10 mars 2020 -

Ce baiser était si inattendu que Maya n'avait pas bien réussi à comprendre ce qui était arrivé. Tout partait pour une entente tout à fait cordiale, avec un brin de complicité compte tenu du passif d'Edward et Maya. Pourtant, les émotions de la jeune femme s'étaient manifestées sans demander le consentement de leur propriétaire. Ce qui était fait était fait. Seulement, le reste de la journée, Maya ne pouvait s'empêcher de revenir dessus et surtout de se demander si on allait toquer à la porte de la maison. Ils avaient prévu de se retrouver le soir... Oui, mais pour quoi faire ?

Dans la tête de la brune, les pensées se bousculaient. Elle pensait bien évidemment à George, mais aussi à la mère d'Eddie, à Zelda – un petit peu – et tout ce qui pouvait avoir un rapport de près ou de loin avec leur relation. En un sens, Maya ne trouvait ça pas correcte : elle allait potentiellement s'unir avec un homme dont elle connaissait la moindre anecdote d'enfance, par sa mère à qui il n'avait même pas eu la chance de dire adieu... Est-ce qu'en un sens, il ne lui dirait pas au revoir de cette manière ? Cette pensée déclencha un frisson d'horreur dans la nuque de Maya : « Malsain au possible... » Avait-elle pesté alors contre elle-même en tournant nerveusement les pages du livre qu'elle avait emprunté à la bibliothèque. Elle parcourait les pages sans vraiment les lire. Daniel passa la tête dans la porte de sa chambre en constatant que cela faisait bien une heure et demie qu'elle était enroulée dans sa serviette de bain, après être sortie de la douche et qu'elle avait disparu dans son lit en feuilletant nerveusement un ouvrage qu'elle comptait rendre la veille. « Quoi ?! » Daniel avait refermé la porte en faisant la moue.

Les émotions de Maya étaient en plein guerre civile à l'intérieur de son esprit. D'autant plus qu'elle avait eu l'occasion de faire la connaissance de Johnson, la veille et qu'elle avait pensé à lui proposer de le revoir... Pourquoi fallait-il que cela vienne sur le tapis maintenant ? Pourquoi pas avant, quand elle regardait le militaire avec envie, avant qu'ils n'aient cette discussion profonde et pleine d'émotions à propos de sa famille ? Après un moment, Maya céda et accepta de s'habiller et de descendre dîner en compagnie des autres. Elle évita soigneusement de mentionner son après-midi, surtout en présence de Zelda, pour ne rien trahir des derniers événements.

Quand la soirée fût bien entamée et que tout le monde était retourné à ses occupations, Maya avait finalement entendu quelqu'un toquer à la porte. Quand elle alla ouvrir, elle vit Eddie et un pack de bière. La chaleur qu'elle ressentait dans les entrailles se calma en voyant qu'il brandissait un pack de bière. L'odeur la dérangerait peut-être sûrement, et peut-être ne se passerait-il rien entre eux ? Cependant, elle ne put s'empêcher de rire à sa remarque, avant de baisser le regard. Qu'est-ce qu'elle pouvait faire ? Le chasser ? Faire comme si de rien n'était ? L'embrasser de nouveau ? Maya lui attrapa alors instinctivement la main et s'approcha de lui, la porte d'entrée encore ouverte. « J'ai pas arrêté d'y penser... » Murmura-t-elle à son oreille avant de fixer son regard boisé. « Je me suis entraînée encore un peu à la maison et j'ai pris un peu de temps pour moi à vrai dire, rien de bien passionnant. » Dit-elle cependant en relâchant sa main en le laissant entrer. Elle l'avait lâché comme si elle venait de se brûler et s'en rendit compte.

Elle alla se chercher un soda dans le frigo, un soda à la cerise et fit un petit geste en levant sa bouteille pour trinquer avec la bière d'Eddie. « Te méprends pas, je peux pas boire d'alcool. » Dit-elle avec un sourire en souhaitant le mettre à l'aise. Elle lui pressa l'avant bras de sa main presque brûlante et plissa les yeux. Ils burent et trinquèrent ensemble dans un silence bien étrange. Maya était pourtant connue comme le loup blanc comme était une bavarde et une pro du social. Pourtant, la présence d'Eddie la troublait et plus elle fixait son visage, plus elle avait envie l'attraper par le col pour venir coller ses lèvres contre les siennes. C'était peut-être pour cela qu'elle s'était autant rapprochée, sans même s'en rendre compte.

Maya fit une grimace lorsqu'elle le vit boire une gorgée de bière. Juste une, ça ne devait pas être si terrible ? Le mal était fait, il aurait sûrement cette haleine qu'elle aurait du mal à supporter. Pourquoi pensait-elle subitement à son haleine ? Parce qu'elle avait furieusement envie de l'embrasser de nouveau. C'était mécanique, elle n'arrivait pas à l'expliquer. Maya était de ceux qui se laissait complètement dicter par ses émotions et à cet instant, elle n'avait qu'une idée en tête : Eddie et ses lèvres. Mais elle garda son self-control en s'efforçant de sourire aimablement en l'invitant à monter avec elle dans sa chambre. Il n'y avait pas forcément un désir d'intimité dans ce geste – bien que ce fût le cas – mais il était commun pour la jeune femme et même les autres membres de cette maison, à recevoir une visite dans l'intimité de leur chambre, lorsqu'ils voulaient parler en seul.e à seul.e avec la personne.

Elle secoua la tête, rassurant le militaire à propos de l'alcool. « Oh non t'inquiètes pas ! C'est juste que quand j'étais malade, j'ai eu la super idée de me prendre une grosse cuite... Tu vois l'genre, 16 ans, en colère contre la société, une guibolle en moins, le rhum arrangé de mon père... » Elle tourna la tête vers Eddie et se mit à rire de sa propre bêtise. « Sauf que j'étais sous traitement à l'époque après ma rechute... Et l'alcool et la chimio ça fait pas bon ménage. J'ai repeint les murs pour faire simple. » Riant toujours, Maya poussa la porte de sa chambre et laissa Eddie s'installer en prenant soin de refermer la porte derrière elle, par réflexe. « Depuis l'idée même d'en boire me donne la nausée ! » Elle fit de nouveau un geste de la main, son soda en main, cognant la canette de bière d'Eddie avec un clin d’œil. « Mais ça me tente pas de retenter l'expérience. » Conclut-elle en hochant la tête en buvant une gorgée supplémentaire.

Toujours debout devant Eddie, elle posa son soda sur son bureau lorsqu'il s'excusa. Elle fronça les sourcils alors, une main sur la hanche, l'autre sur le bureau. Que tentait-il de dire alors. Pourquoi s'excuser, pourquoi reparler même de ça ? Pourquoi, alors qu'il était venu, comme il l'avait promis après leur échange soudainement torride. « Eddie... » Son rire la braqua, mais une sorte de sursaut réactif la pris. Alors, sans hésiter, Maya avança vers lui. Elle l'attrapa par le col de son t-shirt et reposa ses lèvres sur les siennes, plaquant une main derrière sa nuque pour l'attirer vers elle. Ce baiser était comme une sorte de test et un sursaut de ses émotions qui ne pouvaient pas rester ballants à se contenter de faire la conversation. « Tu es sûr que ça n'était pas ton intention ? » Elle recula son visage pour fixer son regard boisé. Maya était beaucoup moins douce, plus joueuse, plus affamée. Elle se laissa dicter par ses émotions qui n'arrivaient pas à résister à l'appel charnel implicite, lorsqu'elle regardait le militaire. « Embrasse-moi encore. » Annonça-t-elle alors. La chercheuse haussa les sourcils, presque surprise par les mots qui venaient de sortir de sa bouche.

Elle avait envie de lui, rien de plus à cet instant précis. Le regretterait-elle ensuite ? Peut-être. Qu'est-ce que cela signifiait ? Quelque chose d'inaliénable et d'indescriptible entre eux deux, qui se contenterait alors de se traduire par l'action du corps.

Il n'y avait aucune hésitation dans la voix de la chercheuse. Là, tout de suite, elle savait ce qu'elle voulait : Eddie. Il y avait dans leur étreinte soudaine quelque chose de profondément triste, presque pathétique. Ils avaient échangé si souvent par le passé sans jamais oser parler du passé, de sa mère. Quand ce fût faire, il y eut quelque chose de profond, parce que Maya connaissait Eddie beaucoup plus qu'il n'osait se l'avouer, mais aussi parce qu'il avait été là à un moment important de sa propre vie de famille, alors que lui-même était disparu. Il y avait une sorte de culpabilité de la part de Maya qui s'était mêlée à une attirance presque animale pour le militaire.

Quand il fondit sur elle, Maya se laissa complètement prendre, reculant jusqu'à la porte dans un grondement sourd, retenue par la main d'Eddie tandis que leurs souffles se mêlaient. Alors qu'Eddie laissait place à une partie entreprenante de sa personne, glissant sa main petit à petit sous les vêtements de la chercheuse, celle-ci peinait presque à reprendre son souffle, aspirée par ce baiser sans fin, de plus en plus insistant et pressé. D'un geste presque furieux, Maya quitta les lèvres et la langue d'Eddie pour fondre sur son cou et l'embrasser jusqu'à presque aspirer sa peau, laissant une marque significative, rouge et irrégulière.

Quand son soutient-gorge tomba sur le sol, Maya se dépêcha de retirer son débardeur en le laissant choir à leurs pieds avant de chercher à la hâte le bord du t-shirt du militaire qu'elle souleva pour l'inciter à la retirer. Pendant ce temps, la jeune femme fit glisser légèrement le manchon de sa prothèse qu'elle quitta presque d'un bon pour sauter au cou d'Eddie pour venir l'embrasser à nouveau et enrouler ses jambes autour de son bassin. Les deux amants furieux semblaient faire grimper la température de la pièce, leur souffle devenait de plus en plus chaud, saccadé et impatient. Maya fondit de nouveau sur ses lèvres, prenant son visage dans ses mains avant de plonger l'une d'entre elle dans ses cheveux. Complètement enroulée autour du militaire aux muscles dessinés et puissants, elle le laissa l'emmener à l'aveuglette sur le lit quelques mètres plus loin avant d'y tomber sur le dos. Retirant sa queue de cheval d'un geste hasardeux, ses cheveux s'étalèrent autour de son visage en soleil, tandis qu'elle desserrait l'étreinte de ses jambes pour venir déboutonner son short pour le retirer à la hâte.

« Viens, dépêche-toi... » Lâcha-t-elle dans un murmure en lui attrapant la ceinture de son pantalon pour la faire glisser avec une hâte tout aussi fiévreuse, capturant par instant ses lèvres dans un échange maladroit et pressé. Il n'y avait rien de romantique dans cet échange. Maya n'osait se l'avouer, mais elle procédait avec rapidité pour ne pas laisser retomber la pression de cette pulsion audacieuse, pour ne pas risquer de regretter. Il fallait impérativement qu'elle s'empare de son corps, qu'il se fonde en elle parce qu'il y avait un passif, il y avait une connexion, il y avait quelque chose de fort et d'indescriptible qui risquait de les rattraper très vite et leur faire face de plein fouet.