Mais qu'attendait-elle de lui, au juste ? Qu'il débarque comme le Messie pour lui apporter la parole divine, en dédoublant les pains, si possible ? Jazz savait pourtant que Dieu et consort étaient loin de son quotidien du No Man's Land, enfermés avec le cadavre putréfié de Bailey quelque part au sud de l'état de Washington.
Pourtant, et même s'il ne ressemblait en rien à un hippie prophétique, la métisse ne put empêcher une part d'elle-même d'attendre la fin de son examen avec un brin d'espoir.

Quant enfin il lui offrit une réponse, celle-ci ne manqua pas d'accélérer son rythme cardiaque. Un air de famille ? Elle aurait traversé le pacifique à la nage pour des pistes plus faiblardes que ça. Evidemment, elle devait d'abord savoir si ce n'était pas un mensonge, qu'il soit volontaire ou involontaire. Il y avait une certaine plage de la population blanche qui semblait ne pas réussir à différencier les personnes d'une autre ethnie que la leur : les japonais, indonésiens, coréens passaient tous pour des chinois à leurs yeux. Alors différencier deux afro-américains, pour ce genre de redneck...
Même si Connor Shepard avait ce petit quelque chose qui la poussait presque à lui faire confiance, la moindre étincelle d'espoir allait de pair avec un brasier de méfiance.

« Si je suis bien la pire, c'est que ça ne devait pas être mes sœurs. » Il n'était pas question de dire que les filles Clarke étaient des démons certes, mais il aurait fallu qu'elle soit folle pour les considérer comme des anges. Sur le plan des cris, des disputes et des prises de tête, Janessa s'était toujours fait battre à plat de couture par ses trois aînées, malgré ses efforts pour ne pas se faire trop distancer en la matière. Mince, même tout ça, ça lui manquait.
« J'les ai vraiment plus revues depuis c'te merde. Si elles apprennent que je plaisante là-dessus, elles risquent de m'arracher la tête. » Ajouta-t-elle en haussant les épaules. Il n'y avait aucun misérabilisme dans sa voix : elle était bien trop consciente que tous avaient traversé la même chose. Elle était déjà heureuse d'être en vie et sans problème de santé majeur.

Il poursuivit sur ce dont il avait besoin. Décidément, il ne manquait pas une occasion de l'étonner. De l'agriculture ? De masse ? « Hey, j'étais étudiante en bio, moi hein... Je connais des plantes qui peuvent te donner une haleine décente, mais de là à faire de l'agriculture, c'est un pas un peu trop grand pour moi. » Expliqua-t-elle sur le même ton que lui. Elle avait bien eu un cours d'agronomie en première année, mais à l'époque ça ne l'avait pas vraiment passionnée. Et puis ça avait été parfaitement théorique, elle n'avait jamais enfilé de bottes en caoutchouc de sa vie.
Malgré tout, elle avait quand même un avis dont elle lui fit rapidement part : « Faites pousser des navets. C'est coriace le navet, parfait pour la grisaille du coin. Et procurez-vous de l'engrais, ça réglera et votre souci d'agriculture et votre envie de tout faire péter. Bon, ça a un côté moins pratique que les grenades, j'avoue... Mais au moins c'est deux en un ! »
Est-ce qu'elle négociait vraiment en lui conseillant de faire des bombes artisanales, là ?

« Ok ok… » Fit-il en se raidissant d’un coup.

Connor pouvait être idiot, mais y’avait tout de même des signes qui avaient du mal à passer inaperçu, même pour un aveugle comme lui. Le fait que la petit Jazz en face de lui ait l’air soudainement un peu plus fébrile, que ses réponses la troublaient vraiment, ou encore qu’elle eût du mal à vraiment lâcher le morceau. Ses sœurs donc ? Elle en avait plusieurs. Et s’il y avait la moindre chance que la Clarke qu’il connaissait soit l’une d’elle, il ne pouvait vraiment pas laisser ça sur le bord de la route. Lui savait ce que c’était que d’avoir un proche : une nécessité, importante, une bénédiction. Sans Quinn, Connor aurait abandonné depuis longtemps la partie.

« J’vais peut-être passer pour un con mais j’veux pas te laisser sans t’avoir concrètement demandé la chose. » Fit-il alors soudainement en plissant le regard, scrutant la brune en face de lui avec le plus grand des sérieux : « Si j’passe à côté d’un truc, faut me le dire tout de suite, Jazz. Parce que j’peux être très con, et très fort pour pas voir les évidences. »

Oh ça, non, Connor était loin d’être devin. Certes, il cernait plutôt bien les personnes – son instinct s’était affûté avec le temps, surtout avec les personnes qu’il rencontrait. Il les sentait, ou non. Et Jazz, ça allait. Mais s’il appréciait raisonnablement la petite devant lui, il estimait bien d’avantage Shawna. Et vu tous les malheurs qu’elle avait traversés dernièrement, peut-être que retrouver un proche de sa famille lui ferait du bien. S’il y avait une chance… La moindre petite chance pour que ça soit possible…

« Shawna Clarke, ça te dit pas un truc hein ? » Demanda-t-il franchement.

Il ne pouvait pas prendre de détour avec elle. Pour autant, il ne manqua pas d’esquisser un sourire : Jazz était bavarde et plutôt maline. Il fut sur le point de sortir de quoi noter ce qu’elle lui disait, mais choisit plutôt d’enregistrer tout ça. Pas sûr que ça lui soit totalement utile dans l’immédiat, mais y’avait de l’idée, et de la bonne :

« T’es pas en train de dire que j’pue de la gueule j’espère ? » Demanda-t-il avant de vérifier, plaçant une main devant sa bouche avant de souffler dessus. Bon, il avait l’odeur de l’homme qui parcourait des kilomètres tous les jours et qui n’avait pas eu accès à une douche et un rasoir depuis un moment. Mais ils étaient tous logés à la même enseigne ici, alors était-ce vraiment si choquant que ça ? « T’en as d’autres des p’tits conseils comme ça ? J’suis preneur. » Fit-il, sincèrement.

Avec ça, Jazz gagnerait son salaire.

Elle serra les poings avec force pour les empêcher de trembler dans les tréfonds de ses poches. Lui non plus n'avait pas gardé la légèreté du début, comme s'il avait compris quelque chose avant elle. Les secondes s'écoulaient avec une lenteur effrayante. Elle aurait voulu le secouer comme un prunier pour qu'il pose la question sans mettre de formes. Elle ne fit rien : elle était pétrifiée sur place, respiration bloquée.
Bailey lui parlait souvent de ses cours, quand elles habitaient ensemble sur le campus de Sacramento. Il y avait ce truc, ce trouble dissociatif qui arrivait à certaines personnes lorsqu'elles vivaient un traumatisme qu'elles étaient incapables de gérer. C'était comme si leurs esprits sortaient de leurs corps. Ils pouvaient se voir, voir la scène sans rien ressentir physiquement ou émotionnellement.
Elle avait l'impression que c'était un petit peu ce qu'il lui arrivait. Elle n'avait pas quitté son corps évidemment, mais elle s'était détachée du froid qui lui mordait la peau et des inquiétudes qui lui ravageaient la tête. Elle n'entendit pas ce qu'il lui dit, quelque chose entre conneries et évidences, alors qu'elle n'était plus qu'une coquille humaine attendant un mot de passe. Un mot de passe sur trois possibles. Janice, Sherill, Shawna.

Shawna Clarke. Le temps qui s'était arrêté reprit violemment son cours, faisant chanceler la jeune femme. Elle eut -heureusement- la présence d'esprit de reprendre une goulée d'air bruyante qui lui brûla presque les poumons, lui évitant l'asphyxie de peu.
Shawna. Jazz se passa une main sur le visage en fermant les yeux, index et pouce s'attardant à masser ses tempes.
Quand elle se sentit qu'elle pourrait parler d'une voix ferme, sans couiner, elle renfonça son poing dans sa poche.
« Où as-tu entendu ce prénom ? Quand ? » Ce n'était qu'un murmure. Elle n'était pas prête à tout croire mais en mourait d'envie. Si elle n'avait pas eu peur de ses réponses, elle lui aurait débité sa checklist de questions de crédibilité en deux-deux, dans un souffle, pour se débarrasser cette épreuve : déçue ou euphorique, peu importe le résultat, elle refusait de devoir rester dans cette expectative qui la faisait trépigner.

« Reprends un bonbon. J'ai une vie de conseils à la con. Je peux tout donner. » Elle pouvait tout donner contre des renseignements valables. Ses mots. La méthode la plus ancestrale de faire de l'engrais à base de déjections. Ses armes. Berreta, couteaux, hachette, peu importe elle se referait. Son sac. Deux ans de sa vie empaquetée en moins de sept kilos, peu importe, elle serait plus légère pour trouver sa sœur.

Shawnie. Elle prit une autre inspiration alors qu'un tic nerveux lui traversait la mâchoire. Ce n'était pas la première fois qu'on plantait cette petite graine d'espoir en elle. Elle avait à chaque fois gangrené ses nerfs, et chaque déception s'était payée au prix fort pour sa stabilité mentale... Et pour la santé des autres. Pourquoi est-ce que cela finirait différemment ce jour-là ? Peut-être que c'était elle, la cible à pigeonner, dans ce troc.

Déjà l'adrénaline coulait dans ses veines. S'il mentait, le pourboire qu'il devrait lui verser serait salé.

Oh, la petite se montrait étrangement moins bavarde dès lorsqu’il prononça son prénom. Shawna. Ça faisait un bout qu’il n’avait pas vu la jeune femme, mais il était à peu près sûr qu’elle allait très bien, avec son fils, au ranch. Loin de se douter de tout ce qu’il se passait là-bas et des risques qu’ils prenaient actuellement. Ou du fait que la métisse n’était pas toujours en bonne compagnie. Les questions qui fusèrent de la part de Jazz lui arrachèrent un froncement de sourcil. Difficile de savoir ce qu’il pourrait lui dire sur sa situation actuelle ou non, mais le sujet semblait lui tenir à cœur vu le sérieux qu’elle arborait actuellement.

« A mon campement. » Confia-t-il en fronçant les sourcils.

C’était au moins rapide et précis. Il ne voyait de toute façon pas quoi lui dire d’autres, sans rentrer dans des discours interminables. C’était étrange d’ailleurs de ne plus la voir aussi « dynamique » et vivante que quelques secondes avant. A croire que le prénom de Shawna venait de lui couper tout simplement le souffle. Il fit mine de rien, mais ça l’interrogeait tout de même. Se passant une main dans sa barbe de plusieurs jours, il essaya de faire le tri entre toutes ses informations, pour parvenir à confier à Jazz ce qu’il lui fallait pour montrer qu’il ne se jouait pas d’elle.

Il lui faudrait ensuite vérifier qu’il n’y avait pas cinquante Shawna Clarke dans l’état de Washington, qui pourrait correspondre au profil. Avait-elle un signe distinctif que seule sa sœur pouvait connaitre ? Une cicatrice, ou un tatouage peut-être ? Bon sang ! Connor ne la connaissait peut-être pas assez pour ça…

« La dernière fois que je l’ai vu, ça remonte à quelques semaines. » Admit-il dans la foulée, un peu gêné de ne pas avoir mieux. « C’est pas le genre à sortir alors… A mon avis, elle est au campement et elle se porte très bien. »

Ça n’était que son avis. Les choses avaient pu changer depuis, il fallait dire qu’il ne l’avait pas vu depuis très longtemps elle aussi. Le Ranch avait probablement évolué en son absence, et de nouvelles têtes y avaient pris place. Lui… Lui, il serait l’inconnu du lot quand il y retournerait. Voilà bientôt un an – l’anniversaire approchait à grand pas – que les retrouvailles avec ses proches n’avaient pas eu cours. Autant dire que sa parole ne valait d’ordinaire pas grand-chose, même si Shawna faisait parti du paysage depuis longtemps et qu’il n’y avait pas de raisons que ça change :

« Donc, tu la connais ou merde ? » Demanda-t-il franchement cette fois, un peu agacé de ne pas la voir plus précise que ça.

Il y avait une Shawna à son campement. Il l'avait vue quelques semaines auparavant.
Elle  eut une envie de lui grimper sur la tête en hurlant devant la brièveté de ses réponses, avant de se rendre compte que c'était sans doute elle qui avait posé de trop courtes questions. Ou peut-être qu'il le faisait exprès, il savait que le meilleur moyen de ne pas être perçu comme un menteur était de ne pas trop en dire : moins il y aurait de détails et moins elle pourrait gratter.

Apprendre ensuite que la possible Shawna Clarke sortait peu de l'enceinte du camp la surprit peu. Elle ne gardait pas ce genre de souvenirs de sa sœur. Plutôt une personnalité bornée et un peu fonceuse aussi. Elle devait bien admettre que des cadavres se relevant pour se lancer dans des petites séances de cannibalisme avaient de quoi refroidir les caractères les plus téméraires, mais elle supposait malgré tout que sa sœur avait réussi à surmonter tout ça. Alors peut-être n'était-ce pas sa Shawnie.

« Elle est.. » Elle marqua une hésitation, pinçant un instant les lèvres. « Elle n'a pas d'autres membres de sa famille là-bas ? »
Elle savait que Shawna avait rejoint leur mère au début de l'apocalypse. Avec un peu de chance, et si c'était bien elle qui était là-bas, elle n'aurait pas eu à vivre ces trois dernières années seule. Et Sherill ? Son mari ? Le petit ? Elle revoyait leur dernier Noël tous ensemble. Si seulement celui qui arrivait pouvait reproduire cette même scène pleine d'insouciance quand ils avaient déballé leurs cadeaux au pied du sapin.

« La connais... Ou merde ?! » Elle le regarda de haut en bas -ou plutôt de très haut à très bas- alors que ses poings prenaient appui sur ses hanches, presque outrée par la question. « Si je connais ma propre sœur ? Tu me prends pour un veau ou quoi ? » persifla-t-elle sans préciser ce qu'elle entendait par veau. Pas quelque chose de très positif en tout cas. « Bordel, c'est toi qui jettes ce nom comme ça, et c'est moi qui dois répondre à c'te question... » Déjà elle haussait le ton, forçant les quelques quidams qui trainaient trop proche d'eux à s'écarter. Pas qu'ils refusaient d'entendre les derniers cancans du coin, mais il y avait toujours une distance de sécurité au cas où ceux qui se disputaient en venaient aux mains. Ou pire, que la jeune femme qui commençait à bouillir pose la main sur la hachette qui pendait à son côté droit.

« Tu la connais bien, ta Shawna ? Elle faisait quoi comme taf avant cette merde ? Elle a combien d'enfants ? » Aboya-t-elle presque.

Sourcils froncés, sourire oublié depuis longtemps, la question brute de pomme de Connor semblait l'avoir sortie de sa torpeur. Pire: elle semblait prête à l'assommer sous une autre vague de questions.

« Pas que je sache. Elle était la seule quand je l'ai rencontré. » répondit Connor en se rendant compte que les questions n'étaient pas aussi évidentes que prévus.

Il connaissait son groupe pourtant, et la majorité de ses représentants. Même si les choses avaient évolués et qu'il n'avait pas affronté les pertes et les nouvelles arrivées, il se disait être capable de parler d'eux sans s'inquiéter. Pourtant face a Jazz, tout avait pris une certaine complexité, comme s'il perdait soudainement ses moyens en se demandant ce qu'il foutait là.

« Bah réagis alors ! Sois pas amorphe comme ca, c'est dingue putain ! » s'emporta l'homme en la regardant avec les yeux ronds. Le sport lui avait pourtant appris a ne pas se frustrer sous la pression mais c'était plus fort que lui : elle s'en prenait a lui alors que sa question était bien plus simple que les siennes. « On dirait que t'as vu un fantôme, on vérifie juste que c'est la même personne alors détend toi et respire. »

Il pouvait parler ! Lui ne faisait clairement pas mieux, un peu crispé. Il se redressa, se rendant compte soudainement qu'il s'était penché pour être dans le secret avec la jeune femme devant lui. Soudainement, l'homme se sentit grand et profita de sa taille pour guetter autour de lui que personne n'écoutait. C'était du sérieux. Autant ramener une petite sœur a sa famille que la sécurité de son groupe. Hors de question de subir des oreilles indiscrètes.

« Plutôt. Elle était coiffeuse. Elle l'est toujours, c'est elle qui s'en occupe pour tout le camp. Quand je l'ai rencontré, elle était en couple avec un certain Axel. Avec qui elle a eu un fils, Liam. Maintenant, elle a plus que son gamin. » précisa l'homme un peu sèchement. Se rendant compte que ça faisait beaucoup a encaisser pour Jazz il rajouta : « Le gosse a même pas un an alors j'suppose que tu peux pas le connaître. »

Ça faisait donc déjà si longtemps que lui avait quitté le groupe pour aller vadrouiller. Si longtemps déjà qu'Axel était mort au passage. Tout ça pour rien. Un peu écœuré par cette évidence, il soupira.

« Elle est petite comme toi, les cheveux longs et bouclés, les yeux clairs. Elle souriait beaucoup et râlait tout autant avant. Je sais même pas quoi te dire d'autres… c'est… résumé une personne comme ça, je sais pas faire. » se justifia Connor comme il le put.

Shawna n'avait donc pas été rejointe par Sherill. Elle pouvait le comprendre, leur aînée avait sa propre famille à mettre en sécurité. Elle avait dû fuir Seattle de son côté, et puis la folie furieuse avait empêché les sœurs de se retrouver. Quant au sort de leur mère, Jazz préférait ne pas y penser.
Elle se rendit compte qu'elle ne mettait plus en doute la parole de Shepard. Elle commençait à le croire de plus en plus, et cette sensation allait de pair avec une bonne dose d'effroi. Etait-ce parce qu'elle voyait toujours le joueur de baseball sympathique, plutôt que le géant des steppes bourru, qu'elle acceptait si facilement ses réponses ? Ou peut-être était-ce le temps qui ramollissait ses défenses ? Elle n'avait toujours pas tranché.

Il la gifla de quelques mots emportés auxquels elle répondit d'une voix empruntée, d'un calme peu trompeur : « Excusez-moi monsieur Connor Shepard de ne pas avoir un master en
comment-bien-réagir-quand-un-inconnu-vous-dit-yolo-je-connais-ta-famille, moi. »
Vexée comme pas deux, elle poursuivit : « Puis tu peux bien parler de détente. T'as vu ta tête ? Pète un coup, t'as l'air plus tendu qu'un string sur les fesses de... » Elle hésita. Qui avait encore les fesses assez grosses pour tendre une ficelle de string ? Elle secoua la tête sans finir sa phrase, image trop perturbante dans la tête, ce qui eut au moins le mérite de la distraire quelques secondes de son état d'esprit vindicatif : « Laisse tomber. J'suppose que ça fait partie des sujets qui me font vriller de façon chelou. »
Forte de cet élan de maturité, et n'ayant pas vomi tout un tas de piques au visage du géant, elle écouta les trois dernières années de la vie de sa sœur en se grattant la tempe.
Rien dans les dires de Connor ne permirent à Janessa de mettre au jour un quelque mensonge, mais ça, elle s'en doutait déjà.
Alors comme ça Shawna avait gardé les ciseaux et avait eu un bébé. Elle se souvenait du désir de sa sœur d'avoir une famille nombreuse, et admira son entêtement pour ne pas avoir abandonné son envie d'enfant malgré l'épidémie. La mort de son compagnon fut plus difficile à entendre. Elle hocha bêtement la tête sans savoir quoi en penser.

Elle rendit les armes quand il décrivit le physique de la jeune femme de son camp, acceptant par la même ses justifications : « Ça colle. Soit c'est elle soit je finis dans une poubelle, mais au diable la prudence. »
Elle prit une inspiration supplémentaire avant de se mordiller l'ongle du pouce, index pointé sur le joueur de baseball. « Juste une question... Tu m'as dit que tu ne l'avais plus vue depuis quelques semaines. Pourquoi est-ce que tu n'es plus retourné voir ton camp depuis si longtemps ? »

Il était parti en vadrouille ou... Il avait été mis dehors ?