Re: Un baiser sur le front [Milou et Lucy]

Il s'arrêta brutalement quand elle lui attrapa la main et lui balança un regard noir qui lui ordonnait de le lâcher. C'était terminé, il avait compris que tout ça n'était qu'un jeu, tout ça n'était que business.
À quel moment s'était-il imaginé pouvoir être autre chose que tous ces autres mecs qui venaient ici ? Lucy lui avait dis, déjà. Elle n'était pas de celles qui donnaient leur corps. Milow ne s'était pas posé de question, mais à présent, tout était clair. Son travail, c'était ça. Créer cette dépendance, cette attirance entre elle et un autre, au point qu'il se sente valorisé, au-dessus des autres, et qu'il s'imagine avoir droit à un traitement de faveur.

Il se crispa quand elle l'enlaça, prit lourdement sur lui pour ne pas violemment la repousser. La colère grondait voir, l'impression d'être trahi était violente. Milow ne s'ouvrait jamais à personne. Pourquoi est-ce qu'il avait fallu que ce soit face à elle qu'il baisse les armes ? Sans doute qu'elle était très forte dans son travail. Une vraie manipulatrice.

- T'auras fais tout ça si ça avait pas été ton travail ? Cracha-t-il dès qu'elle eut terminé de s'excuser. Tu l'aurais pas fais. T'aurais rien fait.

Il soutint son regard mais fut incapable de détendre ses traits crispés. Tout en ayant conscience que capter ses yeux à elle ne ferait qu'un peu plus l'envoûter.

- J'savais pas que les amis devaient payer pour se voir. Il se passera quoi, quand j'aurais écoulé mon temps avec toi ? Des vigiles vont venir me sortir comme un mec turbulent dans un bar ? Je comprends pas ta conception de l'amitié.

Il se figea quand elle leva la main vers son visage. Très sérieusement, il commençait à se demander si elle n'avait pas un super-pouvoir. D'hynose, ou d'envoûtement. Car là où il aurait brisé le poignet, il ne remua pas. Il alla même jusqu'à la laisser l'embrasser, comme la dernière fois. Sa colère lui apparut d'un seul coup stupide, ainsi que toutes ses pensées. Pour autant, il ne lâchait pas l'affaire.

Troublé, il ne remua pas quand elle s'écarta. Ses yeux fouillèrent devant lui, à la recherche de la marche à suivre. Pourquoi tout était toujours si embrouillé dans sa tête ?

- Je … je ne te fais pas confiance, souffla-t-il en secouant doucement la tête.

Ce n'était pas un reproche. Pas vraiment. Juste une vérité, une annonce qu'il se devait de lui faire si lui souhaitait rester un minimum honnête. Certes, ce n'était pas un trait qui caractérisait le jeune garçon. Mais il savait à présent que face à elle, il se découvrait une nouvelle facette de sa personnalité. À vrai dire, il se reconnaissait à peine.
Il retint un soupir, appuya son dos contre la porte fermée. Elle finissait toujours par l'avoir. Il restait.

- Je sais pas pourquoi j'ai imaginé être … plus important qu'un autre.

Ses épaules se haussèrent. Il ravala un sourire de dégoût envers lui-même.

- T'es très douée dans ton travail en tout cas. Tu me fais douter encore.

Et ça le faisait chier de le dire à voix haute. Malgré toute sa colère et sa déception, il restait-là, peut-être qu'il s'imaginait quand même autre chose. Peut-être qu'il voulait se raccrocher à ce bout de mensonge qui le faisait se sentir si bien avec elle.
Quelques secondes s'égrenèrent. Ses prunelles claires fixèrent un point invisible, signe d'une profonde réflexion. Finalement, il les releva vers elle.

- J'suppose que c'est pas évident de montrer qu'on est sincère dans ce genre de travail, non ? J'veux dire … vraiment sincère. Une parole ça suffit pas toujours. J'suis même pas sûr de vous croire si vous m'affirmiez faire ça de vous-même. En vrai, j'ai juste pas envie que vous me mentiez. Vous comprenez ? Parce que … parce que …

Son visage fut agité d'un petit tic nerveux. Finalement, il lâcha un lourd soupir.

- Peut-être que je me serais jamais ouvert comme je l'ai fais avec vous si j'avais été avec quelqu'un de vraiment sincère. Genre … j'sais pas c'est la distance qu'il y a malgré tout entre nous qui fait ça. J'sais pas. J'pense trop je crois.

Il plongea ses mains dans sa tignasse, embarrassé, peu habitué à ses élucubrations venues de nul part.

- Au final ... au final si moi ça m'permet de dire des trucs que j'dis pas d'habitude ... et si toi ça te permet d'avoir des ressources en plus ... Et d'avoir juste à caresser les cheveux d'un gamin pour les obtenir ... j'suppose qu'on y trouve tous les deux notre compte, pas vrai ?

Lucy regarda avec une certaine tendresse Milow, il semblait se débattre avec l’ambiguïté de la situation. Il s’appuya contre la porte fermé, souriant et lui disant qu’elle faisait bien son travail, avant de visiblement accepter qu’elle faisait plus, elle était payé de la même façon qu’il parte ou non. Et là, la rousse ne pensait pas à le faire revenir. Elle se fit la promesse de le voir en dehors la prochaine fois. Elle le faisait peut-être douter, mais ce n’était pas pour profiter de lui, loin de là. Doucement, Lucy s’approcha de lui et déposa une main sur sa joue. : « Milow, il n’y a que trois personnes qui m’ont suffisamment touchés pour que retire mon masque devant eux. Mon ex-petite amie, mon meilleur ami et toi. Mon attachement pour toi n’est pas un mensonge. »

Sa main glissa de la joue de Milow jusqu’à sa main, Lucy avait le cœur battant, pourquoi s’était-elle tant attaché à ce gamin ? aucune idée, elle l’invita à revenir s’assoir sur le lit et à partir de là, elle ne savait pas trop quoi faire, que pouvait-elle dire de plus ? Désireuse de garder le jeune homme en confiance, elle décida à son tour de parler un peu. « Je t’aime bien Milow, tu n’as pas ta langue dans ta poche et tu n’es pas à exiger des choses des gens. Je préfère passer du temps à passer ma main dans tes cheveux et à écouter qu’à devoir me trémousser pour un client de merde. » Lucy jurait très peu, elle détestait sincérement ça, mais quand elle le faisait, c’était vraiment pour marquer un puissant signe de mécontentement ou pour vraiment souligner l’importance d’une chose. « En fait… je suis contente de te voir… Je me sens un peu seule en ce moment, je ne saurais pas comment l’expliquer mais je me sens terriblement seule, depuis qu’Anna m’a quitté. Je m’efforce de chercher le contact avec mes paires Mais c’est pas la même chose… Je serais très heureuse d’avoir un ami comme toi à l’extérieur du motel, un ami que je pourrai aller voir, à qui je pourrai rendre visite s’il veut. »

Qu’était-elle en train de faire ? Elle était en train de lui remonter le morale ou bien de remonter le sien ? Elle n’en avait aucune idée en réalité. La seule chose qui l’importait était de partager cet instant avec le jeune homme, que les deux trouvent un peu de paix.Instinctivement, elle posa sa tête sur l’épaule du jeune homme et l’enlaçant dans une étreinte délicate. Avant de déposer un petit baiser sur son cou.

Il eut un sourire amer à ses mots, parce qu'il aimerait réellement la croire mais que tout ça sonnait trop beau, trop tendre pour que ce soit sincère.
Son regard s'abaissa vers la main gracile de la jeune femme qui attrapait la sienne, et il la suivit, comme un robot, en se frappant mentalement de se laisser ainsi faire. Il garda le silence. L'écouta. Ses yeux toujours posés sur leur deux mains liées, il les comparait sans émotion, constatant que la sienne n'était pas vraiment plus masculine, plus grande, un peu, mais tout aussi gracile bien que criblées de plaies et cicatrices.

- Ah ben merci, souffla-t-il dans un petit rire.

En effet, papouiller un adolescent en crise était sans doute plus agréable que se faire reluquer par des gros porcs dégueulasses.

Il releva ses prunelles vers son visage. Un furtif sourire, un peu plus sincère cette fois, traversa son visage et son cœur s'accélera doucement.

- On pourrait se voir, de temps en temps, reprit-il. J'viens souvent au No Man's Land. Mais après si tu préfère ailleurs on peut aussi.

Il était bêtement à deux doigts de lui proposer devenir dans son camp à lui, mais il n'était pas bien sûr d'avoir droit de ramener n'importe qui. En tout cas, les propos de Lucy avaient fait mouche, et Milow se sentait rassuré. S'il la voyait ailleurs, si elle le lui proposait, c'est parce qu'elle en avait vraiment envie, puisqu'il n'aurait pas à payer sa compagnie.
Son humeur s'adoucie d'un seul coup, et quand elle l'enlaça, il se laissa aller à passer ses bras autour d'elle également. C'était étrange, il n'avait pas l'habitude de câliner les gens. Il n'y avait que sa sœur qui avait droit à ce traitement de faveur, et encore. Généralement, ils s'étreignaient ainsi la nuit, très fort, pour se réchauffer et pour se protéger mutuellement.

Il frissonna sous le baiser qu'elle lui déposa dans le cou. C'était loin d'être désagréable.

- Je suis pas quelqu'un qu'on qualifie de 'bonne compagnie', rectifia-t-il cependant.

Distraitement, sa main attrapa une des mèches rousses de la jeune femme. Il la fit doucement glisser entre ses doigts, appréciant la douceur et la longueur.

- J'ai jamais aidé personne à aller mieux.

Il haussa une épaule. Il l'affirmait sans véritable honte.

- Tu dois vraiment te sentir seule pour penser que ma compagnie peut t'aide.

Un petit rire lui échappa. Il n'était pas de ceux qu'on allait voir pour se faire remonter le moral, ni même simplement pour passer un bon moment, alors venant d'elle, ça le surprenait. Étrangement, c'était plutôt plaisant, de ressentir cette impression d'être utile.
Ses doigts vinrent faire glisser cette même mèche derrière son oreille. Il ne se permettait pas ce genre de contact d'ordinaire, mais après tout … elle l'avait embrassé plusieurs fois, non ? Alors il avait peut-être le droit. À moins que ce soit sa manière à elle de saluer les gens.

Lucy écouta Milow lui répondre, elle avait les yeux mi-clos, se laissant aller à une sorte de faiblesse et de douceur. Le contact du jeune homme la rassurait, elle se sentait seule mais elle appréciait réellement la compagnie du jeune. Alors qu’il lui parlait, elle sentait sa main venir dans ses cheveux, il se laissait également aller à un peu de tendresse finalement ? Ce n’était pas désagréable, pas du tout, c’était la première fois que quelqu’un lui replaçait une mèche de cheveux derrière son oreille, le contact fugitif de la main du jeune homme sur la peau de son visage la fit rougir. Pourquoi donc ?
C’est pour ça qu’elle se rapprocha encore un peu plus de Milow, cachant plus ou moins son visage dans le cou de son cadet, afin qu’il ne puisse pas voir que son geste l’avait un peu… perturbée. Ce n’était pas une sensation de chaleur comme quand Anna s’était occupée d’elle, c’était très différent, mais ça restait néanmoins très agréable, un geste d’intimité et de douceur qu’elle n’avait pas souvent connu. Elle voulait lui rendre, elle voulait qu’il continue… Il était là, alors autant qu’ils se réconfortent l’un l’autre ! Mue par un instinct qu’elle ne contrôlait pas vraiment, par un désir et un vague sentiment, elle décida de se montrer un peu plus entreprenante avec son ami.

Avec tendresse, une des mains de Lucy se posa sur la joue du jeune homme, pour qu’il tourne la tête et qu’il la regarde. Elle lorgna longtemps sur ses yeux bleus avant de descendre un peu plus, regardant les lèvres de Milow… La rousse avait envie de faire quelque chose qu’elle n’avait jamais fait. Elle avança son visage et embrassa son compagnon, pas un baiser pour l’embêter, pour le retenir ou pour lui apprendre quelque chose. Non, un baiser d’une femme à un homme, un baiser de tendresse mais également d’envie. Elle en avait envie, sans qu’elle ne sache réellement pourquoi. Etait-ce son comportement ? Sa façon d’être ? La situation ? Quoi qu’il en soit, ses lèvres s’attardèrent un moment sur celles de Milow avant qu’elle ne se retire doucement.

Mais la rousse ne comptait pas s’arrêter là, elle l’avait senti frissonner quand elle l’avait embrassé dans le cou, elle recommença alors, doucement, comme pour éviter de le brusquer ou de l’effrayer : « Repasse ta main dans mes cheveux… c’est très agréable. Le ton de sa voix était très bas, soufflant, oserait-elle dire qu’il était suppliant. Il n’y avait qu’un pas, elle avait envie qu’il la caresse, qu’il la prenne dans ses bras et pourquoi pas qu’il l’embrasse à son tour.