essaya de l'agripper par l'intermédiaire de la valise avec force et fit tomber le suivant. Il lâcha la valise et planta un rôdeur et s'occupa très rapidement des trois enfants à contrecoeur. Moins quatre, de son côté. Peut-être passerait-il pour un sans coeur mais ça lui avait beaucoup coûté de faire ces gestes.