Ce matin là, j'avais fait mon inventaire comme je le faisais tous les 4 jours. Réserve de munitions : trop bas pour espérer remporter la moindre fusillade nourrie pour peu que je sois contre un adversaire nombreux, j'avais 3 chargeurs de M4 et l'équivalent en balles de 4 chargeurs de mon Glock 22, il fallait dire que ma dernière virée pour trouver des munitions n'avait pas été fructueuse. Réserve de nourriture : j'avais encore de quoi pouvoir tenir une semaine en mangeant deux fois par jour en quantité raisonnable, 12 jours selon mes prévisions si je rationnais, du côté de la bouffe, j'étais plutôt en bonne posture, la sortie d'hier avait été assez fructueuse parmi les maisons du quartier avec une volée de conserves et il me restait encore de l'eau que je pouvais filtrer ou consommer. Réserve de médicaments : il me restait encore quelques bandages, du paracétamol et quelques antibiotiques. Ça serait suffisant si je tombais malade mais si je devais encore m'occuper de quelqu'un, je serais vite à sec. Carburant de ma voiture : j'étais à mi-réservoir, il allait falloir que je parte bientôt en quête de sans plomb. En gros, ma situation était stable et encore supportable, selon une grille que j'avais établi en faisant l'inventaire, rien n'était sous le seuil critique, seules les munitions pouvaient devenir problématiques et le carburant si je ne me dépêchai pas d'en trouver. Pour cette journée, il allait falloir que je trouve du carburant et je ne pouvais plus compter sur la raffinerie à la sortie de Tacoma, il me faudrait aller plus loin.
J'étais en partance pour Seattle en prévoyant de faire un crochet par le No Man's Land pour y voir qui pourrait bien y être peut-être de vieilles connaissances ou non lorsque je me rendis compte que ma Ford Crown Victoria noire galérait à redémarrer. Habillée d'un de mes chemisiers noirs, d'un jean bleu nuit et d'une paire de Converse blanches, mes Ray-Ban fétiches sur le nez, je me mis à regarder le tableau de bord de ma voiture comme si je m'attendais à y trouver ma réponse mais bien entendu, rien ne s'afficha. J'insistai et après quelques tentatives, le moteur partit enfin. Assez soulagée, je me mis en route pour Seattle sans plus tarder. Comme d'habitude, je fis tourner la radio de ma Ford mais je ne captais que des parasites. Je crus à un instant capter une voix mais ce n'était encore qu'un vieux message officiel qui tournait en boucle quelque part disant que les secours arriveraient. Quelle ironie que je me disais pendant que ma voiture s'ébroua... Néanmoins; ce fut le début des ennuis pour moi. Pendant que le paysage de la banlieue désolée et abandonnée de Seattle sous ce soleil d'été 2018 défila sous mes yeux, mon moteur se mit à émettre des bruits étranges. Au début c'était comme si quelqu'un donnait des coups contre le capot mais très vite, les bruits devinrent des sifflements. Je venais de prendre la Pacific Highway au niveau de Federal Way lorsque je m'arrêtai sur la route pour examiner mon capot. À première vue, rien ne me choquait mais je n'y connaissais rien en mécanique. Tout me paraissait à sa place, il n'y avait pas de fumée ou de liquide qui s'échappait, ni même une odeur que je ne trouverai pas normale. Je réembarquai à nouveau pour repartir sur encore quelques kilomètres avant de m'arrêter entre Normandy Park et le grand aéroport de Seattle-Tacoma.
Décidément me disais-je en levant encore mon capot, j'étais certaine que quelque chose n'allait pas et il fallait que je sache ce que c'était mais je n'avais pas les connaissances suffisantes pour régler mon problème de voiture. C'était une donnée vitale pour moi car sans voiture, mes capacités de déplacement seraient fortement amoindries. Changement de programme, la quête de carburant attendrait, j'avais encore de la marge mais ce problème de moteur devait être réglé. Je pouvais rouler mais je voulais régler ce problème avant qu'il ne devienne plus grave et bien sûr, il n'y avait aucun garage d'ouvert dans le secteur sinon ça aurait beaucoup trop simple de prendre rendez-vous. Au bout de quelques instants de réflexion, je me résolus d'aller directement au NML. En interrogeant quelques personnes comme le vieux Eddy ou Smith s'il s'y trouvait, je pourrais peut-être recevoir de l'aide. Cahin-caha, je parvins tant bien que mal jusqu'à l'Industrial District, espérant que ma sortie ne se fasse pas sans heurts. Comme à chaque passage au NML, je me garai à assez bonne distance, mon véhicule engoncé dans la zone entre Bloch Steel Industries et l'ancienne brasserie Two Beers Brewing Company. De là, je m'habillai de mon gilet pare-balles, de mitaines de combat trouvées dans mon précédent groupe de survivants et je levai mon M4 en sortant en m'assurant que l'endroit était bien désert. Il n'y avait pas un bruit dans les alentours mis à part de rares bruits d'oiseaux provenant des arbres environnants. Je m'assurai une dernière fois que j'étais bien armée et je verrouillai ma voiture en progressant avec précaution jusqu'à l'entrepôt où je chercherai de l'aide pour mon problème mécanique.
Étais-je chanceuse aujourd'hui ? Peut-être bien car dans mon malheur, je pus trouver quelques personnes au NML et je passai mon arme dans mon dos en pénétrant dans le squat, mes Ray-Ban rangées dans une poche. Je n'eus besoin que d'interroger un homme occupé à se faire à manger dans un coin de l'entrepôt pour qu'il ne me renvoie d'un air bourru vers une femme qui se trouvait en dehors de l'entrepôt à cette heure de la matinée. Il me disait qu'il connaissait pas mieux en me balançant un nom d'un air précipité mais il était beaucoup plus préoccupé par sa nourriture qu'autre chose. Peut-être déconnait-il ? ... Dans tous les cas je voulais m'en assurer et remettant le nez dehors, mes Ray-Ban sur le dit-nez, je déambulai vers un bâtiment dont l'ancienne devanture indiquait Global Fullfillment. La main sur la poignée de mon M4 que j'avais fait repasser devant moi, je restai vigilante pendant mon approche. Au pied d'un arbre, je vis alors une silhouette féminine qui me donnait l'impression que le visage que je ne pouvais pas encore voir ne me lâchait pas des yeux. De l'autre côté, même si j'étais aux aguets, je n'avais rien fait pour être discrète. Je vins à portée de voix et fit un premier pas vers elle en gardant une certaine distance, la femme n'avait pas pris la fuite. Mon M4 était bien en vue mais je n'avais pas l'intention de la flinguer sur place.
Vous êtes celle qui se fait appeler... euh... Monroe ? On m'a dit que... vous vous y connaissiez en mécanique automobile. J'ai une voiture qui... on va dire m'inquiète, vous êtes donc peut-être celle que je cherche ?