Page 1 sur 2 • 1, 2
Fucking Fate
Mar 6 Aoû 2019 - 14:04
Fucking Fate
Elena Hortos & Milow Lewis
On l'avait laissé à l'infirmerie en attendant. Sous 'surveillance'. Ça faisait plusieurs jours maintenant, trois, pour être exact. Trois jours qu'il avait commis la faute de sa vie. Trois jours qu'il était là, dans cette pièce qui sentait le désinfectant, à ne rien faire, à fixer le vide d'un air beaucoup trop sérieux pour ne pas être inquiétant. Il n'avait pas mangé, avait à peine bu, et se contentait, quand ils avaient de la chance, à jeter de simples oeillades meurtrières à ceux qui s'adressaient à lui. À une certaine Caroline, qui pourtant ne perdait jamais son intonation douce et compatissante. Il n'y avait que sa sœur qui avait eu droit à quelques mots, et encore. C'était elle qui s'était chargée de lui faire une toilette sommaire pour retirer le sang de Jesse de sa peau et de ses cheveux, et elle aussi qui l'avait changé. Personne d'autre ne l'avait touché, et n'avait le droit de le toucher.
À présent, elle était sortie, elle, le laissant seul avec ses pensées.
Et elles étaient aussi nombreuses que décousues. Et il y avait cette phrase, cette phrase affreuse qui tournait, tournait, tournait en boucle dans sa tête, sonnant comme une mélodie lugubre et moqueuse.
Tu as tué ton frère. Tu as tué ton frère. Tu as tué ton frère.
Dans sa vie d'avant, il avait pensé plusieurs fois à quel point sa vie serait belle sans Jesse pour lui dire de faire ses devoirs et d'aller se laver. Il lui avait dit, même, qu'il préférerait qu'il soit mort. Après la fin du monde, il avait repensé à ses mots d'avant. La première fois qu'il avait perdu Jesse, il les avait regretté, mortellement regretté. À présent … c'était pire encore, cette douleur poignante qui lui transperçait le cœur. Comme une ironie douceâtre qui lui riait à l'oreille. Il détestait le destin. Il détestait la vie. Il se détestait. Il aurait voulu que Serena lui colle une balle dans le crâne avant qu'il n'ait le temps de faire quoique ce soit.
Mais lui était toujours là, et pas lui.
Ses prunelles trop claires fixaient le mur en face de lui, à la recherche, peut-être, d'une solution pour se sortir de cette impasse. Assis par terre, le dos appuyé contre le lit, la journée avait commencé il y a peu. Dehors, les bruits de ce qui semblait être une communauté lui parvenait. Là où il était, il y avait de la vie.
Il avait passé la nuit par terre et avait à peine fermé l'oeil. Sur la table de chevet, un petit déjeuner, auquel il n'avait pas touché. Caroline lui avait touché deux mots, l'avait regardé longuement, et, face au silence imperturbable du garçon, était ressortie.
Et le temps filait, lentement.
- Invité
- Invité
- Casier judiciaire
- Feuille de personnage
Re: Fucking Fate
Mar 13 Aoû 2019 - 19:01
« Il ne veut toujours pas manger. Il n’a rien avalé depuis qu’il est arrivé. » l’informa Caroline, la mine grave et douloureuse d’une mère compatissante qui s’inquiétait pour cet enfant. La grecque hocha la tête en posant une main sur le bras de la vétérinaire. Elle avait déjà fait beaucoup, elle pouvait aller se reposer et passer le relais. Surtout… Ces derniers temps. Elle avait suffisamment affronté la mort comme ça pour s’imposer de vivre le deuil et la souffrance d’un autre. Elle se pinça les lèvres en suivant du regard la silhouette de son amie. Elle ne réalisait toujours pas. Jeff. Jesse maintenant. Comment était-ce possible ? Elle se voyait quatre jours avant s’entraîner avec le bouclé. Elle se voyait saluer le couple le matin de leur sortie en se disant qu’il fallait qu’elle parle à Jesse d’un projet, d’aménager une salle de sports avec plus d’équipements pour adapter leurs séances à leur conditions de vie. Et puis aussi parce que les survivants ne pillaient pas forcément les anciens magasins de sport, et qu’il était simple de s’approvisionner. Ce n’était pas une idée vitale, pas quelque chose d’essentiel mais ça pourrait optimiser le défouloir de beaucoup ici. Jesse était comme elle; comme beaucoup d’autres ici, à trouver leur moment de paix dans l’effort, à se sentir libéré seulement après avoir sué pendant des heures. Mais le jeune homme n’était pas rentré. Au lieu de lui, deux jeunes adolescents traumatisés et anéantis que Serena avait tiré jusqu’au Fort.
Comment ne pas être marqué par ce qu’il s’était passé ? Elena n’avait pas voulu le croire. Comment croire à un coup du destin aussi cruel ? Choisir de réunir une fratrie pour mieux la détruire ensuite… C’était abject, innommable. Ce que ce garçon devait ressentir… Non, elle ne pouvait pas se l’imaginer. Pourtant elle ne pouvait pas non plus se résoudre à le laisser dépérir. Pour son frère. Pour le respect et l’amitié qu’elle avait pour lui. Parce qu’il n’avait pas mérité cette fin, qu’il aurait dû vivre assez pour avoir la chance de retrouver et parler de nouveau à sa famille, qu’il aurait dû être encore là auprès de Serena. La brune soupira sans bruit avant de pousser la porte dans laquelle était reclus Millow.
Ses yeux se plissèrent lorsqu’ils se posèrent sur le lit déserté, avant qu’ils n’accrochent la masse de cheveux sombre qui dépassait de l’autre côté. Le plateau repas n’avait pas bougé du chevet. Et l’adolescent n’eut aucun mouvement lorsque les pas de la grecque foulèrent le sol jusqu’à venir à sa rencontre. Elle s’immobilisa un instant, figeant son regard sur la silhouette inerte qui jonchait le parquet, en se demandant ce qu’elle faisait là. Elle aurait sans doute mieux fait d’envoyer Shawna, Ludwig, Olivia ou n’importe quel autre plutôt qu’elle. Armé de plus de patience. De cette chaleur qui prêtait à une relation de confiance.
« Olivia et Shawna se sont données du mal pour ce repas. » Elle ne prit pas la peine de faire un geste dans la direction du plateau, sachant pertinemment qu’il ne redresserait pas la tête vers elle. Savait-il qui était les deux femmes qui s’étaient activées aux fourneaux pour lui ? Sûrement pas. En avait-il quelque chose à faire ? Là encore, sûrement pas. « Ta soeur semble s’intégrer ici. Tu as l’intention de l’imiter ou de te laisser mourir de faim par terre ? Si c’est ça, autant prévenir Caroline pour qu’elle arrête de s’occuper de toi. » Nouveau prénom qu’il n’avait probablement pas retenu. Elena resta debout à fixer l’adolescent sans animosité mais sans compassion apparente dans son attitude. Si l’approche douce de ses amis ne fonctionnait pas, la grecque pouvait s’adapter autrement.
- Invité
- Invité
- Casier judiciaire
- Feuille de personnage
Re: Fucking Fate
Mar 13 Aoû 2019 - 22:51
Il ne remarqua pas de suite la présence, dans la chambre, et eut à peine un frémissement quand elle s'approcha. Ce n'était pas celle qui venait d'habitude, ni même le grand mec roux, qui était venu une fois pour tenter de bégayer deux-trois mots avant de repartir aussi sec.
Est-ce qu'il s'attendait à encore un peu de compassion venant de cette personne ? À vrai dire, oui. Mais la compassion, il n'en avait rien à faire. Ce n'était pas grâce à la pitié que les gens avaient dans le regard en l'observant que Jesse allait revenir. Ce n'était pas grâce à leur gentillesse qu'il allait pouvoir changer le passé. C'était fait. Terminé. Fini. À cause d'un simple geste, un indexe sur une gâchette, et pfiouh ! Plus de Jesse.
Dans un autre contexte, il aurait tout simplement haussé les épaules face à cette première approche. Elles s'étaient données du mal, qu'est-ce qu'il en avait à cirer ? Il n'avait rien demandé. Déjà que, d'ordinaire, il n'était pas du genre à être reconnaissant … à cet instant, c'était à peine s'il calculait les mots de la femme. Qu'on lui foute la paix. Qu'on le laisse crever.
Elle mentionna sa sœur, ce qui lui arracha un bref coup d'oeil en biais. De ce style de coup d'oeil qui veut dire 'd'où elle se permet de parler de ma sœur ?', comme s'il devait se comparer à elle et se sentir mal de savoir que ce n'était pas elle qui avait tiré sur son frère. Certes, c'était difficile pour Ryan aussi, il le savait. Mais dans l'état actuel des choses, il n'arrivait pas à se focaliser sur autre chose que sa propre douleur. Il n'arrivait pas à sortir de sa tête.
Il n'ouvrit pas la bouche face à sa dernière phrase qui ressemblait plus à une pique de provoc qu'autre chose. Les secondes s'égrenèrent, une à une, avec lenteur, où il sentait le regard glacial de la femme ployer sur sa nuque. C'était long. Lui voulait juste être seul. Alors, après ce silence beaucoup trop long, il daigna désserrer les lèvres pour lâcher d'une voix faible et enrouée :
- J'me laisse mourir.
Voilà, comme ça, elle avait sa réponse, il jouait son jeu, et dans le meilleur des cas, elle allait simplement sortir et le laisser effectivement mourir tout seul dans son coin, parce que c'était ce qu'il méritait après tout.
De toute manière, comment pouvait-il continuer à vivre en sachant qu'il avait volé la vie de son frère ? Il culpabilisait d'être encore là. Il ne voulait pas se soigner, se nourrir, en sachant que Jesse s'était sans doute trouver-là, à un moment. Et que c'était de sa faute si ce n'était plus le cas. Et que cette femme, là, devait le connaître. Devait être son amie. Milow le lui avait arraché. Tous les gens de ce camp connaissait Jesse.
Est-ce qu'il s'attendait à encore un peu de compassion venant de cette personne ? À vrai dire, oui. Mais la compassion, il n'en avait rien à faire. Ce n'était pas grâce à la pitié que les gens avaient dans le regard en l'observant que Jesse allait revenir. Ce n'était pas grâce à leur gentillesse qu'il allait pouvoir changer le passé. C'était fait. Terminé. Fini. À cause d'un simple geste, un indexe sur une gâchette, et pfiouh ! Plus de Jesse.
Dans un autre contexte, il aurait tout simplement haussé les épaules face à cette première approche. Elles s'étaient données du mal, qu'est-ce qu'il en avait à cirer ? Il n'avait rien demandé. Déjà que, d'ordinaire, il n'était pas du genre à être reconnaissant … à cet instant, c'était à peine s'il calculait les mots de la femme. Qu'on lui foute la paix. Qu'on le laisse crever.
Elle mentionna sa sœur, ce qui lui arracha un bref coup d'oeil en biais. De ce style de coup d'oeil qui veut dire 'd'où elle se permet de parler de ma sœur ?', comme s'il devait se comparer à elle et se sentir mal de savoir que ce n'était pas elle qui avait tiré sur son frère. Certes, c'était difficile pour Ryan aussi, il le savait. Mais dans l'état actuel des choses, il n'arrivait pas à se focaliser sur autre chose que sa propre douleur. Il n'arrivait pas à sortir de sa tête.
Il n'ouvrit pas la bouche face à sa dernière phrase qui ressemblait plus à une pique de provoc qu'autre chose. Les secondes s'égrenèrent, une à une, avec lenteur, où il sentait le regard glacial de la femme ployer sur sa nuque. C'était long. Lui voulait juste être seul. Alors, après ce silence beaucoup trop long, il daigna désserrer les lèvres pour lâcher d'une voix faible et enrouée :
- J'me laisse mourir.
Voilà, comme ça, elle avait sa réponse, il jouait son jeu, et dans le meilleur des cas, elle allait simplement sortir et le laisser effectivement mourir tout seul dans son coin, parce que c'était ce qu'il méritait après tout.
De toute manière, comment pouvait-il continuer à vivre en sachant qu'il avait volé la vie de son frère ? Il culpabilisait d'être encore là. Il ne voulait pas se soigner, se nourrir, en sachant que Jesse s'était sans doute trouver-là, à un moment. Et que c'était de sa faute si ce n'était plus le cas. Et que cette femme, là, devait le connaître. Devait être son amie. Milow le lui avait arraché. Tous les gens de ce camp connaissait Jesse.
- Invité
- Invité
- Casier judiciaire
- Feuille de personnage
Re: Fucking Fate
Dim 25 Aoû 2019 - 18:20
Le bref regard distrait que lui jeta le garçon eut au moins le mérite de lui signaler qu’elle avait touché juste en mentionnant sa soeur. Millow était probablement loin d’être un mauvais gars. C’était simplement un enfant condamné à grandir trop vite, à s’élever seul, dans la rudesse d’un monde qui brisait l’innocence des plus jeunes. Pire encore, il avait eu la responsabilité de Riley sur ses frêles épaules, comme si survivre n’était pas assez difficile comme ça, il avait vécu avec le poids de cette dernière, parce que c’était ce qu’il avait fait, elle l’avait compris en voyant et écoutant la jeune Lewis ; il l’avait protégée, il avait veillé sur elle, et probablement que l’inverse était un peu vrai aussi. Mais maintenant qu’ils étaient ici, même si oui, c’était la chose à faire, c’était ce que Jesse avait voulu, ce que Serena avait respecté, ce que la grecque comprenait aussi. Mais ici, le poids du deuil était plus lourd encore. La culpabilité qui incendiait sa poitrine, qui lui cisaillait l’esprit, elle ne faisait que croître, à mesure qu’il respirait encore, à force d’entendre la vie autour de lui, de réaliser qu’il continuait de se réveiller jour après jour, qu’il y avait tout un monde ici, qu’il avait presque toujours été là, avec son frère pour le faire vivre, et que ces gens qui venaient successivement à son chevet avaient côtoyé de près ou de loin ce bouclé au caractère trempé. Dehors, peut-être que tout aurait été différent pour lui. Il y aurait du chagrin bien sûr. Longtemps. Toujours. Mais il aurait trouvé la force de se relever pour Riley, pour veiller sur elle plus que jamais.
Elena savait que rien ne serait simple. Leur vie ne l’était pas, et faire face aux conséquences de leurs actes était un défi pénible, douloureux. L’adolescent n’avait rien demandé. Il n’avait pas voulu tuer son aîné, il n’avait pas voulu être traîné ici, il n’avait pas souhaité qu’on s’occupe de lui, ou qu’on lui prépare à manger. Il n’avait simplement rien dit. Il s’était laissé faire, inerte, mort à l’intérieur. Mais la grecque, en prenant la charge de ce groupe, s’était engagée à veiller sur ses membres, et les laisser dépérir ne figurait pas sur la liste de ses devoirs. Jesse n’était plus là. Lui qui avait été un ami. Lui qui avait délibérément choisi de prendre les armes à leurs côtés au ranch, lui avait choisi de rester plutôt que fuir alors que leur groupe était affaibli, asservi. Il était mort. Mais comme tous les autres qui avaient connu son triste destin, il méritait qu’on n’oublie jamais sa mémoire. Que penserait-il s’il savait qu’on laissait son petit frère mourir lentement, se détester pour ce qu’il avait fait ? Non. Elena ne le laisserait pas faire. À sa manière, toutefois…
« Et Riley ? Tu crois que c’est une garderie ici ? » Ses mains vinrent se poser sur ses hanches fines, alors qu’elle toisait froidement le brun. Il avait besoin d’être secoué. C’était brutal, douloureux, mais il devait se réveiller de cette léthargie dangereuse dans laquelle il coulait lentement. Au réveil, ce serait violent, il y aurait de la souffrance encore, mais il devait se relever, il devait accepter d’avancer. « Pour information, même si je te l’accorde, on peut donner l’impression d’être un camp de hippies qui vit loin du tumulte de l’extérieur, on ne s’est pas fait que des amis au cours des mois. Ton frère s’est battu à nos côtés d’ailleurs. Il y a eu des morts. Beaucoup de morts. » Des dizaines et dizaines. Elena pouvait sentir l’odeur de l’hémoglobine qui s’était imprégnée dans les murs du ranch. Elle pouvait revoir les amas de cadavres qui jonchaient le sol, quand elle fermait les yeux. « On est encore là oui. Mais nos ennemis sont toujours quelque part, plus nombreux, bien plus que nous. » ce qu’elle voulait dire ? Ils n’étaient pas en sécurité. Personne ne l’était. S’il pensait pouvoir se décomposer doucement en leur laissant Riley, qu’il sache où il la laissait et à qui surtout.
- Invité
- Invité
- Casier judiciaire
- Feuille de personnage
Re: Fucking Fate
Mar 27 Aoû 2019 - 16:15
- Elle s'appelle Ryan.
Ça lui avait échappé avec un aplomb glacial, tout juste lorsqu'elle eut terminé de parler, comme si elle venait de commettre-là une terrible erreur.
Si elle essayait de le faire culpabiliser, il aurait peut-être fallu qu'elle prépare un peu mieux son texte avant de venir. Et puis, de toute manière, Milow n'avait guère besoin d'aide pour ça.
Il ne la regardait toujours pas, persuadé que s'il créé un contact visuel avec elle, elle n'allait plus jamais partir d'ici.
Dans sa tête, en réponse à ses paroles, c'était un 'qu'est-ce que ça peut me foutre ?' qu'il répondait. Que leurs ennemis débarquent ! Qu'ils viennent décimer le camp aujourd'hui si ça leur faisait plaisir ! Avec lui dedans, même, et avec Ryan ! Ça ne changeait rien pour l'adolescent, plus rien. De toute manière, c'était bien comme cela que les choses fonctionnaient, à présent : tout le monde finissait par mourir. Et ce n'était pas Milow qui allait s'apitoyer sur le sort de cette communauté qui avait apparemmen essuyé autant des pertes. Il n'avait pas la psychologie pour ressentir de la compassion.
Il déglutit, dans l'espoir de ravaler cette folle envie de hurler à cette femme d'aller se faire voir. Ça ne changeait rien. Elle avait très certainement senti qu'elle n'était pas la bienvenue ici.
Lentement, il replia ses jambes contre son buste. Ses mains se refermèrent sur ses bras fins, et il laissa son visage s'enfouir à l'intérieur de ce terrier de fortune. Était-ce trop demander qu'on lui foute la paix ? Il était fatigué. Mortellement fatigué. Se battre, ce n'était plus pour lui. Il voulait juste que tout s'arrête.
- C'est bon à savoir, tout ça, baragouina-t-il d'une voix éteinte qui donnait plutôt à penser l'inverse que ce qu'il disait.
L'inconnue, visiblement, tentait de susciter quelque chose en lui, autre que des paroles détachées, soufflées du bout des lèvres. Mais peut-être n'était-ce pas une bonne chose de vouloir sortir l'adolescent de sa sombre torpeur. S'il était dans cet état-là, c'était justement pour fuir les autres émotions, plus puissantes et dévastatrices, qui l'avaient ensevelis, il y a quelques jours.
- Fous-moi la paix, parvint-il à ajouter après quelques longues secondes.
Il ferma les yeux, sa face toujours enfoui au creux de ses bras.
Ça lui avait échappé avec un aplomb glacial, tout juste lorsqu'elle eut terminé de parler, comme si elle venait de commettre-là une terrible erreur.
Si elle essayait de le faire culpabiliser, il aurait peut-être fallu qu'elle prépare un peu mieux son texte avant de venir. Et puis, de toute manière, Milow n'avait guère besoin d'aide pour ça.
Il ne la regardait toujours pas, persuadé que s'il créé un contact visuel avec elle, elle n'allait plus jamais partir d'ici.
Dans sa tête, en réponse à ses paroles, c'était un 'qu'est-ce que ça peut me foutre ?' qu'il répondait. Que leurs ennemis débarquent ! Qu'ils viennent décimer le camp aujourd'hui si ça leur faisait plaisir ! Avec lui dedans, même, et avec Ryan ! Ça ne changeait rien pour l'adolescent, plus rien. De toute manière, c'était bien comme cela que les choses fonctionnaient, à présent : tout le monde finissait par mourir. Et ce n'était pas Milow qui allait s'apitoyer sur le sort de cette communauté qui avait apparemmen essuyé autant des pertes. Il n'avait pas la psychologie pour ressentir de la compassion.
Il déglutit, dans l'espoir de ravaler cette folle envie de hurler à cette femme d'aller se faire voir. Ça ne changeait rien. Elle avait très certainement senti qu'elle n'était pas la bienvenue ici.
Lentement, il replia ses jambes contre son buste. Ses mains se refermèrent sur ses bras fins, et il laissa son visage s'enfouir à l'intérieur de ce terrier de fortune. Était-ce trop demander qu'on lui foute la paix ? Il était fatigué. Mortellement fatigué. Se battre, ce n'était plus pour lui. Il voulait juste que tout s'arrête.
- C'est bon à savoir, tout ça, baragouina-t-il d'une voix éteinte qui donnait plutôt à penser l'inverse que ce qu'il disait.
L'inconnue, visiblement, tentait de susciter quelque chose en lui, autre que des paroles détachées, soufflées du bout des lèvres. Mais peut-être n'était-ce pas une bonne chose de vouloir sortir l'adolescent de sa sombre torpeur. S'il était dans cet état-là, c'était justement pour fuir les autres émotions, plus puissantes et dévastatrices, qui l'avaient ensevelis, il y a quelques jours.
- Fous-moi la paix, parvint-il à ajouter après quelques longues secondes.
Il ferma les yeux, sa face toujours enfoui au creux de ses bras.
- Invité
- Invité
- Casier judiciaire
- Feuille de personnage
Re: Fucking Fate
Mer 11 Sep 2019 - 21:15
La correction froide et spontanée du jeune homme ne déclencha pas de réaction chez la grecque. Ni malaise ni regret. Ryan ou Riley, qui s’en préoccupait ? Pas elle en tout cas. Elle avait d’autres soucis autrement plus importants. Elle laissa son regard sombre glisser sur l’allure blasée de l’adolescent. Bien sûr qu’elle ne s’était pas attendue à le remettre sur pieds en quelques minutes. Le traumatisme encore bien chaudement imprimé dans son esprit aurait besoin de temps, beaucoup de temps pour s’atténuer un peu, à défaut de disparaître totalement. Elle inspira doucement. Elle allait céder à l’injonction désabusée du garçon. Pour l’instant. Elle fléchit doucement un genou, pour venir à sa hauteur, son visage reflétant alors pour la première fois depuis son arrivée dans la pièce, toute la compassion que lui inspirait sa situation. Elle comprenait la douleur et la peine qui le déchiraient. Elle resta accroupit, silencieuse, immobile un moment à le fixer longuement. Elle aurait souhaité pouvoir effacer cette souffrance qui le tuait à petit feu. Lui raconter une histoire dans laquelle Jesse n’était pas mort, dans laquelle les Lewis avaient droit à leur fin heureuse.
« Je reviendrai. » prévint-elle. Le lendemain, le surlendemain, et les suivants. Elle emploierait les grands moyens si nécessaire. Parce que c’était ancrée en elle. C’était une mission, un dessein qu’elle n’ignorerait pas. Elle ne le laisserait pas tomber. Elle ne laisserait pas un Lewis de plus mourir. Pas sans s’être battue férocement, avec la volonté de fer qu’on lui connaissait. « Rien ne l’y obligeait, mais Jesse nous a choisi. Il a choisi de se battre à nos côtés pour protéger les nôtres et bâtir ce foyer. » Elle baissa les yeux, ses yeux fixant brièvement le sol alors que son coeur se pincer à la mention du bouclé. Il avait tellement contribué, tellement apporté. Il manquait déjà tellement… Elena eut un léger sourire sans joie. Jesse avait participé, il avait construit cette famille. À ce titre, ce sanctuaire aux âmes brisées qu’était Nisqually était aussi son héritage, et ses cadets y avaient leur place.
La jeune femme laissa à regrets Millow avec ses démons. Parce que rien ne pourrait l’en détourner aujourd’hui. Mais elle ne le laisserait pas mener ce combat seul. Elle quitta sans un mot de plus la chambre du brun, le coeur gros.
*****
« Tu sais te battre ou tu te contentes de longs regards noirs ? » questionna brusquement la brune en débarquant sans prévenir dans la chambre de Millow, le lendemain après-midi. Elle ignora la surprise et la probable désapprobation sur le visage du brun, elle se contenta de lâcher sans ménagement son sac brun sur le lit, s’attelant rapidement à la fouille de celui-ci. Elle sortit un premier gant rouge usé qu’elle agita devant le regard sombre de l’adolescent pour qu’il voit où elle voulait en venir avant de le mettre de côté. « Je m’entraînais régulièrement avec ton frère. Il était très doué. » commenta la grecque avec un sourire qui se voulait engageant. « Tiens. » lui dit-elle en lui tendant enfin l’objet de son agitation dans son bagage. Les fameux gants de boxe de Jesse. « C’était les siens. » précisa-t-elle sans que ce ne soit nécessaire.
- Invité
- Invité
- Casier judiciaire
- Feuille de personnage
Re: Fucking Fate
Jeu 12 Sep 2019 - 18:19
Il s'était cripsé quand elle avait mentionné son frère. Prêt à l'envoyer balader avec bien moins de douceur que ce qu'il venait de faire. Parce que le prénom de son frère, dit à haute voix, lui faisait le même effet qu'une épaisse aiguille qu'on lui plantait en plein cœur. Et parce qu'il en voulait à cette femme aussi. Parce qu'elle l'avait connu. Côtoyé. Pendant longtemps. Et jusqu'à il y a peu. Et pas lui. Cette jalousie lui faisait terriblement mal.
Ses ongles rongés s'étaient enfoncés dans ses bras alors qu'il avait retenu son souffle. Heureusement, elle finit par quitter la pièce. Par le laisser seul. Et le silence, sombre compagnon, s'abattit de nouveau sur lui comme une couverture rugueuse sur les épaules d'un sans-abri.
Un peu plus tard dans la journée, le grand rouquin aux allures de paumé qui était déjà venu le voir une fois était repassé. Toujours aussi peu éloquent, il avait de nouveau eu droit à une longue oeillade glaciale et vide de la part de Milow. Dans le pèle-mêle de ses propos, il avait tout de même compris le terme de 'gribouillage', ce qui l'avait malgré tout légèrement intrigué. L'homme avait pris congé bien rapidement, et les prunelles du jeune garçon s'était posé sur la feuille soigneusement pliée qu'il avait laissé sur la table de chevet.
C'était Jesse qui y était dessiné.
Et de voir le visage souriant, espiègle et plein de vie de son frère, là, gravé sur papier, ça lui avait coupé le souffle. Et il avait encore pleuré. Pleuré, pleuré, pleuré … Il n'aimait pas ça, raviver les souvenirs. Il ne voulait plus qu'on l'emmerde avec ça. Il ne voulait plus entendre parler de Jesse. Plus jamais.
L'arrivée de la femme brune semblable à un puissant mistral eut le mérite de décrocher immédiatement le jeune Lewis de son éternelle torpeur d'après-crise-de-larmes. Le dessin gisait par terre tandis qu'il était, lui, à deux doigts de fusionner avec son lit.
En réponse à la première phrase qu'elle lui balança et histoire d'illustrer ses propos, ce fut un regard noir qu'il lui lança.
Lentement, il se redressa sur le lit et observa avec un détachement lointain ce qu'elle avait ramené. La mention de son frère le fit se tendre légèrement, alors qu'il accueillait les gants sans aucune joie. Il n'y toucha pas, d'ailleurs, se contenta de les regarder quelques secondes avant de relever ses prunelles vers la femme.
- J'en veux pas.
Il voulut détourner le regard du sien mais resta bloqué ainsi, à la fixer subitement d'un air interloqué. C'était la première fois qu'il portait un véritable coup d'oeil sur un visage depuis son arrivée ici. Et … Merde alors. Ces cheveux bruns longs et ondulés, ces yeux noisettes, cette mâchoire carrée … ça lui parlait. Il la connaissait, c'était sûr. Mais il n'arrivait pas à la restituer. Et c'était d'autant plus troublant de se dire qu'il ne pensait pas l'avoir déjà vu, en vrai.
Son attention se détourna d'un seul coup d'elle, comme s'il avait vu quelque chose qu'il n'aurait pas du voir. Au final, qu'est-ce que ça pouvait lui faire, qu'il la connaisse ou pas ? Qu'elle aille au diable avec ses gants de boxe !
- Je veux pas me battre.
Ses ongles rongés s'étaient enfoncés dans ses bras alors qu'il avait retenu son souffle. Heureusement, elle finit par quitter la pièce. Par le laisser seul. Et le silence, sombre compagnon, s'abattit de nouveau sur lui comme une couverture rugueuse sur les épaules d'un sans-abri.
***********
Et une nouvelle journée avait commencé, en tout point similaire à la précédente. La fameuse Caroline qui lui porte à manger, qui essaie de lui parler, et lui qui garde le silence, trop occupé avec les fantômes se battant dans sa tête. Las. Épuisé. Il avait dormi plus longtemps que d'habitude ce matin-là, mais ça ne changeait rien à l'épuisement qui se lisait sur ses traits.Un peu plus tard dans la journée, le grand rouquin aux allures de paumé qui était déjà venu le voir une fois était repassé. Toujours aussi peu éloquent, il avait de nouveau eu droit à une longue oeillade glaciale et vide de la part de Milow. Dans le pèle-mêle de ses propos, il avait tout de même compris le terme de 'gribouillage', ce qui l'avait malgré tout légèrement intrigué. L'homme avait pris congé bien rapidement, et les prunelles du jeune garçon s'était posé sur la feuille soigneusement pliée qu'il avait laissé sur la table de chevet.
C'était Jesse qui y était dessiné.
Et de voir le visage souriant, espiègle et plein de vie de son frère, là, gravé sur papier, ça lui avait coupé le souffle. Et il avait encore pleuré. Pleuré, pleuré, pleuré … Il n'aimait pas ça, raviver les souvenirs. Il ne voulait plus qu'on l'emmerde avec ça. Il ne voulait plus entendre parler de Jesse. Plus jamais.
L'arrivée de la femme brune semblable à un puissant mistral eut le mérite de décrocher immédiatement le jeune Lewis de son éternelle torpeur d'après-crise-de-larmes. Le dessin gisait par terre tandis qu'il était, lui, à deux doigts de fusionner avec son lit.
En réponse à la première phrase qu'elle lui balança et histoire d'illustrer ses propos, ce fut un regard noir qu'il lui lança.
Lentement, il se redressa sur le lit et observa avec un détachement lointain ce qu'elle avait ramené. La mention de son frère le fit se tendre légèrement, alors qu'il accueillait les gants sans aucune joie. Il n'y toucha pas, d'ailleurs, se contenta de les regarder quelques secondes avant de relever ses prunelles vers la femme.
- J'en veux pas.
Il voulut détourner le regard du sien mais resta bloqué ainsi, à la fixer subitement d'un air interloqué. C'était la première fois qu'il portait un véritable coup d'oeil sur un visage depuis son arrivée ici. Et … Merde alors. Ces cheveux bruns longs et ondulés, ces yeux noisettes, cette mâchoire carrée … ça lui parlait. Il la connaissait, c'était sûr. Mais il n'arrivait pas à la restituer. Et c'était d'autant plus troublant de se dire qu'il ne pensait pas l'avoir déjà vu, en vrai.
Son attention se détourna d'un seul coup d'elle, comme s'il avait vu quelque chose qu'il n'aurait pas du voir. Au final, qu'est-ce que ça pouvait lui faire, qu'il la connaisse ou pas ? Qu'elle aille au diable avec ses gants de boxe !
- Je veux pas me battre.
- Invité
- Invité
- Casier judiciaire
- Feuille de personnage
Page 1 sur 2 • 1, 2
Page 1 sur 2
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum